Sugar Mommy, la randonnée c'est ma vie (et mes collines ne demandent qu'à être explorées)
I will stop at Nothing
En un mot : Humaine. Profiler pour le FBI et consultante pour la NRD
Qui es-tu ? : A cinquante ans, je rassemble les bris de ma carrière explosée dix ans plus tot. Travailleuse acharnée, animée par un désir de vengeance qui me couple le souffle. Je ne m'arrêterais que lorsque ma Némésis sera morte ou sous les verrous. En parallèle, à la tête d'une cellule spéciale, je suis chargée d'incarcérer les CESS qui s'imaginent au dessus des Lois.
Facultés : J'attire les ennuis. Très facilement. Et souvent, je vais à leur rencontre.
A travers la vitre sans tain, Medea observe la pauvre excuse qui se prétend vampire. Des créatures qui se pensent intouchables, en dehors des Lois, elle en a rencontré par dizaine, au point que la plupart sont à peine plus que de vagues numéros et dates dans ses dossiers mentaux. Lui, il n’entre même pas dans le top 100. Le fond du tonneau dans la plus pathétique et la plus sordide des manières. Farouk Al Jezhia n’a pas plus de cent vingt ans et n’a pas toujours pas appris la prudence nécessaire pour agir en tant que le prédateur qu’il croit être. Il y a un monde entre la créature nocturne qu’il se voit être et celui qu’il est. L’Italienne allume une cigarette, ignorant ostensiblement le signe le lui interdisant. Si elle doit se coltiner des heures d'interrogatoire, hors de question que ce soit privée de nicotine. Comment pouvait il croire que le meurtre de deux étudiantes de la LSU allait passer dans les crimes mondains? Ou que les enquêteurs de la NDR n’allaient pas remonter sa trace méticuleusement?
Deux cafés, beaucoup trop de cigarettes et trois heures plus tard, Medea décide qu’il est temps pour elle de prendre le relais. Il a tout du petit poisson, du Fils de la Nuit relégué en bas de la hiérarchie sociale. Il peut tout aussi bien être un renégat que le plus jeune membre du nouvel Essaim officiel de Shreveport. Aucune de ces options ne sont réellement dignes de son intérêt. Il n’y a là rien qui puisse réellement piquer sa curiosité, tant les autorités vampiriques et mortelles ont déjà des collaborations bien en place. Néanmoins, les courants vampiriques ne sont jamais simples à saisir pour ceux qui ne font pas partie de la Nuit et les rumeurs murmurent. Elles frissonnent de l'Émergence d’une nouvelle volonté, d’un balbutiement de quelque chose qui échappe encore aux autorités officielles. Lorsque Al Jezhia commence à s’agiter, à lâcher des insinuations qu’il aurait mieux fait de ne pas mentionner, cela lui suffit.
Lorsqu’elle paraît dans le petit local, c’est avec un verre de sang à la main. Et pas du True Blood. Un peu de miel pour l’abeille récalcitrante. Ses collègues se retirent et la laissent seule avec Farouk. Elle n’est qu’écoute, patience et attention. Ce dont le fils de Cain n’a sans doute pas bénéficié depuis un moment. Elle est humaine, sans importance. Sous estimé. C’est probablement la meilleure des armes de Medea. Elle ne menace pas. N’élève pas la voix, est presque désolée qu’un homme d’une telle stature se retrouve dans une telle situation. La nature de ses crimes est telle qu’il est hors de question qu’il soit jugé par un tribunal purement humain. Hors de question. Impossible. La Sinueuse est calme, posée. Son rythme cardiaque ne s’emballe pas, ho.. juste une fois, lorsque elle frôle un peu trop son épaule dans ses déambulations dans la pièce. Conversation intime à peine interrompue par le claquement de ses talons hauts sur les dalles de pierres froides. Medea ne porte pas de parfum, rien qui n’insulte l’odorat puissant de son interlocuteur.
Des ouvertures qu’elle profile à peine. Des possibilités muettes. Des peut être. Medea ne menace pas et le gonfle d’importance. Charme son égo et lui attribue un charisme dont il est tristement dénué. Farouk finit par se saisir la porte de sortie qu’elle déverrouille pour lui. Une cigarette qu’elle lui offre. Qu’elle partage avec lui. Il le lui assure. Il connaît des secrets. Des secrets qu’il est pret à révéler pour la garantie de sa liberté. La main de Medea sur son poignet qui se pose une seconde en oiseau effrayé avant de se retirer déja. Il ne mentait pas. Ho, comme il ne mentait pas. Il retire les voiles des rumeurs. Donne des noms aux ombres. Présente les mystères.
Janvier 2021
Un réveil compliqué. Medea se lève avec une impression d’une nuit aux rèves lourds et pesants sans en retenir le moindre souvenir. Une pression sur ses tempes du bout des doigts. Elle n’a pas de migraine à proprement parler. Même pas. Juste cette sensation d’un étaux intangible dont elle n’arrive pas à se défaire. Un regard vague sur la suite dans laquelle elle vit depuis plusieurs mois. Il faudrait qu’elle cherche un appartement, mais c’est une démarche qui lui demande un temps dont elle ne dispose pas. Pas pour ce genre de futilité. Une douche un peu trop fraîche pour la saison ne lui permet pas de chasser complètement les toiles d’araignées qui se resserrent sur ses pensées. Juste une éclaircie. Le miroir de la salle de bain, à peine embué, lui renvoit l’image d’une femme qui ne tente pas de tricher avec sa nature. Quelques traits blancs zèbrent la noirceur de ses cheveux, des rides en pattes d’oie qui s’invitent aux coins de ses yeux, et naviguent en étoile à l’orée de ses lèvres. Medea ne s’y attarde pas. Gestes d’une routine à l’aspect presque rituel. Crème hydratante, fond de teint et maquillage en armure qui éloigne le visage de sa lassitude pour celui d’une détermination assumée. Certains crachent ambition comme une insulte.
