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I need to breathe

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Anonymous
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Sam 7 Nov - 21:27 (#)



I need to breathe
Feat ???


"Tu sais que tu n'as pas le droit. Si on se rend compte que tu fais aussi régulièrement le mur, elles te mettront dehors, c'est le règlement… Tu as beau être super serviable et complètement paumée, elles ne te feront pas de fleur. "

"Je sais Amina… Mais, j'en ai besoin, ça me fait du bien. J'aime quand il fait nuit, j'aime l'ambiance des bars… j'ai besoin de ça tu sais… Puis, on sait jamais, je pourrais rencontrer quelqu'un, retrouver qui je suis…"

"Je ne te couvrirai pas si on me pose la question."

"T'en fais pas, je sais. Je ne te demande pas de prendre ce risque… pas pour moi. Tu as assez morflé, va pas te retrouver à la rue à cause de moi."

Je sais pertinemment qu'elle retournerait chez son mari, qu'elle le suppliera de la reprendre, qu'elle s'excusera mille fois, qu'elle acceptera les coups, qu'elle perdra une fois encore sa dignité, sa personnalité pour se fondre dans le moule trop étroit pour elle. Il lui faudra se courber, plier sous le poids des reproches, se briser sous la verve acerbe, s'effacer au profit de son animalité malsaine et destructrice. Alors non, je ne veux en aucun cas qu'elle me couvre, elle peut bien me balancer si on lui pose la question que je ne lui en voudrais pas. Je frissonne à ces pensées, à ces images qui me traversent l'esprit, aux douleurs fantômes dans mes os et mes muscles. Comme si, moi aussi, j'avais subi la violence d'un homme, comme si ses souffrances faisaient échos aux miennes oubliées. On s'entend bien Amina et moi, je ne la considère pas comme une de ces âmes avec qui ne je ne parle jamais. Elle a en elle quelque chose que j'aime bien, qui me rassure. Je la prends dans mes bras avant de disparaître par la fenêtre.

Je retrouve la chaleur douce d'une soirée de fin d'été. Je n'y peux rien, j'ai lutté contre cette envie de me fondre dans la nuit pour rejoindre les quartiers animés, les ambiances aux relents d'alcool et de tabac. Ça fait parti de moi on dirait, ça fait parti de ces choses que je faisais avant tout ces oublis sans doute. Et je me persuade que quelqu'un croisera mon regard, m'appellera par mon prénom ou me demandera si on ne s'était pas déjà vu avant. C'est tellement présent en moi que j'en rêve la nuit, sans pour autant voir le visage de mon interlocuteur, des traits vaporeux au regard pénétrant. Je sais où je vais, je compte mes pas, il me faut quitter Mansfield pour aller à Downtown. Je ne m'attarde pas dans les diverses rues que je traversent, j'ai toujours, chevillée au corps, cette peur, cette trouille viscérale de tomber sur celui ou celle responsable de mon état actuel. Je veux fuir le danger tout en le bravant quasi chaque nuit. 

Sentiment schizophrénique, fuir et rechercher à la fois. Craindre et braver l'interdit pourtant. Étais-je déjà comme ça avant? Est-ce nouveau? Le corps et l'âme se modifient-ils en cas de choc traumatique profond? Parfois je me dis que j'opte pour des options en les pensant nouvelles mais, si ca se trouve, je ne fais que reproduire un schéma que je connais par cœur. La frustration, voilà ce que je ressens souvent, tout le temps même. Frustrée de ne pas savoir, de ne pas comprendre, de ne pas parvenir, de ne pas retenir. Ce n'est pas faute d'essayer, de forcer, d'en avoir mal au cerveau, de pleurer quand il n'y a que le néant pour seule réponse. Je fourre mes mains dans les poches de mon sweat à capuche, cette dernière cache une partie de mon visage et mes cheveux font le reste quand je baisse la tête. Une paire de baskets aux pieds et un jean troué pile poile à ma taille, j'ai eu de la veine au tri cette semaine. 

Je finis par choisir un bar qui ne paye pas de mine à l'extérieur, style pub anglais, des gueules d'habitués sur les tabourets en face du barman. Une fois la porte passée, mon visage légèrement frais se fait attaquer par la chaleur quasi étouffante de ces soirées de match qui animent les mâles en manque d'adrénaline. Pourtant, pas de télé allumée à l'horizon, juste quelques gars autour d'un billard, de la pop anglaise s'échappe des enceintes qui ne laissent pas de place au silence sans pour autant assourdir. Ma bière à la main, je me recherche une table un peu à l'écart pour prendre place sur la banquette encore moelleuse malgré le nombre incalculable de culs qu'elle a pu recevoir. Un peu au fond, histoire de pouvoir poser mon regard clair sur tout ceux qui gravitent dans ce pub. Je retire mon sweat, remets un peu d'ordre dans mes cheveux, je porte un ravissant t-shirt noir avec des dates de tournées dans le dos et sur le devant les membres d'un groupe que je ne connais pas. 

"Tiens … tiens… Une nouvelle tête dans le coin…  Plutôt mignonne en plus…" La gueule éméchée, l'haleine qui empeste l'alcool fort mélangé à de la bière, un regard bovin qui accroche sur mon visage un masque de dégoût. Lui et ses potes ne tiennent debout que par la volonté de faire chier leur monde. Un se pose sur la banquette, l'autre finit de resserrer l'étau autour de moi pendant que le dernier pose son épaule contre le mur en croisant les bras. Je déglutit, baisse le regard en bredouillant que je préfère rester seule. Ils rient, ils rient fort, leurs épaules frôlent les miennes, leur souffle souillent ma peau pâle. Je relève le regard vers l'avant du pub, cherche désespérément quelqu'un sur qui m'accrocher. Mes dents mordillent nerveusement ma lippe inférieure, quête que je ressens comme vaine en détaillant chacun de ceux qui gravitent autour du billard ou du bar. 

Et en plus, ils deviennent tactiles, mes mains chassent celles qui se posent sur mes avant-bras ou cuisses. Ils se marrent toujours autant et moi j'ai l'impression de disparaître entre ces deux âmes sombres, je ne fais pas le poids et ma voix refuse de se faire entendre, fluette cordes vocales serrées par l'angoisse. Mon regard s'embrume, je finis par accrocher un inconnu qui semble moins pire que les autres -il m'excusera de penser ça de lui-. Je lance une prière silencieuse pour qui voudra bien l'entendre, je ne sais pas si je dois croire ou non à un divin protecteur au vu de ce qui se passe ici… Pourtant, je prie pour qu'il daigne venir me tirer de cette situation qui me dépasse totalement. 
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ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
Gautièr Montignac
Gautièr Montignac
ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
◖ INACHEVÉ ◗

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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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◖MINDHUNTER◗

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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Pseudo : Nero
Célébrité : Harry Lloyd.
Double compte : Eoghan Underwood, Sanford R. De Castro, Aliénor Bellovaque & Ian C. Calloway
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Date d'inscription : 04/11/2019
Crédits : Elrem95 (ava') ; Wiise (Signa')
Lun 5 Avr - 1:03 (#)


Judgment
Le temps des cyclones approche.

Période redoutée en Louisiane. Comme beaucoup d’autres, il a pu voir de ses yeux les ravages de Katrina sur les terres de l’État. Si la Nouvelle-Orléans avait largement encaissé comparé aux villes situées plus à l’ouest, nombre de locaux ayant fui la cité superbe avaient justement opté pour d’autres bourgs, tels que Bâton-Rouge et Shreveport. Bien avant la Révélation. Une leçon d’Histoire glanée là, au détour d’un magazine vantant les mérites touristiques de la région. Sensible aux récits façonnant les humains comme les paysages, il avait retenu puis conservé cette information avec une sensibilité digne du Pyrénéen qu’il resterait pour toujours. Comme lui avait su redouter chaque hiver (le bois viendra-t-il à manquer ?), il pouvait largement entendre que la période caniculaire et les remous du climat habituels, éternels, rendaient nerveux la populace habituée à traiter avec les caprices des vents furieux. Il espère, alors, ne pas être témoin d’un nouvel épisode destructeur. Si jusqu’alors on s’était raisonné, optant pour une logique froide, une acceptation lucide, Halloween 2019 avait réussi à perturber jusqu’aux plus endurcis, jusqu’aux vieux de la vieille qui, soudain, ne se sentaient plus aussi capables qu’autrefois de voir revenir le Chaos frapper à leur porte. Gautièr Montignac peut comprendre. Le Chaos n’a rien de bon. Le Chaos, a infiltré son corps encore jeune, à l’époque où le mental n’était pas assez fort pour lui intimer de déguerpir. Et comment l’aurait-il pu ? Ce n’est pas une question d’âge, il le sait aujourd’hui. Il n’empêche que les questions persistent. Qu’il se demande s’il aurait pu mieux digérer les relents de traumatisme absorbés. Il se demande si l’on aurait pu épargner la folie à son frère, la mort à leur aîné. Bien sûr que oui.

Tels les vieillards ressassant leurs souvenirs au tripot du village, il est assis, appuyé au comptoir de ce commerce du Downtown, décidant de sortir de sa zone de confort exceptionnellement. L’été lui a toujours donné des ailes, quelle que soit la région du globe sur laquelle il s’installe. L’été, saison de tous les possibles. Période charnière, d’épanouissement précédant la ruine. Soleil au plus fort, espoirs au plus haut, fêtes et nuits éternelles.

Il a un frisson, et soudain le goût de la bière lui paraît moins agréable. La saveur de la viande, plus fade. L’établissement ne paye pas de mine en effet, mais la nourriture est pourtant de qualité. Les Américains savent faire cuire un steak, et il n’a jamais craché outre-mesure sur la qualité de l’alimentation ici-bas que dans des accès de mauvaise humeur ou de mauvaise foi assumés. Pas de femelles, parmi la clientèle, ou très rares. Tandis qu’il mâche, songeur, la carne plutôt tendre sous ses dents, il reprend une gorgée d’ambre pour noyer sa mélancolie, et se laisse aller au son des boules de billard qui éclatent les unes contre les autres, des conversations entre habitués, des rires qui fusent. Le monde lui paraît si tranquille, dans de tels moments. Il pourrait oublier qui il est. Oublier les avertissements, les appels à la prudence, sa tête mise à prix, la traque sans fin ; de nouveaux ennemis viendront toujours prendre la place des anciens.

Tournant le dos à la porte, il ne voit pas entrer la femme dont la présence sonne faux, dans un tel décorum. Il poursuit son repas en chassant les nuages noirs voletant comme autant de moucherons autour d’un festin potentiel. Il s’oublie lui-même, à défaut de pouvoir le faire via un nombre de pintes ahurissant qu’il n’aurait pas les moyens de payer ce soir.

Il ignore ce qui l’a poussé à jeter un coup d’œil par-dessus son épaule. Peut-être les ricanements stupides, les grognements de mâle en rut. Peut-être l’odeur rance du désir brutal et sans concession. Moins un désir sexuel, en réalité, qu’un désir de dominer, d’écraser, de faire mal à celle qui s’était délibérément jetée dans la gueule du loup. Il connaissait ce désir-là. Il régissait certains comportements des meutes auxquelles il avait appartenu, bien sûr. Il avait toujours fui autant que faire se peut ces revendications bestiales. Il n’est bien évidemment pas étranger lui-même à ces comportements – et son histoire de meurtrier le lui a appris plus que tout autre de ses semblables – mais il s’assure toujours qu’aucun témoin ne puisse assister à des dérapages incontrôlés. Ce qui se passait loin des hommes devait rester loin des hommes.

