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La Fièvre [Astaad, Anaïs, Alexandra, Heidi]

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Forgive me, Father, for I am sin
Le mauvais oeil
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La Fièvre [Astaad, Anaïs, Alexandra, Heidi] YXpWPvj
En un mot : An eye for an eye leaves the whole world blind
Thème : Witchcraft - Akira Yamaoka
WITHER AND DIE

La Fièvre [Astaad, Anaïs, Alexandra, Heidi] I2XukXq
Messages : 545
Date d'inscription : 27/03/2017
Lun 4 Juil - 18:28 (#)

LA FIÈVRE
Singing in the slaughter house

La Fièvre.
C’est sous ce nom sibyllin que l’évènement vous est apparu. Lors d’une conversation avec l’un de vos amis, qui le tenait lui-même d’un ami et ainsi de suite. Lors d’une de vos escapades nocturnes dans l’un de ces lieux mal famés de la ville. Ou bien encore en surfant sur le Deep Web, en laissant trainer vos oreilles dans les rues sordides, en l’écoutant de la bouche d’inconnue peu recommandable…
Bref. Vous le savez désormais. Ce sera au Gilbert Drive, alors que la chaleur estivale commence à toucher la Louisiane de ses mains moites, que se déroulera cette fête clandestine « La Fièvre ». L’annonce n’a guère laisser filtrer d’informations. Qui sont les organisateurs ? Qui sont les invités ? Quelles sont les festivités prévues ? Pourquoi spécialement à cet endroit abandonné et isolé ?

En effet, les seules informations disponibles sont minces. Vous avez évidemment deviné que la fête est illégale, car ce chantier de lotissement est officiellement interdit d’accès et l’évènement ne commence qu’à la nuit tombée. L’entrée est aussi étonnamment gratuite. L’annonce mettait d’ailleurs en avant le cadre inquiétant du Gilbert Drive, réputé hanté, et l’absence de toute autorité.
Seulement, autre chose a attiré votre attention. Cette mention bizarre, souvent répétée quelle que soit la manière dont vous avez su l’existence de La Fièvre : « Humains autorisés ». C’est sûrement une de ces vannes idiotes que l’on fait lors de ces soirées pseudo-effrayantes. N’est-ce pas ?

La nuit tombée, au Gilbert Drive, tout est différent. L’endroit est sordide à souhait, avec ces maisons aux ouvertures béantes, ces bâtiments à demi construits éventrés comme des cadavres à l’air libre. L’endroit est entouré de ce vide silencieux propre à la campagne nocturne, et vous n’entendez que le craquement du gravier sous vos pas, pourtant… Au loin, les pulsations des basses vous attirent.
La source du bruit est un immense bâtiment au centre du chantier. Futur gymnase ou salle des fêtes, il fait partie des rares structures à être achevée, et ces murs se tiennent là, solitaire au beau milieu des pelleteuse assoupies et des cabanes en plastique effondrées sous la chaleur. Vous vous rendez vite compte que la fête s’annonce beaucoup plus fréquentée que vous ne l’auriez imaginé
Comme si Stoner Hill s’était déplacé le temps d’une nuit. Vous croisez alors des motards à cheval sur des énormes américaines, des punk trimballant leurs chiens et toute une populace modeste, parfois carrément miséreuse. Tout est noyé dans le vacarme de la sonorisation et de la lumière blanche qui irradie depuis l’intérieur du bâtiment. Quelques vendeurs douteux commercent avec les passants, et vous distinguez des sachets suspects passant de mains sales en mains sales.

Peut-être avez-vous reconnu là des shoot de magie. Peut-être vous êtes vous risqués à l’intérieur de la salle des fêtes, où une piste de danse a été improvisée sous les spots crues. Quelqu’un s’est donné beaucoup de mal pour donner à l’endroit un aspect correct, malgré la rouille et les fissures rongeant la structure. Partout des corps dansent frénétiquement dans un bruit assourdissant, des odeurs de sueurs et d’alcools, qui résonnent puissamment entre ces immenses murs abandonnés.
Du coin de l’œil, vous apercevez des individus déjà ivres, ou dans un état second laissant deviner la prise de substances, se déhancher dans cet enfer. Certains ont des cicatrices autour du cou, comme des morsures, et errent au milieu de la foule avec un air absent. Mais soudainement, interrompant la frénésie, certains lèvent la tête et tendant leurs bras vers le haut. C’est un chuintement ténue qui se fait entendre, et vous comprenez que quelqu’un a déclenché le système anti-incendie au plafond.

Seulement, aucune eau n’en sort. Mais bien autre chose.

Vous scrutez le sol ou les fêtards, vous vérifiez vos habits si vous vous êtes aventurés sur la piste de danse, et vous remarquez aussitôt que tout est trempé de sang. Les jets anti-incendie aspergent la zone d’hémoglobine à haute pression, et la foule hurle en réponse, non de terreur, mais bien de satisfaction. Car, au milieu de la musique continuelle et des lumières criardes, vous apercevez ici et là des crocs briller parmi les danseurs, et des chairs un peu trop pâles pour être humaines.

La Fièvre reprend. La musique devient plus forte. La foule redouble d’ardeur. Finalement, la soirée va être plus corsée que prévu…



Got the evil eye. You watch every move, every step, every fantasy. I turn away but still I see that evil stare. Trapped inside my dreams I know you're there. First inside my head, then inside my soul.
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

Pseudo : Achab
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Dim 10 Juil - 15:08 (#)



« Hé, tu cherches du bon temps ? »

La voix de la femme a résonné tout contre moi. J’ai senti une main froide et humide caresser ma joue trempée elle aussi et, surprise, je me suis tournée derechef vers celle qui s’appuyait lascivement contre mon épaule. Elle m’a souri. Un arrondi couleur de l’ivoire au milieu d’un déluge d’écarlate. Au centre de cette cascade d’hémoglobine qui la recouvrait toute entière, je n’ai aperçu que le blanc de ses yeux, et la netteté tranchante de ses dents immaculées ; deux crocs aiguisés bien visibles.
Les extincteurs ont continué à se déverser. J’ai eu la sensation d’avoir de la boue dans les oreilles, et seules les vibrations dans mes tempes rendaient compte des vociférations de la foule. Pour une fois, je suis restée coite un moment, tandis que les ruisselets de sang continuaient d’imbiber mes cheveux et mes vêtements. J’ai fixé la vampire collée à moi de mon seul œil ouvert, l’autre étant aveuglé par le liquide épais, en cherchant une réplique intelligente ou sarcastique à placer. Rien ne m’est venu. Le fait que sa silhouette ondulante se frottait à la mienne, ne m’aidait aucunement à l’instant.

Alors, tout m’est revenu. Par flashs intermittents de lassitude. Putain, qu’est-ce que j’suis venu foutre dans cette merde, me suis-je répétée au moins cinq fois. Dans cette bâtisse en ruine, au milieu de la cambrousse. Sous cette douche de sang. Collée par une vampire sulfureuse.

Le miroir avait tout déclenché.

Parce que sa surface tâchée de rayures m’avait impitoyablement renvoyé cette face lisse, neuve et propre d’une authentique princesse de catalogue. Parce que je ne m’étais jamais vraiment habituée à ma nouvelle chair, lavée de l’usure du temps et des accidents de mon ancienne vie. Et ce matin-là, je m’étais éveillée ainsi, nue devant cette évidence, qui me fixait de ses yeux trop bleus, encadrés par ces cheveux trop souples et trop doux, de ses lèvres trop pleines et trop tendres. J’aurais pu tout énumérer un à un. Mes bras avaient été dépouillés de leurs encres et des cicatrices tracées par ma mère. Mes sourcils, mes lèvres et mes oreilles elles, avaient été cicatrisées et ne toléraient plus un seul bijou ; quant au reste, tout était net et d’une terrible, ennuyeuse banalité humaine.
J’étais restée immobile une éternité devant ce miroir, avec la certitude d’être recouverte d’une enveloppe factice. Persuadée que la femme dans ce miroir vivait une autre existence que la mienne, et que je me trouvais réduite à l’état de passagère, d’une minuscule conscience muette derrière ses orbites. Je suis restée longtemps paralysée à l’idée que cette inconnue n’entendit mes pensées si j’osai les exprimer à voix haute, ou dans sa tête, et qu’elle ne ferma les paupières, m’étouffant dans un vide impalpable. Le noir m’aurait recouverte, encore. Il aurait rampé dans ma bouche, puis envahi mes poumons et mon estomac ; c’était cette obscurité grouillante que je ne voulais pas revivre.

J’en ai eu des frissons. Des souvenirs avaient essayé de se frayer un chemin jusqu’à ma conscience, mais je les avais repoussés aussitôt. Cela avait suffi à m’extirper de cet état second.

J’avais alors ressenti le besoin violent de mettre un coup de poing dans ce miroir, et d’éclater de fureur. D’exploser sans raison. De me lacérer les bras. De frapper contre le mur. De me salir. De balancer des pelletées de pétrole bien sale sur cette belle toile, de détruire quelque chose de beau, et de retrouver un petit bout de moi, un soupçon de familiarité et de confort.

Fractionnement. Putain, j’espère que ça ne va pas durer, m’étais-je répétée toute la journée, où je trainais dans mon appartement sans savoir quoi faire.

C’était con. On s’attachait à tout, même à son style vestimentaire, ses tatouages, ses bijoux, et toutes ces petites babioles qui vous identifiaient au milieu des autres primates. Je n’aurais pas cru que mon ancienne moi allait me manquer, et pourtant, je la cherchais encore dans les coins des miroirs, dans le tiroir où mes bijoux prenaient la poussières, dans les muscles de mes bras devenus lisses et blancs. Ouais. J’étais foutrement neuve et ça me faisait chier. Mes pensées dérivaient inexorablement vers les pires dérives qui soient. Une envie de clope. Une envie d’alcool. Une envie de baiser. Une envie de me défoncer le crâne comme avant, et de dire merde à cette enveloppe trop salubre.

Voilà. Voilà pourquoi je me tenais ici, dans cette antichambre d’un abattoir, détrempée par des litres de sang, une musique assourdissante dans les oreilles, au beau milieu des fêtards débrayés, avec une vampire aguicheuse collée à mon dos. ‘Fait chier, c’était vraiment pas prévu ça.

Le vacarme assourdissant m’est revenu soudainement aux oreilles, comme si la réalité s’était remise en route en même temps que mes sens. J’ai repoussé lentement la créature trop entreprenante pour mon espace vital, et j’ai soufflé brusquement par les narines pour en chasser le trop-plein de sang, en secouant la tête. Des rideaux de sang ont cascadé de mes cheveux. Un goût métallique saturait mon palais. J’ai craché au sol, avant de secouer mes mains dégoulinantes elles-aussi, non sans heurter des danseurs complètement hystériques. Tout mon corps était gluant de cette mélasse rougeoyante.
Autour de moi, l’air vibrait. Le flot écarlate que déversaient les extincteurs au plafond commençait à se tarir, mais la frénésie de la foule n’avait fait qu’empirer, et j’avais du mal à éviter les gesticulations débridées autour de moi. La vampire a profité de mon hésitation pour revenir à la charge.

Je m’en suis écartée en retrouvant la voix. « Ça ira, j’ai déjà eu pas mal de fun pour la soirée, on verra plus tard, » ai-je râlé, franchement pas d’humeur pour tenter la nécrophilie.

J’ai fendu les fêtards hurlant comme des déments, en jouant des coudes, semant derrière moi le pot de colle, au rythme des flops-flops de mes bottines remplies de sang. Mon jean déchiré était aussi en bonne partie imbibé, quand mon débardeur coupé juste au-dessus du nombril était si détrempé, qu’il me collait au corps comme une seconde peau flasque. Quelques silhouette déchainées m’ont heurté, mais je suis parvenue à rejoindre l’extérieur de la piste de danse, en manquant de glisser deux fois.

‘Fait chier, j’voulais picoler comme avant et décoincer Anaïs, ai-je ronchonné de plus belle, pas me faire couvrir du sang d’un autre et m’faire ponctionner le cou.

D’ailleurs, où était-elle passée celle-là ? Je l’avais laissé quelques minutes toute seule, juste avant la douche, dans le but de chercher de l’alcool, avant de la perdre de vue dans cette cohue. Pire encore là-dedans, tout le monde ressemblait à tout le monde. Du rouge et du noir. Le blanc des canines et des yeux mélangées aux lumières aveuglantes des spots. Des myriades de jets de goulettes épaisses voletaient dans l’air, et les hurlements démentiels étaient tels, que l’atmosphère vibrait, comme la peau tendue à craquer d’un tambour, ou les vociférations de psychotiques en pleine crise.
Je n’ai vu aucune trace d’Anaïs dans les alentours. J’ai commencé à me demander si elle avait déjà servi de hors d’œuvre à la horde d’affamé qui se trémoussait sur la piste de danse. Les remords ne m’auraient absolument pas étouffé, cela dit. C’était un contretemps contrariant, voilà tout. J’avais prévu de la faire boire et de me distraire à ses dépens, mais cette douche surprise, et les macchabés débridés bondissant tout autour, avaient quelques peu contrarié mes plans.

D’ailleurs, c’est comestible un cafard pour eux ? Bonne question. J’ai continué à fendre la foule à la recherche d’Anaïs. Mieux valait elle que moi, après tout.

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Anonymous
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Mer 13 Juil - 21:44 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


F
or intérieur, jour.


- Ta mère est morte. Qu’est-ce que ça te fait ?
- Je l’aimais pas, qu’est-ce que c’est censé me faire ?
- Donc tu dis que ça ne te fait rien ?
- C’est pas ce que j’ai dit.
- Donc tu l’aimais ?
- C’est pas ce que j’ai dit.

Depuis quand a-t-on besoin de réfléchir pour ressentir ? Les choses ne sont jamais allées dans ce sens avant. Tu n’as pas eu besoin de réfléchir pour être heureuse lorsque Elinor t’a accueillie, pas besoin de penser pour te mettre en colère quand Anna démontrait son sadisme avec toi, pas besoin de te ronger l’esprit pour éprouver ton dégoût et ta jalousie quotidiens. D’habitude, tu es assaillie de toutes parts par des émotions instables et ingérables. Tu subis en permanence les assauts de sentiments que tu as la plus grande des peine à brider pour conserver ton flegme tout relatif.
Mais pas là. Pas maintenant. Là où d’ordinaire chaque événement prend une teinte saillante et sursaturée, tu te retrouves devant un mur de gris qui jure violemment avec tout le reste de tes pensées. C’est un monolithe imposant attendant avec patience que tu daignes lui rendre sa couleur. Et toi, tu as décidé de l’ignorer. Il s’agit d’une anomalie dans ta propre tête, et tu entends bien qu’elle disparaisse d’elle-même.

- Alors, qu’est-ce que ça te fait ?
- J’en sais rien je te dis, lâche-moi.

Etendue dans ton lit, tu attrapes rageusement ton téléphone et le déverrouilles. Avec un pincement au cœur que tu n’assumes pas, tu fermes ton application de messagerie affichant le dernier échange avec ta cousine. Mère morte comment réagir. Rechercher. Seul au milieu d’une vallée de brume et de rien, le monolithe te regarde. Il te *fixe*. Tu détestes ça.

- Tu es obligée de ressentir quelque chose.
- Et pourquoi ça ?
- Parce que tu es humaine, que tu le veuilles ou non.
- Plus maintenant.
- Arrête, tu sais très bien ce que je veux dire.

Pourquoi est-ce qu’il ne veut pas partir ? Qu’est-ce que tu es censée faire, au juste ? Internet ne donne pas de réponse satisfaisante en utilisant des termes simples, alors aucune chance de trouver une réponse en cherchant grosse pierre grise dans ma tête que faire.

- Et si j’avais *envie* de ne rien ressentir ?
- C’est le cas ?
- Non, mais je pourrais faire comme si.
- Tu perds rien à essayer.

Ignorer, prétendre, ce sont des choses que tu sais faire. C’est ça que les gens font généralement, non ? Prétendre que tout va bien jusqu’à oublier qu’ils prétendent. Tu vas faire comme tout le monde alors ; tu vas aller t’asseoir derrière ton piano et t’occuper comme tu le fais d’habitude. Arranger, improviser, extérioriser.
Tes doigts fins se posent sur les touches lestées avec solennité, comme une prière. Ta mémoire musculaire prend le relai, et ta conscience aime ça. La musique résonne harmonieusement et repeint le monde de couleurs douces et familières le temps de quelques secondes. Mais alors que le paysage semble se redessiner sous tes yeux, modelant un tableau aussi plaisant qu’éphémère, *il* apparait en plein milieu. *Il* obstrue ta vision, te force à ne voir que lui. Le monolithe. Tu bouges, tu cherches à examiner le paysage sous un autre angle, mais rien n’y fait, impossible de voir derrière le mur de grisaille. Tu changes de pièce, de paysage, mais le mur reste là, impassible, immuable.
Il ne fait rien, mais il te provoque. Il va te rendre folle.


Ellipse. Intérieur, nuit.

Le béton est brut, gris, mais les lumières et les stroboscopes l’éclairent de couleurs hypnotiques. La musique n’en est pas ; c’est un appel désespéré à la débauche qui fait vibrer puissamment ton corps entier et te donne l’impression de pénétrer littéralement jusqu’à ton cœur. Il fait chaud, ton cœur bat vite et tes pupilles sont dilatées. Tu n’es pas dans ton état normal, et heureusement. Tu n’as pas réussi à le chasser de ton esprit, alors la seule solution qu’il te restait était de faire migrer ton esprit là où il ne le retrouverait pas. Tout pour t’empêcher de penser.

La salle est remplie de vampires. La Marque t’a permis de développer une sorte de sixième sens grâce auquel tu arrives à reconnaître les tiens. Du moins, tes demi-homologues. L’immortalité les a rendus insouciants, presque innocents. La marée humaine – ou presque – qui ondule aux rythmes des pulsations martelées par les haut-parleurs est composée d’immortels qui vivent comme s’il n’y avait pas de lendemain. Tu les envies, quelque part.
Le effluves se brassent dans l’air : sang, alcool, drogue. Tu en es actuellement à deux sur les trois : quelques rasades de vodka avant de venir et un cachet d’ecstasy raflé en entrant. Le cocktail fait effet, tu commences à tolérer la vue du monolithe. L’objectif de la soirée est de lâcher prise autant que possible, de te laisser aller pour la première fois depuis des mois. Tu regretteras demain, amèrement, mais à chaque jour suffit sa peine puisqu’aujourd’hui, ta mère est morte.

- Ça me fait chier que tu sois chasse gardée, je t’aurais bien pris un ou deux litres…

Une voix perce le silence assourdissant. Tu te retournes. L’homme est grand, fin, ses cheveux de jais et en bataille tombent sur son visage symétrique et attirent ton regard vers l’abime de ses yeux sombres. Il te sourit et tu ressens subitement l’envie de sentir ses crocs se refermer sur ta nuque exposée.
L’instant d’après, tu es frappée par un éclair de lucidité. Qu’est-ce que tu fais là, dans cet état, dans cette tenue ? Tu as décidé d’enfiler un short noir que tu ne mets jamais hors des murs de ton appartement et un haut semi-transparent de la même couleur acheté il y a quelques années dans l’espoir qu’un jour tu arrives à le mettre en public. Un instant, tu as pris conscience de tous les regards qui se sont posés sur toi depuis que tu es arrivée, et une grande angoisse te submerge.
Avec tes yeux grands ouverts et tes pupilles dilatées, tu fixes le longue-vie qui t’a interpelée sans savoir quoi lui répondre.

Et alors, comme une réponse à tous les problèmes qui avaient réussi à te retrouver malgré tous tes efforts pour te perdre ce soir, une pluie écarlate et salvatrice s’abat soudainement sur toute l’assemblée. Une fraction de seconde d’incompréhension perle, jusqu’à ce que des cris d’extase ne percent cette attente. La marée de corps se déchaîne et l’air vibre à t’en déloger le palpitant. Quelques vampires crient non loin de toi, et tu décides de faire la même chose. Un long cri libérateur, une fuite en avant, l’annonce de ton abandon à cet état second que tu veux embrasser à tout prix.
Tu es définitivement jalouse, toi aussi tu aimerais pouvoir profiter de ce nectar carmin tombé du ciel, et profiter de la pulsation chaude d’un cœur envoyant son sang à travers une nuque percée. Avidement, tu regardes ces êtres détachés du temps se nourrir et tu t’imagines tantôt à leur place ou celle de leurs proies. Tu imagines ce qu’ils doivent ressentir, et par procuration, tu bois autant de sang que tu en perds.

On te bouscule. Ton regard hagard décroche de la scène qu’il épiait et se fixe brièvement sur quelques scènes d’intérêt avant de se poser sur le dos et la crinière rousse qui t’ont percutée. La vue te paraît familière, alors sans réfléchir, tu jettes une bouteille à la mer, assez fort pour qu’elle arrive à vaincre la marée, tu l’espères.

- Anaïs.. ?



CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Ven 15 Juil - 18:22 (#)



S’oublier pendant un moment. Abandonner son esprit et laisser son corps agir au rythme des pulsations assourdissante de la musique qui envahit l’espace, des flashs qui agressent les yeux et des odeurs qui flottent tout autour. Oublier un instant tout le reste, se laisser porter sans penser aux conséquences, sans penser à ce qu’on devrait être en train de faire, à ce qu’on ne devrait pas faire, dire ou penser. Juste pendant ce moment, plus rien d’autre n’existe à part la musique, la danse et l’envie de défoulement qui s’atténue à chaque mouvement, chaque battement de cœur, chaque nouvelle musique.

Un bref instant, je reprends mon souffle et capte du regard la silhouette d’Alex fendant la foule, annonçant son intention de chercher d’autres verres. Mon esprit tente aussitôt de l’en dissuader, de trouver une parade, de refuser sans autre raison que le fait que ce soit interdit. Une seconde plus tard et elle a disparu dans la foule et une longue expiration quitte ma poitrine, cherchant à chasser ce début de culpabilité qui tente de s’installer dans ma poitrine. Tu ne devrais pas faire ça. Les yeux clos, j’inspire à nouveau focalisant mon esprit sur le son, uniquement ce son agressif qui se ressent dans ma poitrine comme les battements d’un second cœur au-dessus du mien. Juste la musique. Juste la danse. Oublier tout le reste.