Heureusement une double dose de caféine accompagnée de nicotine assure qu’elle soit fonctionnelle. Et d’une humeur qui lui évite de noyer le premier chat qu’elle croise dans la première rigole. C’est son premier hiver en Louisiane et en parfaite New-Yorkaise, la neige, le froid, le gel lui manquent comme des amis perdus de longues dates. La pluie, elle, s’invite régulièrement. Comme ce matin. Protégée dans par un grand parapluie rouge carmin qui s’évase autour de ses épaules en clochette, elle s’assure que ses dossiers de la veille ne souffrent pas d’une perle humide. Depuis des mois, en plus de ses fonctions officielle, elle s’est divisée sur deux projets personnels. Rien ne peut la détourner de la traque du Loup-Garou au centre de sa carrière en miette. Lorsqu’elle croise Kaidan Archos au détour d’une coursive, son savoir-vivre ne s’entame en rien. Elle le salue de la même manière qu’elle salue tous ses autres collègues ou agents. Courtoise, un peu distante, une virgule naturelle à ses lèvres carmines. Seul l’éclat plus vif de ses prunelles détrompe son sourire indolent. Qui peut facilement être attribué à l’apparence séduisante du grand blond, à sa stature imposante. Un intéret tout à fait féminin et qui n’a rien de professionnel. Si seulement. Il s’éloigne sans qu’ils aient échangés plus de trois mots. Medea n’est rien sinon patiente.
Son second projet personnel l’occupe maintenant depuis plusieurs mois. Elle n’a pas reporté à sa hiérarchie les propos de Farouk. Celui -ci est maintenant hors d’atteinte grâce à ses soins. Elle considère que cela fait partie de ses prérogatives de chef de cellule d’attendre avant de s’avancer. Il n’y a que Duncan et Wayne qu’elle a mis dans la confidence. Le trio n’a pris aucune mesures concrètes à la suite des révélations du vampire traître à son organisation. Ils en sont à la phase de rassemblements d’informations. Il y a une masse de travail et de preuves à assembler avant de présenter la situation au chef de l’antenne. Si elle s’y prend bien, cela devrait être un coup de maitre.
Elle a tu à ses deux collègues le sentiment d'oppression qui la suit depuis quelques courtes semaines. Ignore si c’est simplement l’atmosphère poisseuse des Bayous qui finit par lui taper sur les nerfs ou si son intuition exprime quelque chose qu’elle ne parvient pas encore à déchiffrer. Elle se tient néanmoins sur qui-vive. Elle n’a pas la naïveté de s’imaginer sans ennemis. Près de dix-neuf heures. Besoin de s’éloigner de la ville pour une respiration. Medea commence a voir pris ses habitudes au Dream on the Bayou, appréciant la proximité de Haughton. Trente minutes de conduite qui lui permettent de relâcher un peu la pression. Si elle ne se sépare jamais totalement mentalement de son travail, elle peut parfois le mettre en pause. Crabe Cajun et Gumbo qui se complètent pour un repas dont elle apprécie l’atmosphère tranquille et élégante. Si elle s’accorde un verre de vin avec son plat, cela s'arrêtera là. Dès qu’elle sort du restaurant, Medea s’immobilise sur le porche. Attentive à l’atmosphère nocturne. Ecoutant la Nuit. Une inquiétude diffuse qui se creuse à nouveau au creux de ses reins. Rien de concret qui permet de confirmer. Pas besoin de vérifier que son pistolet Arsenal est dans son sac à main. Il l’est toujours. Son double canon n’est pas un hasard. Si l’un des chargeurs est à munition classique, le second est réservé pour les balles en argent. Néanmoins, elle n’est pas angoissée au point d’avoir besoin de sentir la crosse de l’arme au creux de sa paume. Non.
C’est pourtant un sentiment de sécurité certain qui revient lorsqu’elle retrouve les murs de sa suite de son hôtel à Pinecrest. Il est encore tôt, à peine 23h. Largement le temps d’étudier encore pendant au moins deux heures les informations qu’elle commence à rassembler sur les divers membres du Chaos. C’est un travail de fourmis mais qui lui permet de tracer un tableau mental. Et encore, il lui manque un nombre hallucinant de maillons. Le Schisme et l'Éclatement du nouveau pion sur l’échiquier politique vampirique n’aident pas. Néanmoins une figure centrale à l'intérêt des deux leaders du Chaos se dessine peu à peu. Sans qu’elle ait demandé, le room service lui a débouché une bouteille de vin pour sa soirée studieuse.