Il accroche le regard de cette femme qui n’avait rien à faire là. Il lit la paralysie de la victime idéale, incapable de réagir, de faire montre d’un instinct de survie digne de ce nom. Il lit l’appel à l’aide. Une ombre de sourire menace de poindre. Rien ne monte. Il conserve ce masque froid, pesant le pour et le contre. Tu ne mérites pas que je t’aide, souffle ce museau imperturbable, ces prunelles glacées qui en ont déjà vu d’autres. Tellement d’autres. S’il compte réagir, ce n’est pas pour elle. Voir une créature en détresse ne réveille jamais que le pire en lui, rarement le meilleur. Le meilleur, ce sont les quelques élues choisies par le destin qui parviennent à en réchauffer un peu cette silhouette trop mince.

« Sérieusement ? »

La voix du loup a porté. Un vibrato mince, mais suffisamment grave pour interpeller le groupe de bipèdes à proximité. Les attouchements ralentissent, jusqu’à cesser tout à fait. Le Français, lui, reprend sa chopine, termine sa bière en quelques déglutitions tranquilles. « Au-delà du cliché... Si les flics passent par hasard, vous êtes morts. Si la fille porte plainte, vous êtes morts. Si vous allez plus loin que ça, vous êtes morts. »
« Non mais je rêve, t’es qui, connard ? T’es en train d’nous menacer, là ? »

Paupières qui clignent tandis qu’il fixe, désabusé, le barman à qui on ne la fait pas depuis un moment. Le genre de gars prêt à fermer les yeux sur quelques dérives tant que ça ne va pas trop loin. Mais le mal est fait. La scène est désormais jugée. Scrutée. « J’crois qu’il parle juste d’la taule, les gars. Relax. »

Le loup acquiesce, toujours calme. Il reprend sa fourchette, qu’il enfourne pour faire saigner la viande devenue tiède contre sa langue. Le goût du sang lui manque, il s’en rend compte. Les frissons reprennent, mais n’ont rien à voir avec les déambulations nostalgiques effectuées sur le chemin du siècle dernier. Il s’agit d’un autre type de frémissement agréable, et sa langue vient laper contre sa lèvre inférieure quelques gouttes de jus dont l’arôme n’aura jamais la puissance de la sève rallumant ses instincts les plus bas. Les plus terribles.

Morts.

« Et toi ? Qu’est-ce que tu viens faire ici ? » C’est à elle qu’il s’adresse. Prudemment, les quelques molosses se sont écartés d’elle, comme si elle s’était brusquement changée en pylône radioactif. La question accusatrice aurait embrasé les esprits, échauffé les bonnes consciences, ailleurs. Mais pas ici. Lorsqu’il se retourne à nouveau pour la contempler dans toute sa déchéance, c’est avec une sérénité confondante qu’il assène, tout en la dévisageant de la tête aux pieds : « Pourquoi est-ce que tu les laisses faire ? » Il n’y a pas que de la provocation, dans ce raisonnement tout personnel. Il y a une curiosité sincère, morbide. Pourquoi la mouche se jette-t-elle dans la toile de l’araignée ? Surtout quand la toile arbore des néons aux couleurs douteuses, parsemée de pièges collants où que l’on pose le pied.


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Le Temps qui reste

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Anonymous
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Ven 7 Mai - 21:32 (#)


I need to breathe
Feat GAUTIÈR  MONTIGNAC


Je ne suis qu'une coquille vide qui se remplit de ces alcools, de ces discussions de bar et de ces rencontres éphémères que je fais au fil des nuits. J'ai l'impression de revivre quand je quitte le foyer pour me fondre dans cet univers nocturne, braver le danger et risquer ma vie alors que je suis un être nouveau. Pour le moment, je m'en sortais bien, quelques relous rapidement esquivés, des amitiés autour d'une pinte ou deux accompagnées de fous rires agréables. Oui, j'ai eu pas mal de chance quand je vois la situation dans laquelle je me suis fourrée alors que je ne demandais rien à personne. Ils sont là, respirant tels des animaux en rut, mains brûlantes et baladeuses sur mon corps tremblotant et glacial. Je me retrouve pétrifiée sous ces gestes qui font écho dans mon être, réveillent des souvenirs enfouis. Des flashs indéchiffrables laissant dans ma bouche un arrière-goût désagréable. J'ai déjà vécu cette situation ou du moins une qui lui serait semblable, des palpations non désirées, cette impression d'être prise sous les phares d'une voiture. Petit animal devenu la proie de prédateurs affamés qui ne s'apaiseront qu'une fois repus. Je suis une éponge, j'absorbe toutes ces émotions et ces désirs malsains qui coulent sur mon corps tout en étant parfaitement incapable de réagir comme je le devrais. Prisonnière de mon corps, je ne parviens qu'à envoyer des signaux de détresse de mes yeux larmoyants. 

Qui appeler à l'aide ? L'homme aux cheveux gris et la mine aussi rouge que son t-shirt? Ou celui qui beugle fort sur le barman pour qu'il lui donne une pinte de plus? Non, mon regard se porte sur celui qui semble plus à même, malgré son physique, de venir à mon secours. Simple jugement au jugé, rien de bien recherché, juste des détails qui font la différence. La voix de l'inconnu se fait entendre, les prédateurs semblent hésiter à continuer leurs attouchements. Il enchaîne alors qu'ils cessent enfin de me plonger dans encore plus d'embarras. Il prévient ou bien menace sur la suite des événements. Ils sont morts. Ces simples mots me glacent le sang, je comprends qu'il ne parle pas au sens propre du terme mais, le ton utilisé peut amener à penser le contraire. D'ailleurs, les prédateurs le prennent ainsi et passent de gros dégueulasses à des mecs prêts à en découdre. L'ambiance change tout autour de nous, électrique, tendue. Le brouhaha sympathique se meut en presque silence, une chape de plomb s'abat sur la bonne humeur et les rires gras, alcoolisés. Le barman cesse de faire couiner ses verres avec son torchon à carreaux, les bagarres il a dû en voir plus d'une mais, pas certaine qu'il ait envie qu'il y ai de la casse ce soir. Je subis cette scène, toujours apeurée parce que les soulards sont très proches de moi, les relents de sueur m'emplissent les naseaux. Ils empestent l'adrénaline et la testostérone mélangées aux nombreux verres qu'ils se sont envoyés avant de me prendre en chasse. 

Une voix impose une trêve, raisonne mes agresseurs avec quelques mots simples mais sur un ton sec. Ils ne cherchent pas plus loin… pour le moment en tout cas. Ils me quittent, l'un d'eux me glisse qu'il saura être patient, ses doigts courent une dernière fois sur ma peau, effleurant mon bras rongé par les frissons. Ils risquent de m'attendre à la sortie du bar, encore plus éméchés, encore plus affamés. Un tremblement ébranle ma carcasse trop frêle à mon goût, soudainement, je regrette d'être sortie ce soir. Je noie ce torrent de négativité dans une longue gorgée de bière fraîche et chasse d'un revers de main la mousse sur ma lippe supérieure. Idée à la con, première fois que je regrette une fuite du foyer, première fois que je goûte à la peur et que cette dernière a un goût de déjà vu. Le déjà vu, première fois que je le ressens depuis que j'ai quitté l'hôpital. Cet instant désagréable ne m'a pas délivré les clés de mon passé, rien de plus que le dégoût en arrière bouche. La voix de mon sauveur m'arrache de mes pensées. J'entrouvre les lèvres pour un "merci" qu'il mérite amplement mais ses paroles me figent dans cette expression toute intelligente. Ce que je fais ici? La suite n'est guère mieux; pourquoi je me laisse faire? Et son regard qui coule sur moi comme on regarderait un animal avant de l’adopter. Dérangeant. Je me renfrogne légèrement, relève le menton malgré la gêne qu'il m'inspire. 

"C'est facile de juger quand on est juste spectateur de la scène. Trois masses imbibées comme des éponges face à… moi et mon poids plume. Merci quand même pour le coup de main. Même si…" Oui, même si le dernier m'a bien fait comprendre qu'une fois seule, je ne pourrais compter que sur moi pour me réfugier en sécurité au foyer. Je frissonne, soupire pour évacuer cette frustration de ne pas avoir plus de cran, de manquer de courage aussi sans doute. "Je te paye un verre pour te remercier. Et, c'est pour ça que je suis ici, l'ambiance… sans les connards. J'aime les bars, sans savoir pourquoi. Et toi? Tu sauves souvent des demoiselles en détresse entre deux bouchées?" Il a adopté le tutoiement, je fais de même. Je tente de me décrisper, de quitter le carcan de mes émotions pour ne pas paraître trop apeurée. Un fin sourire ourle mes lèvres, un peu timide mais franc, j'ose quitter ma place pour le rejoindre au comptoir en posant mon sweat sur mes cuisses dévoilées par endroits à cause de mon jean troué. "Tu permets? Pas besoin que tout le bar profite de la conversation après s'être délecté du spectacle qu'on a donné." 

J'essaye de faire bonne figure, de vaincre ma timidité pour éviter de rester seule en espérant qu'ils se lassent de m'attendre. Nouvelle gorgée de bière, je lorgne sur son plat, ici la nourriture semble plus appétissante qu'au foyer. Faut dire que ce sont en grande partie des dons qui constituent le garde-manger. Si on veut quelque chose en particulier, il faut se le payer en allant faire les courses, il faut donc bosser pour se faire de l'argent. Le peu que je gagne, je le dépense dans mes sorties nocturnes, je me remplis d'alcools divers et de mauvaises fréquentations. Je me contente donc des plats infâmes cuisinés par Tasha sans m'en plaindre, en les mangeant, je n'ai pas d'idées culinaires qui me viennent. Sans doute que je devais être une piètre cuisinière avant ou un excellent cordon bleu qui a complètement tout oublié … Une brise de frustration assombrit mon visage, je maudis cette mémoire qui a sélectionné ce que j'ai le droit de savoir ou non de moi. 
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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Ven 4 Juin - 1:36 (#)


Judgment
Il se retourne, n’offrant plus que son dos à l’inconnue, désormais abandonnée par ses prédateurs. La petite biche aura la vie sauve, ce soir. Pour combien de temps ? Sera-t-elle prise demain par un piège de chasseur ? Une meute lui tombera-t-elle sur le râble ? Une falaise dangereuse trahira-t-elle son pied pourtant sûr ? Ce ne sera plus son problème. Demain, il l’aura oubliée. Demain, elle n’aura même plus de visage. Plus de voix. Il n’a pas de mémoire à accorder à ce genre de détails-là. Il n’imagine pas un seul instant qu’elle daigne lui adresser la parole par la suite, et encore moins se rapprocher de lui. Il sait ce qu’il peut dégager. Les femmes le couvent toujours d’une drôle d'attention. Souvent apeurées, parfois intriguées, nombreuses sont celles dont l’instinct leur intime de fuir, de ne pas rester seules avec un individu pareil. Elle a déblatéré ; il écoute à peine. Il se lèche les babines – il ne perdra pas une goutte de ce jus de viande délicieux – , et lui abandonne une oreille lascive, comme la bête le ferait, à l’affût dans les bois. Pourtant, en dépit de sa fragilité, de sa faiblesse évidente, elle se lève, parle, s’accroche et s’approche, jusqu’à se poser à ses côtés. Ses gestes s’interrompent tout à fait, maintenant. Il la regarde. Il voit le mouvement, l’installation du sweat sur les cuisses dévoilées par les trous du tissu. Un peu perturbé par cette mode dont il ne comprend toujours pas le fondement des années après, ses index se font plus fermes sur les couverts qui découpent la viande, lentement mais avec précision. Sous ses dents, la viande s’écrase, sa langue la plaque au palais pour mieux déglutir avec discrétion, sans bouder son plaisir pour autant. Entre deux mastications, il articule :