Une sensation de froid remonte soudainement le long de mon bras, faisant réagir mon corps d’un bond. Mon regard se tourne, tombant sur le fin sourire d’un inconnu dont le doigt levé explique sans mal la sensation dérangeante qui m’a prise à l’instant. Je m’écarte aussitôt, glissant entre d’autres danseurs avant que la musique ne change. Le son des extincteurs se met en marche, et je lève le nez, surprise. Je regrette mon geste dès que le flot quitte le plafond et baisse la tête en criant de surprise, le tout couvert par le rugissement de bonheur de la foule. En cascade, ce n’est pas de l’eau qui tombe, mais du sang, chaud et poisseux et ma magie enfle soudainement, percevant l’hémoglobine qui recouvre tout, peau comme vêtement, du sol au plafond. Je sens mes cheveux se plaquer contre mon crâne alors que mon haut s’imbibe de sang, que mes épaules nues se peignent de rouge et que l’odeur métallique me prend violemment au nez, remplaçant les odeurs que la soirée diffusait jusque-là.

Un bref coup d’œil aux alentours, et toute l’idée de me laisser aller dans cette soirée disparaît. Çà et là, j’aperçois des crocs qui n’ont rien d’humains, des peaux trop pâles pour être ceux de vivant, et des bouches ouvertes se délectant de ce qui tombe du plafond. Je repère le même type avancer vers moi, un sourire bien plus révélateur aux lèvres, ses crocs parfaitement visibles. Comment en suis-je arrivée là, exactement ? Tout ça à cause d’une bête dispute, d’une proposition d’Alex et d’un manque cruel de réflexion de ma part. J’aurai dû deviner que tout cela sentait mauvais à l’instant où j’avais vu des sachets changer de main à l’entrée, mais cela ressemblait à n’importe quelle fête étudiante dont on me rabâche les oreilles encore et encore depuis des mois. Tu devrais venir, te changer les idées. Fait chier… Fait vraiment chier !

Couverte de sang poisseux, entourée de vampires et complètement seule, je finis par tourner les talons et fendre la foule sans attendre que l’autre huluberlu approche davantage, essayant de repérer la silhouette d’Alex parmi tout ce monde. Tous se ressemblent. Habits minimalistes, verre à la main, mains tendues vers le plafond déversant toujours son liquide sanguin, rendant le sol glissant pour moi qui regrette déjà d’avoir tenté de changer de mes tenues habituelles. J’essuie mon visage couvert de sang, résistant à l’envie d’envoyer voler toute cette hémoglobine ailleurs. Je suis certaine de déjà trop attirée l’attention, aussi je me contente de chercher Alex, de bousculer sans en avoir quoi que ce soit à faire de déranger des types se douchant dans le sang de je ne sais quoi, priant intérieurement pour que ce ne soit pas du sang humain, ayant peu d’espoir que ce ne le soit pas.

- Alex !

Ma voix est couverte sans difficulté par la musique et les cris de joie des danseurs qui ne semblent pas vouloir se calmer. Je cherche frénétiquement le moindre indice qui pourrait me dire que cette personne-ci est Alexandra. Je commence à m’inquiéter sérieusement pour elle, malgré son pouvoir et son flegme, je doute qu’elle puisse s’en sortir dans tout ça et je refuse de partir sans elle de toute façon. Je me faufile entre deux groupes, détournant le regard d’une scène qui devrait se situer dans un film à mi-chemin entre l’horreur et la pornographie et manque de glisser sur le sol, percutant le dos de quelqu’un. Préférant ne pas m’arrêter, je file aussi vite que la foule et la situation me le permets, mais le son de mon prénom parvient jusqu’à mes oreilles et je tourne la tête, cherchant du regard la provenance, espérant voir le visage familier de ma camarade de soirée.

- Alex ? C’est t…

Ce n’était clairement pas elle et je ne m’attendais pas à la vision qui apparaît devant moi. En lieu et place de la brune que je m’attendais à voir, c’est une grande blonde au visage familier que j’aperçois. Je cligne des yeux, essuyant le mélange de sang et de sueur qui commence à dégouliner sur mes yeux. La vision a disparu et le type vu un peu plus tôt se tient non loin, toujours souriant. Sans demander mon reste, je file, cherchant à m’approcher du bar, l’esprit tournant à plein régime malgré tout. Venais-je vraiment de voir Heidi ou bien est-ce que j’avais imaginé quelque chose en voyant simplement une grande blonde habillée de noir ? prise d’un doute, je m’arrête, tourne à nouveau la tête, mon regard se posant à nouveau sur la fameuse blonde.

- H… Heidi ?

Le doute est permis, mais difficile. Je la reconnais sans difficulté, mais mon esprit à du mal à enregistrer tout ce qui est autour. Le lieu, la musique, ses fringues qui, malgré le manque de couleur habituel, sont tout sauf ce qu’elle porte d’habitude. Je la fixe, complètement prise au dépourvu et n’entend pas l’autre type approcher, ne me rendant compte de sa présence qu’à cause de la sensation glacée de son doigt sur ma joue alors qu’il récupère le sang sur ma peau pour le lécher. Je me raidis aussitôt et m’écarte de ce taré qui n’a pas cessé de sourire tout du long.

- Viens t’amuser…

Même sa voix m’envoie des vagues de frissons dans tout le corps, mais pas autant que son regard qui semble froid et emplie de tentation et d’envie qui ne me plaît pas du tout.

- C’est… ce que je vais faire… je suis prise…

Regardant autour de moi, je cherche à repérer une chevelure familière. Trop de mouvements, trop de monde, trop de bruits et le sang qui ne veut pas cesser de me couler sur tout le corps, imbibant mes vêtements et mes cheveux. Tout cela était censé être une bonne soirée, pas un remake de Carrie avec des vampires

Fait vraiment chier…
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Sam 16 Juil - 23:11 (#)

la fièvre

Le cortège de femmes est digne d'hirondelles se déployant dans le suaire d'une nuit fiévreuse. La chaleur embaume les ergs d'un Shreveport allongé dans le linceul nocturne, les arbres fauves se disséminent autour d'elles qui avancent sur le bitume esquinté, leurs talons frappant le pavé gris de leurs échasses aux aiguilles bien aiguisées. Les rires se sèment comme des bruits de corbeaux qui ne l'atteignent qu'à peine, veillant à garder un œil sur une Nejma toute excitée à l'idée de faire sa première sortie depuis longtemps, toute belle dans sa robe-corolle fleurie, chantant ses paroles au même rythme que celui d'une Sage plus qu'emballée à l'idée de passer un bon moment aux côtés de ses amies. Elle ne fait que déployer ses yeux sur les lieux se faisant de moins en moins cléments, les coulisses d'un sort funèbre semblant les attendre aux portes de ferrailles qui s'entrouvrent à leur arrivée. "Vous êtes sûres qu'on est au bon endroit ?" Et pourtant, elle ne pourrait se tromper, entendant déjà au loin la clameur des hurlements de la foule, les basses tonner comme un tambour chamanique dans l'espace, atteignant les caracollages de son cœur échauffé d'une certaine angoisse. Les lieux ne semblent pas sûrs et elle s'étonne de ne trouver que peu de monde à l'entrée, s'arrêtant un instant pour observer les lieux où les pelleteuses se sont endormies, leurs langues de fers écrabouillées sur le sol, les maisons de plastique recroquevillées sur elles-mêmes. Tout empeste l'animalité d'un lieu hanté qu'elle n'a pas envie d'observer plus longtemps. "Astaad ? Tu viens ?" Nejma la hèle et elle détourne le regard d'un monstre de ferraille pour avancer, peu certaine que l'amusement sera réellement au rendez-vous ce soir.

Ses cuisses frottent l'une contre l'autre tandis qu'elle s'avance encore et encore, s'épanchant dans la fosse des fauves humains - ou du moins, ce qu'elle croit être humains - pour demeurer aussi immobile que possible dans cette cage étrange. Nejma ouvre grand ses yeux, explorant les alentours de son regard émerveillé, se mettant déjà à se déhancher sur une musique électronique qui persifle à son oreille comme une agression. Ce soir, elle n'a pas la tête à la fête mais voilà qu'elle a fait l'effort pour sa jeune amie de venir et surtout pour la protéger d'un quelconque danger qui pourrait éclater.

Le temps passe, se prélasse et quelques bières ont finit par la désinhiber, à la faire s'élancer dans les corps pour y trouver la chaleur et la froideur de certaines peaux sans s'en soucier, tenant toujours la main de sa sœur d'âme, pur être certaine de ne jamais la voir s'éloigner. "C'est trop bien, non ? J'ai jamais vu une fête comme ça !" crie-t-elle à son oreille, délaissant dans son sillage un rire de jeune enfant florissante sous le joug d'un bonheur extatique et encore sobre. Un sourire crispé s'esquisse sur ses lèvres carminées alors que ses hanches se délassent, forment quelques arabesques, repoussant certaines mains qui oseraient venir se crocheter à elle, le traumatisme d'une nuit où l'on essaya de la violenter s'accrochant toujours à l'esprit. Les mirettes persans accrochent quelques regards statiques, parfois semblant fait d'une âme vieillotte mais elle se demande un instant si la paranoïa ne parle pas à la place d'un calme qu'elle devrait garder, l'inquiétude maternelle ne pouvant s'empêcher de se détourner toujours vers Nejma qui discute encore avec Sage et d'autres amies conviées qui ne semblent pas s'alarment de quoi que ce soit.

C'est alors que la musique se fait plus puissante, plus profonde encore, comme la ritournelle d'un chant macabre qui semble faire hurler tout le monde. L'oreille serpentine se tend et elle cille, voyant certains visages se tendre vers les cieux, sourires d'adorations placardés sur leurs lèvres. Elle cille encore en croyant percevoir l'émail bien ciselée de quelques crocs mais s'en détourne dans sa panique, serrant davantage la main de son amie, craignant d'y voir l'horreur se métamorphoser sous ses yeux pers sans qu'elle ne puisse rien n'y faire. Le trouble se peint sur ses traits tandis qu'elle sent les premières gouttes d'une fine bruine tomber sur son visage, ses doigts s'élevant pour en chasser l'humidité avant qu'elle ne se fige en découvrant la pulpe de ses phalanges se teinter de vermeille. "Qu'est-ce que c'est que c'bordel ?" "Astaad…" Elle n'entend qu'à peine le murmure de Sage non loin d'elle, plus inquiet que d'habitude avant que le déluge ne s'abatte brutalement sur elles. Les épaules se haussent, se tendent sous la pluie cramoisie qui détale d'un seul coup sur leurs corps en geyser carmin. Un soupir lourd lui échappe tandis qu'elle perçoit le beige de sa robe se teinter de rouge, des larmes de sang s'écoulant sur elle comme si l'on venait de lui planter plusieurs couteaux en plein corps, sa poitrine s'élevant sous un souffle rapide, ses cheveux se mettant à coller à son visage ensanglanté. Les hurlements autour d'elle l'effraient et elle perçoit, enfin, les vrais visages de ceux qui l'entouraient, écarquillant les yeux en voyant son voisin qui, quelques minutes plus tôt, dansait près d'elle sans faire de bruits, dévoiler ses crocs à la nuit. D'un pas, elle recule vivement, les cris de Sage et Nejma se répercutant fortement en elle pour la ramener à un temps où le feu brûlait, où les gorges se faisaient trancher. Favashi errait comme un spectre vengeur sur le sable, glissait sur le sol comme une âme en peine, tranchant les trachées comme on couperait de la viande. Persifle son souffle hors de sa gorge serrée, la panique s'entremêlant à la colère d'avoir accepté de venir.

Ce n'est que quelques secondes plus tard, quelle découvre sa main brutalement libre, détournant brutalement la tête çà et là sans plus trouver le visage de ses amies. "Nejma ! Nejma ! Sage !" hurle-t-elle dans la cacophonie qui reprend, son visage baigné par le cruor sanglant semblant être tout droit sorti d'un film horrifique. Sur ses hauts talons, elle manque se fouler une cheville, se fait bousculer par quelques corps en transe, repousse brutalement un visage qui allait s'épancher vers son cou du plat de sa main, sifflant un "Dégage, pétasse." de sa voix parée d'agressivité et de haine, son mépris pour les vampires ressurgissant d'un seul coup tandis qu'elle tente d'évoluer dans la masse de corps qui reprend la danse comme si de rien n'était. Elle savait. Elle savait que tout semblait trop glauque pour être sécurisé, qu'elle aurait dû porter davantage d'attention aux peaux froides qu'elle frôlait jusqu'alors. Les larmes rouges s'écoulent sur son visage comme une Vierge Marie tendrait son visage vers le ciel, l'œil suppliant pour retrouver ses proches. "Nejmaaa !" hurle-t-elle à plein poumons, un cri de désespoir qui se perd dans la brume de la musique, un cri de bête blessé craignant de revivre le même enfer qu'elles ont quittés.

Je ne te perdrai pas.
Je ne te perdrai pas ce soir.
Ni jamais.


Son corps percute alors une épaule, croisant le regard bleuté d'une être qui ne semble pas réellement ici ni tout à fait ailleurs. Mais l'élan maternelle la pousse à se désintéresser de ce qui semble être étrange d'ordinaire pour ne se concentrer que sur le fait qu'aucun croc n'apparaisse. Les mains s'accrochent brutalement à la peau suintante de ses bras pour tenter de balbutier quelques mots "T-T'aurais pas vu une fille aux longs cheveux noirs avec une robe fleurie ? Et une fille aux grands yeux de miel ?" Elle se rend soudainement compte du ridicule de sa phrase, la masse humaine et vampirique autour d'elles se confondant dans le bain pourpre dans lequel elles se noient, rendant tout le monde presque semblable. Et un rire lui échappe, terrible, cassé, relâchant brutalement la personne face à elle pour expier un rire presque hystérique tandis que continue de tomber la bruine pourpre sur elles encore et encore.

La pluie de la Fièvre.

 



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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

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Mar 19 Juil - 23:40 (#)



La Fièvre a commencé à me contaminer moi aussi. À l’intérieur de ce labyrinthe de chair, de tissu et de convulsions hystériques, j’ai erré un moment, désorientée, malmenée par des furies déchainées au rythme de la musique assourdissante. Des visions de corps écarlates furieux et d’ivoire affamée. Mes appels envers Anaïs sont restés vains. Ils étaient noyés dans le tumulte d’une foule ivre d’alcool, de sang et de sexe tous confondus ; j’ai fini par abandonner l’idée de la retrouver. Pendant ce temps, des mains suintantes essayaient de m’attirer dans cette folie, vers cette semi-obscurité où les coudes me heurtaient les cotes, et les cheveux collants d’humidité poisseuse me fouettaient le visage.

Pulsations violentes éructant des enceintes et lumières stroboscopiques. Une frénésie déroutante. Une marée de silhouettes se mouvant sous les flash de blanc, de bleu et de rose criards, sauvages, jusqu’à perte de vue. L’odeur métallique saturait tout. Les hurlements aussi. Trop de proximité.
J’avais besoin d’air. J’avais besoin d’espace avant d’être avalée à mon tour par l’ivresse de l’endroit, bien palpable dans la touffeur métallique de l’air. C’était un désir viscéral. Un hurlement contenu qui vous vrillait les sens. Une écharpe qui vous comprimait le crâne. C’était cette délicieuse tentation de s’abandonner, de chuter sans honte ni scrupules, ni lendemain ; elle était à portée de main, partout, tout le temps. Le murmure sensuel de l’oubli était omniprésent ici. Attirant même.

Pourtant, je me suis sentie imperméable. En contrôle. Comme si une couche d’ouate m’isolait de ces bas instincts et me laissait les rênes de ma soirée à loisir. C’était se tenir au-dessus d’une fosse de pêchés vous tendant les bras ; cependant, j’avais la nette impression d’avoir la force d’y renoncer ou de m’y essayer sans conséquence. D’être à mon aise. Étrange et grisante sensation pour une fois.

Puis merde.

J’ai fendu la foule en abandonnant l’idée de retrouver Anaïs. J’vais la retrouver dans un caniveau à ce rythme, me suis-je dit, et cette pensée cruelle m’a fait sourire. Au moins, la bonne humeur revenait.

Les mouvements imprévisibles de la foule m’ont heurté dans le dos, m’envoyant opportunément loin de la piste de danse, à côté d’une longue table de camping couverte d’un tas de boissons intactes. Forcément. Je me suis aussitôt avancée jusqu’à l’ilot paisible. Ma respiration reprenait ses droits. J’ai saisi une bouteille et un gobelet en plastique, indifférente désormais au sort d’Anaïs et à l’apocalypse musicale, vampirique aussi, qui se déchainait tout autour de moi. La soif d’abord.
Je l’ai mérité celle-là. Je me suis servie une abondante ration d’alcool cuivré et pétillant, lequel, dans cette obscurité en tout cas, ressemblait indiscutablement à de la bière bon marché. À l’autre bout de la table, une jeune femme hagarde a fait irruption hors de la foule, sa robe aux motifs floraux collée à ses jambes par les torrents de sang qui l’avaient inondé. Elle m’a dévisagé de la tête aux pieds. Elle devait sûrement attendre de voir si des crocs me poussaient. Je l’ai ignoré en buvant l’alcool amer. Il a chassé un peu l’horrible saveur métallique qui me collait au palais. Elle s’est alors précipitée vers moi, sa chevelure noire collée à sa peau hâlée qui, à première vue, avait au moins l’air vivante.

« Hé, tu n’aurais pas vu une autre femme qui me ressemble ? Cheveux noirs, yeux très clairs, elle doit me chercher, elle… Elle s’appelle Astaad, elle parle un peu crument, on s’est perdues de vue… »

J’ai fait mine de réfléchir et d’en avoir quelque chose à carrer. « Avec la peau un peu bronzée ? » Elle a hoché la tête. Trop facile. « Ouais, j’ai vu une nana comme ça vers l’entrée, elle était en train d’se faire bouloter la nuque par un de ces vampires. L’avait pas l’air d’aimer ça. »

L’inconnue m’a fixé avec un air totalement affolé. C’était mesquin, mais j’étais d’humeur. Aussitôt, elle est repartie à fond de train au milieu des danseurs, en hurlant le nom de sa copine, sa voix vite étouffée par les monstrueuses basses. J’ai vidé le fond de mon verre sans m’en préoccuper, avec la nette certitude que ma soirée commençait lentement à s’améliorer malgré la douche dégueulasse.

L’ivresse était toujours là. La tentation aussi. Je la sentais plus forte que jamais. Elle se mêlait à cette humeur mauvaise qui, chez moi, ne cherchait qu’à s’exprimer en trouvant enfin un premier exutoire. Elle attendait. Elle réfléchissait. Elle observait, à l’affût du meilleur prétexte pour casser sa bride.

Au milieu de mes conjectures quant à la méchanceté couvant au fond de moi, silencieusement, une main froide s’est immiscée sur mon épaule poisseuse de sang, en m’arrachant à mes réflexions.

« Tu m’avais oublié ? Pas moi, » a fait une voix mielleuse à mon oreille.

Super. La vampire m’avait retrouvé. J’ai tourné la tête pour rencontrer les mêmes yeux affamés, les mêmes courbes pâles, les mêmes cheveux rougeâtres et l’arabesque tâchée de son sourire.

« Tu sens bon. Ma proposition tient toujours, » m’a-t-elle fait en passant son index dans mon cou, avant de le porter à ses lèvres et d’en lécher le sang.

Indécision. Entre l’envie de l’envoyer royalement se faire voir avec une vanne bien cinglante dans la tradition familiale, et l’envie de mettre un orteil dans cette fosse bien noire. De me laisser aller, juste un instant, à ses bas instincts libérateurs et débridés, de lâcher prise et de savourer l’oubli. J’ai senti une intention remuer au fond de moi. Le contrôle de mes émotions s’est aiguisé mais, malgré tout, j’ai jeté un coup d’œil vers l’abime qui me promettait enfin un abandon salvateur.

En réalité, j’ai surtout déshabillé des yeux celle en face de moi. Silhouette sensuelle. Peau trop pâle là où elle n’était pas tâchée de carmin. Des courbes froides. Des yeux trop clairs. Une chevelure collée à son buste, doux, qui se pressait agréablement contre moi. J’ai lâché un peu de contrôle.

« Essaye, » ai-je fait, un mince sourire aux lèvres, sans ajouter un mot de plus.

Elle m’a scruté, curieuse. Indécise. « Vraiment ? »

J’ai haussé les épaules. Essaye, me suis-je répétée intérieurement.

La vampire a interprété mon silence pour un accord. Je me suis appuyée contre la table derrière moi, tandis que son corps se serrait contre le mien, alanguie l’une contre l’autre, ses mains avides venant investir mon cou. Elles étaient froides et moites. J’ai frissonné. Elle a pris sûrement pris ma réaction comme un encouragement car, dans la seconde, ses lèvres se sont collées contre ma joue, ont léché lentement le sang avant de se joindre aux miennes. Le baiser était court et trop froid à mon goût. Dommage. Elle a délaissé mes lèvres en étirant l’instant, avant de descendre sur mon cou, que j’ai tendu comme une invitation. Vraiment, essaye, me suis-je dit avec une intonation malsaine.
J’ai senti la dureté de ses crocs contre ma chair. La sensation était curieuse. Électrisante comme un sentiment de danger tout proche, comme le tranchant d’un couteau sur une artère. La vampire les a pressés contre moi ; mes mains, elles, ont été presser ailleurs, en suivant la courbure de son dos et de ses hanches. Ce n’était pas si mal de lâcher prise. Mais ça n’a pas duré. J’ai senti ses dents se heurter contre ma peau, laquelle s’est tendue et a résisté comme prévu ; elle a eu un mouvement de recul, une seconde d’hésitation avant de se redresser brusquement et de rompre l’étreinte.

Elle m’a fixé. Sa curiosité s’était évanouie, remplacée par une méfiance furieuse. « Merde alors, t’es quoi toi ? »

« Et le bon temps que tu m’avais promis ? » lui ai-je répondu, sarcastique.

Elle a carrément perdu son sourire. Son majeur s’est dressé bien droit dans ma direction. Elle était bien plus charmante comme ça. « Va te faire voir, connasse, » m’a-t-elle craché en se détournant.

Premier vrai sourire de la soirée. Plutôt satisfaisant. J’ai observé ses hanches énervées disparaitre au milieu de la foule, en bousculant deux ou trois junkies, sans un regard en arrière. Je me suis resservie une bière douteuse, en décollant le gobelet de ma paume encore collante de ce fichu sang. La soirée s’annonçait finalement mieux que prévu.

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Anonymous
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Mer 20 Juil - 16:20 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


L
es lumières sont aveuglantes, la musique assourdissante, l’air irrespirable. Sur ta tête, tu sens tes cheveux s’alourdir et s’agréger en épaisses mèches écarlates. Sur ton visage, tu sens les gouttelettes masquer tes joues pâles d’un voile rouge vif. Sur tes bras, ton dos, ta poitrine, tu sens tes vêtements humides se presser contre ta peau veloutée. Tu te sens de plus en plus lourde, attirée vers le sol recouvert d’une fine couche de sang et de débris pour t’y faire engloutir toute entière comme dans des sables mouvants. Tes jambes presque nues ont soudain toute la peine du monde à te soutenir. Elles tremblent, flageolent un instant alors qu’en toi se déroule une lutte sans merci entre ton angoisse et les substances que tu as prises. La bataille fait rage, et toi tu ne fais que t’agiter dans la masse comme un corps dénué de volonté propre. Tu es une particule superposée dans deux états en même temps, et la nature te forcera à en choisir un dès que l’on interagira avec toi. Toute la question reste de savoir quand cela se produira, et surtout dans quel état tu te figeras.