L'étrange douceur de l'hiver louisianais tente de mordre la peau de l'Immortel. En vain. Gargouille figée sur son socle de bois, l'Immobile guette, les sens en éveil, la nuque étirée, la fenêtre tant convoitée. Perché sur son curieux promontoire, le corps dissimulé par les branchages et par l'épaisseur de l'obscurité nocturne, il patiente, semblable à un rapace aux aguets. Seules les pupilles s'animent parfois, lorsqu'un infime mouvement trahit la présence de la proie, de l'autre côté du verre. Alors, les serres se raffermissent sur la branche qui le soutient, tandis que juché à une douzaine de mètres du sol, il observe le moindre mouvement, même infime, avec une patience irréelle. Après tout, l'attente n'est rien pour ceux et celles condamnés à errer pour l’Éternité sur cette Terre en perdition, coincés entre ces âmes éphémères, maudits au point de devoir subir cette injustice crasseuse, celle d'exister parmi les insignifiants. Qu'importe. Il serait encore debout lorsque viendrait l'Apocalypse. Qu'elle survienne d'ici quelques mois, années ou même siècles, cela n'avait aucune importance. Puisqu'il assisterait au crépuscule du monde. Nous sommes l'Alpha et l'Omega.
Avec un orgueil tout à fait vampirique, il redresse légèrement le menton – mouvement aussi imperceptible qu'inutile, pour ce voyeur d'une autre époque. L'hôtel est conforme à la description que lui en avait fourni Ashkan, le plus fidèle acolyte et conseiller de Salâh ad-Dîn. Quelques recherches sur le net – des manipulations que l'Immortel ne cherchait même pas à comprendre – avaient permis au sorcier noir de présenter une vue aérienne des lieux, ainsi que quelques photographies suffisamment parlantes, pour que le vampire puisse se repérer une fois aux abords de l'hôtel dans lequel résidait actuellement Medea Comucci. Bien sûr, l'identification du logis de fortune n'avait été que l'ultime étape, après des mois de traque inversée, à remonter la corde que l'enquêtrice du FBI tirait discrètement, de l'autre côté. Et si les premiers remous avaient été imperceptibles, même pour le Noctambule méfiant qu'il était, c'est l'éclatement du Clan et la recherche de ses anciens aspirants qui avaient finalement alerté le Traqueur. Et pour la seconde fois, sans le vouloir, Farouk Al Jezhia avait définitivement scellé les destins de l'Ordre et du Chaos. Au prix de sa minable existence.
Quel sort réserver aux traîtres de ton espèce ? Une fois n'est pas coutume, le bougre avait parlé. Probablement gonflé par un excès de zèle, suite à la réussite de sa précédente entreprise, là où il croyait avoir dupé pour s'échapper, alors qu'il n'avait été qu'un pion sur l'échiquier de la NRD. Les alliés d'hier sont les ennemis de demain. Cette désagréable prise de conscience avait rapproché l'Enfant de Jérusalem de la compréhension à l'égard de l'attitude paranoïaque de son Sire. A qui donc accorder sa confiance, dans un monde où tout n'était que renversements, trahisons et quête du pouvoir ? Comme beaucoup trop d'autres avant lui, Farouk Al Jezhia s'était élevé contre son ancien bienfaiteur. Et donc, par extension, contre son Infant. Et, nul ne va sans dire, le cadet avait pris un malin plaisir à traquer le fuyard. Quelques longues semaines d'investigation, d'activation des réseaux et de filature avaient suffi à lui remettre la main dessus, dans les favelas de Ciudad Juárez, là où le nuisible se terrait. Peut-être que le malheureux avait inconsciemment senti la proximité glaciale de la lame du couperet contre sa nuque, pour renier sa nature au point de s'enliser sous la fange humaine. Peut-être avait-il cru que la masse grouillante des indésirables érigerait une barrière suffisante entre lui et son futur bourreau. Mais il en aurait fallu davantage pour dissuader la main orientale d'abattre le pieu dans le cœur du traître. A trop sous-estimer ses opposants et à croire en son impunité, on finissait réduit en cendres, le corps éparpillé dans les taudis de Ciudad Juárez, la dernière demeure terrestre de Farouk Al Jezhia.
L'interrogatoire qui avait précédé la mort de l'insolent avait été d'une grande richesse, écho probable mais encore inconnu de celui qu'avait perpétré Medea, quelques semaines auparavant. Désormais conscient du piège qui se refermait lentement mais sûrement sur lui et son Clan, l'Israélite avait alors décidé de remonter le fleuve de l'enquête à contre-courant. Les mois qui suivirent la disparition d'Al Jezhia avaient été éprouvants, parfois frustrants pour celui qui exécrait l'idée qu'une mortelle puisse ainsi se jouer de lui. Et le calme comme l'intelligence d'Ashkan n'avaient pas été de trop afin d'apaiser l'impétuosité de l'Immortel, tout comme les tentacules qu'il avait déployés comme un réseau neuronal sous la ville, à l'écoute des bruissements. Il avait fallu sélectionner les bribes d'informations, les recouper avec patience, interroger les individus significatifs. A cette époque, il n'avait pas cherché à connaître l'état de l'avancée de l'enquête. Non. Tout ce qu'il souhaitait, c'était elle. Le reste viendrait en temps et en heure.