« Quand on est un poids plume, on ne se met pas en danger comme ça. Je me fiche bien de ce que disent les nouveaux dieux de cette société. Car si tu n’es pas sûre de pouvoir rentrer vivante, ou en un seul morceau… » Les prunelles se fichent dans celles de l’humaine. « … alors pourquoi t’exposer ainsi au danger ? » La question est sincère. Il n’en peut plus de heurter ses incompréhensions au manque de logique de certaines femmes de son espèce. Jamais ses sœurs n’auraient baguenaudé ainsi à des heures pareilles, et ce même dans les ruelles du village. On ne pouvait jamais savoir. Les rôdeurs trouvaient toujours un chemin, aux abords des demeures des honnêtes gens. Il en avait été un exemple parfait. Une victime étrange, résultat d’une attaque sournoise à laquelle personne ne s’était attendu. Et lui encore moins. « Ne t’attends pas à ce que j’aie des scrupules. Je ne te connais pas. Je juge toujours ce que je vois. Comment pourrait-il en être autrement ? » Il n’est pas toujours capable de faire preuve d’objectivité, d’une parfaite impartialité. Il s’agit d’un art que peu d’êtres vivants possèdent, maîtrisent. Faut-il être pur, pour ne jamais agrémenter le comportement de ses « congénères » d’un œil critique. Sa main saisit la chope vide, la poussant entre eux deux. « J’accepte une bière supplémentaire en dédommagement, dans ce cas. »

Un échange de bons procédés qui lui convient. Lui « donner un coup de main » ne lui a rien coûté. Il ne ressent pas la crainte face à ces gars, aussi forts soient-ils. Le loup a appris à ne redouter l’Homme qu’en quelques circonstances bien précises. Il a déchiré les gorges bien trop souvent pour se voir paralysé par l’instinct immémorial, la trouille au ventre ; celle de voir arriver l’extermination des siens, l'éradication des fauves menaçant les bergers. Alors il s’attarde, prend ses aises quand il le peut. Pactise en partageant oxygène et espace vital avec l’une de celles qui auraient pu tomber sous sa coupe. « Tu devrais tout de même envisager de changer tes passe-temps, si c’est pour te retrouver engluée dans ce genre de problèmes. Les bars regorgent de gens mauvais. C’est un terrain de chasse idéal, et tu ne vaux pas mieux qu’un lapin de garenne bondissant au beau milieu d’un pré. Mais ils t’ont vu. Ils ajustent leur viseur et bientôt, ils tireront. Paf. Fini la jolie fourrure toute blanche. » Un ricanement lui échappe. Il est réellement amusé. Il n’a jamais eu de scrupules envers les rongeurs pullulant dans le giron de leur ancienne ferme. Sous sa forme bipède comme lupine, des dizaines et des dizaines de ces gentilles bestioles, un peu stupides, sont venues emplir sa panse et l’aider à tenir jusqu’au lendemain.

« Je ne sauve personne. »
Si tu savais.
« Peu de monde mérite d’être sauvé. Je ne supporte simplement pas la bêtise et les rires débiles des hommes comme eux. Ton comportement et ton absence de réactions m’ont agacé autant qu’eux. » Il essuie ses lèvres à l’aide d’une serviette en papier comme les Amerloques en laissent une quantité faramineuse dégueuler des boîtes de métal où elles sont entreposées. « Quel âge as-tu ? Hum ? Vingt ans ? Pas plus de vingt-cinq, pour sûr. Je me demande comment tu as fait pour survivre jusqu’ici, avec cet état d’esprit. »

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Le Temps qui reste

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Jeu 24 Juin - 8:19 (#)


I need to breathe
Feat GAUTIÈR  MONTIGNAC


Je ne sais rien de celle que j'ai bien pu être avant, je ne connais rien de cette femme qui n'est recherchée par personne. Rien, un infini rien qui maintenant fait de moi celle que je suis. Complètement incomplète, découvrant des sensations, des goûts, des odeurs qui parfois semblent faire écho à des souvenirs bien cadenassés dans un coin inaccessible de mon esprit. Je me satisfais en me disant que je sais parler, raisonner et me débrouiller avec mes membres. La psychologue qui tente de déverrouiller ma mémoire me dit de penser au positif, elle me le martèle même car la dépression ne serait pas bonne compagne ou conseillère dans mon état. Mon état, ces mots me font toujours doucement rire, au premier abord, tout semble normal, c'est en grattant un peu la surface qu'on se rend compte que quelque chose cloche. Un nouveau né dans le corps d'une adulte, le côté couches sales et bave en moins quand même. Alors oui, je ne me rends sans doute pas bien compte du danger qui rôde autour de moi, des mauvaises rencontres que je pourrais faire en sortant comme ça nuits après nuits. Mais, je n'arrive pas à me trouver en plein jour, autant que je me cherche une fois la nuit tombée. 

Allez savoir pourquoi, la trouille de me retrouver seule sans doute, je finis par m'accrocher à cet homme au manque de tact, ose m'approcher et prolonger cette conversation pourtant vouée à demeurer stérile. Sans doute aussi que sa franchise pique ma curiosité, agite cette partie de moi qui devrait me tordre l'estomac alors que je brave un interdit, que je prends des risques idiots pour des souvenirs qui ne reviennent jamais. Il met de nouveau en avant le fait que je m'expose au danger. S'il savait comme cette notion ne rentre pas un seul instant en ligne de compte quand je quitte ma chambre du foyer. Dans mon être ne réside que le désir de fouler les rues sombres pour que la brise froide caresse mon épiderme avant de se faire mordre tendrement par la chaleur presque étouffante des bars dans lesquels je dépense le peu d'argent que j'ai. Je suis sans doute inconsciente alors, stupide aussi sans doute vu d'un œil extérieur. Il me juge donc, pourquoi pas, il fait bien ce qu'il veut après tout. Faut dire que moi aussi je le juge un peu, je sais pas qui il est et j'ai estimé en un regard que c'était le seul vers qui accrocher mes prunelles pour ne pas subir plus longtemps les assauts de ces connards. Peut-être est-il pire qu'eux? Il pousse son verre vide et accepte que je lui en paye une pour m'avoir extirpée des griffes de mes bourreaux de la soirée. J'acquiesce d'un signe de tête et en fait un au barman pour qu'il le serve à nouveau, j'en profite pour prendre une nouvelle gorgée de la mienne en écoutant ses mises en garde et cette comparaison parfaitement adéquate de l'animal pris pour cible par un chasseur. Je ne me rendais pas bien compte du danger avant ce soir, j'avais eu la chance insolente de m'en sortir sans la moindre égratignure physique ou psychologique. Ou alors j'avais des œillères et je préférais ne pas le savoir...

Sa bière arrive. Il ne sauve personne. Ironiquement, il vient de le faire même si ses raisons ne sont pas celles de l'homme bon. Étrange malgré tout sa façon de penser et d'agir en conséquence. Ses derniers mots me froissent. Comment j'ai fait pour survivre jusque là ? Mon sourire s'éteint, nouvelle tentative de noyade dans une dernière gorgée de bière, le verre est repoussé vers le bord que le barman le remplisse de nouveau. "Tu ne sauves personne… et pourtant, tu l'as fait avec moi et je t'en remercie une fois encore. Qu'importe tes raisons, le résultat reste le même pour moi. Je n'ai plus leur haleine sur ma peau et leurs mains baladeuses sur mon jean. Ta vision des choses est très… j'sais pas… détachée, désintéressée. Un peu comme si tu n'étais pas vraiment là tout en observant." Je tourne mon visage vers lui, l'observe un instant de mes prunelles claires, mes doigts jouent avec la condensation fraîche sur mon verre de nouveau plein. "Vingt-cinq ans, tu as visé juste, très observateur. Je ne sais pas non plus comment j'ai fait pour m'en sortir. Je dois avoir une bonne étoile qui veut que je vive encore quelques années. Sans doute que je brûle la chandelle par les deux bouts en sortant la nuit. J'sais pas. J'en ai besoin. Comme si retrouver ces ambiances m'aiderait. C'est con, c'est dangereux aussi du coup. Là où je vis, je m'ennuie, je me sens seule, j'ai besoin de cette foule alcoolisée, ça fait du bien au moral." Je détourne le regard en laissant échapper un rire amer. C'est franchement pathétique, je vais passer pour une ivrogne ou une cinglée. Cette amnésie me tuera, sans doute plus efficacement que la personne qui a voulu le faire.

Mon estomac se noue, mon cœur se serre. Je n'aime pas penser à ce qui a pu m'arriver pendant ce laps de temps qui a conduit mon cerveau à ériger un mur infranchissable dans mes souvenirs. Il a occulté vingt-cinq années de ma vie en ne me laissant que quelques acquis, me retirant l'écriture en même temps que ma vie d'avant. Ce qui est triste, c'est  que personne ne semble s'inquiéter de ne plus me voir, de ne plus avoir de mes nouvelles. Une inconnue qui semblait déjà être un fantôme aux yeux de cette ville. Énième gorgée, plus longue, délier ces nœuds, endormir mes craintes dans une douce ivresse. En fait, c'est ça que je recherche, me perdre encore un peu plus pour oublier que je suis mal dans ma peau. Pathétique, l'autre folle à l'hôpital avait raison; fallait que je cesse de pleurnicher. Un soupir. Je reprends mes esprits, claque mental pour ne pas me morfondre plus que de raison, je suis en vie après tout. "Tu sauves personne donc et tu fais quoi dans la vie? Flic? Journaliste? Psychologue? Ça pourrait coller avec ton détachement et ton côté observateur. Quoique flic non ou alors un très mauvais si tu t'en prends avec aussi peu de tact aux victimes." Un rire léger m'échappe, je joue son jeu à juger, jauger l'autre sans le connaître. Sa compagnie, quoique particulière, ne me dérange pas, ca change des rencontres éphémères aux accents de faux-semblants. 
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ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
Gautièr Montignac
Gautièr Montignac
ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
◖ INACHEVÉ ◗

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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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◖MINDHUNTER◗

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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Lun 2 Aoû - 3:54 (#)


Judgment
Sitôt arrivée, il s’empare de sa chopine de nouveau pleine pour descendre deux ou trois gorgées de houblon bien frais. Il ne force pas son désintérêt. Remarquablement cohérent, il ne bouge pas de sa posture, de sa position détachée. Ni hostile ni amical, il fait partie du décor, ayant retrouvé son impavidité seulement troublée par l’agitation interrompue. Il n’est pas sensible à ses remerciements, et toutefois il garde à l’esprit la politesse de la fille fragile. Ce n’est pas une vertu qu’il rencontre souvent, de la part d’une certaine frange de la population. Pudeur ou changement de mœurs, la déférence, la reconnaissance, sont comme autant de valeurs promptes à se perdre, à se dissoudre lentement dans le nouveau bain de l’époque, préférant la défiance, l’insolence et les attitudes impertinentes. Il n’oubliera pas. Elle vient de marquer quelques points discrets, figurant un score vague au tableau qu’il aura oublié dans une heure. Elle le distraie comme un match diffusé sur les télévisions aux quatre coins du bar aurait pu le faire. Elle met un peu de vie, un peu d’animation et de chaleur, de discussion inutile dans sa solitude. Il prend. Il prend toujours ce qui est bon, tant qu’à faire. Ce n’est pas si désagréable, d’autant qu’elle ne cherche pas à contester, à le provoquer, à lui tenir tête. Tant qu’elle demeure reposante et que sa voix n’est pas criarde, il l’acceptera dans son cercle, pour quelques minutes en suspens. D’autant qu’elle ne dit pas que des bêtises. Il frissonne un peu, lorsqu’elle touche juste peut-être sans se rendre compte d’à quel point. Nombreux sont ceux ayant cherché à cerner la créature en lui. Bien peu ont pu ne serait-ce que frôler du bout de l’ongle le début d’un commencement de vérité à son sujet. Il n’en tire aucune gloire. Simplement un peu de lassitude. Et cette humaine, tout juste sortie du pétrin, est à sa façon bien plus lucide, perspicace et pertinente que bon nombre des blouses blanches qu’il a eu à affronter par le passé. Il tourne de nouveau la tête vers elle, comme si elle était parvenue à l’intéresser davantage, pour de bon cette fois. Il a quitté son masque de sarcasme, pour la dévisager, les traits nus. Leurs prunelles se rencontrent. Le contact est curieux. Presque doux. Sans qu’elle ne s’en aperçoive, il se laisse peu à peu attirer par sa candeur dénuée de malveillance. Elle semble transparente. Pas forcément fade, de prime abord, mais telle une enfant à l’esprit vierge quant au monde qui l’entoure. Vulnérable, mais dénuée de jugement. Une proie facile, mais qu’il ne se mettra pas en tête de chasser, cette nuit. Lentement, il sourit. Un tout petit peu. Il consent à laisser une bulle de légèreté enfler dans sa poitrine, tandis que ses longs doigts fins se referment plus sûrement sur la surface glacée du verre.