Un flash de lumière blanche et crue se reflète sur le béton couvert de traces de sang et d’alcool. Un visage paniqué en face de toi ; tu souris de toutes tes dents, douloureusement dénuées de crocs. Voir que d’autres personnes peuvent elles aussi se trouver dans un tel état de désespoir te rassure et fait te sentir moins seule, en quelque sorte.
Cependant, ce sourire s’éclipse tout aussi soudainement qu’il est apparu lorsque la femme à qui appartient ce visage pose ses mains sur tes bras et les agrippe. Ta réaction est presque physiologique : tu te crispes soudainement et l’espace d’un instant, ton visage s’assombrit avec l’expression d’une gamine farouche et apeurée. Tu auras beau boire autant d’alcool que tu voudras et avaler autant de cachets que tu en auras envie, tu n’arriveras pas à lutter contre ces réflexes profondément enracinés depuis ton enfance. Un petit gémissement aigu et plaintif s’échappe de ta gorge lorsque tu réalises que l’on est en train de te toucher, mais il ne fait pas le poids devant la résonnance écrasante de la musique électronique.
Quelque part, tu crois entendre ton nom comme un mirage né d’une envie profonde et inassumée. Mais c’est la voix de la femme qui perce rapidement l’air en face de toi et te ramène à la réalité. Elle cherche quelqu’un. Est-ce que toi aussi tu cherches quelqu’un ? Ses cheveux, sa robe et ses yeux ? Comment est-ce que tu décrirais celle que tu cherches, toi ? Son sourire, sa taille et ses cheveux, sans la moindre hésitation. L’as-tu vue ? Et elle, l’a-t-elle vue ?
Les pensées se mélangent dans ton esprit tandis que sa métaphore fait renaître ton sourire en même temps qu’elle te lâche et se met à rire. Est-ce l’absurdité de la situation qui la fait agir de la sorte ? Parce que toi, oui.

La réponse à sa question est « non ». Tu as passé les quelques dernière secondes, ou minutes, ou peut-être même heures, tu ne serais pas capable de le dire, à fixer le vide de tes pupilles rondes. Tu n’as fait attention à rien sinon les sensations brutes qui électrisaient ta peau et te donnaient la chair de poule. Toujours sans prononcer le moindre mot, tu secoues la tête, indifférente à la déception que tu créeras sans doute.

Un nouvel éclat de lumière stroboscopique cisaille ta vue de la foule ; un visage en particulier clignote comme un voyant extrêmement important dans ton esprit. Est-il bien réel ou n’est-il seulement qu’une invention de tes méninges complètement perdus dans la brume ? Il n’y a qu’une seule manière de le savoir : te jeter à la poursuite de ce fantôme insaisissable. Ton regard se porte finalement sur la femme à la peau tannée qui t’a interpelée. Ton sourire grandit.

- Bouge pas.

Et tu te lances agilement dans les entrailles sanguinolentes de la foule en plein débâcle, évitant avec un instinct animal les violents mouvements de marée en te faufilant à travers les vagues de corps vermeils. Bien vite, tu te retrouves à son niveau, et tu fais la seule chose que tu as eu envie de faire en la voyant, ou en l’imaginant : tu attrapes ses mains.
La première fois que tu l’as fait, tu as ressenti une telle fierté, un tel élan de bonheur que c’en est devenu presque un idéal ; le geste qui te relie à elle d’une manière unique pour toi.

- Anaïs.. ! C’est moi.. !

Couverte de sang, tu lui affiches un sourire sincère surplombé de tes yeux de jade grand ouverts, une association tellement dissonante mais dont tu n’as pas l’air de te rendre compte.
La lumière t’éblouit à nouveau et l’image de cette femme à la robe beige tâchée d’un brun sinistre te revient. Tu balbuties.

- Il y a.. est-ce que tu as vu.. la fille aux yeux de miel ?

Tu es raide. Raide comme jamais elle ne t’a vue. Raide et obsédée pour une raison inconnue par cette métaphore. Tu jettes un coup d’œil très rapide derrière toi dans l’espoir de trouver cette inconnue venue t’aborder, sans parvenir à la revoir. Tant pis, maintenant que tu as trouvé ton amie, tu vas enfin pouvoir lui montrer que tu peux t’amuser toi aussi, te lâcher, être normale. Oublier.




CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Ven 22 Juil - 3:01 (#)



Comment les choses avaient pu en arriver là en si peu de temps ? L’instant d’avant, je dansais, l’esprit ailleurs, ne me souciant de rien et oubliant un instant toutes les responsabilités, devoirs et obligations qui m’attendaient dès le lendemain. Tout a brusquement changé. Hémoglobine coulant du plafond, les sens en alerte et le cœur battant plus vite que le rythme effréné d’une musique assourdissante alors que je fends la foule pour retrouver le visage familier qui m’a amené jusqu’ici avant de disparaitre au milieu de cette cohue dégoulinante de sang et de sueur. J’ai beau la chercher, impossible de reconnaître le moindre visage dans cet enfer à la lumière aveuglante et aux corps floutés par leurs mouvements incessants. Jetant un œil par-dessus mon épaule, j’aperçois à nouveau cette ombre qui semble me suivre à travers la foule et un frisson glacé me remonte le long de l’échine, faisant frissonner mes épaules et accélérer mon cœur un peu plus. J’accélère moi aussi, glissant sur le sol devenu presque marécageux, évitant les corps qui se meuvent au son de la musique ou à celui de leur propre mélodie dans des danses que mon regard évite aussitôt. Et pour la deuxième fois en sortant avec Alex, l’envie apparaît. L’envie de boire pour m’échapper de tout ça et de me laisser aller. Je rejette l’idée. La première fois était la fois de trop. Qui c’est ce qui pourrait se passer dans une ambiance de ce genre ? La dernière fois, les choses étaient vaguement sous contrôle, au début. Là, c’est loin d’être le cas

Le sang ruisselant depuis les extincteurs finit par se tarir et je secoue la tête, essuyant mon visage rougit, fixant mes mains avec un détachement presque clinique. Trop habituée à en voir, trop habituée à en avoir sur les mains, cela ne me fait plus grand-chose, à vrai dire. La sensation est désagréable et poisseuse, faisant coller mes vêtements à ma peau, mes cheveux sur mon crâne, mes épaules et ma nuque. Je glisse dessus et j’ai l’impression qu’il s’infiltre partout, dans ma bouche, mon nez, mes oreilles. Je souffle, crache et secoue la tête en espérant m’en débarrassé, refusant d’allumer la moindre étincelle de magique tant que je serai ici. Trop de regards, trop de monde ; Trop de dents, aussi, ce qui n’arrange rien à la situation. Mes précédentes rencontres avec des vampires n’ont pas été les plus agréables et je préférerais ne pas me faire remarquer outre mesure dans un de leur bain de sang, au sens propre du terme. L’idée d’essorer ma jupe imbibée me traverse l’esprit, tout comme l’idée d’ignorer out et de juste envoyer tout le sang sur le sol, mais une apparition soudaine m’en empêche.

On se fige devant moi, on attrape mes mains et il me faut quelques secondes pour que mon esprit enregistre pleinement la personne qui se trouve devant moi. Un large sourire surplombant deux yeux verts pétillant sur un visage tout aussi rougit que doit être le mien, Heidi est devant moi. Ce que je pensais être qu’une ressemblance peu avant se révélait pourtant vrai et je mis un moment à m’en assurer, tant rien ne collait. Ce sourire semblait loin d’être à sa place dans cet endroit, tout comme sa présence. Et sa tenue… Je ne sais pas ce qui me choque le plus entre le mini-short moulant ou le haut noir transparent, le tout laissant peu de place à l’imagination. Connaissant Heidi, jamais elle ne porterait ce genre de chose au quotidien, même seule chez elle, alors la voir porter une tenue montrant autant de peau à une soirée remplie de monde, des centaines de questions me passent par la tête, mais une seule arrive à franchir mes lèvres.

- Heidi ? mais… Qu’est-ce que tu fais là ?

Pendant une brève seconde, je me demande si c’est vraiment elle, si je ne suis pas victime d’une quelconque hallucination, mais la chaleur poisseuse de ses mains serrant les miennes, l’habituelle paire de boucles d’oreilles et ses yeux couleur de jade semblent bien trop réelles pour que tout ceci ne le soit pas. Bien vite, mes yeux se fixent sur son visage, évitant la tenue qui n’attire probablement pas que mon regard. Tout semble dire qu’elle est détendue, peut-être trop ? Il y a quelque chose qui ne colle pas avec la Heidi que je connais, comme si... Sa gestuelle la trahit un peu, tout comme ses raits trop détendus alors que me tient les deux mains. Elle a dû boire un peu... Ses mots, à demi couverts pas la musique, ne trouvent aucun écho dans ma tête et je la fixe, sans savoir quoi répondre, incapable de comprendre de quoi elle parle, ne bafouillant qu’un simple :

- Euh... quoi ? Non. Je ne sais p...

Mes mots se meurent dans ma gorge lorsque la sensation glacée d’une main se posant contre ma nuque envoie de violents frissons de peur dans tout mon corps. Je fais volteface, le dos plaqué contre Heidi, faisant face au même vampire que plus tôt, ses cheveux noirs de jais encadrant un visage blanchâtre sous le sang   le macule, son sourire bien visible. Sourire qui flétrit bien vite lorsqu’il lève une seconde les yeux, transformant son visage en une moue déçue lorsqu’il repose à nouveau les yeux sur moi ; Des yeux toujours aussi froid et plein d’envie. Pourtant, il recule d’un pas, déclarant d’une voix mielleuse.

- Prise en effet, dommage… Si elles ne conviennent pas, tu sais où me trouver. Cela fait longtemps…

Et juste comme ça, me laissant bouche bée, perdue et vaguement tremblante, il disparaît dans la foule. Lentement, reprenant mon souffle, je m’écarte d’Heidi, cherchant sur son visage les réponses à toutes les interrogations qui m’assaillent au fur et à mesure que la soirée avance et que les délires s’amoncellent les uns après les autres. Je n’aime pas la savoir ici, au beau milieu de tout ça, avec ces vampires qui trainent autour comme une nuée de moustiques prêt à fondre sur nous. Elle ne semble pas blessée, mais je n’ai pas l’intention d‘attendre que cela se produise. Ni qu’Alex subisse ce sort-là. Je dois les faire sortir d’ici, toutes les deux. Et moi avec.

- Heidi, tu vas bien ? Restons pas là, viens.

Je prends sa main, la tenant fermement malgré les tremblements qui agitent la mienne et cherche du regard un moyen de sortir de cette soirée qui a bien trop dégénérer. De ma main libre, je sors mon téléphone, pestant contre le sang qui rend mes doigts glissants. Trois mots et le message part. J’espère sincèrement qu’Alex l’avec elle, qu’elle le sentira vibrer et qu’elle pourra répondre.

Où es-tu ?
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
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En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

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Dim 28 Aoû - 23:06 (#)



Déclic.
Je le sentais s’amorcer au fond de moi. Une fumerolle mauvaise s’évadait lentement de ce lieu jadis confiné dans un recoin caché de mon âme, imbibait mes entrailles, infiltrait mes narines et saturait mon palais de saveurs délicieusement acides. De l’encens s’évaporant d’une urne fermée depuis bien trop longtemps. Une essence éprise de liberté. Je la savourais. Je comprenais désormais toutes les implications de cette journée de Février, où la fatalité m’avait finalement rattrapé sous la forme d’un rêve d’un merveilleux terrifiant. Tous mes efforts n’auraient pu arrêter ces métamorphoses.

D’ailleurs, à quoi bon ? Je me sentais de mieux en mieux. À mon aise dans cet abandon décomplexé et cette lente chute ; en était-ce vraiment une en fin de compte ? Jamais une telle assurance n’avait auparavant afflué dans mes veines, jamais cette mélancolie, ce mal-être, cette douleur perpétuelle n’avait cessé de ruiner mon existence humaine. Pourtant, celle-ci était fini. Et avec elle, les névroses de l’ancienne Alexandra envers laquelle, désormais, je ne voulais plus avoir le moindre lien.

Quelque chose mourrait. Quelque chose vivait. Je troquais une vie. J’en vivais une autre. Putain, je philosophe maintenant, ai-je pensé en embrassant du regard l’hystérie collective.

J’ai terminé ma bière d’une seule rasade. Tout autour de moi, les silhouettes n’en finissaient plus de vociférer, cet entrelacs de corps tantôt chauds, tantôt froids, tous blottis dans cette folle frénésie. La Fièvre battait son plein. Et moi, vraiment, je me sentais de mieux en mieux. J’ai reposé le gobelet de bière vide sur la table, avant de percevoir la vibration dans ma poche ; j’ai récupéré mon téléphone en repensant soudainement à Anaïs, quelque part au milieu de cette foule déchainée.

Trois mots sur l’écran. Où es-tu ?

« Pas chez moi. Mais tout à fait moi, » ai-je marmonné pour moi, et seulement pour moi, tandis que je tapais un message de réponse.

J’ai pris un râteau 😓

Envoyé. J’ai levé les yeux vers l’amas de chair parcouru de convulsions. Anaïs devait certainement se trouver au milieu de tout cela et, quelque part, c’était un peu de ma faute. Peu importe. La rouquine voulait s’amuser ce soir-là, et n’avais-je pas exaucé son vœu ainsi ? C’est un putain de fun, j’vois pas de quoi elle se plaindrait, me suis-je amusée à penser en cherchant une trouée parmi les fêtards. Elle devait sans aucun doute être pétrie d’angoisses quelque part, triturant ses cheveux, et fuyant un ou deux vampires affamés. La scène me semblait d’un comique à crever de rire, littéralement.

Je me suis relevée de la table, fourrée mon portable dans la poche, et contournée le gros de la foule en rasant les murs. Le plâtre rendu blafard par les spots déchainés était teinté de violentes et fines arabesques de carmin, comme la toile d’un artiste moderne. Un travail à la Pollock. Ou une diarrhée d’ampleur biblique. À mes yeux, cela revenait au même. J’ai joué des coudes. Je me suis appuyée le long des parois, indifférente à mon débardeur et à ma peau déjà imbibés de rouge, en scrutant les visages à la recherche d’une rouquine à l’expression de cocker terrorisé.

Les faces livides apparaissaient par flash. Expressions crispées dans l’extase, sous les chevelures folles et les vêtements révélateurs, aux mains avides qui dansaient et cherchaient à m’entrainer dans leur ronde. Tentant, mais j’avais toujours un objectif. Je me suis faufilée sur ce sol rendu glissant par les jets successifs d’hémoglobine et, au bout de cinq minutes de recherches à l’aveuglette, j’ai fini par remarquer une petite silhouette familière, flanquée d’une grande perche. J’ai repoussé vivement un punk puant l’alcool, échappé à une harpie plantureuse, et j’ai cherché à me faire entendre.

« HEY ANAÏS ! »

Mon cri avait autant d’effet qu’un pet de rat. La musique a couvert ma voix avec l’efficacité d’un raz-de-marée, tandis qu’un mec bourré, pris d’un élan comique, s’est mis à gueuler en retour. Je me suis dépêchée de bousculer quelque épaules, tandis que les silhouettes d’Anaïs et de sa blondasse s’en allaient à l’opposé. Trop de chair autour de moi. Trop peu d’air. Trop de viande humaine.

J’ai écrasé la tronche du mec bourré de la main alors qu’il m’accueillait, les bras grands ouverts, un sourire idiot sur sa face tanné de veines d’alcoolique. « Pousse-toi ducon. » Contact chaud et suant. Moite. Ça sentait la viande des caniveaux et l’alcool de bas étage. Dégueulasse.

« ANAÏS BORDEL ! HÉ… »

J’ai réussi à me coller devant elle. À ses côtés chancelait une blonde en tenue révélatrice, carrément moulante, qui se cramponnait à moitié contre ma comparse de soirée. J’ai observé la nouvelle venue d’un œil appréciateur. Hé ben, elle s’emmerde pas quand j’suis pas là. Les formes avenantes de la fille étaient cependant gâchées par son regard bovin, très certainement défoncée par les substances qui circulaient çà et là. J’ai soupiré en regardant à Anaïs. Elle aussi était détrempée de sang de la tête aux pieds et, comme prévu, ses traits étaient fuyants, nerveux, voire carrément paniqués.

« J’ai eu un mal de chien à t’retrouver dans tout ce bordel. » J’ai secoué mes chaussures imbibées de sang déjà à moitié crouté. « J’pensais pas te trouver en train de conclure d’ailleurs. »

J’ai observé à nouveau la blonde. Bizarre. Elle exhalait un je ne sais quoi de particulier, une sensation surnaturelle qui caressait mes instincts d’une manière que je n’avais encore jamais éprouvé. J’ai mis cette intuition de côté pour plus tard. Le trajet m’avait laissé irritée, encore davantage barbouillée de sang et les tympans vrillés par le boucan. Je suis revenue à Anaïs en désignant sa copine du pouce.

J’ai forcé sur ma voix pour couvrir le vacarme. « Tu l’emmènes déjà au motel ? Elle est canon, mais le GHB c’est moyen comme solution, faut pas te sous-estimer comme ça. Elle a l’air carrément raide défoncée là. »

J’ai ponctué le tout d’un sourire narquois. L’air lasse, j’ai repoussé d’un revers de main agacé les trois mèches de cheveux collées sur mon front, retiré d’une pichenette un grumeaux sanglant englué sur ma joue, et réajusté avec une classe indiscutable les bretelles de mon soutien-gorge. Celles-ci et mon débardeur étaient désagréablement moulés à mon buste telle une seconde peau poisseuse. Autour de nous, les fêtards hystériques continuaient de se trémousser en tout sens, chaque seconde un peu plus violents, refermant lentement un cercle claustrophobe sur notre trio de demoiselles.

La défoncée, la détachée et la paniquée. On allait bien s’éclater ce soir.

« Bon. Et sinon ça va ? T’avais besoin d’un truc ? » ai-je lâché d’un air détaché, tandis que le monde se teintait de carmin et de crocs affamés.

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Lun 29 Aoû - 18:22 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


B
oum. Boum. Boum. Boum. A ce stade de la soirée, tu abandonnes l’idée de comprendre la force mystérieuse qui te permet de continuer à te tenir debout. Au rythme de la musique, tes jambes s’agitent subtilement, rebondissent sur le sol poisseux pour imiter toutes celles autour de toi. Tu cherches à te fondre dans la masse, à devenir quelqu’un que tu n’es pas, l’espace d’une soirée. Et ça fonctionne plutôt bien, sans doute grâce au cocktail vodka-ecstasy que tu t’es enfilé sans réfléchir.

Le sang a arrêté de pleuvoir, et tu peux enfin deviner l’incompréhension sur le visage de ton amie. Elle a l’air… sobre. En tous cas plus que toi, et en un sens tu trouves ça dommage ; tu aurais aimé te laisser aller avec elle et oublier l’existence du reste du monde pendant quelques heures dans une sorte de parenthèse de responsabilités. Enfin, la soirée est loin d’être terminée, peut-être que ton humble ambition aura l’occasion de se réaliser avant que le soleil ne force les lieux à se vider. Avant que vous ne soyez tenues par le monde de récupérer vos fardeaux respectifs.
Qu’est-ce que tu fais là ? Tu tâches d’exister sans devenir folle, comme tout un chacun tu imagines. Qu’est-ce que tu fais *là* ? Tu t’apprêtes à lui répondre quand elle se retourne violemment en plaquant son dos contre ton corps couvert de sang. Tu ne comprends pas vraiment l’origine de ce contact avant de relever les yeux et d’apercevoir un vampire en train d’essayer de faire du charme à Anaïs. Pas vraiment son genre, il faut croire. Pas vraiment le tien non plus, remarque. Lorsque finalement, la petite rousse se retourne, l’incompréhension semble avoir laissé la place à la panique sur son visage. Sa main cherche la tienne et tente de t’attirer hors de la piste de dance tandis que tu es toujours en train de sautiller instinctivement au rythme de la musique.
Elle a l’air d’avoir… peur ? Il te faut quelques longs instants avant que tu n’en saisisses la raison : vous êtes encerclées par les immortels, et elle contrairement à toi, est toujours une proie pour eux. Seulement, elle ne t’a pas demandé ton avis, tu n’as pas envie de quitter cet endroit. A vrai dire, tu te sens parfaitement à ta place au milieu de ce véritable bain de sang, au milieu de cette foule de vampires insouciants.

Alors, après quelques pas laborieux, tu commences à opposer de la résistance. Assez pour faire s’arrêter ton amie alors que tu essaies de trouver son regard. Les yeux à moitié désolés, tu tentes d’élever suffisamment la voix pour qu’elle t’entende par-dessus

- Anaïs.. j’ai pas envie de partir..

Tu es venue de ton propre chef, sachant très bien à quoi t’attendre - ou presque - mais ça n’explique pas sa présence à elle. N’était-elle pas au courant que la salle allait être bondée de tes demi-congénères ? Si tu n’avais pas aussi peu envie de penser, tu aurais aussi beaucoup de question à son attention. Mais la priorité n’est pas de savoir comment elle est arrivée là : tu veux la faire rester.

- Personne te touchera si tu restes avec moi, fais-moi confiance.

Tu essaies de lui offrir un sourire rassurant, mais un changement de tempo dans la musique fait s’agiter la foule et grimper la Fièvre au même moment. On te percute d’un côté, de l’autre, et tu commences à te prêter au jeu de la marée. Tu fermes les yeux quelques secondes pour laisser les artéfacts d’une lumière invisible danser sur tes paupières. Lorsque tu les rouvres, un autre visage a trouvé place à côté de la magicienne. Vaguement, très vaguement familier, mais impossible de mettre un nom, un lieu ou une époque dessus. Peu importe, ça ne t’intéresse pas.
Tu ne cherches pas à capter les premières bribes de leur conversation, mais puisque celle-ci semble se prolonger, et que quelques regards se sont tournés vers toi, autant t’y intéresser. La brunette ne t’inspire pas grand-chose si ce n’est une sorte de méfiance ; elle dénote du décors pour une raison que tu n’arrives pas encore à définir précisément. Pourtant, au milieu d’elles deux, tu as l’impression que c’est toi qui dénotes, que tu constitues l’anomalie du groupe alors qu’au contraire, tu veux être celle qui se fond le plus dans le décor. Alors, avec une fierté sans doute mal placée, sans doute mal venue, tu réponds.