Il la scrutait désormais, immobile sur son perchoir végétal, trop éloigné toutefois pour espérer glaner la moindre information pertinente. Situé à plus d'une cinquantaine de mètres de la chambre de Medea, la vue plongeante que lui offrait sa position surélevée ne suffisait cependant pas à l'instruire sur la femme qu'il suivait, depuis quelques nuits déjà. Malgré les recommandations d'Ashkan, l'Immortel éprouvait toutes les peines du monde à museler sa curiosité, à l'égard de celle qui s'était lancé à sa recherche. A vrai dire, aucun humain ne s'était déjà essayé à une telle entreprise. Il était celui qui s'immisçait habituellement dans l'intimité des autres, jamais l'inverse. Un tel revirement de situation ne pouvait que ravir celui qui prêchait le chaos et la destruction de l'ordre établi. Alors à son tour, il avait guetté. Et être le second ne l'avait pas dérangé le moins du monde. Après tout, elle ne lui avait pas encore mis la main dessus.
C'est tout juste si ses pas spectraux impriment une trace dans le sol meuble, lorsqu'il parcourt la maigre distance qui les sépare encore, après avoir quitté son poste d'observation. Escalader la façade de l'hôtel n'est pas une mince affaire, mais l'Immortel s'était acclimaté à la jungle urbaine depuis des années déjà. L'ombre véloce se hisse avec souplesse jusqu'à l'étage convoité, et prend place sur le châssis solide, suffisamment large pour qu'il puisse s'y installer, paumes et chaussures contre le béton, le corps tendu vers l'avant. La silhouette féminine, de profil, est penchée sur un tas de paperasse dont il ne parvient à deviner la nature. Choisissant raisonnablement de ne pas approcher davantage, malgré la tentation d'évoluer jusqu'à la baie vitrée pour se tenir plus proche d'elle encore, il se contente pour l'heure de son perchoir de fortune, la tête légèrement penchée sur le côté, le faciès déformé par un pâle rictus – écho lointain de ce qui avait peut-être, à une époque désormais révolue, ressemblé à un sourire. Lentement, le visage s'approche du carreau et scrute le corps proche, si proche, encore protégé par sa prison de verre. Il l'a souvent suivie et épiée de haut, mais il n'a pas souvenir de s'être déjà approché autant d'elle. Jusqu'alors, Ashkan était parvenu à contenir l'impulsivité de l'Immortel, et à lui intimer la prudence. Mais malgré ses recommandations, le Fils de Caïn avait cédé à la tentation d'attirer Medea dans ses filets, avant de se retrouver pris au piège des siens.
Son seul acte raisonné sera sa précaution de s'ensevelir sous les ombres, d'utiliser ses dons pour se dérober à la vue de la mortelle et se fondre dans l'obscurité. Cette nuit, il avait bien l'intention de devenir ce spectre qu'elle craindrait désormais. Une présence plus marquée que celle qu'elle avait cru percevoir ces dernières nuits. Le début du cauchemar. L'amorce d'une perdition pour au moins l'un d'entre eux. Et à ce jeu, il partageait la patience de son adversaire. Et contrairement à Farouk, il ne commettrait pas l'erreur de la sous-estimer.
Devenu ce fantôme indétectable, il scrute alors sans pudeur le quotidien de cette femme dont il dépèce l'existence, décortique l'intimité, imperméable à toute notion de permission. Après tout, c'est toi qui as commencé. L'invisible créature se nourrit des visions d'un labeur acharné – encore une notion trop humaine que son esprit fragmenté ne parvenait à saisir. Son œil avisé remarque évidemment la présence de la bouteille de vin, tout comme de rares effets personnels présents dans la suite. Elle ne vivait pas ici depuis bien longtemps, sans pour autant paraître souhaiter emménager ailleurs. Es-tu nomade ? Comme moi ? Ou est-ce tout simplement que tu ne te sens nulle part chez toi ? Hypothétique similitude, qu'il se devait de vérifier. Énième secret pour la Mystérieuse, qu'il désirait ardemment lui arracher. Et tandis qu'il contemple son visage concentré, penché sur son ouvrage, l'illusion se délie naturellement – hideux prolongement de lui-même, spectre aux mille visages, Djinn des déserts oubliés.
Le sifflement est discret, tout d'abord. Comme une bouilloire, dans une chambre voisine, une fois la température désirée atteinte. Ou le mugissement du vent, à l'extérieur du cocon protecteur. Un son au-delà des parois. Rien qui ne puisse encore t'atteindre, très chère. Les nuages sombres, bien réels quant à eux, s'amoncellent au-dessus de lui. Il espère que la pluie ne s'abattra pas, il déteste l'humidité. Et il aspire à rester concentré à sa tâche. Il n'utilise pas ses doigts pour amorcer le cauchemar. Sa main amputée demeure sagement posée contre le châssis, pour assurer à la créature un équilibre certain. C'est contre la baie vitrée que le crissement retentit, insupportable raclement d'ongles invisibles contre le verre. Le son parcourt la fenêtre sur toute sa longueur, et parmi l'opaque obscurité, peut-être que Medea percevra la main diaphane et inhumaine qui engendre le tourment, griffes noires éclatées sur une peau trop pâle, cinq doigts démoniaques rattachés à rien, aucun corps pour les contenir ou les guider, seulement cette dextre irréelle qui traverse la paroi de verre horizontalement. Les contours flous du mensonge s'estompent et l'illusion disparaît dans la nuit. Un silence gênant, absurde, s'installe alors, remplace le bruit odieux comme s'il souhaitait effacer son existence des consciences. Puis tout à coup, alors que l'arbre le plus proche se situe à une cinquantaine de mètres, le claquement cinglant d'une branche folle s'abat à nouveau, cette fois contre la vitre derrière laquelle l'Immortel dévore chaque réaction, dissimulé dans les ombres. Approche.