« J’ai vraiment l’air d’un flic ? » Il trouve la remarque amusante, et secoue la tête. « Je pourrais presque le prendre mal, attention. » Sirotant de nouveau l’alcool, il ne la fait pas languir plus longtemps. « Je n’ai pas de temps à perdre à courir après tous les criminels de ce monde. Et je n’ai pas la carrure d’un flic. Je leur laisse leurs plaques, leurs voitures et leurs uniformes… je ne fais pas partie de leur monde. »

Je suis leur Némésis.
Je suis le reflet de leurs angoisses.
Je suis l’une des innombrables raisons qui les poussent à s’enrôler.
Je suis le Monstre que certains rêvent d’accrocher à leur tableau de chasse.


« Journaliste, psychologue… Ces métiers-là ne sont que des impostures. Ce sont ces professions qui ont refaçonné le monde. Aujourd’hui, tout est vu sous le prisme médiatique sensationnel, doublé d’une analyse permanente de l’émotion… L’émotion, partout. Le cérébral est devenu l’ennemi. On ne pousse plus les gens à réfléchir. Simplement à ressentir. » Il la darde de ses prunelles pénétrantes, guère méchamment toutefois. « Toi, tu dois être du genre à ressentir beaucoup. Les femmes baignent dans le sensoriel. Elles… ressentent tout, avec plus d’acuité, j’ai l’impression. Le bon, le mauvais, l’excès… leur malédiction, c’est bien d’être un réceptacle ayant saturé et d’où émane à son tour toutes ces ondes qui saturent l’atmosphère. Tu n’es pas d’accord ? »

Il croit en son discours. Il n’y a pas de volonté d’éblouir son interlocutrice. Il ne fait que poser des mots sur l’un de ses étonnements quotidiens, pour ne pas dire : l’un de ses constats qui l’écoeurent. « Je préférais quand je n’entendais pas parler d’eux. Les journalistes et les psychologues. Ce ne sont que des parasites qui ont réussi à se hisser tout en haut de la pyramide, ou bien du corps qu’ils sucent pour atteindre les replis les plus chauds. C’est comme ça que je les vois. »  

Lui, n’aime pas le tact. Il ne l’a jamais connu. On ne prenait pas de gants, autrefois. Pourquoi saurait-il, pourquoi voudrait-il en prendre envers le monde et les autres ? Égoïstement, il ne cherche pas à étendre sa conscience, à saisir et développer son empathie. Il ne pense pas en être capable. Plus maintenant. « Je n’ai pas une opinion très populaire, je crois. Mais tu as raison. Je ne suis pas là. » Il frémit de nouveau, en articulant lui-même une vérité lui apparaissant comme éclatante. « Je ne suis plus là. » Sa prise se fait moins assurée. Il boit pour oublier pendant quelques secondes, pour ne se concentrer que sur la fraîcheur qui anesthésie l’intérieur de sa bouche, focalisé sur ses organes internes, sur la descente du liquide froid, délectable. Le feu s’apaise, un peu.  

« Toi non plus tu n’es pas là. Si tu passes tes nuits à vouloir te perdre dans la foule, alors tu n’es pas vraiment là. On se délite parmi les autres. L’influence est partout. Tu ne peux plus penser seule, au milieu d’un groupe. Tu t’annihiles plus que tu ne t’aides en faisant cela. »

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Le Temps qui reste

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Mar 5 Oct - 22:03 (#)


I need to breathe
Feat GAUTIÈR  MONTIGNAC


Musique d'ambiance Sub Urban - Freak

Avoir une conversation quasi normale avec une personne autre que Amina ou celles qui gravitent au foyer ne peut que me faire du bien. Il est bizarre mais, je sais pas, j'aime bien cette bizarrerie, ça me change de d'habitude. Puis il ne cherche pas à profiter de moi, ses mains ne sont pas baladeuses, son regard n'est pas dégoulinant de vices. Bizarre oui, intéressant surtout. De par sa manière de parler, de se tenir là avec son assiette alors qu'autour ça picole sec en se nourrissant de quelques planches de charcuteries et autres tapas rapidement engloutis sans prendre le temps d'user de piques ou de couverts. Doigts gras et haleine imbibée, un duo du tonnerre pour les futures conquêtes. Les détails. Je m'y attache. Un peu comme si ma mémoire pouvait encore me faire défaut. Comme si un matin, soudain, plus rien de nouveau. Le froid ronge mon épiderme. Cette peur de tout perdre une fois encore. Alors, je m'attache aux détails. Me souvenir des gens, le visage, les yeux, la bouche, la posture, le langage, des tics. Des détails, qu'importe lesquels, tant qu'ils dressent un portrait de mes rencontres. Une fois rentrée, je les ajoute dans mon carnet sous forme d'images car les mots sont toujours absents de cette nouvelle personnalité. Quand on ne peut écrire, il faut avoir des souvenirs affûtés, pas le choix. Se raccrocher à ces bouées de sauvetage et marquer mes rencontres de manières indélébiles. 

Il est différent des hommes que je rencontre dans les bars. Il fait partie du décor et pourtant il s'en détache à mes yeux. Croiser son regard. Il daigne délaisser son plat pour ma personne, ce qui illumine brièvement mon visage. Un brin embarrassée et presque flattée qu'il pose un bref instant son détachement de côté. Un léger sourire flotte sur ses lèvres… Enfin si ça en était un d'ailleurs car il n'est déjà plus alors qu'il répond à mes suppositions sur le métier qu'il pourrait faire. Il a de la conversation, ses mots bien choisis, si bien que je bois ses paroles sans chercher à l'interrompre ou glisser des oh… ou des bien sûr qui seraient bien inutiles et parasites. Je me contente de me tourner complètement vers lui, jambes croisées se balançant dans le vide. Il a toute mon attention depuis qu'il m'a sortie des griffes des soulards et encore plus maintenant que je comprends qu'il est totalement différent de ceux qui nous entourent. Donc ni flic ni journaliste ni psychologue, dommage… quoi que. Parler avec un psy et un flic, j'ai déjà donné et je n'aime pas vraiment la manière qu'ils ont de me juger, de m'analyser comme si j'étais une idiote ou un animal de laboratoire. 

Je me contente de hocher la tête à sa question. Je ne sais pas si toutes les femmes ressentent beaucoup mais oui, depuis mon réveil, je m'attache à mes ressentis. Après, je ne sais pas si ce qui agite mes sens est toujours bon pour moi mais, je n'ai plus que ça alors, autant me fier à ce qu'il me reste. Je ne dirais pas qu'auprès de lui je me sente en sécurité, ça serait faux. Il y a, en tout cas, une part de moi qui me dit que je ne risque pas ma vie en restant là ce soir en tout cas. Quand on a plus les souvenirs, on s'attache au moment présent, ce qui me vaut de mauvaises rencontres ainsi que d'autres qui réchauffent un peu le cœur et l'âme. Ma psy n'aime pas ces sorties nocturnes, si elle pouvait, elle m'enfermerait en hôpital pour pouvoir garder le contrôle de mon mental en pièces détachées j'en suis sûre. Une gorgée de bière et je reviens au moment présent, des parasites. Oui, il n'a pas tort sur ce point. Il y a eu des journalistes au début, quand une Jane Doe fait son apparition, on a envie de faire un papier qui fera vendre et si le dénouement est heureux ou pas même d'ailleurs, c'est encore plus juteux. Sauf qu'avec moi, il n'y avait rien à se mettre sous la dent, un vrai naufrage, l'article à mon sujet a vite été relégué aux faits divers décrits en quelques lignes insipides. Un léger rire m'échappe, ses mots me tirent de mes fugaces pensées moroses. Le tact ne l'étouffe pas, il n'y a visiblement pas de filtre entre ses pensées et les mots qui glissent hors de ses lippes. Ce n'est pas pour me déplaire, au contraire, ça change des faux culs, j'adore même. 

Mais tu as raison. Je ne suis pas là. Un étrange frisson glisse sur mon corps sur ces mots. Comme un écho à ma condition actuelle. Je sais que j'ai dit un peu plus tôt que c'était comme si il n'était pas là tout en observant mais, ces paroles sortant de sa bouche avec son ton détaché ne donnent pas du tout la même saveur à cette observation presque innocente de ma part. Les mots se retournent contre moi, psychanalyse de comptoir que je ne prends pas aussi mal que je le prendrais dans le cabinet de la tritureuse de cerveaux. Il analyse simplement les phrases que je livre sans vraiment y réfléchir, sans filtre moi aussi, pour changer. Je ne suis aucunement sur la défensive ici, un peu comme en terrain connu ou tout du moins neutre. "C'est vrai, c'est juste tout ce que tu dis. Malgré ce que tu penses d'eux, tu ferais un bon psy… Encore faudrait-il que tes patients ne soient pas trop fragiles au point d'être froisés par ton manque cruel d'empathie de leur balancer en pleine face les choses qui les paralysent." Aucune animosité dans mes propos, un simple constat abordé avec un sourire aux lèvres. "Mais… tu as raison. Ce que je fais de mes nuits ne m'aide aucunement. Je suis juste mon instinct depuis quelque temps, je n'ai que ça à quoi me raccrocher tu vois? Autant ne pas être là tout en étant entouré sinon autant se tirer une balle ou se tailler les veines pour ne plus être pour de bon tu ne crois pas? Puis, avoir l'impression d'exister dans le regard de l'autre, ressentir, des joies, des peines, des peurs, des désirs… Ça aide à se sentir encore vivant. Comme je te l'ai dit, ça fait du bien au moral même si ce n'est qu'éphémère."

Je me rends compte que mon discours vire dans la noirceur alors qu'on avait trouvé un peu de légèreté après mon passage à vide avec le groupe d'ivrognes. Je vide le reste de ma bière d'une traite et joue distraitement avec mon verre en glissant mon doigt sur le bord pour le faire dangereusement tanguer sur le comptoir. Mes prunelles reviennent sur lui, sur sa posture, son assiette qui se vide elle aussi. "Alors? Tu vas me dire ce que tu fais de ta vie ou je vais encore devoir me noyer dans des suppositions encore plus farfelues? J'avais espéré viser juste pour t'impressionner un peu après mon pathétique manque de hargne à me défendre contre ces mecs." Je me pare d'un nouveau sourire, toujours aussi franc que les précédents malgré ce que je venais de dire. Encore une fois, quand on est dans ma situation, soit on croque la vie à pleine dent, soit on se morfond dans un coin et on attend la fin. Je préfère grandement m'en prendre plein la gueule et avoir quelques moments intéressants comme celui-ci même si parfois je sombre un peu. Je sais me relever rapidement quand il le faut et garder mes larmes quand je suis sous ma couette. "Analyste? Comportementaliste? Ou bien tueur psychopathe. Ça collerait bien au personnage en même temps, tu es là dans ce bar avec ton air détaché, comme ce gars là… Il est dans un film. Ou une série je sais plus. Il cuisine des victimes je crois…. Bref, désolée, je m'emballe pour un rien puis… c'est pas hyper sympa pour toi de te mettre dans la catégorie des tueurs psychopathes." Ma voix s'est emballée, comme si c'était une évidence, sombre connerie oui.
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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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◖MINDHUNTER◗

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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Pseudo : Nero
Célébrité : Harry Lloyd.
Double compte : Eoghan Underwood, Sanford R. De Castro, Aliénor Bellovaque & Ian C. Calloway
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Mar 23 Nov - 23:48 (#)


Judgment
Paix intérieure.