- Evidemment que je suis défoncée, je suis là pour ça. C’est vous qui êtes trop clean !

Comment si la part de toi qui n’était pas d’accord avec ce choix s’insurgeait muettement, tu ressens le besoin pressant de te justifier.

- Ma mère est morte aujourd’hui, je…

Comment finir cette phrase ? Avec quel degré d’honnêteté ? Tu ne pouvais rien faire d’autre ? Tu ne savais pas quoi faire d’autre ? Le monolithe réaffirme tout à coup sa présence. Qu’il en soit ainsi, si tu ne peux le contourner, alors tu vas l’escalader. Après un bref moment d’hésitation à entendre battre ton cœur dans tes tympans et contre tes tempes, tu pousses un nouveau cri que tu espères libérateur à l’attention de quiconque voudra bien d’écouter, à peine assez fort pour échapper aux basses assourdissantes qui font vibrer ton corps.

- MA MERE EST MORTE, WOUUH !!

Un petit peloton autour de toi réagit et répond à ton cri avec enthousiasme en éreintant eux aussi leurs cordes vocales. Tu lèves les bras et commences à sauter en rythme de plus belle. Sur ta joue, une unique larme a tracé son chemin à travers le sang, et tu te forces à sourire. Il faut que tu profites de la fête, tu en as besoin.



CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
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A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Mer 7 Sep - 21:28 (#)



Au milieu de la cacophonie ambiante des corps englués de carmin et se frottant les uns aux autres, la main d’Heidi dans la mienne a quelque chose de rassurant ; Cette soirée ne pouvait pas plus mal tourner qu’elle n’était en train de le faire, et il fallait vite qu’on fiche le camp d’ici avant qu’un vampire un peu moins regardant se mette à se mettre en tête que le sang qui recouvre littéralement tout n’est pas suffisant pour ses papilles délicates et son estomac vide. Je me demande encore pourquoi l’autre a finalement rebroussé chemin, mais le simple fait de ne pas l’avoir collé à moi me suffit, la raison importe moins que le fait qu’il soit parti. Mon petit sac vibre et j’en extrait mon téléphone barbouillé du sang que j’ai sur les mains. Super, encore un truc à nettoyer. je regarde rapidement et soupire en voyant une réponse d’Alex qui… s’est pris un râteau. Et bien au moins il y en a une semble s’amuser. Je range le téléphone et regarde autour de moi, reprenant un chemin hasardeux en quête de la sortie.

C’est Heidi qui m’arrête et je tourne un visage inquiet vers elle. Tout ça, ça ne lui ressemble pas du tout. Ses fringues, son état, tout me hurle qu’truc ne va pas, mais impossible dans tout ce bordel imbibé de sang de trouver la raison à tout ce qui est en train de se passer. Je serre plus fermement sa main, mais elle insiste et je la regarde, incrédule. Comment ça elle veut rester ? Dans une salle bourrée de vampire avec des hectolitres de sang qui tombent du plafond ? Elle a perdu l’esprit entre avant-hier et ce soir ?

- Quoi ? Mais Heidi c’est super dangereux ici, faut qu’on parte !

Voilà qu’elle essaie de me rassurer, mais tout ça n’a aucun sens à mes yeux. Pourquoi ils ne feraient rien si elle est là ? J’ouvre la bouche mais elle a déjà fermé les yeux pour se laisser porter par la marée des corps en mouvements et de la musique qui accélère. Dans n’importe quelle autre situation, j’aurais suivi, je me serai laissée happer par l’ambiance et le tempo, mais pas là. Pas alors que la foule est composée de je ne sais combien de vampires. Pendant une seconde, l’envie de juste la forcer à me suivre se place en tête de liste des choses à faire, mais une apparition soudaine m’arrête net.

Alexandra, elle aussi couverte de sang, arrive finalement. Indemne, visiblement, bien qu’avec une grimace qui me fait me dire qu’elle n’est pas plus enchantée que ça par tout ce qui est en train de se passer. Pourtant c’était son idée cette soirée.

- Alex ! Tu vas bien… Conclure ? Quoi ? mais pas du tout ! C’est Heidi, pas une conquête.

Ce qui n’expliquait pas grand-chose, mais j’avais vraiment autre chose à faire que de penser à faire les présentations au vu de la situation. Elles avaient déjà dû se croiser en plus, Heidi vivait encore aux Kingston quand j’ai rencontré Alex qui y vit toujours. Et voilà que cette dernière décide de me rappeler une énorme bêtise qui aurait pu me coûter très cher et qui est salement en train de se reproduire ce soir, même si les raisons et enjeux sont clairement différents. Je ne peux pas m’empêcher de râler en entendant ça. Ce n’est pas la première fois qu’elle me le rappelle, comme si elle était fière…

- Rhaaaa, mais la paix avec ça ! Tu sais très bien que ce n’est pas ce qu’il s’est passé et… bordel je sais que tu dis ça exprès pour m’emmerder en plus, pourquoi je t’écoute…

Je soupire, essayant de frotter mon visage pour en retirer le sang qui commence à y sécher, ne parvenant qu’à m’en badigeonner un peu plus sur les joues. Un soupir de frustration m’échappe et je n'ai vraiment qu’une envie : foutre le camp d’ici. J’écoute à peine Heidi avouer qu’elle est défoncée, je l’avais remarqué toute seule. Pourtant, la suite m’arrête net et je la fixe en cillant, pas certaine d’avoir bien entendu ce qu’elle vient de dire. Elle le hurle alors et je sens mon cœur se serrer en la voyant faire alors que tous autour semble hurler leur joie, plus emportés par le cri que par sa signification. Sa mère est morte ? Tout semble se mettre davantage en place et je l’observe sauter sur place comme si elle était heureuse de la nouvelle et pas en train d’essayer de s’oublier pour ne pas avoir à y penser.  Je serre les poings, me tourne vers Alex. Comme si j’allais partir maintenant que j’ai entendu ça…

- Ouais… me faut un verre. Ou plusieurs. Sans doute plusieurs.

J’inspire, regardant autour de moi, essayant de percevoir quelque chose dans cet endroit empli de flash lumineux, de corps en mouvement et d’odeurs indéchiffrables qui s’entassent sous celle entêtante de l’hémoglobine déversée à foison. Je commence à gratter mes bras nues eux aussi couvert de fluide carmin et la sensation me dérange désormais beaucoup plus, comme un rappel de quelque chose de bien plus lointain qui remonte dans ma mémoire.

- Tu sais où sont les toilettes aussi ? J’en peux plus de sentir le sang couler de partout et imbiber mes fringues. C’est dégueulasse, faut que j’enlève tout ça.

Je tends le bras, attrapant Heidi par son short, essayant de capter son attention jusqu’à avoir son regard fixé sur le mien. J’ai envie de lui dire que je désolée, qu’elle peut me parler, qu’on peut essayer de voir ça une fois sorties d’ici, mais tous ces mots restent bloqués dans ma gorge. Voir son visage imbibé de sang être parcouru d’une unique larme me serre la gorge et la poitrine. Je déteste voir cette larme sur sa joue.

- Je reste là. Je pars pas Heidi, mais viens, on va chercher à boire.

Et trouver un endroit où je pourrais retirer ce sang qui macule nos peaux et nos vêtements. Je ne veux même pas savoir d’où vient ce sang ni s’il appartenait à quelqu’un. Je vais refaire une connerie, mais cette fois, pour Heidi. J’aurai préféré qu’elle m’appelle comme elle l’a déjà fait…
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- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
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Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

Pseudo : Achab
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Dim 11 Sep - 23:07 (#)



L'overdose de viande. L’écœurement.
Nous étions dans un abattoir. Entourées d’une marée de jambons. Ils se trémoussaient en tous sens, se pressaient les uns contre les autres en bavant des fluides carmins, alcoolisés, poisseux. Partout. N’importe où, tout le temps, et surtout contre moi. J’étais recouverte d’odeurs de chairs. La clarté brutale des spots éclairait par intermittence ces faces déformées par l’hystérie, ces haleines lourdes, que je voyais se rapprocher et nous enfermer dans leur sarabande déchainée. Je saturais. Des bras ont commencé à me flanquer des bourrades dans le dos. Des coudes me rentraient dans les côtes. Des cuissots me bousculaient. J’ai senti des cheveux collants m’asperger la nuque et les joues, en y rajoutant une couche malvenue de ce sang désormais à moitié coagulé et crouteux.

L’énervement a suivi l’écœurement. Besoin d’air putain, me suis-je répétée, tandis que la comparse d’Anaïs s’enfonçait au milieu de l’hystérie collective, en hurlant à propos de sa mère crevée. Génial. On avait bien besoin de ça. Défoncée et tarée en prime. Apparemment, Anaïs les collectionnait.

« La chance, la mienne s’accroche encore… » ai-je râlé à sa suite, en repoussant d’une bourrade le cul d’une femme complètement pétée qui s’écrasait contre mes hanches.

J’aurais dû l’emmener d’ailleurs. Ouais, ça aurait été comique, ai-je songé, alors que la musique et les mouvements de la foule s’amplifiaient de concert. Nouveau choc. Tout le temps, sans arrêt. J’ai failli percuter Anaïs en pleine face deux fois comme la situation devenait ingérable, et la Fièvre saccadée, violente. Insupportable au milieu de ce troupeau. J’ai senti l’irritation monter en moi. Bien sûr, toute cette soirée était mon idée, mais j’avais prévu de rester loin de tout ça, et non d’être ballotée par des sacs de viandes imbibés aux stupéfiants et des cadavres surexcités par une douche de sang.

J’ai ravalé l’ironie acide qui montait. « Les toilettes ?! » J’ai hurlé pour me faire entendre d’Anaïs. « Dans ce trou ? Il doit y avoir quelques pièces isolées, la plupart avec des camés en train de se faire vider ou baiser. Mais j’suis d’accord, nous faut de l’air, ça pue le… »

Encore un choc. J’ai senti un poids chaud s’affaler sur mon dos. Je me suis interrompue en percevant l’haleine lourde, et la moiteur dégueulasse d’une peau contre la mienne. Un bras lourd et tatoué au bout duquel chancelait une bouteille de bière, s’est enroulé autour de mes épaules. J’ai ressenti les poils humides d’une barbe, malvenue, crépiter contre ma nuque. Un violent frisson de répulsion m’a traversé. De fureur aussi, d’être collée comme ça. Le type affalé sur moi, à l’allure de vieux métalleux Texan, m’a attiré contre lui en vomissant une série de mots à moitié incompréhensibles.

« …Filles ! … Un verre ! PUTAIN ! Dix bordel de dieu !... C’est… Coincées ?! Z’avez l’air de…  Être dans l’ambiance et… » Je n’ai pas compris la suite. Trop de bruit. Trop de proximité. Trop de colère.

Je l’ai repoussé d’une vive saccade. En me retournant, ma bottine a décollé vivement du sol avec un bruit de fureur humide, comme une ventouse, en décrivant un arc de cercle remarquablement précis dans cette pénombre. Elle a heurté un endroit mou, sensible, situé entre les jambes du motard. J’ai vu son expression se modifier par flashs. Comme un comics. Surprise. Joues rouges. Bouche ouverte. Douleur. Tentative de reprendre son souffle. Celui-ci a fini par chanceler en avant. Aussitôt, l’espace d’un instant, une violence réflexe comme une étincelle rageuse m’a traversé de part en part.
Ralenti sur fond de flash blancs et noirs. Je me suis emparée de la bouteille, laquelle commençait à s’échapper de sa main à demi ouverte, et je lui ai fracassé sur le crâne. Celui-ci était d’ailleurs coiffé d’un bonnet Hells Angels ridicule, avec sa tête de mort blanche sur le tissu noir. Il s’est effondré à genoux, une main sur le crâne, une entre les jambes, en criant de douleur. Le boucan a étouffé de moitié le hurlement, et j’en ai profité pour balancer le tesson au hasard, parmi la forêt de jambes.

La foule a reculé. Quelques yeux m’ont observé. Mais la majorité des hystériques continuaient de se trémousser dans tous les sens. Je me suis sentie un peu mieux. Un peu de violence gratuite. Un peu plus d’air autour de nous. Toujours bien d’avoir un exutoire, ai-je constaté à part moi, en me frottant les épaules pour essayer vainement de me débarrasser de l’odeur de transpiration du barbu.

Je me suis retournée vers Anaïs, l’air détachée. Tout est sous contrôle. Nickel.

« Toilettes alors ? Bon plan de s’éloigner, juste au cas où… » lui ai-je crié à l’oreille en m’esquivant dans la direction opposée où les danseurs commençaient à se heurter au type par terre.

J’ai avancé dans ce rideau de viande. Une étincelle d’adrénaline m’a conforté dans ce petit épisode de déchainement de brutalité. Étrange. Je ne me sentais pas tellement grandie. Ni vraiment amusée. Un filament de dureté se déroulait simplement au fond de moi, quelque chose de nouveau, quelque chose d’impatient, qui me conduisait vers une issue que je ne connaissais pas encore. Ou bien était-ce une autre facette de moi que je découvrais lentement, par petit bout, après ce mois de Février.

Ouais, enfin, ai-je réfléchi, les bastons de bar c’est minable. J’ai bousculé des épaules suants, des culs qui oscillaient en plein chaos, toute cette foule de barbaque qui me barrait le chemin, à moi et peut-être à Anaïs. En espérant qu’elle suivait. J’ai filé en direction du mur du fond, dans la partie fermée de cette construction abandonnée, où des battants s’ouvraient sur des corridors et d’autres pièces poussiéreuses, désertes. Je me suis arrêtée juste en face d’une de ces issues. Ici aussi, on avait étalé des tables alourdies de divers alcools et de verres en plastiques, tous relativement peu consommés.

« Putain de merde, j’déteste être autant collée et être collante comme ça… »

J’ai décollé machinalement mon débardeur de mon ventre, comme si cela allait chasser toute cette mélasse faite de sang poisseux, d’alcools renversés et de sueurs humaines. Hors de question d’aller à nouveau se fourrer parmi ces monceaux de viande. Ma bonté avait des limites. Juste un peu.

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Anonymous
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Sam 17 Sep - 23:08 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


I
l y a des choses que les mots font sembler impossibles, antinomiques, alors que la réalité les réunit pourtant avec aise. Les mots ne devraient pas permettre d’être paralysée et active à la fois, et pourtant c’est comme ça que tu te sens ; bloquée dans un vortex d’eau noire qui te noierait à l’instant même où tu cesserais de tenter de lui échapper. C’est une impasse camouflée en choix : dans tous les cas tu finiras par boire la tasse, la seule question qui subsiste est de savoir combien de temps encore tu voudras continuer à lutter contre l’inéluctable. Combien de temps encore tiendras-tu à danser au milieu de ces êtres que tu as jalousé toute ta vie ? Combien de temps à supporter les bras qui se pressent contre les tiens, les coudes qui rentrent dans tes côtes et tous ces regardes qui t’apparaissent encore plus intrusifs qu’une armée de mains baladeuses ?
Si tu t’arrêtes de sauter, c’est la fin. Et pourtant, tu sens une main t’attraper et t’attirer. Ton cœur rate un battement comme il ne sait pas gérer la panique qui t’envahit à chaque fois que l’on te touche à peine une demie seconde. Tu as l’impression qu’il s’arrête toutes les secondes, à vrai dire, et tu t’agites comme si sans cela, il allait s’arrêter de palpiter définitivement, mais pas de la manière que tu souhaites.

Après avoir rapidement relevé les yeux vers la propriétaire de cette main qui s’attarde sur tes vêtements, tu desserres le poing qui allait se déchaîner par réflexe contre la personne qui avait osé te toucher de la sorte. Mais c’est Anaïs, tu peux bien lui permettre ça. Tu lui permets déjà presque tout ce qu’elle veut ; il y a chez elle quelque chose de plus fort que ta volonté. Un virus qui te fait plier, autant que tu en es capable, à ses attentes. Tu n’es pas une personne raisonnable, tu n’as pas la moindre compassion et tu te fiches de blesser ceux qui ont la malchance de croiser ton chemin ; mais pas elle. Pour une raison que tu ne te figures encore pas tout à fait, tu éprouves une peur sincère de la triste. Ou énervée. Ou déçue. C’est une réelle panique qui te saisit le cœur dès lors que vous êtes ensemble : tu fais passer tes envies au second plan pour tenter de te conformer au mieux à l’idée de ce qu’est une bonne amie pour elle.
Alors naturellement, lorsqu’elle tente de t’attirer hors de ta bulle tourbillonnante de désespoir, tu le lui permets. Contre ta volonté, mais si ça ne lui plaît pas de te voir ainsi, alors tu ne vas pas le lui infliger plus longtemps.
Avec une mine triste que tu ne peux réprimer, tu mets fin à ton déni bondissant pour suivre la petite rousse, et visiblement la brune qui l’accompagne.

- Si c’est pour reprendre un verre alors…

Dans le chaos battant au rythme de la grosse caisse synthétique, elle n’a même pas dû t’entendre. Ça ne fait rien, de toutes façons tu aurais sans doute fini par le faire après que la foule à moitié liquide ne se soit lassée de célébrer la mort d’une femme sans cœur. Sans un mot de plus, tu te laisses traîner en dehors de la marée de corps ensanglantés avec les yeux ronds et la bouche dessinant une fine moue juvénile. Sur le chemin, tu assistes à une débâcle de violence gratuite et banalisée de la part de son autre amie en tête du cortège, et tu dois avouer que cette vision te délivre un bien fou par une sorte de procuration étrange. Peut-être as-tu finalement plus en commun avec l’autre amie d’Anaïs que ce que tu pensais.
Un grand sourire est brièvement apparu au bord de tes lèvres alors que tu es passée à côté de ce visage bouffi et vexé, déjà oublié par une foule indifférente. C’était comme reprendre une dose. Un rappel d’une vie précédente, minable et pourtant si familière. Tout ici te la rappelait, comme une invitation trop insistante à revivre le on vieux temps. Celui où tu ne te souciais pas des conséquences de tes actes. Celui où tu vivais dans la jungle, à des lieux du concept même de responsabilité.

Finalement, l’oasis. Un peu à l’écart, une paire de tables en plastique jonchée de gobelets eux aussi en plastique. Les bouteilles, elles, sont en verre. Dures, stables, elles ne trahissent jamais leurs promesses. Une armée de vieilles amies qui se dressent et t’invitent à les rejoindre. Des sirènes de verre qui elles aussi veulent ne noyer grâce à leur chant imbibé d’éthanol. Quelle piètre Ulysse tu ferais, alors que la tête la première tu plonges en leur direction.
La table est un véritable cimetière : les cadavres de verres s’empilent devant ceux de bouteilles. Tandis que les deux amies discutent de la suite de événements, comme si cette soirée ne répondait pas à la promesse qu’elle avait faite, toi tu te mets en quête de trois survivants que tu rempliras avec avidité d’un doigt de jus d’orange bon marché et de douce, douce vodka. Rapidement, tu interromps tes camarades pour leur tendre un verre chacune, sans un mot, seulement un sourire désolé collé à la va-vite sur le visage.
Tu n’as pas le temps de parler, ton verre t’appelle. C’est physique, viscéral. Il t’a manqué, tant manqué. Tu es presque désolée d’être partie sans rien lui dire, voulant t’éloigner pour finalement réaliser que tu avais commis une erreur. Et l’instant d’après, une étincelle fugace de raison te contredit et tente de faire taire ce verre trop bavard. En un battement de cils stroboscopique, le débat fait rage en ton sein, et la meilleure chose à faire pour le faire taire est sans doute d’en supprimer l’objet. Pour cela, une seule manière : d’une seule traite, sans même trinquer, comme une morte de soif. La brûlure de l’alcool déchire ta trachée et fait trembler tes jambes alors que tu rejettes la tête en arrière et que tu laisses tes cheveux poisseux dévoiler ton visage maculé du sang céleste.
C’était si bon. Si bon que tu en pleurerais.

C’est une main s’ancrant fermement autour de ton bras qui te rappelle à la réalité de la Fièvre. Cette main n’appartient pas à ton amie, tu en es absolument certaine. La poigne n’a rien de délicate ; au contraire : elle est ferme et autoritaire, et ça ne te plaît pas du tout. Tu fais volteface, donnes un grand coup d’épaule dans le vide pour tenter de te dégager de l’étreinte qui s’est abattue sur toi ; en vain. Ce que tu vois, c’est le vampire qui t’avait déjà interpellée un peu plus tôt, targué d’un grand sourire qui ne cherche même plus à cacher sa dentition anormale. Il serre un peu plus ses doigts autour de ton bras, tu grimaces. Tu n’es pas dans ton état normal, et il a l’air de l’avoir deviné.

- J’ai changé d’avis, même si je peux pas boire j’ai quand même envie de tirer un coup. Allez, viens.

L’effet qu’il te fait maintenant n’a plus rien à voir avec les quelques secondes d’égarement qu’il t’avait causé un peu plus tôt. A présent, il te répugne plus que tout au monde, et surtout, il fait grimper ton angoisse en maintenant ce contact malsain.
Avec une voix presque plaintive, tu réponds.

- Lâche moi… j’ai… j’ai pas envie…

Son sourire s’élargit, comme s’il attendait ces mots. Il serre encore un peu plus fort, comme pour te faire comprendre que le choix ne te revenait pas.

- Tu plaisantes ? Me dis pas que t’es pas venue habillée comme ça pour faire le tapin.

De l’adrénaline, tu reconnais ce qui est en train de se distiller dans ton sang tandis que tu vois finalement le danger en face. Ton rythme cardiaque explose, et ton corps entier se raidit encore plus qu’il ne l’était déjà. Tu hausses le ton, ta voix chevrotant malheureusement contre ta propre volonté.

- Je t’ai dit de me lâcher, tout de suite..! Je s-

Il te coupe sèchement la parole. Ses yeux s’assombrissent un peu plus encore, et son sourire se morphe en celui d’un véritable prédateur.

- Sinon quoi ? Qu’est-ce que tu v-

Tu lui coupes à ton tour la parole, mais d’une autre manière. Tu n’as pas réussi à contenir ton poing lorsque celui-ci a tenu à s’élancer de toutes ses forces en direction de son visage. Il ne chancelle même pas, mais la surprise le fait relâcher la prise qu’il exerçait sur ton bras. Tu en profites pour te dégager avec urgence. Instinctivement, tu fais un pas en arrière et tu cherches à te grandir en rejetant les épaules en arrière. Sous ses mèches noires dégoulinantes de sang, les yeux de l’immortel brillent d’un nouvel éclat bien plus sombre. Son sourire est mort avec ton coup, et ce qui se trouve à la place fait froid dans le dos. Il s’exclame.