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Medea Comucci
Sugar Mommy, la randonnée c'est ma vie (et mes collines ne demandent qu'à être explorées)
I will stop at Nothing
En un mot : Humaine. Profiler pour le FBI et consultante pour la NRD
Qui es-tu ? : A cinquante ans, je rassemble les bris de ma carrière explosée dix ans plus tot. Travailleuse acharnée, animée par un désir de vengeance qui me couple le souffle. Je ne m'arrêterais que lorsque ma Némésis sera morte ou sous les verrous. En parallèle, à la tête d'une cellule spéciale, je suis chargée d'incarcérer les CESS qui s'imaginent au dessus des Lois.
Facultés : J'attire les ennuis. Très facilement. Et souvent, je vais à leur rencontre.
Medea relève la tête. Fait craquer sa nuque. Réduisant l’engourdissement musculaire après avoir passé de trop longues minutes à étudier les informations qui se chevauchent entre elles. La politique vampirique n’est pas son domaine de prédilection, ce qui ne signifie pas qu’elle lui tourne totalement le dos. Surtout lorsque l’opportunité d’en tirer les fils d’araignées les plus fragiles s’est présentée à elle. Les Clans sont en déséquilibre, un nouveau poids sur l’échiquier invisible promet de redistribuer les pièces. Le Roi est mis en échec par sa propre Reine. Figure encore tronquée dans les ombres. Un échec qui n’est pas Mat. Les tensions se font plus vives ces derniers mois. Maintenant qu’elle est à l’écoute de la Rue, qu’elle surprend toutes les rumeurs, le conflit larvé se dessine mortel pour les collatéraux.
C’est ce qui intéresse l’agente de la NRD. Non pas que des Fils de Cain se déchirent entre eux. Pas les victimes qui connaissent une seconde mort après avoir emprunté à la Nature une seconde vie. Mais les Calices. Les marqués. Les humains qui sont dans le sillage des Trop Charismatiques. Ils tomberont avant leurs protecteurs, loi de la Guerre si elle se déclare ouvertement. Dans le silence de la chambre d’hotel, peut être, parfois, Medea s’avoue qu’elle chasse deux gibiers à la fois. La figure intangible qui semble être le pivot du conflit du Chaos. Malgré toutes ses persuasions, Al Jezhia a refusé de lui livrer un nom. Ce nom. Il lui restait un brin de survie. Grand bien lui fasse. Son second gibier n’a pas de nom, lui non plus. Frustration. Mais il a un visage. Il a des sensations. “James” n’a jamais disparu de sa mémoire après sa trahison odieuse. Rien ne permet de dire que le Vampire est Louisianais. Sauf.. Sauf cette supplique mensongère en Francais. Un français à l’origine du dialecte cajun. De plus, Shreveport est le catalyseur des forces surnaturelles. Que l’Edonis à langue fourchue se dissimule dans l’anonymat d’un Essaim ne serait pas surprenant. Cependant, elle a volontairement refusé d'enquêter sur les différents Clans établis pour le rechercher. Ses motifs sont trop personnels. Son ressentiment trop semblable à celui qu’elle nourrit pour sa Némésis.
Lasse. Lasse de cette bile dont elle s’empoisonne à chaque respiration. Cependant, elle est incapable de déposer ce fardeau. D’abandonner le passé qui pourrit chaque mouvement de son présent et vice les rêveries d’un futur de plus en plus opaque. Elle se renverse sur sa chaise, les yeux mi clos fixés sur les fresques du plafond, chatte au repos. Réfléchissant à comment piéger le Second insaisissable. Par d’autres menues proies peut-être? En identifiant et neutralisant des membres plus insignifiants? Impossible. Elle n’en a pas les moyens techniques. Pas si elle n’implique pas la hiérarchie de la Nrd. C’est trop tot. Barrois a besoin d’un dossier beaucoup plus précis et fondé que cela. Pour le moment, c’est une lutte sans cadavres humains. Pas leur juridiction. Elle peut entendre toutes ses objections et il serait dans le vrai.
Soudain, elle se redresse. La brune braque son regard vers la grande porte vitrée qui domine le salon de sa suite. Les fins cheveux de sa nuque sont hérissés tout comme ceux de ses bras. Elle est sous tension. Volée de bois vert de ses instincts qui ne cessent de l’alerter depuis plusieurs nuits. Rien. Ses yeux ne distinguent rien que les lumières habituelles qui se reflètent sur le lac, les quelques lanternes accrochées dans le jardin. Medea est épuisée. Elle travaille trop. Ne dors pas assez. Ne s’autorise pas assez de moments récréatifs. Son briquet qui s’allume en une flamme claire. L’extrémité d’une cigarette qu’elle embrase. Son verre de vin a perdu tout attrait. Non, elle se sent influencée par la bouilloire qu’elle entend chanter dans la suite à coté de la sienne. Étrange d’ailleurs, c’est la première fois qu’elle perçoit des sons à travers les murs épais. Haussement d’épaule. Aucune importance. Elle se dirige vers le minuscule coin cuisine, sa cigarette à la main dont elle tire une bouffée. De l’eau dans l'appareil, une tasse qui lui appartient tout comme la petite boîte métallique qui contient le thé dont elle a envie ce soir. Plusieurs sont alignées, si elle voue un culte à la caféine, se passer de thé n’est pas envisageable. Lapsang Souchong. Les veloutes du thé noir fumé embaument la pièce et chassent celle du tabac. Sa tasse dans une main, cigarette dans l’autre, elle revient au centre du salon. Machinalement, elle pose la céramique pour empocher son briquet. Un grincement désagréable, semblable à une craie sur un tableau noir vibre soudain non loin d’elle. Ses yeux se portent sur la vitre et alors qu’elle se rapproche, elle est certaine de voir une chose arachnide contre le carreau transparent. Qui la traverse de part en part, trop rapide pour être décelée. Le coeur dans la bouche. Le dégout est immédiat. Néanmoins, il lui en faut plus pour avoir peur d’un insecte. En alerte, elle se rapproche de la paroi translucide. Rien. Il n’y a rien. Peut-être qu’elle a simplement vu la silhouette de feuille déchiquetée rabattu par le vent après l’averse qui s’est produite quelques heures plus tot?