Ces deux mots ne signifient plus rien pour lui. La paix intérieure n’a jamais représenté un concept atteignable à ses yeux. Il ne s’est jamais posé ce genre de questions, comme celles d’une sérénité à acquérir. Il vivait. Il faisait. Il parlait. Son époque ne laissait pas la place à ce style de concepts. À tort ou à raison, il n’a pas envie de s’interroger là-dessus. Mais s’il devait tenter de l’apposer à des images, à des scènes, à des instants, peut-être choisirait-il celui-ci pour qualifier l’échange particulier qui le relie à l’humaine dans ce bar. Le cadre lui est rassurant, l’heure de la journée agréable, et la compagnie… pas déplaisante. Elle ne pépie pas pour ne rien dire. Elle sait écouter. Elle est attentive. Elle ne déblatère pas des expressions dont il comprend à peine le sens, dont son cerveau toujours en retard doit analyser la signification ; le phrasé populaire américain ne lui est pas toujours aussi intelligible que celui des patois provenant de son pays natal. Le temps passé aux États-Unis n’y change rien, d’autant que les traditions verbales et idiomatiques changent à toute vitesse, dans une frénésie dont il se détache spontanément. Ici, il ne se sent pas perdu, pas hostile, pas agacé. Il se contente d’être. D’exister, un peu. De profiter d’une aura étrangère qui ne lui veut aucun mal, et qui le distrait de ses habitudes surannées.
Il sourit de plus belle lorsqu’elle insiste, persiste à croire qu’il ferait un bon psy. Il en connaît une qui ne serait pas d’accord avec cette idée. Une dont la carrière toute entière demeurait la seule véritable obsession, avec lui. Les deux l’ont dévorée. Renvoyée aux oubliettes dont elle n’aurait pas dû sortir. Ça, c’est ce qu’il aime à croire, à se ressasser, lorsque sa rancune revient lui pourrir l’esprit et lui donner l’envie de mordre de ses crocs dans la chair d’une proie innocente. Une, dont les cheveux sont de la même couleur que la jeunette près de lui, et sans doute pas beaucoup plus longs, aujourd’hui. Au fil des années, au fur et à mesure que leur relation se renforçait, se dégradait, cette satanée chevelure n’avait cessé de raccourcir. Comme il détestait ces cheveux courts. Il perdait l’envie d’y glisser les doigts. Il lisait trop bien la masculinité pareille à son tempérament de fer, à cette lutte pour surmonter les affres d’une féminité ne prédominant que dans l’intimité. Songer à elle le dérange. Songer à elle lui déplaît. Ils n’ont pas réglé leur histoire. Le temps passe, les souvenirs restent, mais ils n’ont rien en commun avec l’histoire vécue dans les bras de Mei Long. D’autres belles mèches noires. Si longues, elles. Les avertissements de Kaidan Archos restent bien présents dans sa mémoire, et savoir que son ancienne geôlière a aiguisé ses griffes pour repartir sur ses traces ne fait que le conforter dans ce regret qui n’en est pas un : ils n’en ont pas fini, tous les deux. L’un ne pourra vivre, tant que l’autre n’aura pas été défait.

La voix joyeuse le ramène sur terre. L’air un peu ailleurs, il sourit en réponse par réflexe. Un sourire un peu faux, artificiel, pas méchant. C’est sa façon à lui de faire des efforts. De montrer au monde qu’il vaut encore la peine de rester quelque temps. Juste un peu plus. Juste pour être certain de ne pas quitter la surface du globe trop tôt. Trop tôt ? Tu parles. Son âme étirée, dégingandée, contient à peine assez de substance pour ne pas lui faire ressembler à un véritable fantôme. Il exagère. Il n’est pas raisonnable.

« Bravo. Tu as trouvé. »

Il joue au con. Un sacré requiem, pour d’autres, mais aussi pour lui en cet instant. L’ambre coule dans sa gorge, tandis qu’il fixe devant lui le reflet métallique des tireuses à bière, aperçoit son image déformée dans l’éclat d’une machine à pression. « Tueur psychopathe. C’est bien moi. C’est comme ça qu’on me qualifiait, fut un temps. » Des couloirs tristes à pleurer. Une moquette dégueulasse étouffant les bruits de pas des hommes, les talons des femmes. Des stores toujours bourrés de poussière, des vitres jamais lavées, souillées par la poussière apportée par la pluie new-yorkaise. L’odeur qui ne s’en allait jamais. La pollution, des années après la Catastrophe. Il la sentait dans l’air. Il sentait déjà qu’elle tuerait bon nombre de gens, ici bas. Pas tout de suite. Pas si vite. Mais au fur et à mesure, à force de s’encrasser dans les poumons des uns et des autres, des braves contribuables américains, de quelques touristes s’attardant au mauvais endroit et au mauvais moment… La mort n’en finissait pas de planer. Il pouvait la caresser du regard, d’un toucher immatériel, chaque soir, chaque nuit. Il en avait prévenu Medea Comucci. Comme d’autres, elle n’avait pas réellement prêté attention à ses propos, les trouvant sûrement trop sibyllins, énigmatiques.

« Je ne cuisine pas mes victimes. Je n’ai pas le temps pour ça. Je sais que d’autres le font. Personnellement, je ne saurais pousser le vice à ce point. Je préfère être plus… efficace. Concentré. Je ne suis sans doute pas le plus raffiné parmi mes comparses. Nous avons tous notre style, après tout. » Il en avait vu défiler, des monstres. Des que le Pasua traquait. Des que les médias affichaient. Des que les livres racontaient. Il ne se sentait pas lié à eux. Il se trouvait différent. Pourtant, dans l’opinion publique, il sait que rien ne pourrait franchement le différencier de ces monstres-là. Cannibales, dépeceurs, pédérastes, pédophiles, tueurs de prostituées, tueurs de flics… Sa main droite remue, comme pour se débarrasser d’un rouage coincé dans ses articulations. « Tu n’a pas à t’en faire. On a fait bien pire que me placer dans cette catégorie-là. »

Il tourne la tête vers elle de nouveau. Les bras croisés contre le comptoir, contemplant sa cadette avec aménité. L’œil du loup brille, mais l’émeraude demeure. Ce n’est pas le moment d’instiller le doute davantage que ses propos ne le font déjà. Ce serait inutile. Une bravade qu’il pourrait payer cher. « J’espère que ton instinct te sera plus salutaire que le mien. J’espère que tu trouveras ce que tu cherches, à errer la nuit. Même si ce n’est pas sûr. Même si je te le déconseille. » Elle ressemble à un petit chaperon rouge différent des autres, au jean déchiré mais à la naïveté semblable. Une Blanche-neige que la forêt n’aurait pas épargnée. Cette jungle urbaine pourrait bien lui être fatale. Elle ne bougerait pas. Elle resterait là, lapin égaré, surpris par les phares d’une voiture. Il ne lui donne pas longtemps à vivre ainsi, si son mantra persiste. « Je comprends. Tu veux assumer ton état d’animal social. » Contrairement à lui qui n’avait eu de cesse que de chercher à s’éloigner des autres. Le groupe était mauvais. Le groupe lui était fatal, quelque part. Le groupe l’avait trahi tant de fois que l’homme comme la bête s’étaient épuisés à apprendre leurs mœurs et coutumes. Partir faisait moins mal. « Tu devras faire attention. Peut-être que tu réussiras dans cette voie. Si la vie t’appelle, alors tu as raison de ne pas l’ignorer. »

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Le Temps qui reste

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Mer 29 Déc - 22:11 (#)


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Je ne sais où va me mener cette soirée mais au moins, je ne suis plus la cible de soulards aux désirs malsains, aux mains plus que baladeuses. L'alcool glisse dans mon être, allège le poids de mon âme, de mes manques qui obscurcissent mes traits par vagues successives. J'aime à penser que boire m'aide à être plus naturelle, à ne pas me laisser submerger par mes émotions négatives. Et, c'est réellement le cas car, je fais des rencontres, des hommes occupent quelques heures de mes nuits froides pour des échanges non-verbaux qui me suffisent amplement, qui comblent le manque, le vide qui me fait me sentir creuse et incomplète. Des hommes de passage, jamais les mêmes ou alors que très rarement. Une traînée aux yeux de beaucoup sans doute mais, je m'en moque, j'assume d'écarter les cuisses pour un peu de chaleur humaine. Je suis consentante, ce qui diffère avec ce qu'il s'est passé quelques heures plus tôt. Ce soir, c'est autre chose, je ne cherche pas à séduire cet homme, parce qu'il me semble différent. Parce que cette différence m'intrigue plus que le désir qui m'anime habituellement. Habillée de cette gaieté enfantine qui ne me ressemble pas vraiment suite à ma supposition stupide, je fais un nouveau signe au barman pour qu'il me serve de nouveau, sans doute le dernier pour cette nuit.

Ses propos me font sourire, rire même au premier abord. Qu'il rentre dans mon jeu, se joue même de ma stupidité passagère quant au fait qu'il puisse être un tueur psychopathe. Les mots déferlent, me retombent dessus et font naître quelques sueurs froides à ma nuque. Il parle, valide mes hypothèses et en réfute d'autres pour que mon cerveau se mette en marche pour imaginer la boucherie, la douleur, les hurlements de ses victimes. Et si... Je déglutis difficilement. Et s'il était le responsable de mon état? Et si je m'étais jetée délibérément dans la gueule du loup? Mouvement de recul, léger mais, perceptible. Position qui se modifie, sur la défensive soudainement, sur la défensive alors qu'il se dévoile sans la moindre pudeur. Puis, il remue la main et chasse la trouille qui me nouait l'estomac. Il s'est joué de moi, il a une fois encore retourné mes propos contre moi et j'ai plongé comme une andouille. Je laisse un long soupir m'échapper et un sourire de nouveau éclairer mon visage alors que je secoue la tête pour chasser à mon tour ce que j'ai pu imaginer à son sujet. La bière arrive au meilleur moment, j'en prends une longue rasade en veillant à essuyer la mousse sur ma lippe supérieure. J'ai joué et je me suis bêtement brûlée, tombée dans mon propre piège. Je savoure sa légèreté, le fait qu'il ne prenne pas mal ma supposition plus que fantasque.

Il se tourne vers moi, croise mon regard alors que ma tête repose au creux de ma main, accoudée au comptoir mon verre déjà à moitié vidé à cause de l'entrelacs d'émois qui s'était entortillé dans mon être tout entier. Sans doute l'a-t-il remarqué. Sans doute est-ce pour ça qu'il a coupé court à son discours flippant. Qu'importe, je me sens bien plus apaisée à présent qu'on reprend notre conversation où elle était restée avant que cela devienne inquiétant. Le retour de la simplicité qui m'a fait m'intéresser à lui malgré son côté bizarre et étrange. "C'est rare...c'est vraiment rare de trouver une personne aussi prévenante qui dit malgré tout s'en foutre. Je trouve ça… touchant, adorable même. Je te remercie pour tes mots même si mes actes ne les suivront pas forcément. C'est pas simple pour moi de faire autrement, de vivre cette vie comme une femme lambda." J'en dis trop sans en dire assez pour qu'il puisse saisir la totalité de ma personnalité et mon désir ardent de ne pas me retrouver seule trop longtemps. Comme si la présence de quelqu'un auprès de moi pouvait éviter une nouvelle perte de mémoire. "Je vais sans doute abuser mais… Tu accepterais de me raccompagner une fois ta soirée terminée? Si tu veux encore boire un coup, c'est moi qui paye hein."