- Oh, tu vas regretter ce que tu viens de faire, je peux te le promettre espèce de sale petite garce.. Marquée ou pas je vais te redessiner le portrait. Tu as besoin qu’on te rappelle ta place visiblement.

Ça aussi, tu reconnais. Pour en avoir vu des dizaines, c’est à ça que ressemble le début d’une rixe. Le pire, c’est que tu n’as même pas dû lui faire mal. Il est vexé comme un pou, blessé dans son égo et avide de faire valoir sa puissance de caïnite. Il fait un pas vers toi. Du coin de l’œil, tu vois une main se lever. Le temps s’arrête pour toi l’espace d’un moment, à peine assez pour réaliser ce qui s’apprête à se passer, l’accepter, et te galvaniser pour encaisser.
La claque retentit, aigue, et se détache même du fond sonore, attirant quelques regards autour de vous. Ta joue prend une nouvelle teinte sous la lumière saccadée, un rouge intense et violacé qui jure avec la pâleur extrême du reste de ton visage. Tes yeux eux aussi sont rougis ; alcool, drogue, douleur ? Tu chancelles, poses un genou au sol, sans parvenir à pousser le moindre cri. Tu savais ce qui t’attendais, mais tu peux au moins en tirer la fierté de ne pas avoir baissé les yeux.
Contrairement au lourdaud que la brunette a émasculé il y a quelques instants, cette fois la foule réagit. A l’écart de la masse, quelques personnes s’approchent de la scène. Dans ton état, leurs intentions sont difficiles à lire, mais la gifle aura au moins eu le mérite de te faire regagner ta lucidité : tu ne veux plus rester ici pour les connaître.

CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
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A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Jeu 29 Sep - 19:58 (#)



J’ai comme l’impression que cette soirée ne va pas en s’améliorant. Déjà la douche de sang avec la foule de vampire avait jeté un froid, mais voir Heidi dans cet état et apprendre la raison dudit état ne me donne pas spécialement envie de rester ou de boire, mais s’il faut ça pour qu’elle évite de se jeter tête baisser dans des ennuis qui ne manqueront pas de tomber vu la situation… fuck it. Je jette un regard outré à Alexandra à sa remarque et tente de ne pas me faire écraser par des danseurs un peu trop imbibés pour remarquer que leur déhancher pourrait ébranler les fondations même du bâtiment s’ils venaient à taper dedans. Pourquoi je suis venu déjà ? Lorsqu’Alex manque elle aussi de me percuter une première, puis une deuxième fois, l’exaspération commence à prendre le pas sur l’angoisse. Alors lorsqu’elle me dit que trouver des toilettes ce sera pas le plus simple, je lui fais comprendre que, vraiment peu m’importe.

-  On s’en fout, tant qu’on s’éloigne !

Je n’ai pas spécialement envie de finir écrasée entre deux inconnus complètement bourrés ou des vampires. Alors j’attrape la main d’Heidi et la tire derrière moi, faisant de mon mieux pour suivre Alexandra tandis qu’elle fend la foule sans ménagement, me permettant de me faufiler derrière elle malgré le poids mort qu’est Heidi à ce moment précis. Pour une fois, j’envie la taille de Serguey. J’aurai pu la catapulter sur mes épaules et dégager tout le monde du passage sans perdre Alexandra de vue, ça aurait été très pratique.
Enfin, nous parvenons à nous extraire de la cohue collante et je souffle de soulagement en rattrapant Alex qui s’est approchée de quelques tables sur lesquelles trainent des verres entamés. Pas question que je touche au moindre truc qui se trouve ici. Allez savoir ce qu’ils y mettent dans ces verres, je compte bien rentrer sur mes deux jambes, pas les pieds devant. Je m’approche d’Alex qui tente de décoller son haut imbiber de sang de sa peau avec un bruit de succion que même la musique ne couvre pas totalement.

- Je vais m’occuper de ça, bouge p…

C’est sans compter sur heidi qui, visiblement tout à fait lucide pour remplir des verres, nous en tend deux à Alex et moi. Je prends le mien d’une main hésitante, ne sachant pas trop quoi en faire. Rien que l’odeur me répugne au plus haut point, alors l’idée d’avaler ça…

- Euh… merci Heidi ?

Je la regarde, bouche bée, engloutir son verre d’une traite comme s’il s’agissait d’eau minérale avant de fixer le mien d’un œil hasardeux, jetant un œil à Alexandra qui semble m’observer d’un œil à moitié curieux et narquois, l’air de dire « vas-tu oser ? ». Le souvenir de la soirée en sa compagnie est encore suffisamment vivace pour que je sache très bien à quel point tout ça peut mal finir, surtout vu l’état d’Heidi et ma tolérance plus que limitée. J’inspire et porte le verre à mes lèvres, prenant une gorgée qui, non comptant de me brûler la gorge, possède en plus un goût infame et me fait grimacer de dégoût. Les gens boivent vraiment cette horreur ? Je repose sagement le verre sur la table près d’Alexandra, pas vraiment prête à une deuxième gorgée ensuite.

Le temps que je boive un peu, Heidi a eu le temps de s’embrouiller avec quelqu’un. Le son assourdissant m’empêche de comprendre ce qu’il dit, mais ej vois très bien la raclée qu’il lui colle et qui la force à topmber à genoux. Les yeux écarquillés, j’agis sans réfléchir en la voyant se faire frapper. Comme si cette soirée n’était déjà pas assez merdique !

- HEIDI ! Vous êtes tarés ou quoi ?

Réaction instantanée face à la scène, mon bras part et le contenu restant de mon verre s’écrase contre le visage du type qui vient de frapper Heidi. Je m’agenouille près d’elle, essayant de savoir si elle va bien, remarque la teinte rouge de sa joue et ses yeux arborant la même couleur. Elle n’a pas l’air plus blessée que ça, mais le coup semble avoir été assez fort pour la mettre à genoux, alors le type n’a pas dû y aller de main morte. Je me tourne vers lui en me relevant, passablement énervée. Il se prend pour qui cet enfoiré-là ?

- Foutez le camp espèce…

- Encore une garce qui ne connait pas sa place… Mais tu sens drôlement bon…

Je me fige. Shit. Evidemment que ce type est un vampire. Et évidemment qu’il a senti que je n’étais pas humaine. Soudainement, je sens comme une douche froide dévaler tout mon corps alors que ses canines apparaissent clairement sous les lumières des néons. Un pas en arrière est tout ce qu’il faut pour qu’il lance son bras en avant. Peur, réflexes, instinct ou un mélange des trois, je ne saurai trop dire, et je réagis d’une façon que je ne pensais pas possible. En voyant son regard, la seule idée que j’ai en tête c’est que c’est lui ou moi. Et je préfère que ce soit moi. Le sang de mes épaules à mes doigts fuse, le frappant pile dans ce regard qui me terrifie bien plus que les canines. Son bras revient aussitôt vers son visage alors qu’il cri de douleur alors que je manque de me vautrer en trébuchant sur une table derrière moi. Je me précipite sur Heidi, cherchant à la relever, implorant Alexandra.

- Alex ! Viens m’aider, s’il te plaît, qu’on foute le camp !

Loin de ce type... et des autres vampires, tant qu’à faire.
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
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Dim 2 Oct - 22:44 (#)



La Fièvre nous a vomi comme un maux d’estomac. Aux relents de viande humaine se sont mêlées les vapeurs des alcools orphelins, des cocktails bon marché et d’autres substances liquides délaissées sur l’autel de l’ivresse. L’îlot alcoolisé était calme. La marée frénétique avait reflué d’ici, laissant sur le sol des fines zébrures sombres et des traces de semelles collantes, brillantes par à-coups sous les flashs des spots comme des tâches de graisse. Je me suis arrêtée contre la table pour inspirer en paix, loin de l’abattoir de la piste de danse, d’où nous venions de nous extraire à coup de tessons de verre.

Nous, c’était moi et les deux dévotchka, l’une camée, l’autre en détresse. J’ai soufflé. Mon débardeur me collait encore étroitement au corps à la manière d’un étau poisseux, qui ne faisait qu’accentuer ce début de mauvaise humeur. Car, au fond de moi, je sentais encore ces braises de violence couver, attendant un éclat de je ne sais quoi, pour transformer cette fête en un festival de je ne sais quoi.

En somme, j’étais en roue libre. Génial. J’ai scruté la foule bondissante et déchaînée, en cherchant à nouveau la raison de ma présence ici. Rien ne m’est venu. Seulement un tic. Une démangeaison que je ne parvenais ni à saisir, ni à soulager, cachée sous le pansement de ma nouvelle vie. J’devrais peut-être m’en débarrasser et jeter la croûte un bon coup, ai-je pensé en décollant mon jean imbibé.

Question hautement philosophique. Je la notai pour plus tard. Je me suis tournée vers Anaïs, ouvrant la bouche pour lui répondre, lorsqu’un verre rempli d’alcool est apparu dans mon champ de vision.

« Hm, merci, » ai-je marmonné, en prenant le verre que me tendait la blonde, Heidi manifestement, l’amie d’Anaïs en tenue ultra courte.

Le verre exhalait l’alcool fort. J’ai jeté un coup d’œil narquois vers Anaïs, qui approchait son verre de bibine avec toutes les précautions d’une belette sur un champ de mines. Amusant, est-ce qu’elle va nous faire une galette instantanée, me suis-je demandée en reniflant mon propre verre. Il sentait le sang et l’orange, sans doute en bonne partie à cause de l’intérieur de mes narines maculées de cette hémoglobine qui s’infiltrait partout. J’ai tiqué. La sensation d’écœurement est revenue à la charge et, faute de mieux, je me suis tournée vers la blonde avalant cul-sec son verre de douceur infernale.

Coup d’œil appréciateur. Anaïs avait décidément d’intéressantes fréquentations, que je ne lui aurai jamais associées. Quelle cachottière.

« Dis donc, t’aurais pu m’la présenter avant ta pote, elle m’a l’air d’être de super compagnie... » lui ai-je lancé, avant de réprimer un rictus moqueur face à l’expression d’Anaïs.

Une lampée d’eau bénite et voilà la rouquine, mon amie à priori, affublée d’une convulsion écœurée, transformant son expression d’habitude affable, en une petite tomate plissée de répulsion. Ça aurait valu un selfie. Ça aurait valu aussi une réplique bien placée, que j’ai ravalé au moment où un homme fendait la foule de fêtards hystériques pour accoster et agripper fermement le bras de la camée. Le reste s’est emballé en un clin d’œil. Je n’ai même pas eu le temps de savourer mon verre d’alcool.

Éclat de voix. Refus de la sauterie. Poing qui jaillit. Claque qui vole. Eh bah, c’est vite parti, me suis-je dit à ce moment-là, en assistant au théâtre sans bouger d’un centimètre. J’ai observé avec intérêt Anaïs s’élancer à la rescousse de sa copine, tel un petit chevalier inconscient du monstre en face, au point d’en oublier ma boisson. La suite a été des plus croustillante. Insultes d’abord. Démonstration de je ne sais quel tour d’abracadabra. Recul du monstre avec cri de douleur. Un point partout.

Match intéressant. J’ai jeté vite fait mon verre par-dessus la table, dans la noble idée de saisir mon téléphone pour conserver un souvenir de cet évènement, avant qu’Anaïs ne réalise le danger de la situation. J’ai soupiré. Est-ce que j’ai l’air d’une foutue héroïne sérieusement, ai-je râlé à part moi, comme la rouquine se précipitait maladroitement pour ramasser sa copine, en criant de détresse.

« OK, OK… J’espère que t’as un plan B parce que j’suis pas sûre que ton petit tour l’ait calmé. » Je me suis avancée vers la camée et l’affolée, sans beaucoup d’enthousiasme ni de bonne volonté.

Plus loin, la foule s’est condensée. Par-dessus le vacarme ambiance et les vociférations des basses, la rumeur a enflé autour des gémissements de douleur du vampire indélicat. Ça commençait à sentir la merde. Je me suis dépêchée de rejoindre Anaïs qui essayait de soulever un poids mort, tandis que les silhouettes s’accumulaient non loin de nous pour assister aux prémices d’une rixe punitive.

« Grouillons alors, ça pue là, » ai-je confirmé en venant aider Anaïs. « On peut la soulever sans qu’elle nous en mette une au moins ? Elle a l’air allumée ta pote, note que c’est pas déplaisant mais bon... »

Choc. Je n’ai pas eu l’opportunité d’approfondir ma vanne, que l’équivalent d’un parpaing m’a heurté violemment à l’épaule, m’envoyant me vautrer contre la table aux boissons. J’ai perdu l’équilibre. La table a chancelé elle aussi, basculant en avant et entraînant les verres, moi et mon cul par terre. Une douche froide de substances diverses m’est retombée sur le haut du corps, imbibant mon débardeur d’une nouvelle couche liquide franchement malvenue. Les verres ont dégringolé autour de moi dans un bruit de casseroles en plastiques, tandis que la voix du mort-vivant en rogne résonnait à côté.

« Vous les deux salopes, je vais vous faire la peau... » l’ai-je entendu gronder non loin de moi.

J’ai fulminé. Non pas à cause de la douleur, que je ne ressentais pas, ou à cause de la brutalité envers mes amies, ou d’une éventuelle cause féministe, non. J’ai simplement saturé. De tout. Du trop plein de viandes humaines. Du trop plein de contacts. Du trop plein d’humiliations et de foutues douches.

« Si c’est pas... » J’ai marmonné sans m’en rendre compte. Je me suis relevée lentement, tandis que d’autres verres cascadaient autour de moi, en rajoutant de nouvelles odeurs à mon état répugnant.

Les lumières ont illuminé le type par flash. Une haute silhouette se découpant au-dessus d’Anaïs et d’Heidi, sans que je parvienne à distinguer s’il les agrippait par les vêtements ou les cheveux. J’avais de la vodka qui me dégoulinait dans les cheveux et sur le front. J’entendais des fêtards dans la foule scander des encouragements à la brutalité, au son de « Bute-les ! Vide-les ! Nique-les ».

J’ai senti les braises se réveiller au fond de moi. Sans doute n’attendaient-elles qu’une excuse pour déclencher le brasier. Qu’importe. Ça allait déborder. C’était prévisible.
Le vampire m’a totalement ignoré. Je me suis avancée vers lui, marchant comme à travers un rêve, ou une fureur soudaine faisait palpiter mes tempes et rendait la réalité floue, incertaine. Tout était sourd. Tout était lointain, comme si mes oreilles étaient imbibées d’une couche de boue épaisse.

« … ce bon vieux... » À un mètre de moi, le mort-vivant a tourné la tête en m’entendant marmonner. J’ai lu le dédain s’afficher sur ses traits durs et furieux. Ça n’a pas aidé à me calmer.

Des élancements m’ont subitement traversé le bras droit. Comme des câbles remuant sous la peau, et qui, en se tortillant, s’étiraient le long de mes os, se solidifiaient, et prenaient possession de mes phalanges. J’ai senti des aiguilles se planter à l’intérieur de mes doigts. C’est parti comme c’est jamais parti putain. La fête. La Fièvre. Le vampire a sans doute vu ma main droite s’élancer vers lui, mais il n’en a tenu aucun compte, confiant, dédaigneux, et se contentant de se déplacer légèrement pour dévier ce qui lui apparaissait comme une claque molle. Ce qui n’en était pas une. Pas du tout.

Ma main a ricoché contre son épaule. Le tissu de sa veste a crissé, déchiré par la chitine qui couvrait désormais cette main et tout mon bras transformé. Une matière lisse, dure et insectoïde, terminée par des pointes effilées comme des serres. J’ai senti celles-ci entrer en contact avec la chair de son cou, puis s’enfoncer sans effort dans cet endroit palpitant, mou, et terriblement froid. Exaltation. La violence au creux de la paume. Mes doigts se sont fichés là, saisissant l’homme par l’intérieur de sa gorge, et mes serres de chitine ont enserrés la viande filandreuse, sa trachée, son larynx gargouillant.

« … gros sac de Billy Boy, » ai-je marmonné, complètement transportée par cet instinct de violence et un état de fureur très avancée.

Dans l’instant de flottement qui a suivi, un jet carmin a failli dans l’air. Une expression de surprise a déformé les traits du vampire, alors que des ruisseaux de sang s’écoulaient sur son torse depuis son cou ouvert, et sur ma main monstrueuse enfoncée de moitié dans sa chair froide. Le temps a ralenti encore. Les cris de soutien se sont brutalement taris, remplacés par des « Ooh », des « Aaah » et des « Ooof » de stupeur. Les bras du mort bientôt mort ont battu l’air, comme pour vainement saisir la main qui lui éventrait le cou, un réflexe désespéré de bête cisaillée par la souffrance et la panique.

J’ai refermé la main, et j’ai tiré.

Tout a suivi. J’ai entendu le crissement flasque de la chair molle qui se distend et cède, puis le subtil raclement osseux des vertèbres, comme mes serres d’insectes lui emportaient la moitié du cou. Il est resté debout un moment. Un trou béait désormais à la place de sa gorge, dévoilant l’éclat d’ivoire de ses cervicales au milieu d’un amas de chair dégoulinante, qui émettait de petits crachats de liquide d’un noir de bitume. Moi je suis restée là. Le bras chitineux refermé autour de cette main, laquelle tenait un tas répugnant de viande froide et de fluides ; je suis restée un moment à fixer ce spectacle.

Alors, le vampire a fini par chuter. Il est tombé à genoux devant mes camarades, en faisant entendre un concert de gargouillis humides et franchement dégueulasses. J’ai senti une violente et puissante vague de satisfaction me gagner, un mélange d’hystérie et de rage ; presque une jouissance.

J’ai jeté un coup d’œil à ma main, et lâché le tas informe de viande qui était resté dans mon poing encore serré. J’sais pas encore comment qualifier ce que j’ressens, mais putain que ça fait un bien fou. Je n’avais jamais éprouvé cela. J’ai levé mon bras pour observer avec une fascination détachée ce bel et mortel instrument de brutalité ; un membre à demi humain, recouvert d’une carapace de chitine brillante, dessous laquelle se dessinaient des mécanismes musculeux durs comme l’acier.

Au-delà de mon exaltation éphémère, un cercle de fêtards frénétiques s’était assemblé, et observait la scène. Les lueurs des spots dévoilaient tantôt des expressions stupéfaites, tantôt fermées et peu amicales. J’ai secoué mon bras monstrueux pour évacuer les restes de fluides et fibres sanguinolents, qui se sont écrasés à mes pieds en dessinant des rhizomes collants. J’ai jeté un coup d’œil vers Anaïs et sa copine, en haussant les épaules d’un air d’excuse. On dira que c’est lui qui a commencé...

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Anonymous
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Sam 8 Oct - 18:16 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


«
A
voue, tu regrettes.
»

Un ricanement moqueur s’élève au-dessus de la masse sonore oppressante et incessante ; au-dessus de l’acouphène provoqué par la trempe que tu viens de recevoir, même. C’est ta voix que tu entends, claire comme si tu chuchotais à ta propre oreille.

« C’était une mauvaise idée, tu le savais dès le début. »

Et tu n’as pas tort. Ça te peine de le reconnaître mais cette soirée est un véritable calvaire, et tout cela était aisément prévisible. Les choses ont presque commencé à dégénérer sous tes yeux avant même que tu ne partes de chez toi, mais tu as refusé de voir l’évidence qui clignotait devant toi comme une enseigne de casino en pleine nuit au milieu du désert. Au-delà du refus d’entendre raison, tu as même plongé la tête la première vers les emmerdes comme si t’en rajouter de nouvelles allait faire disparaître les anciennes.

« Et maintenant tu réalises qu’en plus d’être dans la merde, t’es vexée parce que t’aurais pu éviter tout ça. »

Tu ne prêtes même pas attention à la voix affolée de la rouquine que semble – pour une fois à raison – s’inquiéter pour toi. Comme une ancre lointaine à la réalité, tu entends ton nom. A travers le voile sombre qui s’est abattu sur ta vision, tu observes la scène qui se déroule sous tes yeux ; tu as essayé de te relever par toi-même, mais la gifle a bien amoché ton oreille interne et ton équilibre.
Ça aussi, c’est vexant. Ce sentiment d’impuissance, toujours le même quoi qu’il arrive. Est-ce qu’il y aura toujours quelque chose pour te rappeler, quoi que tu fasses ou que tu deviennes, que tu ne seras jamais en mesure de t’en sortir seule.

Tu ne saisis pas bien ce qui se passe autour de toi, le temps ne semble se dilater que pour te montrer plus longtemps que tu n’es pas en mesure de comprendre. Un cri enragé se détachant à peine du boum-boum indifférent, les lumières crues et aveuglantes brûlant le fond de ta rétine comme d’autres acouphènes visuels, petit à petit chaque chose se remet à sa place et arrête de tourner pour dessiner le paysage sinistre dans lequel tu as délibérément décidé de plonger. Pourquoi déjà ? Pour oublier. Oublier quoi ?

« Bien joué. »

Un nouveau ricanement intérieur conclut ce dialogue qui n’en est pas un, et le retour de ta lucidité te frappe comme une nouvelle gifle. Autour de toi, tu vois tes deux camarades de soirée s’enquérir de ton état. Tu leur adresses un signe de main nonchalant pour leur signifier de laisser tomber tandis que ton autre main masse ta joue endolorie pendant que tu tentes de réprimer ta grimace de douleur. Tu aimerais avoir le temps de leur dire que ça va, qu’il faut juste qu’elles te laissent un peu de temps de te remettre du choc ; mais ce temps justement, tu ne l’as pas.
Vacarme à nouveau, et la brunette sort de ton champ de vision malgré elle. Une seconde plus tard, ton genou quitte le sol poisseux avec imprimé sur ton articulation un cercle carmin ; malheureusement ce n’est pas de ton propre fait. Le vampire furieux a saisi ta crinière d’or à l’éclat sérieusement terni pour te faire relever la tête vers lui, et tu siffles à travers les crocs que tu n’as pas tout en tachant d’enfoncer vainement tes ongles dans la peau cadavérique de son poignet. A ce moment, c’est une colère pure et finement distillée qui seule t’anime. L’instant d’après, lorsque tu réalises qu’il réplique ton sort de la même manière sur ton amie la plus précieuse, tout se trouble. La colère reste, mais celle fois elle te pince le cœur en plus de te galvaniser. Elle se teinte d’une culpabilité affreuse, d’autant plus douloureuse que tu demeures complètement sans défense.  