A l’autre bout de la pièce, c’est contre le second carreau que se produit un bruit sec, presque dans son dos. Cela ne peut être un volet mal accroché, l’établissement n’en possède pas. Un objet emporté par une bourrasque? Une seconde fois? Ce n’est pas qu’elle ait vraiment peur. C’est une sensation de Faux. Une impression que quelque chose ne va pas. D’absence de Naturel. Résolument, elle franchit les quelques pas qui la séparent de la baie vitrée qu’elle ouvre en grand. Sa tasse à la main, elle tire un peu trop nerveusement sur le cylindre de nicotine. Scrutant le jardin depuis son balcon qui le surplombe. Un cri qu’elle étouffe à moitié à la sonnerie soudaine de son téléphone portable. Coincé dans la poche de son jean, elle l’en extrait, effleurant son briquet qui reste au fond. Cigarette abandonnée dans le cendrier, tasse qui lui réchauffe la paume. La température a baissé en ce début de nuit et elle frissonne. Pourtant, rentrer à l’intérieur ne l’effleure pas malgré sa chemise légère. Pieds nus sur le dallage encore humide.
En commençant à prendre l’appel, elle scrute la semi obscurité autour d’elle. Rien d’alarmant. Et certainement aucun insecte bizarre. Un sourire un peu plus détendu quand elle voit son interlocuteur et elle se met à marcher en huit sur le balcon, incapable de rester immobile au téléphone. Pour une fois, les traits sévères de son visage se détendent un peu. -Ciao, Damiano. Comment va Chicago? Damian Vascos. Un ami, un amant dont elle a croisé la route pendant son mariage avec Adam lorsqu’elle était encore à Chicago, après avoir quitté New-York. Impossible de rester dans l’immense mégalopole, pas après dix ans destructeurs. Elle garde pour Chicago beaucoup de tendresse. Et pour l’architecte, tout autant. Leurs vies se croisent sans jamais trop se mêler. Il est l’un des rare qui ne la mette pas sur la défensive. Complicité possible par la distance et l’évidence qu’ils ne sont pas fait pour vivre ni être en couple. Elle tourne régulièrement le dos à sa chambre, circuit erratique et imprévisible, au gré de sa conversation. -Bien sur que tu peux venir me voir! Par contre j’ai un boulot monstre… mais je devrai pouvoir dégager une ou deux journée, et passer mes soirées avec toi. Une gorgée de thé qui refroidit à peine. Sa cigarette qui se consume, oubliée. La tension malsaine qu’elle ressentait à l’intérieur de la suite commence à se dissiper grace à la voix chaleureuse du grand blond. -Tu sais que je ne peux pas te parler de mes affaires en cours, rebuffade légère. Un temps de silence et un léger éclat de rire. -Rien que ca?! Non désolée, je ne connais aucun des deux sénateurs de Louisiane, je ne me mêle pas trop de politique tant que la politique me fout la paix. Medea finit par s’immobiliser contre la balustrade en fer forgé, regardant le lac miroiter sous les étoiles qui percent à peine. Dans les ombres, à peine perceptibles, les manoirs nichés dans les propriétés les plus luxueuses de la ville. Elle ferme les yeux. -Je sais. Non, je bois pas ce soir! Juste un thé! -Pensées pas tout à fait coupables pour la bouteille restée ouverte sur la table délaissée. - Pas mal de stress, beaucoup de fatigue, rien de très inhabituel, quoi. Ca me fera du bien de te voir, je n'ai pas été très disponible depuis que je suis à Shreveport, c’est un peu la folie. - Un soupir. Parfaitement audible pour son interlocuteur. -Non. Aucune trace de lui, je ne sais pas où il se cache. Pas encore. La brune s’arrache à la nuit, récupère sa cigarette presque disparue et tire une longue taffe, écoutant le phrasé familier. -Va dormir… -un sourire amusé - Tu nous a pris pour des ados, ou quoi? Et j’ai encore besoin de travailler ce soir. -Son ton change, devient plus sérieux, un peu plus profond -Tu me tiens au courant pour ta venue. Riguardati, Stai attento, Damian.
Ce n’est qu’une fois la conversation terminée qu’elle revient à l’intérieur. L’esprit plus léger, les phénomènes bizarres des minutes précédentes presque effacés.