Je retrouve le sourire léger que j'arborais un peu plus tôt même si je suis quelque peu embarrassée de l'embêter une nouvelle fois. Je lance un regard derrière mon épaule, comme pour rechercher les gars qui pourraient en avoir après moi si je sortais d'ici seule. Je reviens vers lui, retrouve ses prunelles devenues rassurantes. Havre de paix éphémère. " Tu parlais de ton instinct. Qu'il ne t'avait pas été salutaire. Tu t'es attiré des ennuis en le suivant? Je m'en suis aussi attiré et sans doute des gros vu où j'en suis à présent. Mais, j'ai du mal à ne pas me fier à mon instinct. C'est plutôt compliqué de lutter contre ce déferlement d'adrénaline qui nous pousse à faire tel ou tel choix sans raisonnement logique parfois. Tu vois ce que je veux dire?" Faire durer la conversation, encore un peu. Que la nuit s'étire, encore un peu. Que le danger s'éloigne, encore un peu lui aussi. Je crains de quitter ce pub, j'ai peur de croiser leur route dans un angle mal éclairé et même s'il l'était? Les gens se moquent bien de la détresse des autres, égoïstes, aveugles et sourds à ce qui dépasse la circonférence de leur bulle intime. Les agressions se font à proximité de lieux bondés, débutent dans ces derniers sans attirer la moindre sympathie. Une demoiselle qui semble juste un peu éméchée, entourée de quelques hommes qui rigolent et parlent fort, le tour est joué.  
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Gautièr Montignac
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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Lun 17 Jan - 3:33 (#)


Judgment
Il entrevoit le doute. Et cela lui fait plaisir. Cela lui rappelle le bon vieux temps. Celui pendant lequel sa morale avait tout envoyé valser. La liberté qu’il éprouvait alors, il n’en a plus jamais retrouvé la saveur. En contrepartie, la douleur, les automutilations et les délires allaient loin. Très loin. Mais cette sensation délicieuse de se délester de toute règle sociale, de toute emprise humaine, autoritaire… Il caresse du bout de ses songes ses déambulations dans le Gévaudan. Solitaires, certes, mais tellement éloignées de tout ce qu’il avait connu jusqu’alors. On ne lui donnait plus d’ordres. Il n’avait plus à trouer la panse des Boches parce qu’une succession de guerres ayant débuté bien avant sa naissance l’avaient fait naître au mauvais endroit au mauvais moment. Il se demande si les déserteurs de son régiment avaient éprouvé la même chose, au moment de franchir l’autre côté du parapet. Envoyer valser la hiérarchie, les officiers, la fierté de la nation, la défense de la France… On n’a rien sans rien. Les exécutions en guise de représailles, les lourdes peines à exécuter… Lui, sa peine, il l’avait effectuée seul. Il se l’était attribuée, seul. Et elle, assise près de lui, n’a aucune idée du gouffre de souvenirs qu’elle fréquente, avec lequel elle converse comme si de rien n’était. Ou presque. Car oui, il a vu le doute. Rapidement effacé par une légèreté nécessaire à l’absence de peur. Sans doute regrette-t-elle déjà son mouvement de recul, trop éloquent. Il avait raison. Elle n’est qu’une proie que le premier prédateur passant pourrait convoiter pour envisage un dépiautage en règle. Rien de plus facile. Presque trop facile, à vrai dire. Elle a de la chance. De la chance de ne pas être née au mauvais endroit au mauvais moment. De la chance de ne pas s’être aventurée dans le Maine ou le Maryland, déambulant dans les forêts profondes desquelles elle ne reviendrait jamais. Petit chaperon rouge tombée sur un loup sans scrupules, elle aurait rejoint d’autres compagnons d’infortune aux ossements blanchis par le temps et les vers, planqués sous une couche épaisse de feuilles mortes ou tout au fond d’une crevasse.

Elle possède une beauté particulière, et en lire les affres au travers de ses expressions nombreuses ne lui est pas désagréable, à l’image du reste. Lui ne bouge pas. Son visage est rarement bouleversé, ce soir. Elle se montre bien plus intéressante. Sa naïveté n’est absolument pas impactée par l’aura du garou. Il trouve cela plutôt fascinant. Elle se trompe si fort qu’il commence à comprendre comment une fille comme elle s’est peu à peu changée en âme errante, cherchant désespérément un but, mais s’empêtrant dans chaque entrelacs de ronces qui se présente à ses pieds. Elle n’est pas sereine. Elle craint les autres dont il l’a délivrée bien plus qu’elle ne le devrait, en comparaison avec le Français en cavale. Il ignore s’il a réellement envie de s’embarrasser du petit lapin blanc. Il devrait poursuivre le fil de sa soirée, faire comme si de rien n’était. Pourtant, son regard cherche finalement à repérer les violeurs en puissance. Ils attendent. Il reconnaît la tension qui habite leurs dos, leurs épaules et leurs mains nerveuses faisant tourner les verres. Leur gueule de clébard abâtardi, prêts à montrer les crocs au premier stimulus. S’il la laisse filer seule, elle y passera. Il ne s’inquiète pas vraiment du sentiment de culpabilité qui ne l’atteindrait probablement guère. C’est autre chose qui le pousse à ne pas lui dire non.

« Je me suis attiré plus d’ennuis que tous les gens de ce pub réunis, tu peux me croire. » Sa voix conserve ce timbre sobre, presque humble. Il ne se vante pas. Il n’a jamais trouvé intelligent de se vanter des crimes commis, des écarts de conduite. Il ne les a jamais jetés à la tête de ses bourreaux que lorsque le désespoir l’habitait, prisonnier de leurs griffes intrusives. « On ne peut pas faire autrement. Certains décident de tourner le dos à leurs instincts, pour le restant de leurs jours. Il ne resurgit que si les conditions le permettent. Dans une situation particulièrement urgente ou mettant en péril leur existence. Et encore. Mais ceux qui s’y accrochent corps et âme ne peuvent plus s’en détourner aussi facilement. Toi et moi appartenons à cette seconde catégorie. Ce n’est pas toujours un mal, mais cela implique des retombées parfois… fâcheuses. » Le mot est faible, et c’est pourquoi il l’amuse. « L’adrénaline sauve. Mais si tu oublies totalement la logique… alors pas sûr que ton sursis dure. » Il se redresse et glisse de son siège, plongeant dans sa poche pour en extirper son portefeuille. Il balance de quoi payer son repas, agrémenté du pourboire cher aux Amerloques, avant de pivoter dans sa direction. « Je ne suis pas prévenant. Ce n’est pas touchant, et certainement pas adorable. Ne remercie pas un inconnu rencontré dans le premier bar venu. Si tu continues sur cette voie, tu vas finir balancée dans un caniveau ou un fossé à l’entrée de la ville. Et même ton instinct et l’adrénaline n’y pourront rien. »  

Il ne jette pas de coup d’œil supplémentaire vers les locaux. Ils le prendraient comme une provocation, il en est sûr. Sans hâte excessive mais sans lambiner, il prend la direction de la sortie, comptant sur leur victime pour le suivre sans discutailler. Il attend d’être dehors pour se retourner vers elle, la gratifiant de sa cruelle franchise : « Je te raccompagne parce que tu me fais pitié. Parce que tu ne vas pas t’en sortir si je te laisse là. Ils te rattraperont et ils ne te laisseront pas filer, cette fois. On doit s’en aller. Maintenant. » Il attend qu’elle lui indique la direction à prendre pour s’éloigner de l’établissement. Il y a un peu de colère, une sorte de hargne dans sa manière de déambuler. Loup aux aguets. « Je ne sais pas ce que tu entends par vivre cette vie comme une femme lambda, mais crois en mon expérience : à ce rythme, tu ne vas pas faire long feu. Et tu n’auras pas toujours un crétin comme moi pour t’escorter au moment de rentrer. »  Il tend la main, et ses phalanges se referment sur le bras de l’humaine. Il la tient. Il ne sait pas pourquoi mais quelque chose lui dit de la tenir. Qu’elle ne s’éloigne pas. Qu’elle tienne la cadence. « Tu veux te faire tuer, à terme ? C’est ça, ton ambition ? » Il secoue la tête. « J’en ai connu une, femme comme toi. Elle aussi était suicidaire. Elle non plus n’écoutait rien. Toutes des butées, des gazelles qui se pavanent devant des lions. Et ça s’étonne de se faire mordre. »

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Dim 27 Mar - 13:26 (#)


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Musique d'ambiance Sub Urban - Freak

Je sais qu'ils sont là, ils n'ont pas eu leur proie, il ne sont pas repus. Ils attendent le bon moment, la bonne occasion pour fondre de nouveau sur moi et, cette fois, il n'y aura personne pour me sauver les miches. Non. Je ne suis pas encore en vie après avoir subi de nombreux sévices pour que ces mecs s'en prennent à moi ce soir. Habituellement, je sais passer au travers des gouttes, je sais esquiver ce genre de "désagréments". Là, ma seule chance a été de tomber sur cet homme. Sauveur qui ne se reconnaît pas comme tel mais, qu'importe, il m'a sauvée et j'espère qu'il le fera encore le temps que je rentre au foyer. Pour une fois, je ressens de la peur, une angoisse nichée dans l'estomac. Sa présence étouffe un peu cette sensation, l'alcool l'allège autant qu'il l'accentue. Une envie de rentrer, de fuir ce lieu qui me semblait accueillant et chaleureux au premier abord. Il n'est en rien responsable, bien au contraire, sa présence est agréable sans que je cherche à le séduire pour qu'il comble le vide glacial en moi. Une simple conversation autour d'un verre sans la moindre arrière pensée. Je me montre à nu avec une personne autre que ma psychologue et le corps médical qui vérifie encore mon état depuis que j'ai été retrouvée dans la rue. Que je n'aime pas repenser à tout çà, ces souvenirs que je n'ai plus, m'entendre dire que ça devrait revenir à tendance à me braquer, à m'énerver puis à profondément me déprimer.

Comme plusieurs fois depuis que nous avons entamé notre conversation, il me sort de mes troubles brumeux. Lui? S'attirer des ennuis? Oui, sans doute s'il se lance à la rescousse d'idiotes comme moi, même si au premier abord, il semble être le genre de mec à détourner le regard à cause d'un corps de lâche. Le jugement. Voilà un trait de ma personnalité que je sens ancré en moi depuis toujours par contre. Amina me dit souvent que l'apparence ou la première impression ne dit pas tout de la personnalité. Il développe en parlant de suivre son instinct au lieu de l'étouffer. Je me retrouve dans cette explication et il m'inclut avec lui dans cette part des gens qui se laissent vivre comme bon leur semble, comme leur instinct le dicte sans réellement se soucier des conséquences. Je veux juste profiter de cette vie nouvelle, de cette vie sans souvenir, vierge des erreurs que j'aurai pu faire par le passé. Fâcheuses, le mot est bien faible pour ce soir et pour mon passé. J'esquisse malgré tout un sourire... "Pas sûr que ton sursis dure"... qui s'efface immédiatement à ses mots, j'avais dit qu'il n'était pas la cause de mon envie de partir, je change immédiatement d'avis. Les mots et leur puissance. Il use de franchise avec très peu de tact. Si j'ai trouvé ça agréable au départ, je déchante légèrement. Oui, agir comme je fais risque de me couter cher, très cher même. Peut-être que cette inconscience faisait déjà partie de moi avant mon amnésie et que c'est à cause d'elle que je suis dans cet état actuellement. Qui sait? Moi bien évidement mais, il me manque certaines connexions pour que la lumière se fasse. Peut-être, peut-être. Il y a que ça qui tourne en boucle depuis que je me suis réveillée à l'hôpital, rien que des incertitudes, des champs des possibles sans moindre réponses à mes questions. Alors, je m'enivre, tente de refaire des liens, de retrouver ceux qui auraient pu me redonner mon identité, m'aider à redevenir enfin moi. Pourtant, je n'ai encore trouvé personne pour m'aider à reconstruire mes manques, mes doutes. Je n'étais qu'une parmi d'autres un visage familier mais inconnu en fin de compte.