Dans ta fuite en avant, tu t’es heurtée à un mur. Enfin. Un bloc de briques froid et sans pitié. A ce moment précis, tu as compris que tu ne pouvais plus rien faire pour éviter l’inévitable. Le monstre qui refusait de lâcher tes cheveux allait pouvoir faire ce qu’il voulait de toi, et rien de ce que tu aurais pu dire ou faire ne pouvait aller contre cela. Ton cœur s’est glacé, rempli d’un torrent d’effroi silencieux. Tu as au moins voulu regarder ton destin dans les yeux, par fierté, pour réussir à te convaincre toi-même que ce qui allait arriver ne serait que le fruit d’une tragique inégalité. Dans les orbes vénéneux de l’immortel, tu lis un dessein pire que la mort.
Et fière jusqu’au bout, tu refuses la prière, tu refuses d’accorder à Dieu le bénéfice d’une grâce miraculeuse. Comme tu fais bien, puisque le bras qui te sauve n’est pas le sien mais plutôt celui d’un de ses plus fidèles ennemis.
Un sang nouveau gicle sur tes vêtements alors que tu retrouves la liberté. Béate, tu regardes la vie quitter une deuxième fois le corps de l’agresseur. Le tableau est horrifiant, gore au possible. Tu grimaces, nécessairement, mais la colère revient au galop, naturel chassé bien malgré toi. Une seconde, tu te tiens immobile devant le corps inanimé en équilibre sur ses genoux comme tentant de s’excuser. C’est trop tard, et bien que tu saches que son âme brûle désormais dans les pitons embrasés d’un enfer quelconque, tu veux être l’instrument de ta propre vengeance. A nouveau debout, tu t’approches d’un pas, le regard sombre rivé dans ces yeux révulsés et figés dans la stupeur.
La semelle de ta bottine vient imprimer sa trace sur le visage de vampire égorgé avec une violence rare. Sa tête bascule vers l’arrière et le reste de son corps s’en voit attiré de même. Tu refusais de le laisser reposer dans une position si flatteuse ; pardon refusé. Dernière désacralisation de son corps maudit : tu craches sur le cadavre, une salive mêlée de sang, dont le tien. Il sera temps de te soucier de morale plus tard, tout comme de la nature des griffes qui t’ont sauvé la vie.

Tu te retournes finalement. Sur ton visage, tu tentes de cacher l’angoisse et la terreur extrêmes qui envahissent le moindre de tes nerfs. D’un revers de main, tu essuies les quelques perles qui avaient pointé au coin de tes yeux, laissant par la même occasion deux traces cramoisies sur le haut de tes joues. Tu adresses un regard indéchiffrable à Anaïs et sa comparse, la bouche figée dans un rictus terriblement vexé.

- J’me casse, j’en ai eu assez, j’ai compris. Je rentre chez moi

Elle est loin, bien loin la fêtarde aspirante et sa fausse désinvolture. Tu n’es plus qu’un bouillon sanglant de mauvais sentiments, et surtout tu es en train de te frayer un chemin comme une furie vers la sortie. Tu te fiches que l’on te suive ou non, tu veux juste échapper le plus vite possible à ce nouveau sentiment d’oppression qui t’a saisie à la gorge. Tu veux te laver, enlever ces fringues stupides et ne plus jamais les remettre. Tu veux enfiler un col roulé et te réfugier chez ta marraine pour qu’elle te dise que tout va bien se passer et que tu ne risques plus rien.

Bientôt, l’air frais de la nuit rencontre ta peau beaucoup trop exposée, et tu frissonnes. Les murs de béton brut empêchent les plus hautes fréquences de te parvenir, mais les sirènes de police à quelques centaines de mètres de là les remplacent par-dessus le ronflement odieux des basses. Tu t’appuies contre un mur une seconde, mais en le sentant vibrer, tu le maudis et décides d’aller te calmer un peu plus loin, assises et adossée contre une cabine de chantier apparemment dévalisée un peu plus tôt dans la soirée.
La redescente est dure, et tu réprimes quelques tremblements. Tu fais bien de partir tôt, de toutes façons, demain tu dois prendre la voiture pour traverser le pays.


CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
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A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Lun 17 Oct - 13:10 (#)



Fais chier.

C’est toujours la même chose. Ça finit toujours pareil. Au début je pense que c’est une bonne idée, que ça ne va pas me faire de mal. Puis plus on avance et plus cette conviction s’effrite pour finalement voler en éclat d’une manière ou d’une autre. Il y a toujours quelque chose. A croire que ce n’est tout simplement pas possible pour moi d’avoir une vie normale. Sur une ville de dizaines de milliers d’habitants et de dizaines de kilomètres carrés, pourquoi je tombe toujours sur l’endroit merdique ou sur la personne qu’il ne fallait pas ? Quelles sont les chances ? Est-ce que c’est trop demander de mettre un pied dehors sans avoir à se demander si c’est pas le pire endroit de la ville ? Je voulais simplement me vider l’esprit, danser, peut-être même m’assommer à coup de vodka, au point où j’en étais.

Au lieu de ça, je me retrouve à la merci d’un vampire sous les hurlements d’une foule friande du spectacle. Au lieu de ça, ma magie rugit et je sais que je vais à nouveau devoir faire ce que je me refusais absolument. Comment en est-on arrivé là exactement ? Le corps couvert de sang, une poigne de fer me tirant les cheveux alors qu’il a plaqué mon corps au sol. Je devine plus que je ne vois Heidi à mes côtés et l’ironie de la scène ne m’échappe nullement. C’est encore la même chose, pas vrai ? Le dilemme de merde entre ma morale et la vie d’un être cher. Est-ce que je suis destinée à toujours faire ce genre de choix ? Comme si c’en était vraiment un, de choix, de toute façon.

Le sang bat si violemment contre mes tempes que j’entends à peine la musique. Tout ce que je ressens, c’est la douleur de mon corps violemment projeté au sol et le sang qui remonte jusque dans la main qui n’est pas agrippée vainement au poignet de l’enfoiré qui m’arrache les cheveux. Je vais le buter. Je vais le buter et foutre le camp d’ici, j’ai eu ma dose. Je me sens libérée de la sensation visqueuse qui me recouvrait, mais ma main n’a pas le temps de remplir son office macabre qu’une gerbe de sang et de chair me pleut sur la poitrine et le visage. Hébétée, je lève les yeux pour apercevoir un bras. Un bras qui n’a aucun sens, encore moins en voyant la personne à laquelle il est rattaché.

la poigne sur ma tête se relâche et je m’extirpe en vitesse, donnant un coup de pied en passant, m’écartant le plus possible de tout ça. Je fixe le corps sans vie du vampire dont la gorge n’est plus qu’un amas de chair sanguinolente et d’os à nu, avant de fixer Alex et son bras. Elle se contente de hausser les épaules et je ne parviens pas à comprendre ce que j’ai sous les yeux. C’est quoi exactement ? une armure ? On dirait une carapace. Qu’est-ce que c’est que ce bordel encore ?  Je passe une main sur mon visage en retirant le sang qui le macule à nouveau, le reste ayant soigneusement coulé près du vampire. Et je vois Heidi foutre le camp, comme ça. Assise par terre à côté d’un cadavre à la gorge arrachée et d’une foule spectatrice, me voilà en train de me demander pour la énième fois ce que je fous.

Je finis par me faire violence et me mettre sur mes jambes, tentant d’ignorer la douleur dans mon dos et ma nuque. La musique est redevenue assourdissante à mes oreilles et voir toute cette situation partir en vrille une fois de plus me fous la haine. Et voir Heidi s’en foutre complètement empire les choses. Ça bout depuis trop longtemps. Soudainement, j’en ai marre d’être la gentille Anaïs dont on se fout complètement. Un coup de pied envoie valser une table et son contenu sur le sol sans calmer le souffle saccadé qui m’échappe.

- J’en ai marre de ces conneries.

J’avise Alex un instant, son bras bizarre et son air à peine perturbé par tout ça. Je ne la reconnais même plus, en fait. Je me voilais peut-être la face, mais quand a-t-elle changé au point que je ne sais même plus qui elle est vraiment ? Le monde a l’air décidé à foutre toute mes perceptions en l’air et mes nerfs à vif. Et voilà une autre table qui valse. Ça fait du bien. Un peu. Pas assez. J’attrape une bouteille à portée sans même regarder le contenu qui m’indiffère complètement et prend la direction de la sortie, soufflant un « Merci » à Alex sans trop savoir quoi dire de plus. C’est tellement le bordel.

L’air frais a au moins l’avantage de me faire ressentir autre chose que l’énervement qui a enflé tout au long des dernières minutes, heures, jours, mois. La boisson me brûle la gorge et ça a un goût horrible, mais ça me réchauffe de l’intérieur, comme si j’avais pris un carburant pour attiser un peu plus les flammes de la colère. J’avise Heidi, immobile et m’approche d’elle. D’un mouvement sec, je tends la main et le sang qui la recouvre y forme une bulle qui vole et explose contre le pare-brise de la voiture la plus proche. Ça apprendra à ces guignols d’organiser des fêtes de ce genre. Au moins les flics dont les sirènes hurlent non loin auront une bonne raison de les arrêter avec la trainée de sang sur l’avant de leur voiture.

- Je suis désolée. Pour ta mère.

Est-ce que je le suis vraiment ? Du peu qu’elle m’en a dit, c’était un horrible être humain, mais la voir dans cet état… Mon regard tombe sur la bouteille dont j’ai déjà siphonné quelques gorgées sans même y avoir pensé. Elle vole aussi, s’écrasant quelques mètres plus loin sur le toit d’une autre voiture. Je n’en ai vraiment plus rien à foutre. Je m’adosse à côté d’elle contre la cabane de chantier et lève le nez vers le ciel sombre en soupirant. Rien que penser à ça fait redescendre aussitôt toute la colère et je me sens soudainement vide, fatiguée, à bout. Je devrais être dans mon lit, pas au milieu de nulle part avec de la vodka qui commence à infiltrer mon système et une envie passagère de détruire une des voitures des connard ayant eu l’idée de cette soirée. Peut-être que je devrais appeler Zach et lui demander s’il lui reste un joint dans son tiroir. Au point où j’en suis…
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

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Sam 22 Oct - 22:36 (#)



J'ai eu soudainement chaud et froid. Et le cœur à cent à l’heure. Frissons et adrénaline.
Un flot de sensations escaladait violemment mon échine toutes les secondes. Comme des échos saccadés, indiscernables les uns des autres, vrombissant, pulsant, telles des nuées de parasites sur un écran mort. La rumeur de la foule s’était réduite à un lointain bruit blanc. Flashs de couleurs. Flashs de sons. Des formes sans substance. Des sentiments subliminaux. Des cris venus du fond de mon âme pour toute émission de télévision, et sur l’écran de mon esprit, je ne discernais rien d’autre que les couleurs saturées de la violence. Et des bouts d’anatomie chitineuse. Des mots hachés avec avidité dans des mandibules affamées.

Tranche. Mord. Sang. Noir. Colère. Violence. Déchaîne-toi. Fais-toi plaisir. C’est la fête. Et merde, j’empire tous les jours, ai-je réalisé en scrutant ma main sanguinolente, ces serres, cette chitine brillante, mortelle, au bout de mon bras. Fascinante et morbide. La jointure entre ma chair humaine et la nouvelle, couleur du caramel translucide, formait une dépression de veines battantes, pleines d’un liquide noirâtre qui les faisaient enfler tel un réseaux de canaux gorgés de mort. Hypnotique même. J’ai remué cette main difforme et ses crochets en guise de doigts. Des ruisselets de sang en sont tombés en cascade, et j’en ai ressenti toute la puissance maîtrisée, la parfaite machine à déchirer et à démembrer la chair.

J’ai dérivé durant un court instant. Puis le monde s’est remis en marche, m’assaillant soudainement avec tout son bruit, ses odeurs de sueur et d’alcool, cette écœurante surabondance de sang et de viande.

Mon bras est retombé contre ma hanche, mollement. Autour de nous, l’hystérie de la foule a disparu en tombant dans un mutisme stupéfait, alors que les curieux s’accumulaient, comme une rangée de zombies rougeâtres sur fond de musique techno. J’ai inspiré. J’avais presque oublié de le faire. L’étincelle de violence en moi a menacé de s’animer à nouveau, comme le désir de recommencer continuait de me hanter. Encore plus de brutalité, encore plus de massacre. Des soubresauts ont fait tressauter ma main monstrueuse. J’ai remis ça à plus tard. Le boucan qu’a fait Anaïs en renversant les tables m’a extirpé de ma torpeur contemplative, et j’ai tourné la tête, hagarde comme après un shoot de stupéfiants.

Je n’ai rencontré que des traits hostiles. Des yeux morts et furieux qui nous scrutaient, nous mesuraient, comme le ferait un prédateur à l’affût. Quelqu’un veut tenter sa chance ? Mais j’ai ravalé ces mots, tandis que Anaïs me remerciait d’un murmure contrit, manifestement embarrassé. Étonnant. On est encore amies, maintenant ?

« Eh, de rien... » ai-je marmonné en avisant la foule hostile d’un air placide.

Quelques faces livides m’ont fixé. Personne n’a rien dit. Personne n’a fait de mouvements brusques. J’ai eu l’impression d’être au milieu d’une impasse mexicaine, où nul ne savait vraiment de quoi l’adversaire serait capable. Ça me convenait. J’ai reculé d’un pas. Puis deux, puis trois. Au bout de quelques mètres, je me suis tournée vers l’endroit où Anaïs s’éloignait, encore incertaine quant à l’issue de cette situation tendue. La musique couvrait la menace tacite. J’ai senti des regards épier mes mouvements dans mon dos, alors que ma main s’était remise à me démanger, à tressauter comme une mâchoire vorace impatiente de repartir à l’assaut.

Note pour plus tard, pratique le machin partiel, me suis-je intimée en avançant parmi le reste des fêtards, dont les rangs s’écartaient à mon arrivée. Telle une Moïse écartant les flots de la merde rouge, j’ai traversé la salle, collectant avec satisfaction là des airs effrayés, ici des regards furieux, ou des œillades dégoûtées. C’était grisant à souhait. Une seconde injection d’adrénaline. La certitude d’être celle imposant le rythme, forçant la crainte, et non l’éternelle victime telle l’ancienne Alexandra, la minable qui était morte depuis des mois. C’est fini la putain de victimisation. J’ai suivi la trajectoire d’Anaïs, sans accorder un seul regard autour de moi, seulement un rictus mi-satisfait, mi-repu, et à cent pour cent prête à recommencer.

Puis le silence est revenu. Lourd comme un socle de tombe. La foule a retint son souffle et, à la lisière de mon champ de vision, j’ai capté des mouvements de recul et des figures soudainement prises de panique. Je me suis retournée. Juste au bon moment. Un homme venait de fendre la foule, laquelle s’était écartée dans un brusque mouvement d’affolement pour lui livrer passage, lui et le revolver qu’il tenait à la main. Pointé dans ma direction. OK, ça s’est pas du jeu. Durant une fraction de seconde, la colère m’a de nouveau submergé, aussitôt suivi par un bref instant d’effroi, et la certitude que j’allais y passer pour de bon cette fois-ci.

Puis tout est allé très vite. Des réflexes inattendus m’ont électrisé de la tête aux pieds. Un tressaillement de force. Réaction instantanée.

Mon bras monstrueux a attrapé une femme qui tâchait de s’écarter de la trajectoire de tir, et l’a repoussé derrière moi, l’envoyant balader dans le couloir qui s’était créé face au tireur. L’arme a aboyé à cet instant. L’épaule de l’inconnue a éclaté dans un feu d’artifice de sang, d’esquilles d’os et de hurlement de douleur, avant qu’elle ne s’effondre au sol, sous les cris affolés de la foule ; moi je n’ai pas attendu d’examiner les réactions. J’ai sauté par-dessus d’autres tables d’alcool, tandis qu’un second tir faisait éclater le béton d’un pilier près du mur à côté de moi. La sortie n’était pas loin. Je me suis précipitée par là, contournant l’autre pilier de ciment qui marquait l’entrée, lequel reçu aussitôt deux autres balles, sous un nuage de débris qui me giflèrent les joues.

J’ai sprinté dans l’herbe dehors. Des vociférations furieuses et des hurlements de terreur ont résonné à ma suite, à l’intérieur du bâtiment, à peine recouverts par les pulsations de la musique. Dehors, il faisait frais. Le vent froid m’a douché le visage, lequel m’a paru en feu sous les couches successives d’hémoglobine et d’alcools accumulées. Je n’ai pas attendu que le tireur sorte. J’ai couru jusqu’aux rangées de voitures les plus proches sans me retourner, les pensées réduites à un fil de concentration aiguë comme une lame de rasoir. Dans ma course, mon bras a de lui-même accroché le métal de la carlingue, le déformant profondément, et je me suis propulsée sur le capot, en dérapant sur les fesses pour atterrir de l’autre côté, entre les deux voitures.

Juste à temps. Trois détonations ont suivi. L’une a sifflé contre le toit de cette même voiture, en créant une gerbe d’étincelles, et deux autres ont crevé les vitres jusqu’au dessus de moi. J’ai rampé vite fait jusqu’à la voiture suivante, en me collant derrière les pneus, le cerveau à cent à l’heure pour trouver une solution, et la colère au maximum. La rage même. Le besoin de violence est devenu un déferlement volcanique, que je me sentais désormais incapable de contenir plus longtemps. À quelques mètres de là, j’ai entendu des voix s’élever ; des invectives furieuses, des appels au massacre. J’ai créé des jaloux j’imagine.

J’ai cherché une solution. J’ai vraiment cherché une solution. Pour une fois, j’ai eu une pensée pour Anaïs et sa copine, sans doute à plat ventre dans un coin, à attendre la fin du déluge. Mais tout cela était minime. Je sentais croître au fond de moi cette soif de confrontation, cette chose qui cherchait à se débarrasser de ses chaînes, et à donner libre cours à son appétit vorace. À tester les limites du cadeau paternel.
À renommer la Fièvre, en Hémorragie.

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Anonymous
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Ven 28 Oct - 15:16 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


C
hacun leur tour ce soir, tes vieux désirs refont surface et viennent te taper le dos comme un ami que l’on aurait pas vu depuis trop longtemps. L’alcool a été le premier à s’échapper de l’abyme s’étant ouvert sous tes pieds : serpent sournois, il t’a délicatement prise par la main en te promettant d’occulter l’évidence et de t’accorder un répit que tu aurais juré bien mérité. La drogue a été la seconde à passer son bras autour de tes épaules. Avec une tendresse autoritaire, elle t’a fait regarder ailleurs en t’assurant que ce que tu ne peux pas voir ne peux pas te faire de mal.
Evidemment, le couple ne parle jamais de la redescente, et c’est à chaque fois la même chose : ils pointent les étoiles du doigt, te lancent à leur poursuite et t’abandonnent à ta chute inéluctable comme une goutte de pluie seule dans le ciel d’automne, condamnée à subir la gravité avant d’avoir pu atteindre les nuages. Et tout en bas t’attend un dernier camarade prénommé violence. Un nom parmi tous ceux qu’il se donne : chaos, destruction, tempête… L’ami toxique et sans visage qui te jurera que lui ne te tournera jamais le dos. Assise sur le sol poussiéreux, dégoulinant d’un sang se faisant un goudron de plus en plus lourd et poisseux, tu verrais presque cette main se tendre vers toi. Tu entendrais presque cette voix projetée en un torrent de rocaille t’inviter à te déchaîner. Défoncer des voitures à grands coups de batte et te délecter du son de la taule froissée et du verre brisé, incendier des poubelles et admirer le ballet furieux des flammes tentant elles aussi d’échapper à la gravité. Oh, comme il te manque, le spectacle des ombres dansantes se détachant d’un coin de ruelle oublié de tous.

C’est cependant une autre main qui finit par apparaitre devant toi. Tu lèves les yeux : ce n’est pas ta vieille amie violence, ce n’est qu’Anaïs. Malheureusement ? Tu n’en sais rien, tu sais juste que la voir à cet instant précis ne te fait pas plaisir comme ça te fait plaisir de la voir en toutes autres circonstances. Elle ne mérite pas de te voir comme ça, et de ton point de vue, la regarder depuis le fond de ton trou ne fait que raviver la colère malsaine qui t’anime.
Franchement, t’es en rogne. Sacrément en rogne. Tellement en rogne que tu ne fais même pas cas du fait que la rouquine utilise sa magie sur toi. En temps normal, tu aurais retenu un élan d’insurrection, celui qui t’aurait poussée à dire que tu aurais très bien pu te débrouiller toute seule. Ta fierté a été heurtée avec tant de violence ce soir qu’elle n’a pas daigné réagir cette fois-ci, et vis-à-vis de votre relation, c’est sans doute une bonne chose. Voilà encore une autre raison pour laquelle tu n’es pas heureuse de la voir : tu sais que dans cet état, tu pourrais dire des choses mauvaises. Méchantes. Cruelles. Tu n’as pas envie qu’elle les entende, et tu n’as pas plus envie de les refreiner, et par la même occasion te frustrer encore plus.
Décidément, ouais, ça te fait chier qu’elle soit là. Tu aurais de loin préféré la voir demain après avoir décuvé ton vin et laissé retomber la boule de nerfs qui tend ton dos comme une arbalète.
Avec un très léger intérêt, tu suis du regard le vol de la bouteille encore à moitié pleine et l’admires s’écraser au sol. Tu en ressens une légère satisfaction, une étincelle qui ne saurait te suffire et qui appelle un brasier autrement plus important. Tu finis par répondre après quelques secondes.

- Le sois pas, c’était une salope. Je la détestais de tout ce que j’ai.

La fin de ta phrase est couverte par les échos assourdissants d’une paire de coups de feu. Bien plus forts que la musique à laquelle tu as fini par t’habituer, tes oreilles imprégnées par l’essence des immortels sifflent méchamment, et tu grimaces. Les vampires à l’intérieur, eux, doivent en souffrir encore plus ; à moins que leur nature ne leur permette de résister à cette douleur-là. Enfin, cette réflexion est très vite interrompue par l’apparition fugace de l’amie de ton amie, visiblement pressée de trouver refuge derrière la voiture déjà repeinte par la rouquine. Pas vraiment le temps de tracer le lien logique entre les deux événements, celui-ci apparaît très rapidement de lui-même dans l’encadrement grisâtre de ce qui devrait un jour être une porte, l’arme brandie bien en évidence au bout de son bras. Il fait trop sombre et tu es trop loin – et peut-être trop éméchée – pour distinguer le flingue qu’il agite comme un dangereux malade, ni même son visage. Tout ce que tu sais, c’est que pour l’instant il ne vous a pas vues, toi ou ton acolyte de circonstances ; d’ailleurs, qu’est-ce qui lui a pris de venir ici ?
Ça devait arriver, mais tu n’y étais pourtant pas prête : trois nouveaux coups de feu, trois flashs de lumière intense, et surtout trois déflagrations qui vrillent tes tympans. La douleur est abominable, et tes mains portées à tes oreilles ne l’atténuent pas. Plus aucun bruit autour de toi, seulement le sifflement assourdissant des acouphènes, et un soudain vertige qui te fait tourner la tête et donne envie de cracher ta bile alcoolisée sur le sol. Et cette soudaine douleur au milieu de ton front qui te donne envie de prendre une balle ailleurs juste pour en être distraite… Le seul problème est que ça risque d’arriver si tu ne réagis pas rapidement. Seulement vous mettre à l’abri, toi et cette amie que tu ne supporterais pas de perdre malgré tout le mal que tu éprouves à la voir en cet instant précis.
Tu grimaces encore plus fort, mais dans un effort démesuré insufflé par un esprit de conservation que tu pensais avoir perdu depuis longtemps, tu parviens à te remettre sur tes pieds en t’appuyant difficilement sur la cloison en PVC de la cabane de chantier. Toujours incapable d’entendre le moindre son, tu chuchotes sans t’entendre à Anaïs en espérant qu’elle, au moins, te comprenne.