Immobile dans les ombres, la Créature patiente, se régale des réactions provoquées par les leurres, à l'échelle des sentiments qu'il désirait engendrer chez la mortelle. Juste un grain de folie, une dissonance suffisante pour la désorienter légèrement, réajuster sa posture. Peut-être provoquer un déplacement, générer une ouverture qu'il saisirait alors. S'il se voulait parfois marionnettiste, il savait pertinemment qu'il ne dirigeait pas les fils du Destin. De là où il se trouve, il parvient à arracher des bribes d'indices sur l'inquiétude qui agite quelque peu l’éphémère, sans qu'un véritable élan de panique ne la saisisse toutefois. Un sang-froid froid à toute épreuve, malgré ses origines méditerranéennes qui murmuraient le contraire. Satisfait, il prend le temps de décortiquer le faciès féminin lorsque celui-ci se présente à lui. Elle est encore loin, trop loin pour qu'il puisse la humer comme il le souhaiterait, s'abreuver de ses émotions à même sa peau. Tandis qu'il la guette dans le silence, il n'aspire qu'à la profaner. Les dossiers sur le bureau attirent son attention, lorsqu'elle se déplace vers la cuisine. Légèrement, sa nuque se tend pour espérer apercevoir un visage en deux dimensions, une information quelconque sur les revues de papier, mais la distance et l'angle visuel l'empêchent encore de dérober les secrets de l'Italienne.
L'occasion inespérée se présente lorsque Medea s'approche finalement de la baie vitrée pour l'inspecter, visiblement soucieuse de traquer l'apparition précédente. Le Noctambule se pétrifie dans les ombres, à quelques mètres à peine de sa cible sur laquelle il darde ses pupilles de rapace. Chaque geste, chaque odeur est disséquée, et il se nourrit de la nervosité qu'il devine à travers les gestes, par ce parfum qu'elle exhale inconsciemment, par les tremblements presque imperceptibles des phalanges ; enfin, par ce sursaut qui arrache un rictus à l'Immortel, témoignage de la tension qui électrifie la mortelle à fleur de peau. Les yeux qui, en réponse, décortiquent l'obscurité, ne perçoivent pas le danger tapi à quelques enjambées. Tant qu'il ne se déplace pas, il se sait indétectable. Et cet appel opportun lui offrait probablement le sésame tant espéré pour s'introduire sans peine à l'intérieur, sans brusquerie, sans avoir besoin d'y être invité. Car tout laissait à croire que les lieux impersonnels ne réchauffaient pas le cœur de l'Européenne comme un vrai foyer le ferait. La suite d'hôtel, comme tant d'autres choses dans la vie de Medea Comucci, occupait une fonction spécifique et dédiée. Un cadre qu'il s'apprêtait à bousculer, tout en l'observant tournoyer avec irrégularité sur le balcon humide, s'animer au gré d'une conversation qui efface les craintes précédemment implantées dans son esprit. Il n'en ressent aucune frustration. Au contraire, il y décèle une aubaine : celle de percer les défenses de l'enquêtrice, de profiter de ce relâchement pour se faufiler au creux de son existence.
Excessivement attentif, il tâche d'identifier un motif récurrent dans les pas qu'effectue Medea, sans y parvenir. Et puisque la faille ne se présente pas immédiatement, il décide de patienter, tend l'oreille, écoute malgré lui la conversation qui ne lui arrache qu'une grimace de dégoût lorsque la voix masculine courtise la belle. Le mensonge, en revanche, lui tire une nouvelle satisfaction, tandis qu'il jette un œil discret à la bouteille qui trône toujours sur la table. Il aurait préféré qu'elle en boive davantage, plutôt que de ce thé à l'odeur appétissante pour lequel elle avait finalement opté. Qu'importe, la soirée était encore jeune, pour celle qui dormait à peine. Il la briserait autrement. Son imagination crépitait déjà de multiples stratagèmes dont il userait sans scrupule à son encontre.
Finalement, la marche intempestive s'interrompt et la silhouette féminine se fige contre la balustrade. C'était le moment qu'il attendait. Prudemment, ses membres se délient, et les ombres s'étendent, pernicieuses, jusqu'à la lisière du balcon. Le bruit des chaussures est étouffé par un cri de rapace nocturne, nouvelle illusion, lorsqu'il saute du châssis et atterrit sur la plateforme. Il lui suffisait de longer le mur, de se fondre dans l'obscurité, de se glisser derrière la proie sans céder à la tentation de la frôler, pour s'immiscer dans son intimité et enfin accéder au savoir qu'il traquait depuis des mois. Une tâche aisée, pour celui qui savait se jouer des apparences et redessiner l'univers à sa guise, pour duper les mortels et s'infiltrer sans bruit dans leur existence.
A pas de loup, la silhouette spectrale légèrement recroquevillée sur elle-même, il ne remarque la dissonance que lorsqu'il réalise que la communication téléphonique s'est interrompue. Prudemment, il tourne le visage vers celle qui l'observe désormais, médusée. Plusieurs secondes lui sont nécessaires avant de comprendre que les ombres autour de lui se sont dissipées, lâchement évaporées pour le placer sous le feu des projecteurs, prisonnier du champ visuel implacable de Medea, jeté sur sa route comme une erreur cosmique. Sagement, sa posture s'immobilise, entre elle et la baie vitrée par laquelle il avait espéré s'engouffrer. Il était trop tard pour dresser un leurre entre elle et lui, trop tard pour se composer un visage factice. Il ignorait si son investigation l'avait déjà fait découvrir son identité, tout comme l'avancée de l'enquête, des éléments avec lesquels il devrait composer, et rapidement, tandis que sa figure trahit l'étonnement, reflet ironique de la situation inverse, où la femme découvre un inconnu sorti de nulle part au milieu de son balcon.