Il enfonce le clou alors qu'il paye pour son repas, qu'il met un terme à cette lente agonie dans une ambiance devenue étouffante. Ses paroles devenues bien trop crues. Moment de flottement. Il a payé pour me fuir ou pour accepter de me raccompagner? Dans le doute, et surtout pour ne pas sortir seule de ce coupe-gorge, je me décide à lui emboiter le pas. Je me dis qu'au moins, les autres penseront qu'on est ensemble même si ce n'est pas réellement le cas au final. J'enfile rapidement mon sweat et passe la capuche sur ma tête. Je ne demande pas mon reste et me glisse hors du bar sans un regard au groupe encore plus alcoolisé qu'à mon arrivée. Le froid gifle mes joues brûlantes, j'aspire l'air à grandes goulées comme en sortant d'une trop grande a prée. Des fourmis dans les jambes et la brume aux coins des yeux. Celui qui m'a sauvée est bien là, m'assène une nouvelle attaque en plein estomac pour y faire germer un nœud. Je reste interdite sous ses mots, la bouche entre ouverte et des larmes menaçant de poindre le bout de leur nez. L'alcool aide un peu et je fais un signe de tête pour lui indiquer la route. Pas de merci, je fais suffisamment pitié non? J'ouvre la marche, ruminant sur ce qu'il vient de me dire, sur cette vie que je crame par les deux bouts sans me soucier des conséquences. Non pas que je ne m'en soucie pas mais… La vie est trop courte pour la passer à regarder au travers d'une fenêtre sans jamais en profiter non? Un sursaut quand sa main s'accroche à mon bras, je jette un regard vers lui sans pour autant le repousser. Résignée. Acceptant sa présence pour rentrer en un seul morceau même si je n'ai qu'une envie; le fuir. Il ne parle d'une autre qui serait aussi "inconsciente" que moi, nous compare à des proies qui se font croquer et s'en étonnent. "Et elle est morte?" Voix sans âme, simple pensée exprimée à voix haute sans que je la retienne.

Je frissonne. Je suis frigorifiée, l'alcool a beau tenir chaud, en prendre plein les dents refroidit pas mal. Instinctivement, oui, encore malgré ses reproches, je me rapproche de lui pour m'approprier un peu sa chaleur tout en fourrant mes mains dans la poche avant de mon pull. "J'sais pas ce que j'ai voulu dire… Juste que la vie est trop courte pour rester le cul vissé sur une chaise ou vivre enfermée dans un foutu foyer avec des horaires à respecter…" Je lui balance l'air de rien où je vie vu qu'il le découvrira en me déposant devant dans quelques minutes. Les rues sont moins animées que les bars, la fraîcheur règne en maîtresse dans les artères. Les moindres bruits dans notre dos me rappelle à mes agresseurs et je ne peux m'empêcher de tourner la tête pour vérifier qu'ils ne sont pas à nos trousses, attendant le moment propice pour me tomber dessus. J'essaye de penser à autre chose que ces bruits de pas, de revenir à celui qui me tient fermement le bras. "Alors, j'ai eu la chance de ressembler à cette personne qui à visiblement un peu compté dans ta vie et que ton instinct t'a dicté de ne pas me laisser entraîner par ces hommes. Je n'avais pas vraiment pensé au pire en fuyant ce soir, J'ai juste pensé à mon désir de liberté, ce besoin de me sentir encore en vie, pas encore morte. Bref, une belle connerie quand on est une proie idéale comme moi hein?!" Je soupire. "C'est quoi ton nom au fait ?"
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ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
Gautièr Montignac
Gautièr Montignac
ADMIN ۰ Mignon comme Tchoupi, aussi vnr que Moundir : le Loup d'la Vieille (la chair vivante, c'est gourmang-croquang)
◖ INACHEVÉ ◗

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"C'est une histoire de dingue.
Une histoire bête à pleurer."

En un mot : Meursault d'Occident. Sorel d'Amérique.
Qui es-tu ? :
"J'irais bien voir la mer.
Écouter les gens se taire."

◖◗ Homme du pays occitan, dans le Sud de la France. Né au cœur des Pyrénées aux sommets blanchis, entre le soleil et la rocaille du mois de juillet 1898.
◖◗ Loup-garou Bêta condamné à fuir famille et village, jeté sur les voies forestières d'un exil, des frontières d'Espagne aux vallées de Lozère. Voyageur infatigable, jusqu'au Nord de la France et la côte est américaine.
◖◗ Relation d'amour et de haine pour cette France ingrate. Son sang a coulé pour des généraux dont le pied n'a jamais foulé le no man's land de la Grande Guerre. Membre d'un réseau clandestin dans les années 40.
◖◗ Rêveur misanthrope à la philosophie d'un autre temps. Passe sans mal de l'empathie au jugement, de la tolérance au dégoût. Aide lorsqu'il le peut. Tue quand il le doit. Bestiole dans le crâne qui commandite d'étranges désirs.
◖◗ Homme à tout faire : capable de nettoyer les chiottes, de garder un musée, de balayer la rue ou de tenir une caisse. Prédilection pour les postes de serveur, aidé par ses hanches étroites et ses bras solides. Poste d'observation privilégié pour tous les comportements humains et non-humains.
◖◗ Rebut. Incapable de s'adapter pleinement à une meute. Chaque tentative se solde par un échec plus ou moins pénible. Solitaire, se protège derrière la barrière de mensonges qui résistent encore aux outrages du temps. Prétend n'être rien d'autre que la Bête du Gévaudan. S'en convainc parfois, ou bien d'être un descendant.
◖◗ A subi les affres du sang et de la rumeur capable de frapper tous les bourgs et hameaux des campagnes profondes. Accusé de crimes qu'il n'a pas commis. N'a jamais eu l'occasion de racheter son honneur parmi les siens.
◖◗ Ancien amant de Mei Long, poupée chinoise de sang royal. La rencontre entre deux écorchés de la vie, entre deux psychés abîmées, vouées à toutes les folies et aux errances mortifères dans les bois du Maryland.
◖◗ Poursuivi par des flics qui n'ont pas pour habitude de lâcher prise. Connu des autorités américaines depuis les années 70. En cavale permanente. Passé maître dans l'art des identités plastiques, artificielles. Espère trouver à Shreveport l'abri de la dernière chance, en incorporant les rangs de la meute. Tueur de flics et de femmes.
◖◗ Mélancolique. Dans ses bons jours, capable de déceler la beauté dissimulée derrière tous les aspects de l'existence. Amoureux d'Histoire et de littérature, lecteur infatigable de Camus et de Céline.
◖◗ Dérangeant. Par ses regards perçants, par ses paroles sans filtre, par ses rires grinçants : inadapté, mais sympathique, si son interlocuteur s'y prête.

◖BÊTE DU GÉVAUDAN◗

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"L'a pas tellement changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue.
La mentalité est la même.
Tous des tocards, tous des faux culs."

Facultés : ◖◗ Faiseur d'histoires. Capable d'inventer mythes et récits sans effort. Charmant ou effrayant tour à tour. Se réinvente sans cesse, personnage protéiforme.
◖◗ Passé maître dans l'art de dissimuler un corps et d'en ôter la vie. Tous les moyens sont bons.
◖◗ Sait comment survivre face au froid, à la pluie, à la grisaille et à la brume, aux mers, aux monts et aux coups bas. Aux morsures, aux traîtrises, aux caresses, aux promesses.
Thème : Le Fleuve ◖◗ Noir Désir
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◖MINDHUNTER◗

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"Je vais les rues je vais les lieux où on ne m'attend pas. Ceux que je croise au fond des yeux, non, ne me voient pas. Je parle à des gens comme moi qui n'ont l'air de rien. Des esclaves en muselière qui n'en pensent pas moins."

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Lun 2 Mai - 1:57 (#)


Judgment
Il devrait se taire, le joli lapin blanc.
Petit lapin qui frissonne, malgré la fin d’un mois d’août connu en Louisiane pour faire partie des plus étouffants. Il baisse les yeux vers elle, surpris de la sentir trembler, sous la poigne par laquelle il la tient. Il se figure soudainement les véritables lapins qu’il attrapait par la peau du cou ou par les oreilles, leur petit corps encore chaud fraîchement tombé dans un piège ou croqué par la hargne d’un patou. Elle, elle parle encore. Elle, elle n’est pas encore morte. Pourquoi est-ce que cette ville ne cesse d’exposer sous ses yeux des femmes lui rappelant sa sœur, son bourreau ou son amour cruel ? Toutes, avec leurs longs cheveux noirs, lisses et doux, leurs yeux clairs ou bien si sombres, comme autant de harpyes se moquant de tordre ses sentiments comme Nina ses torchons humides. Nina, sa crinière de même couleur, ramenant inlassablement de l’eau puisée dans la rivière d’à côté. Affamée d’une vie qui lui resterait interdite, prisonnière du même destin morne et tout tracé qu’Ofelia Montignac avant elle. Kaléidoscope, flashbacks pénibles qui surnagent, chaque fois que ses paupières battent. L’obscurité s’infiltre, se joue des mots qui rebondissent contre les murs, proclamés par le petit lapin blanc qui semble désormais un peu fâché. Tant pis. Petit lapin pourrait déjà dire merci, de ne pas avoir finie croquée dans la première ruelle à proximité.

Il finit par céder. Il s’engouffre dans une voie peu fréquentée, et sans se montrer trop brutal, la plaque le dos au mur, sans faire mine pour autant de s’en prendre à sa personne. Il la fusille d’un regard impitoyable, mais sa cruauté ne s’exerce pas encore. « Écoute-moi. Ne me prends pas pour un bon samaritain. Je suis sûr qu’au fond de toi, une petite étincelle te dit que je ne suis pas ce à quoi je ressemble. » Il s’approche, et sans se rendre compte d’un geste-miroir pareil à celui qu’avait connu la Comucci contre cette satanée bagnole, perdus tous les deux dans le trou du cul du monde de l’Arkansas une nuit sordide de décembre presque vingt ans plus tôt, sa main touche le sweat au niveau du ventre. Ni trop haut, ni trop bas. « Ce que tu as ici… ce sont tes tripes. Tes tripes, ou autrement dit ton deuxième cerveau. Si le premier ne fonctionne plus assez bien… » La main libre tapote de deux doigts la tempe de l’humaine, du bout de l’index. « Alors fie-toi au second. Lui, se fiche bien de ton désir de liberté. Lui, tout ce qu’il veut, c’est que tu rentres saine et sauve dans ton lit avant la fin de la nuit. »

Il s’aperçoit du tambourinement puissant de son propre myocarde. Il doit se calmer. Il doit reprendre son souffle. Se redressant lentement, il rompt le contact physique avec elle, pour la toiser de toute sa hauteur. Secouant la tête, d’un air désapprobateur. « C’est ce que cette époque n’a pas compris. Les gens… vont et viennent comme si rien ne s’était passé, il y a seulement quelques années encore. Ou bien c’est ce pays qui est trop stupide pour comprendre… » Il ricane, et lui oppose comme s’il s’agissait de murmurer un secret : « La liberté est un luxe. Se sentir en vie ? Chaque fois que tu respires, tu devrais te sentir en vie. Chaque fois que tu bois le moindre verre d’eau. Que tu mords dans un malheureux quignon de pain. » Croquer une musaraigne. Laper l’eau d’un minuscule ruisseau, filet liquide à peine visible serpentant dans les bois solitaires. Dormir à l’abri de la pluie. Lui aussi avait appris à apprécier de nouveau le sel de cette vie. Même misérable, même sans personne à qui parler. Personne à qui se confier. Personne pour verbaliser les terreurs qui le privaient d’un sommeil réparateur. Et elle… Elle, contre cette paroi, faisait soudainement office à ses yeux d’une parfaite ingrate, incapable de s’apercevoir de la chance qu’elle avait de vivre dans une communauté. Seule, de par son individualité, mais pas franchement isolée non plus.