- Allez, vite, cache toi derrière.. !

Sans trop te redresser, tes mains se sont posées sur ses épaules et la poussent derrière le coin du mur où tu la suis immédiatement. Par un réflexe inconscient, une fois plaquée contre la paroi de plastique, tu te mets à cacher le corps de ton amie avec le tien. Epaules rejetées en arrière et cherchant à te grandir dans cette posture défiante, tes doigts se crispent de ne rien pouvoir faire tant que le magasin du tireur n’est pas vide.
En un sens, c’est une bonne chose pour votre amitié : toute ta colère enfouie s’est redirigée sur un seul bouc émissaire, et plus aucun mauvais sentiment n’est dirigé contre l’étudiante que tu abrites derrière ton dos. De cette position, vous avez en visuel la dernière membre du trio, accroupie entre deux rangées de bagnoles que tu rêvais d’éclater il y a à peine quelques secondes.

Tu pourrais tenter de persuader le tireur de vous lâcher grâce à ta Présence balbutiante, mais l’idée est si mauvaise que même dans cet état tu es capable de t’en rendre compte. Une nouvelle fois ce soir, tu te sens impuissante, incapable de protéger ta propre vie ou celle des personnes auxquelles tu tiens. Une nouvelle fois, c’est un goût amer dégueulasse dans ta bouche.

CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Lun 31 Oct - 22:03 (#)



Le son des basses n’est plus qu’un lointain bourdonnement. L’air frais du dehors rampe sur mes bras nus et je les serre contre ma poitrine. Le changement de température entre l’intérieur étouffant et le dehors plus frais me fait frissonner. Il a au moins le mérite de calmer ce qui enflait jusque-là. À moins que ce ne soit le regard qu’Heidi lève vers moi. Il y a quelque chose que je ne parviens pas à identifier, mais je sais qu’il n’y a pas la chaleur qui les anime d’ordinaire quand je suis avec elle. Cette soirée est une catastrophe à tant de niveau que cela ne m’étonne même pas vraiment. À moins que l’alcool qui circule dans mon corps ne fasse effet. Je n’ai pas si froid que ça, après tout. Je me sens idiote maintenant, encore plus lorsque la voix d’Heidi résonne doucement à mes côtés. Et ça me tire un sourire et un souffle. Au moins elle est toujours la même, je crois. Je soupire.

- Alors pourquoi tu sembles souffrir, Heidi ?

Je l’observe, triste pour elle malgré tout. Malgré out ce que je reproche à mes parents, s’ils venaient à mourir demain… la simple idée me serre le cœur. Je devrais les appeler, juste pour être sûr que tout va bien pour eux.
La détonation assourdissante qui suit me fait sursauter et je baisse la tête par réflexe. Mon sang ne fait qu’un tour et je revois aussitôt les images du Mall se plaquer sur le devant de mon esprit. Pas encore… Je sens mes jambes trembler. Courir, je dois courir. Et ça continue. Les coups de feu s’enchaînent, résonnent et j’aperçois avec horreur Alex se cacher en vitesse derrière les voitures alors qu’un type apparaît. Les coups de feu reprennent, me vrillent les tympans. Je claque mes mains sur mes oreilles, espérant échapper à l’agression sonore. Mes jambes tremblent et je voudrais être loin d’ici.

C’est la voix d’Heidi qui me sort de ma transe terrifiée. Ses mains se posent sur mes épaules et je la suis finalement sans discuter. Cachée derrière la paroi de plastique, je reprends mon souffle que j’avais instinctivement retenu. Heidi m’a caché derrière elle, mais l’idée qu’elle se fasse tirer dessus elle aussi… Et Alex…

- Merde… merde, pourquoi ça part toujours en sucette ?! Pourquoi y’a toujours un taré armé quelque part ?

Je me penche, apercevant Alexandra tapie derrière les voitures. Je veux pas qu’elle se prenne une balle, je veux qu’on rentre toutes chez nous indemne et entières. Mon regard passe d’Heidi à Alex, puis se fixe sur le tireur et j’inspire en tremblant. Si j’échoue, il va nous voir et nous tirer dessus. Si j’y arrive, je pourrais régler le souci sans blesser personne. Ma main tremble et je dois enfoncer les ongles dans ma paume pour le faire cesser. Ça va aller. Tu peux el faire. Tu l’as déjà fait. J’inspire à nouveau, essayant de me souvenir de la sensation.

- Heidi… reste là.

Le type est concentré sur Alex, ça me laisse une petite marge de manœuvre. Je me concentre et laisse la magie s’écouler lentement, effleurer les alentours. Je ressens le pouls d’Heidi à mes côtés, le mets de côté. Lorsque j’atteins l’homme, je me concentre sur une seule chose : le forcer à cesser de bouger. Manipuler le sang ne me permet pas de bloquer les muscles, en tout cas pas en l’état. Mais si je parviens à bloquer l’afflux sanguin, les muscles cesseront d’être alimenté et de bouger. Mais pour ça…

La dépense d’énergie va me coûter cher, mais elle en vaut la peine. Je me redresse et fixe le bras qui tient l’arme. Je finis par ressentir le déplacement constant du sang à l’intérieur, mais il me faut quelques instants pour avoir assez de concentration pour pouvoir y faire quelque chose. Ça n’a rien d’instantanée, mais ça ne devrait pas tarder. Alors je sors de ma cachette et me dirige vers lui. Il nous tourne presque le dos, donc il ne me remarque pas tout de suite et j’approche suffisamment pour faciliter mon emprise sur la circulation de son sang dans ses mains. Suffisamment pour être à peu près sûre qu’il ne va pas tirer. Faites qu’il ne puisse pas tirer.

- Hey ! Pas un pas de plus, ou je tire !

Merde… Meeeeerde. Il m’a vu. Je déglutis et fixe avec angoisse le bout du canon de son arme pointé vers moi. Il ne devrait pas pouvoir tirer. Je lève les mains pour bien montrer que je ne suis pas armé, mais mes yeux notent le tremblement de ses mains. Il a du mal à les garder stable. Bon signe.

- A genoux, connasse, sinon je tire.

Peut-il tirer ? Je dirai que non. Je prends une grande inspiration et réduit la distance qui nous sépare à grandes enjambées. Je peux voir son visage crispé, ses yeux écarquillés et fixés sur sa main. Parfait. Le tout est de se souvenir des consignes de Zach ? Je me rue sur le type et ma main droite empoigne le canon de l’arme pour qu’il cesse de le pointer sur moi. Mon autre main se colle à son poignet et je tire sèchement de l’autre côté. Avec Zach, c’était simple, il m’a fait faire ça plusieurs fois et je savais qu’il n’allait pas me tirer dessus. Mais là, un bref instant de panique, une erreur et je me retrouvais avec une belle logée dans la poitrine. A la place, j’ai le flingue entre les mains et pointé sur le type qui recule en se massant le poignet, me fixant d’un air à mi-chemin entre la haine et la panique.

- Tu vas pas tirer…

- On parie ?

Zach m’a montré comment tenir un flingue et faire croire que je savais parfaitement tirer avec. J’ai longuement protesté, mais je me suis rendue à l’évidence. S’il fallait un jour s’en servir, je n’aurais pas le droit à l’erreur et mieux valait bluffer efficacement que vraiment savoir tirer. Pointer une arme sur quelqu’un me file la gerbe, mais je serre les dents et mes deux mains soutiennent l’arme dirigé vers celui qui tirait sur mon amie quelques minutes plus tôt. Il semble hésiter, mais finit par reculer, encore et encore avant de filer vers l’intérieur du bâtiment.

Ce n’est qu’un fois qu’il est hors de vue que mes jambes me lâchent et que mes genoux heurtent el sol. Mes mains tremblent si violemment que je riss de tirer sans le vouloir. Je lâche l’arme qui glisse sur mes jambes jusqu’à toucher le sol. Pendant une brève, très brève seconde, j’ai vraiment cru que j’allais y passer. La bile me remonte dans la gorge et un haut-le cœur me prend. J’inspire violemment, tente de juguler tout ce qui me passe par la tête tout en calmant mon rythme cardiaque affolé. Plus jamais… plus jamais je veux avoir à tenir un flingue comme ça.

Je veux juste rentrer chez moi.
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

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Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
Sam 12 Nov - 18:05 (#)



La carrosserie était froide contre mon dos. Les tirs ont continué. Moi, je brûlais.
Trois nouveaux chocs ont fait vibrer le métal contre moi. Les vibrations ont résonné dans le caoutchouc des pneus et la terre en dessous, faisant tressauter les cailloux contre mes chaussures. Je voyais tous ces détails de manière trop vive. Trop nette. Une odeur de brûlé flottait dans l’air nocturne. L’écho des balles claquait avec la force du tonnerre dans cet espace vide, entre les murs des bâtiments abandonnés, à l’intérieur des salles vides et dans les cabines des engins de chantiers morts. Le vacarme de la Fièvre continuait de vrombir à la limite de mes perceptions, comme le bourdonnement incessant d’une nuée de sauterelles.

Ces sensations ont lentement reflué. La réalité n’a pas cessé d’exister, au contraire, elle s’écrasait dessous la fureur montante dans mes entrailles. J’ai ressenti, à l’intérieur de ma poitrine, enfler et se déverser dans tout mon corps une sensation, à la fois une douleur et une joie, comme une coulée de lave inarrêtable.

Le monde s’est effacé autour de moi. Quelle importance ? Je fais comme tu m’as faite.

Les tirs ont cessé. Je ne m’en suis pas aperçu. J’ai cru entendre des voix non loin de moi, diffuses, car toutes mes perceptions étaient étouffées par cette monstrueuse rage qui s’éveillait au fond de moi ; une tempête en approche. Plus rien d’autre n’avait d’importance. Mes pensées se sont entrechoquées comme une meute de chiens furieux ; désir, faim, violence, libération. Un abandon. La simple venue d’une réalité dont je n’avais aucune envie de refouler la face monstrueuse, et de l’enterrer derrière un mensonge délétère comme je l’avais fait autrefois. Tout cela était terminé. Tout cela n’était plus ni moi, ni Alexandra.

Le miroir avait perdu son pouvoir. Je me suis acceptée.

Ce fut comme briser un sceau interdit. J’ai senti quelque chose se rompre au niveau de mon abdomen et dans ma cage thoracique, alors que tout l’air de mes poumons se vidait d’un coup. Tel un uppercut porté dans mon ventre, je me suis pliée en deux contre le sol, l’estomac pris de brusques hoquets. La première fois, ça fait toujours un peu mal, ai-je pensé, et je n’ai pas pu m’empêcher de ricaner en rampant par terre.

J’ai commencé à me traîner au-delà de la voiture, dans les hautes herbes bordant le chemin de terre, tandis que des spasmes me cisaillaient des pieds à la tête. J’ai laissé venir. Je n’avais pas l’impression de perdre le contrôle, tout au contraire, mais de le reprendre, de dénouer des chaînes trop longtemps verrouillées. J’ai escaladé le talus boueux, et suis retombée dans le fossé, où reposaient des emballages de plastiques et des tessons de bouteilles. Je n’ai rien ressenti de tout cela. Une sorte d’hilarité hystérique menaçait de me saisir tandis que tout mon corps se tordait dans des sursauts monstrueux et déformants.

J’ai retenu le rire nerveux. Le bruit avait cessé d’exister. Les odeurs et le froid aussi. J’ai scruté la lune, haute et lointaine, en me demandant soudainement ce que ressentait ma mère, ces jours-là.

Puis, tout a commencé. Mon dos s’est arqué violemment sous la poussée d’une matière dure et moite, une carapace d’insecte couleur du caramel, encore visqueuse des fluides sanguins que sa poussée avait arraché. Les os de mes jambes se sont tous brisés en même temps, sous le poids énorme apparu sur le haut de mon corps, qui s’est mis à enfler de manière démesurée comme une pustule en train d’éclater. Je n’ai ressenti la souffrance que d’une manière diffuse, comme si tous ses membres humains s’effondrant sur eux-mêmes n’étaient pas vraiment les miens. La sensation de brûlure s’est aggravée, violente, affamée, insaisissable.

J’ai levé mes mains au clair de lune. La peau s’est distendue, avant d’éclater en lambeaux purulents, et j’ai admiré d’autres lambeaux chuter de mon ventre, de mes épaules, de mes jambes, telles les pelures d’un fruit trop mûr. La chitine a poussé dessous, énorme, distendue et brillante, en arrachant ce déguisement d’humaine, ce vêtement factice qui emprisonnait quelque chose de plus grand, de plus parfait. J’ai voulu marmonner un truc intelligent, mais mes cordes vocales avaient été broyées, tout comme mon larynx.

Oh, peu importe. J’ai essayé de maintenir mes mains en l’air, mais tous les os ont éclaté sous la pression de la masse qui était en train d’éclore, telle une fleur du mal, en écartelant ma colonne vertébrale. Je suis sortie par le haut de moi-même. L’insecte s’est frayée un chemin en se débarrassant de la coquille humaine qui le tenait en laisse, en déchirant les restes de peau, lesquels pendaient çà et là sur sa carapace, telle une horrible écharpe. J’ai ressenti une joie incommensurable me traverser, une brutale hystérie de sortir à l’air libre pour la toute première fois, et d’être moi, ce petit monstre issue d’une famille de monstres.

J’en étais consciente. Ça, c’est une putain de surprise, ai-je aussitôt pensé, en étirant mes nouvelles pattes, lesquelles escaladèrent la terre du fossé pour se redresser. Je me suis sentie incroyablement moi-même. Une sensation de force exaltante. Une euphorie meurtrière. Six pattes me portaient. Elles supportaient un corps brillant, de plus de deux mètres, caparaçonné de chitine camouflant deux ailes énormes. J’ai tourné la tête avec satisfaction, exerçant mes deux mandibules tranchantes comme un sécateur géant et animal. Je percevais les fluides monstrueux qui animaient ce corps de part en part, et faisaient mouvoir les réseaux de capillaires, de cils vibratiles et de mécanismes bien rodés, parfaitement conçus pour le massacre.

Le monde m’a assailli avec une netteté féroce. Ces antennes sur ma tête captaient chaque frémissement du vent, chaque frottement d’herbes, et chaque mouvement d’êtres vivants. La lumière était merveilleuse. J’ai levé la tête vers la lune. Un kaléidoscope de nuances blafardes ont cascadé de l’astre, irradiant mes pupilles à facette, et tous les poils hypersensibles qui recouvraient mon crâne. J’ai perçu le bourdonnement lointain des basses et des voix humaines. J’ai ressenti jusqu’aux flux de leurs respirations. Chaque menu détail avait une démesure irrésistible, si intense, qu’elle nourrissait cette faim croissante, ce besoin de se déchaîner.

Je pense, donc je suis, amusant. J’ai cherché à me dissimuler pour l’instant. J’ai rampé dans les taillis épais qui couraient à la lisière du parking, traînant ce corps énormes, aux mouvements si étranges que j’ai tout d’abord chancelé plusieurs fois, en renversant la végétation avoisinante. Des segments de peaux humaines, des restes d’organes et d’os chutaient derrière moi ; une véritable chrysalide de matières mortes.

Je me suis vite habituée. Tout cela était moi, rien d’autre. J’ai écrasé tous les arbrisseaux sur ma route, tous ces obstacles ridicules face à ce monstre, et j’en ai ressenti une telle exaltation, une telle euphorie, que j’ai vite désiré davantage. Tester les limites. Tester cette machine à tuer. J’ai contourné le bâtiment de la rave pour rejoindre l’autre partie du terrain vague, où les motards avaient accumulés leurs engins bruyants. J’ai suivi l’écho des voix, leurs vibrations dans l’air qui électrisaient chaque once de mes antennes. Les branches me fouettaient la carapace, un simple chatouillis quand ils ployaient sous l’avancée de cette masse.

Cette masse, c’était moi. Putain, ouais, ai-je songé, au bord de la folie furieuse. J’ai entendu les discussions bien avant de les voir. À propos d’une gamine bizarre et d’un vol de pistolet. Qu’importe, elles se sont tues bien avant, en entendant les craquements des arbres et les mouvements des buissons autour de moi. J’ai senti l’inquiétude. Comme une odeur de terreur à venir. J’ai senti leur sueur, leurs éclats de voix, l’odeur de l’essence et du métal, les frémissements de leurs vêtements et de leurs cheveux, sous cette brise molle qui m’amenait l’odeur de leur viande chaude. Ils n’avaient rien vu encore. J’en aurais ricané si j’avais pu.

J’ai bondi d’entre les arbres. Les ailes dans mon dos m’ont laissé plané sur quelques mètres, horrible masse traversant l’aura lunaire qui faisait briller les chromes des engins. J’ai ressenti tous les rouages inhumains de ce corps monstrueux frémir de satisfaction d’être enfin libre, de travers les airs en planant sur ces ailes d’insectes, pour atterrir bruyamment au milieu des motos. Je me suis redressée et les ai scruté, ces petites silhouettes ridicules en nuances colorées, si nettes derrière les yeux à facettes, et si pulsantes de vie.

Les hurlements ont suivi. Si nombreux. Si délicieux. Des armes ont brillé au niveau du groupe le plus proche, et j’ai reconnu au milieu d’eux l’as du pistolet de tout à l’heure, qui avait rejoint ses petits camarades, tel un bon un petit primate affolé. Quelle chance. Je ne lui ai pas laissé l’occasion de me tirer dessus cette fois.

J’ai accroché une Harley-Davidson juste à côté de moi, en la crochetant du bout de la patte, et je l’ai lancé comme une balle de tennis sur le groupe de barbus. C’était si facile. C’était si stimulant. La moto a heurté le tas de macaques à la façon d’une boule de bowling mortelle dans un jeu de quilles, en propulsant quatre en l’air tels des fétus de pailles, et écrasant un cinquième sous le poids. Un sixième en a réchappé en se jetant à terre. Je l’ai rejoint d’un seul bond. Une odeur d’urine a saturé l’air. Je l’ai saisi par les jambes, et l’ai levé dans les airs, fou de terreur et hurlant ; c’était si aisé de le maintenir avec ces pattes si mobiles et adroites.

Si facile. Si fragiles. Cette colère et cette soif de violence était encore là. Elle pulsait au fond de moi, à la façon d’un cœur si noir, si sale, que ses cavités ne charriaient qu’un liquide semblable au pétrole. J’avais besoin de la satisfaire. J’avais envie de le faire, parce que, sans doute, étais-je née pour cela.

Mes pattes ont tiré dans des directions opposées. Une jambe d’un côté, une jambe de l’autre. Un bruit de déchirure osseuse et musculaire a suivi celui du textile qui se déchire, sous les hurlements qui se sont vite transformés en gargouillis d’agonie indescriptibles. J’ai laissé tomber les morceaux. Les boyaux s’étaient déchirés en leur centre, et dégageaient une odeur infâme qui irritait mes perceptions sensibles.

J’ai détourné la tête, et découvert, rampant au sol comme une limace brisée, un survivant dont les jambes avaient été broyées par le choc avec la moto volante ; je lui ai écrasé la colonne vertébrale d’un coup de patte précis et rapide. Craquement satisfaisant. Un instinct indéchiffrable s’était éveillé au fond de mon âme, ordonnant la réalité en proies et prédateur, en tissus mous et matière comestible ; je me suis penchée et j’ai sectionné la nuque du cadavre avec les mandibules. La tête a roulé sur le gravier, comme un vilain pruneau détaché de sa grappe ; je l’ai ramassé souplement et l’ai croqué avec un bruit de biscuit sec.

La saveur était immonde. M’étonne pas, c’est humain, ai-je pensé en ricanant intérieurement. Non loin de là, les cris se sont mués en rumeur affolée, tandis que les quelques témoins avaient rejoint l’intérieur de la rave pour avertir le reste du troupeau. J’aurais voulu hausser les épaules. À la place, j’ai bondi à la hauteur du premier étage, et ces pattes se sont accrochées naturellement, en créant des prises insoupçonnées dans le béton friable ; ces ailes n’étaient pas assez fortes pour me porter entièrement, mais je n’ai eu aucune peine à m’accrocher et à me hisser avec une fermeté surprenante jusqu’à une ouverture.

Merci le paternel. J’ai brisé la fenêtre, et infiltré mon corps immense à l’intérieur des salles désertes du premier étage. Une obscurité ténue y régnait, à peine brisée par les spots de la piste de danse filtrant par les escaliers. En dessous, les basses continuaient de rythmer la soirée, au milieu des éclats de voix de ces sacs de chair, leurs bousculades et leurs cris d’avertissements. J’ai continué à avancer en silence.

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Dim 13 Nov - 18:08 (#)



La fièvre
Gilbert Drive
ft. Anaïs, Alexandra & Astaad


« Heidi reste là. »

A
lors, Heidi c’est toi, jusque là ça va. Rester là, oui tu avais l’intention de le faire jusqu’à ce que le maniaque avec son flingue ne s’en aille aussi, jusqu’ici vous êtes d’accord. Attends, une seconde. Comment ça « Heidi reste là » ? Anaïs va rester là aussi, pas vrai ? Qu’est-ce que tu racontes, personne ne dit à quelqu’un de ne pas bouger sans avoir soi-même l’intention de bouger. Et ça, elle n’a pas intérêt à le faire. La rouquine est têtue, et tu as le désagréable présentiment qu’elle s’apprête à faire quelque chose de particulièrement stupide.
Et… touché. Sans que tu n’aies le temps de dire quoi que ce soit, elle s’extirpe de la zone sûre que tu avais dressée pour elle en faisant rempart de ton corps pour s’approcher du tireur. La zone est dégagée, assez éclairée pour la détacher clairement du décors, et elle est assez proche pour que n’importe d’à peu près sobre puisse la toucher sans difficulté. Vraiment, de toutes les choses stupides qu’elle pouvait faire, avancer à découvert vers un barjot armé et menaçant fait partie du top.