Il s’ébroue. Se rappelle à la question du lapin blanc dont il tordrait bien la nuque, juste pour la rappeler à cet essentiel auquel elle semble rester aveugle, pour le moment.

« Elle est vivante. Mais à quel prix. »

Il se recule. Il l’englobe d’une vision nouvelle. C’est vrai, qu’elle est belle. Et cette figure victimaire attise la pulsion d’un désir qui, au gré de ses caprices, s’éveille en un éclair, ou reste endormi irrémédiablement. « Tu ne me rappelles pas qu’elle. » Confusion des genres. Abomination qui frôle sa caboche. Pourtant, la Bestiole ne pointe pas le bout de ses antennes. Il est seul, avec elle. « Tu me rappelles toutes les femmes avant toi qui ont cru que la chance agirait une fois de plus. Et elles, en revanche, ont toutes fini dans une tombe. » Il sait que ses mots sont durs. Que son regard l’est tout autant. Pourtant, c’est avec une étrange aménité qu’il lui tend la main, la laissant libre, cette fois, de s’y accrocher ou non. Que ce soit pour embrasser cette mort qu’elle appelle par ses divagations dans l’urbanité grise, ou pour saisir le grappin qui la sauvera d’une chute fatale, le destin lui-même semble ne pas en avoir encore décidé.

« Ne commets pas l’erreur de croire que cette vie t’est acquise. J’en ai vu beaucoup trop, des comme toi. Tu es trop jeune. Tu es trop jolie pour figurer maintenant dans une nécrologie. »

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Le Temps qui reste

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Anonymous
Invité
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Jeu 21 Juil - 1:37 (#)


I need to breathe
Feat GAUTIÈR  MONTIGNAC


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De son identité, je ne sais rien. De sa personnalité, je ne sais pas grand chose non plus. Les seules choses que je connais de lui sont: son sauvetage et son manque cruel de tact. Perdue. Désorientée. Il me perturbe, je ne sais pas sur quel pied danser avec lui. De charmant, il passe à un autre registre moins réjouissant. Ma question sur qui il peut bien être reste en suspens, comme s'il ne désirait pas créer plus de lien avec moi, avec le monde qui l'entoure. Tellement différents. Je cherche à me lier, à me fondre dans cette masse inconnue, renouer avec la civilisation, avec les gens tout simplement. Multiplier les rencontres pour espérer un déclic, une étincelle dans ma boîte crânienne où réside une meule de gruyère bien trop aérée à mon goût. Il me perturbe, il me trouble de part sa manière de réagir. Brutal. Animal. Il se meut en quelque chose qui devient dérangeant. Dans la foule, dans l'agitation; il était désinvolte, intéressant de part cette manière de répondre qui sortait de la norme, de la banalité des rencontres alcoolisées. Maintenant, seul à seul; il me fait peur, il fait ressurgir la personne qui a ouvert les yeux à l'hôpital et qui s'est mise à paniquer quand les questions posées n'amenaient que des "je ne sais pas". Instants terribles de trouble intense, proches de la folie pure. Il me ramène à ces moments terriblement douloureux que j'aurais largement préféré oublier. Chienne de vie!

Pensées interrompues. Souffle qui se brise. Coeur qui explose dans ma poitrine une fraction de seconde. Mon regard se fige dans le sien qui me happe instantanément, me piège fermement. Peur. Peur que ça soit lui en fin de compte. Peur qu'il se soit joué de moi. Animal pervers s'amusant avec sa proie avant de la dévorer. Mains sur son buste, tentative vaine de marquer la distance entre nous, de me refuser à cette proximité, acculée contre le mur dans cette rue peu passante. Un animal, voilà ce que je suis aussi. Un animal terrorisé, un animal sans défense qu'il va pouvoir tuer à sa guise. Non, bien évidemment qu'il n'est pas un bon samaritain. Proximité accentuée, sa main se pose sur mon ventre, je me fige, déglutis difficilement. Si le premier ne fonctionne plus assez bien… Mes prunelles se détournent quelques secondes, il a touché dans le mille. Mon crâne ne tourne pas rond, il n'a plus les repères habituels, juste des réflexes innés, viscéraux. Un sourire m'échappe malgré la situation. Il parle de mes tripes et j'ai pourtant déjà le sentiment de les écouter. Serais-je simplement défaillante? Prédestinée à en chier, prédestinée à en prendre plein la gueule à chaque instant. Connerie!

Je tourne en boucle. Je retourne toujours dans mes travers, dans ceux de cette fille qui s'est retrouvée à l'hôpital avec aucun visage au-dessus d'elle pour veiller à son bien-être. Rien. Personne. Ce soir, c'est pareil, il n'y a personne, que cet homme sans tact qui brutalise mon esprit en pleine rémission, en quête d'un renouveau à défaut de retrouver l'ancienne personnalité qui habitait ce corps. Il se recule enfin. Une éternité. J'avale l'air par grandes inspirations saccadées, affolées, anarchiques. Il parle de l'époque, des gens, comme s'il en avait connu une autre. Stupide! Toujours cette sensation qu'il est au-dessus de la mêlée, qu'il regarde tel un observateur les événements qui se déroulent sous ses yeux. Voilà ce que je devrais être, simple observatrice et non idiote me jetant tête la première, à corps perdu dans le vide. Il m'explique les détails du quotidien qui devraient me faire sentir en vie et libre. D'un revers de manche, j'essuie mes larmes et remets de l'ordre dans mon physique débraillé et terrorisé. Je savoure les minutes que je passe en dehors du foyer, je savoure ma liberté, à ma manière. Oui, c'est brouillon, oui c'est suicidaire mais, je ne connais que cette façon de faire, celle d'une gosse en plein apprentissage qui se mange le bitume en se prenant les pieds dans le tapis.

À quel prix? Sans doute le même que le mien, une liberté aux relents nauséabonds? Des séquelles physiques ou bien encore psychologiques? Je n'ouvre pas les lèvres, profite qu'il se recule encore un peu pour souffler et reprendre mon calme. Il n'est pas lui, cette certitude fracasse mon esprit. Il n'est pas celui qui a fait de moi cette amnésique, il est un autre, un qui ne supporte pas celle que je suis à ses yeux; une proie bien trop facile. Compréhensible. Je tremble encore, l'air ambiant ajouté à la violente montée d'adrénaline qui me quitte y est pour beaucoup aussi. Il parle de la mort, de celles à qui je lui fais penser. Je ne suis qu'une inconsciente qui sait pertinemment que la mort rôde, qu'elle est prête à me cueillir, que je manque à son tableau de chasse même. Elle rôde sous les traits d'un ou d'une inconnue qui a vu son jouet s'échapper ou que sais-je encore. J'ose enfin relever mes prunelles rougies sur lui, affronte son regard qui me glace le sang. Un prédateur, plus qu'un protecteur. "Je… Je sais ce que je suis. Je sais que ce que je fais est stupide, puéril, suicidaire même peut-être… sans doute, certainement. Tout est simple pour toi, tu observes, tu as en mémoire et tu peux agir en conséquence. De mon côté, je compose avec ce que j'emmagasine depuis peu de temps, je réapprends et je fais un tas d'erreurs, j'en suis consciente."

J'aime pas devoir avouer cette faiblesse qu'est le manque d'informations sur celle que j'étais, un pantin sans son marionnettiste, un robot à qui il manquerait des connectiques. Peu importe, pas entière, peut-être à jamais incomplète. La thérapie avance timidement, trop lentement à mon goût mais, j'ai pas d'autres choix que d'espérer un déclic extérieur ou dans mon crâne. "T'es un samaritain flippant en fin de compte, je sais pas si je dois te fuir ou rester près de toi pour espérer rentrer entière au foyer. Alors, sans doute que mes tripes fonctionnent encore suffisamment pour que je me pose la question. Je suis juste un peu trop… aventureuse et comme je te l'ai dit plus tôt… j'ai besoin de ces sensations pour me sentir encore vivante quitte à en crever. Je sais, c'est complètement stupide, c'est sans doute préférable à la prise de drogue non?" Un rire sans émotion m'échappe, une mort plutôt que l'autre, choisir entre la peste et une autre merde dont le nom m'échappe. Foutu gruyère! Du rire je passe à la grimace de dégoût, celui de moi-même, de cette mémoire que je ne parviens pas à débloquer et qui sans doute me fout dans ces bars, dans ces lieux alcoolisés, dans ces bras sans importance, entre les cuisses de ces hommes qui ne m'offrent qu'un éphémère réconfort. Soupire.

Sans vraiment réfléchir et juste aussi parce que je n'ai d'autre choix, je m'approche de lui lentement et saisis sa main. Je tremble encore, la trouille. Mon regard s'accroche au sien. Moment suspendu. Le moment aurait été un autre, ce geste aurait été un prémice, ensuite il y aurait eu un sourire léger, je me serais hissée sur mes pieds pour venir cueillir ses lèvres dans un baiser passionné. Puis, je serais venue murmurer à son oreille pour qu'on se trouve un endroit plus agréable pour passer la nuit ensemble. Un autre oui. Là, il n'y a que ma main dans la sienne et mes prunelles dans les siennes qui me font frissonner. "J'ai encore besoin de toi… D'abuser de ta gentillesse, j'ai peur qu'ils s'en prennent à moi et je ne fais pas le poids face à eux. J'ai rien à te filer en échange de cette protection, un peu de fric là où je vis si tu veux, sinon, des fois les mecs préfèrent…" Je ne finis pas ma phrase, mes doigts froids resserrent légèrement leur emprise sur sa main chaude. Si ça me permettait de rentrer en un seul morceau ce soir, je pourrais donner de ma personne, il manque de tact mais, il ne manque pas de charme. Un sourire parvient à éclairer un instant mon visage, une étincelle brève qui insuffle dans mon corps une dose de dopamine: hormone du plaisir immédiat, lors d'une action qui provoque une satisfaction comme le goût d'un aliment sucré, une cigarette ou le plaisir sexuel dans mon organisme, merci la psy pour le terme que je n'avais sans doute jamais entendu dans mon autre vie.

"Tu parlais de nécrologie, que je n'étais pas trop belle pour finir six pieds sous terre. J'suis consciente de tout ça malgré les apparences hein. J'ai fini dans un sale état y'a pas si longtemps, j'ai été assez belle pour figurer dans les journaux sans que ça émeuve qui que ce soit d'autres que les journalistes avides de sensationnel… Puis, comme ils n'avaient rien de consistant à se mettre sous la dent, j'ai été reléguée aux faits divers avant de tomber dans l'oubli. Je suis consciente de tout ça, c'est juste que c'est ma façon à moi de tenter de recoller les morceaux… tu vois ce que je veux dire?" Dopamine circulant encore dans le système sanguin, je deviens légèrement charmeuse avec mon sourire au coin des lippes et mon regard soudain teinté d'une légère assurance. C'est pas flagrant, c'est pas obscène, ce ne sont juste que quelques détails mineurs, rien de plus. Je tiens toujours sa main, d'un mouvement de la tête, je l'invite à reprendre notre route, j'ai pas envie de traîner trop longtemps dans la rue. Mon instinct, mes tripes, me disent que le danger rôde toujours, j'essaye de m'y fier.
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