A cet instant précis, tu la hais pour être aussi égoïste. Le temps qu’elle coure et qu’elle désarme presque miraculeusement le tireur, la question a eu le temps de traverser des dizaines, sinon des centaines de fois ton esprit : et si elle prenait cette balle ? Et si elle y restait ? Est-ce qu’elle te laisserait vraiment seule, comme ça, alors que tu as encore tant besoin de son aide ? Encore tant besoin de voir son sourire toutes les semaines, encore tant besoin qu’elle insiste pour te faire sortir de chez toi et encore tant besoin qu’elle te transmette un peu de sa joie de vivre.
Tu as déjà craint pour ta propre vie, beaucoup trop de fois pour pouvoir encore en garder le compte. C’est une sensation affreusement désagréable mais qui a le mérite de passer une fois en sécurité. Craindre pour la vie de quelqu’un d’autre, en revanche, c’est nouveau pour toi. C’est différent. C’est glaçant. Cette peur se mue en une terreur muette et découpe une plaie dans ton cœur qui, tu le sais déjà, ne cicatrisera pas. Et tu n’arrives pas à bouger.

C’est seulement une fois qu’elle tombe à genoux, le pistolet devant elle et le connard reparti que l’adrénaline te submerge assez pour te forcer à bouger. Aussi vite que tu le peux, tu te précipites vers Anaïs. Oh, comme tu as envie de crier. De lui hurler au visage ta rage, ton inquiétude, à quel point elle a été égoïste, mais tu vois bien son état ; et au-delà de ça, tu vois aussi bien la situation. La seule priorité pour l’instant, c’est de foutre le camp le plus vite possible.

Tu t’accroupis juste à côté de l’étudiante, cherchant désespérément à accrocher son regard. Elle tremble, au bord des larmes, et ton palpitant se fend encore un peu plus de la voir dans cet état. Alors, le mieux que tu puisses faire pour elle est d’assumer le reste des responsabilités jusqu’à ce que vous soyez en sécurité.

- Anaïs.. ! Anaïs, regarde-moi.. !

Tu as l’air paniqué, et pour cause, tu l’es.

- Il faut qu’on se casse d’ici, et vite, ok ? Tu peux marcher ?

Tes yeux se posent un bref instant sur le révolver tombé au sol, et tu es frappée une nouvelle fois d’un éclair de lucidité.

- Il faut effacer tes empruntes de ce truc, une seconde.

Tu ne sais pas à quoi cette arme a pu servir, et tu n’as sincèrement pas envie de le savoir. La seule chose que tu sais, c’est que laisser des empreintes digitales sur une arme n’est jamais une bonne idée. Alors, en mettant ta main sous ton haut, tu essaies de t’en servir comme d’un gant pour attraper le pistolet abandonné. Tu réalises vite que tu n’y arriveras pas, et presque aussi vite que tu vas devoir enlever ce haut pour attraper et essuyer l’arme. Sans adrénaline, tu n’aurais jamais réussi, mais tu en débordes littéralement, et ainsi, tu te dénudes encore un peu plus pour te permettre d’attraper le flingue. Habilement, tu en réenclenches la sécurité et te mets à le frotter frénétiquement. Enfin, tu te relèves et jettes puissamment l’objet vers un tas de gravats dans un fossé, un peu plus loin.

Et finalement, tu attrapes la main de ton amie et l’aides à se relever tant bien que mal. Va-t-elle arriver à courir dans cet état ? Tu n’es pas bien sobre non plus, mais tu as les idées plus claires que jamais, et surtout tu es en forme.

- Allez, on y va.

Ta voix se veut douce et rassurante tandis que attrapes la rouquine à bout de bras et que tu commences à courir dans la direction opposée à tout ce merdier, mais tu n’as pas réussi à lui amputer toute l’inquiétude qui te prend encore à la gorge.

- Je sais pas où est passée ton amie mais si elle est maline elle s’est cassée de là quand elle a pu. Tu lui enverras un message quand on sera en sécurité.

En sécurité dans un quartier plus tranquille, lorsque vous aurez retrouvé la civilisation et l’éclairage public. Lorsque tu l’auras ramenée chez toi pour ne pas qu’elle passe la nuit toute seule.
A mesure que tu t’éloignes, tu crois discerner des cris s’échappant de cette fête maudite, mais peut-être que tu hallucines. Vous êtes déjà loin, et on peut aimer la techno ou pas, mais on ne peut pas lui nier le mérite de bien couvrir la Fièvre.


CODAGE PAR JFB / Contry.
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
Anaïs Wilhm
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A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Jeu 24 Nov - 3:06 (#)



C’est simple. Inspirer, expirer. Un réflexe, On le fait tout le temps, on n’y réfléchit jamais Même lorsqu’on y pense, on le fait sans trop savoir comment. C’est la chose la plus naturelle au monde. Alors pourquoi j’y arrive pas ? Pourquoi j’ai comme un immense poids sur la poitrine qui m’empêche de respirer comme il le faudrait ? C’est comme si l’air ne voulait pas rentrer que par à-coup. Un peu. Peut-être. Et puis parfois non. Alors ça brûle. Et j’ai beau crisper mes mains contre ma poitrine et tenter d’avaler de grandes goulées d’air, ça ne vient pas comme ça le devrait. Inspirer. Expirer. Je sens pourtant la fraîcheur de la nuit, la caresse du vent et l’air puant des abords du chantier. Mais il refuse de rentrer. Pourquoi ça fait si mal ? Pourquoi ça ne s’arrête pas ? Pourquoi est-ce que tout ça ne s’arrête pas une bonne fois pour toute ?

Peut-être parce que tu mérites ce qui t’arrives.

Au fond, je le sais. C’est un simple et juste retour des choses. C’était juste trop beau pour être vrai. Tout ce qui s’arrangeait, ça va finir immanquablement par empirer, un jour ou l’autre. J’essaie si durement, et tout ça pour quoi ? Tout ça pour finir là, à manquer de me faire tirer dessus par un type que j’ai jamais vu après avoir été attaquée, presque violée et bouffée par un vampire cinglé…

C’est pas si grave, après ce que t’as fait.

J’ai jamais voulu tout ça ! Jamais voulu être ce que je suis. Jamais voulu faire ce que j’ai fait. Personne comprend ce que c’est… Comment j’en suis arrivée là ? Comment je suis passé des soirées en famille à rire avec maman, jouer avec Quentin ou boire les paroles et éloges de papa à ce que je vis aujourd’hui ? Une vie calme et toute tracée devenue une suite d’embûches tel un parcours d’obstacles ou la moindre erreur m’enverrait au mieux à la morgue.

Ce serait peut-être une solution.. Anaïs...

- Anaïs... ! Anaïs, regarde-moi.. !

J’inspire violemment en relevant brusquement le regard. Je cligne. Heidi ! la soirée ! J’inspire une grande goulée d’air e gémis en sentant mes poumons me brûler. Merde il s’est passé quoi ? Le flingue au sol… Alex. Où est Alex ? Je n’arrive pas à former le moindre son. Mes mains tremblent si violemment que je peux même pas essayer d’attraper le bras d’Heidi à côté de moi. Je l’entends… Marcher ? Si je peux marcher ? Je viens à peine de réussir à respirer alors marcher. Je déglutis, la gorge sèche et douloureuse et m’essuie fébrilement les joues. Humides évidemment. Je pensais être plus forte que ça…

Je sais pas ce qu’elle fait, à se déshabiller d’un coup, mais j’arrive même pas à trouver une raison de lui faire remarquer que personne a mes empreintes. J’arrive pas à faire autre chose que respirer. Enfin respirer. C’est si simple, en fait. Inspirer. Expirer. Je sens à nouveau l’odeur des abords du chantier et j’entends le son lointain de la techno qui doit résonner à l’intérieur du bâtiment. Je sens le béton dur sous mes genoux et la main d’Heidi qui me tire pour me relever. J’ai l’impression de peser une tonne et j’aurais aimé rester là, au sol. Pourquoi s’entêter ? Pourquoi sa voix est si douce ? Et pourquoi me sentir blottie contre elle ma soulage autant quand elle me plaque contre son torse ?

- Heidi…

Je doute qu’elle puisse m’entendre. Ma voix semble si basse, même à mes propres oreilles. Le son des battements de son cœur fait écho au mien et je ferme les yeux, me focalisant sur le rythme de nos palpitants qui semblent soudainement liés. Je réagis à peine quand elle me soulève, enfouis ma tête contre sa poitrine et file comme si je pesais rien. Tout ce que j’arrive à ressentir, c’est la chaleur qu’elle dégage, la douceur de sa peau et la sensation rassurante de ses bras autour de moi.

- Je suis désolée…

Pourquoi tout part toujours en vrille ? Il me semble entendre des cris, des coups de feu, mais je n’arrive pas à en être sûre. Et je préfère aussi peut-être me dire que tout ça n’est pas réel. Heidi est là, elle est bien réelle, elle. Elle me sort de cet endroit. Une fois de plus, je dois compter sur quelqu’un d’autre. Je suis incapable me de faire quoi que ce soit par moi-même. Incapable de la protéger. De leur être utile. Je sais juste pleurer sur une épaule de plus, désolée d’être un fardeau partout où je vais sans réussir à grandir et à me sentir mieux.

- Alex… Je suis désolée…

Je l’ai laissé derrière ! Ce que dit Heidi fait sens, mais ça ne me fait pas me sentir bien pour autant. Elle était peut-être blessée, ou pire et je l’ai laissée derrière parce que je suis incapable de tenir une arme sans avoir une crise de panique. Putain de pathétique !

- Heidi... Heidi stop. Pose-moi s’il te plaît.

Je peux continuer comme ça. Je peux pas continuer à me reposer sur les autres en espérant que ça aille mieux. J’attends qu’elle me repose pour m’écarter doucement et inspirer lentement. Au moins je peux tenir sur mes jambes, c’est un sacré progrès comparé à tout à l’heure. Je sais même pas combien de temps Heidi a couru, ni même où on est à présent. Tout ce que je vois, c’est sa silhouette se découper dans la pénombre. Et je revois ce qui s’est passé. Et j’imagine ce qui aurait pu lui arriver. Je ferme les yeux en inspirant. Ça aurait pu être pire. Tellement pire. Elle aurait pu…

Je n’essaie même pas de lui demander la permission. Je l’enlace brusquement, la serre contre moi en retenant un sanglot de plus.

- J’ai cru… J’ai eu si peur…

Je me serais jamais pardonnée de la perdre alors que j’avais les moyens de la sauver, quitte à me salir les mains pour le faire. Pourquoi c’est ce genre de dilemme qui surgissent dans ma vie ? Pourquoi je dois choisir entre ma morale et la vie des mes amis comme si c’était un choix facile ? J’inspire, blottie contre elle, essayant de faire cesser les tremblements de mes mains qui ne sont pas arrêtés.

- On peut rentrer ? J’en peux plus…
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NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
Alexandra Zimmer
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
FULL DARK NO STARS
En un mot : We're all mad here. I'm mad. You're mad.
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.

Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.

Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand

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Dim 27 Nov - 0:29 (#)



C'était facile.
La Fièvre battait son plein. Moi, je commençais à me faire à cette mélodie démente. Je commençais à me faire à ce nouveau corps, sa force silencieuse et mécanique, ses perceptions sensibles. Je ressentais tout. Les interstices du béton sous mes pattes, les creux des murs où l’air sifflait, les fréquences des basses qui caressaient les cils délicats entre mes antennes, la chaleur de la chair en mouvement. C’est mon corps, le mien, ai-je pensé, comme étonnée, autant de ce fait si singulier que de ma facilité à l’appréhender.

La mélodie a continué. Je me coulais en silence dans ces couloirs déserts, piquetés de milles perceptions riches, environnées du bruit saccadés des jambes humaines qui frappaient le sol comme des percussions. Les murs n’étaient que des échelles pour ce corps d’insectes. Des recoins de ténèbres pour s’y dissimuler, où la chitine se fondait dans le noir, patiente, d’une immobilité mécanique. Les mandibules suspendues dans le vide en dessous, avides, attendaient les visiteurs de cette fastueuse soirée de carnage.

C’était facile.

Ramper dans le noir. Gravir les murs. Attendre. Ressentir leur chaleur. Percevoir les mouvements. Tendre les mandibules. Crocheter la chair. Trancher. Écraser. Poursuivre. Sectionner. Déchirer. Recommencer.

Les humains étaient si incrédules. Une fourmilière de fêtards inconscients continuaient de s’éparpiller en désordre, balayant d’un revers de main assuré les avertissements de leurs semblables. On est à une soirée de vampires, qui aurait peur ? me suis-je demandée, non sans ironie, toujours fascinée d’être maîtresse de mes pensées. Et je me sentais libre. De réfléchir, de savourer, de m’amuser, de mesurer mes limites.
Ça aussi, c’était facile.

Je suis restée cachée dans les couloirs. Dans les réduits des plafonds. La rumeur paniquée a continué de se répandre, mais les basses ont persisté à cracher la mélodie humaine. Moi, j’en jouais une autre. Une paire d’humains passèrent, enlacés l’un dans l’autre, leurs ombres fusionnant en-dessous d’une autre bien plus grande, accrochée aux angles des murs. Il y eut un bruit flasque, comme tant d’autres. Un hurlement, vite éteint. Un bruit d’os qui s’écrasent. Le raclement de la chitine contre le béton, et l’odeur du sang répandu.

Facile, comme écraser des œufs.

Bientôt, la fourmilière humaine fut prise de hoquets, et les voix des primates se mêlèrent pour appeler les autres, ceux disparus, ceux qui redécoraient l’intérieur avec les pigments de leurs organes. J’ai ressenti un plaisir viscéral, vil et destructeur, pour cette partie de cache-cache où le monstre malin n’était pas suivi par des colliers de hurlements, mais par un silence de plomb et une immobilité de statue. J’ai cessé de faire les comptes. Les têtes ont roulé. Les colonnes vertébrales ont plié. Les viscères se dévidaient au sol.

Finalement, la fourmilière se vida. Ce fut une femme aux cheveux crépus et suintant le sang qui sonna la fin des festivités, en découvrant la vision d’un homme transformé en peinture abstraite. Elle s’est mise à courir dans la lumière des spots, attirant sur le couloir semi-éclairé une foule de curieux qui se transformèrent en hystérie collective et contagieuse. Les hurlements m’ont vrillé les antennes. Les portes ont claqué en faisant chuter le plâtre des murs, et moi je suis restée là, immobile dans le noir, à écouter les pas des courageux.

Trois hommes. L’un était un cadavre vivant, les autres vivants tout courts. Le premier m’a vu dès le départ. Je me suis déroulée du haut du plafond, segment de chitine après segment de chitine, les pattes retombant avec la souplesse visqueuse d’une chevelure mécanique, et j’ai contemplé le dernier héros. Il n’a rien dit. Il est resté sous le choc, ses deux compagnes mortels venant le rejoindre en le questionnant, avant que ceux-ci n’allument leurs torches de téléphones directement en face d’eux. Sur moi. La lumière crue m’a dérangé.

Ils ont hurlé. Juste un court instant.

Je me suis crochetée sur les murs, comblée la distance nous séparant, et enfoncée le bout tranchant d’une pattes dans la nuque du premier homme. Le second a cherché à faire tourner le vampire pour s’enfuir, mais celui-ci s’était retiré si rapidement, qu’il a laissé son camarade d’infortune sur place. Il est resté tétanisé. Et son regard s’est fait absent, vide, comme absorbé dans la contemplation de l’horreur face à lui ; quelques secondes seulement avant que son crâne ne vienne se fracasser contre le mur, comme un fruit trop mûr.

J’ai filé à la suite du dernier. Le mort-vivant avait rejoint la salle principale, où se trouvait la piste de danse désormais vidée de ses participants. Les lumières étaient restées allumées. On avait déserté les lieux aux cris de « Tirez-vous putain, il y a un truc qui bute les gens », m’avait-il semblé comprendre, et l’espace avait un air terriblement mort, d’une sinistre poésie. Le sol était jonché de traces de pas imprimés dans le carmin du sang, et l’on avait oublié ici et là quelques affaires ; une chaussure, un verre, un foulard, une seringue.

Une barre de fer. Le vampire s’est arrêté pour la ramasser. Il m’a fait face. Je me suis faufilée à l’intérieur de la salle abandonnée, arrachant les gonds des battants sur mon chemin, et me suis redressée face à lui. Un silence est tombé autour de nous. Il n’a rien dit. Je sentais pourtant la terreur filtrer au travers de ses mains qui ne tremblaient pas, dans ses yeux fixes et les pores de sa peau froide. Je me suis avancée vers lui, mes yeux à facettes fixés sur lui, immobiles au milieu des mouvements mécaniques de mon corps.

Où sont mes limites. La pensée a jailli comme une étincelle. Je n’ai pas répondu immédiatement.

L’adversaire lui est resté immobile, indécis. Je l’ai surplombé du haut de ce corps d’insecte horrifique, qui ne ressemblait à rien de terrestre, et lui a resserré cette stupide barre de métal entre ses mains. J’ai senti quelque chose remuer au fond de mon torse. Comme un nœud se dénouant et se reformant, une profonde palpitation dans ce qui me restait de larynx ; l’évidence m’est alors apparu. Je n’avais que les limites que je m’imposai. Ce fut comme briser un nouveau sceau. Je me suis tenu au-dessus du mort, et le son est sorti.

« Cours, » ai-je prononcé au travers de cordes vocales impossibles, dont la voix éructait de cette gueule de cafard immonde imitant des sons humains difformes.

Comme une lamentation crissante et rocailleuse, émanant d’une corne métallique, de laquelle sortait une unique syllabe, où chaque lettre se contorsionnait en fréquences mouvantes, tels les vers d’un cadavre. J’ai vu son expression perdre toute sa placidité d’immortel. Ses traits ont fondu comme un masque de cire pour former une figure de pure terreur, lequel fut aussitôt d’un coup de barre de fer, rapide et réflexe, sur le devant de ma cuirasse de chitine. J’ai encaissé la douleur. Lui, semblait pris d’une folle terreur furieuse.

J’ai coupé court à tout ça. Il a levé sa barre une seconde fois, ivre de folle frénésie, avant que son sternum ne soit traversé, avec un bruit sourd, d’une appendice chitineuse et luisante de sang. Le cadavre dissous est retombée en un petit tas livide au centre de la piste de danse. La barre de fer est tombée, claquant sur le sol avec la violence du métal froid, avant que le silence ne se réinstalle, comme la morale de l’histoire.

Fin de partie. Retour aux bobards.

Trente minutes plus tard, j’étais dehors. La Fièvre était terminée. Un vent frais balayait le terrain vidé de voitures et de motos, ne laissant que les cabines et les engins de chantiers abandonnés. La lune recouvrait le tout d’un linceul pudique de clarté morbide, délavant les feuilles des arbres et les chemins terreux d’une teinte cadavérique. Tous les humains étaient partis. Des canettes jonchaient encore le sol, et l’odeur de la sueur, de la terreur aussi, s’accrochait encore contre les murs tâchés de tags ou d’auréoles de pisses.

Ça sentait la désolation. Moi, je me sentais apaisée. Je me suis arrêtée au milieu du terrain déserté, faisant sauter les clés de ma moto dans ma paume. J’avais eu foutrement du mal à les récupérer dans les herbes hautes, malgré une vision d’insecte, laquelle avait aussi décelé mon téléphone en pièces détachées. Peu importe, ça valait le coup, ai-je songé enfin détendue, enfin débarrassée de cette fureur volcanique au fond de moi. J’ai inspiré lentement. Librement. J’avais l’impression d’être enfin réconciliée avec mon âme.

J’ai frissonné aussi. J’étais nue sous une veste de motard à demi ouverte, et un jean transformé en mini short après que les jambes de la propriétaire aient été séparées du reste. Pas terrible, mais mieux que rien. Je n’avais rien trouvé de plus propre, ou en tout cas, qui ne soit pas imbibé de sang ou d’autres fluides d’organes percés. J’ai commencé à marcher ainsi, le vent entre les seins, et les pieds nues sur les graviers de la Louisiane, qui étaient encore tièdes du passage des pneus des Harley-Davidson.

« Ah, une clope, » ai-je marmonné en fouillant à l’intérieur du manteau du défunt.

Je me suis arrêtée un instant. J’ai perçu le cliquetis et la forme familière d’une pochette de cigarettes à côté de son briquet, tous deux à l’intérieur de la poche de la veste volée. Je les ai sorti. Pas comme si j’allais me choper un cancer de toute façon, ai-je ricané en portant une clope à ma bouche, tranquillement. J’ai fourré le paquet dans la poche en regardant autour de moi ; toute la poussière du terrain vague était baignée de cette clarté blanchâtre, qui faisait briller les quelques rares traînées de sang noir autour de moi.

J’ai allumé la cigarette et tiré une bouffée, avant de remettre le briquet à sa place, et de reprendre le vieux téléphone portable que j’avais emprunté sur un cadavre. Il avait encore du réseau. J’ai composé le numéro d’Anaïs en tirant quelques bouffées, déambulant paisiblement au milieu du champ de ruines.

« Anaïs ? Ouais, c’est Alex. »

J’ai retiré la clope de ma bouche. Une brise plus froide a balayé mes jambes nues, et j’ai déambulé dans la direction où nous avions laissé ma moto, voilà une éternité de cela.

« Ça va ouais, désolée on a été séparées. Je récupère ma moto et je t’attends au prochain croisement, celui juste avant de tourner au Gilbert Drive. J’dois dégager d’ici, ça craint. »

Quelle foutue soirée. J’ai raccroché, indifférente, sans éprouver la moindre envie discuter avec elle, ni de m’attarder dans les environs. Les flics allaient finir par débouler. J’avais tout intérêt à me dépêcher de sortir d’ici, avant qu’ils ne viennent poser des questions à la survivante cul nu d’un massacre. J'ai balancé négligemment le téléphone dans un fossé. J’ai hâté le pas vers l’extérieur du terrain, parmi les cabanons écroulés et les buissons épais, où m’attendait la moto, que nous avions camouflé avant de venir nous imbiber d’alcool.

Je me sentais bien. Je me sentais même extrêmement bien. Apaisée. Satisfaite. Comblée comme après une cure d’alcool ou une partie de jambes en l’air. Dans mon crâne s’attardait encore ce petit confort, ce nuage d’ouate qui enrobait mes sensations d’une douceur lointaine, comme une absence de sentiments.

Ça allait passer. Juste le temps de redescendre. J’ferai le point plus tard. J’ai traversé le terrain désert ; dans la nuit, la lumière grésillante de ma cigarette était le seul point coloré dans cette obscurité livide.

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