Le temps joue contre lui, mais sa position l'avantage. Lentement, il se redresse et pivote pour lui faire face, et tend sa main gauche, amputée à l'annulaire, vers le petit objet qu'elle tient toujours fermement entre ses doigts. « Votre téléphone. Donnez-le moi. » Il préférait miser sur l'idée qu'elle savait d'ores et déjà qui se tenait face à elle. Car même si ce n'était pas le cas, elle déduirait aisément sa nature. Son intelligence la pousserait probablement à se protéger du danger qu'il représentait alors pour elle. La froideur des menaces tranche avec la chaleur de sa voix, à la musique orientale, la caresse du couperet avant la mise à mort. « Si vous tentez de faire intervenir qui que ce soit, je vous assure que je ne laisserai à Damian aucune dépouille sur laquelle se recueillir. » Les quatre doigts tendus comme des serres vers elle, il coulisse légèrement pour dégager l'ouverture de la baie vitrée et l'inviter à entrer la première, bien décidé à la talonner de près. Il ignore si elle possède des armes quelconques, ou quoi que ce soit qu'elle pourrait utiliser contre lui. Puisqu'il avait surestimé ses propres capacités d'infiltration, il joue désormais la carte de la prudence. Il ne peut plus se permettre de commettre la moindre erreur, au risque qu'elle en profite pour prendre l'avantage.
D'un coup de menton, il lui désigne l'un des sièges du salon, ses prunelles d'ambre rivées à son visage féminin. « Asseyez-vous. Nous allons simplement parler. » Il se garde bien de lui révéler que les choses ne se déroulaient pas tout à fait comme il les avait anticipées. Ce qui, une fois remis de sa surprise initiale, ne lui déplaisait pas particulièrement. Au contraire, sa psyché démente appréciait les retournements de situation, l'impromptu, le chaos qui s'infiltrait dans sa propre existence, lorsqu'il tentait de provoquer la destinée des mortels avec une confiance démesurée. Même les Immortels pouvaient être destitués, aucun empire n'est éternel. Tôt ou tard, chaque être retourne à la poussière.
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Medea Comucci
Sugar Mommy, la randonnée c'est ma vie (et mes collines ne demandent qu'à être explorées)
I will stop at Nothing
En un mot : Humaine. Profiler pour le FBI et consultante pour la NRD
Qui es-tu ? : A cinquante ans, je rassemble les bris de ma carrière explosée dix ans plus tot. Travailleuse acharnée, animée par un désir de vengeance qui me couple le souffle. Je ne m'arrêterais que lorsque ma Némésis sera morte ou sous les verrous. En parallèle, à la tête d'une cellule spéciale, je suis chargée d'incarcérer les CESS qui s'imaginent au dessus des Lois.
Facultés : J'attire les ennuis. Très facilement. Et souvent, je vais à leur rencontre.
Quelques mots d’au revoir. Quelques mots d’à plus tard. Pensées saupoudrées de mélancolie tendre. Medea aimerait parfois que Damian soit celui qui lui aurait permis de tourner le dos aux hurlements à la lune qui résonnent encore dans un coin de ses cauchemars. L’homme de quarante huit ans l’a certainement souhaité un temps avant de poursuivre son propre chemin, une fois les dés lancés et Dame Destin se riant d’une telle possibilité. L’italienne ne possède pas seule la force de couper les fils aconit qui pourrissent sous l’iceberg de son regard, la reliant, par delà le temps et la distance, à une créature maudite de bien plus qu’une manière.
Ses épaules s’affaissent quelques instants. Duncan, sans presser l’issue, est en chasse, et il entend bien que le Loup soit son premier trophée de chasse. Comment lui en reprocher l'ambition. Ce serait un coup d’éclat pour marquer le début d’une carrière qui s’annonce fulgurante. Fierté assombrie d’amertume pas tout à fait assumée. Une bourrasque de vent qui s’infiltre contre son cou la ramène à la nuit présente. Pas qu’elle ait réellement froid, mais elle n’a pas encore terminé sa nuit studieuse. Il lui faut encore recouper et analyser divers témoignages et …
La brune s’est retournée. Ses yeux s’agrandissent sous la stupeur en voyant la position recroquevillée de son invité surprise. Le moment est si inattendu, si loin de tout ce qu’elle aurait pu imaginer qu’elle n’a pas le temps d’avoir peur. La seule chose, incongrue, qui passe en tête de la psychologue, c’est qu’il aurait dû auditionner pour le rôle de Gollum. Il a clairement le facteur sinistre et un brin ridicule au plus juste. Elle ne songe ni à se défendre ni à attaquer. Elle reste figée sur place, la moquerie au bord des lèvres qui commence à se disputer avec la réalisation qu’il tentait de s’introduire dans son espace en toute impunité. Ce qui ne la met pas de bonne humeur. Elle choisit de laisser percer l’amusement, mordillant un coin de lèvre, comme pour retenir un éclat de rire, et de garder sa colère naissante bien enfouie en elle.
Il pivote à son tour. Perçoit la qualité du silence nouveau. Il est un faon pris soudainement entre les phares et qui ne sait plus de quel côté s’échapper. Les grains de sable s’écoulent par centaine d’un sablier suspendu au-dessus de leur tête avant qu’il ne songe à se redresser. Vampire. Medea grave ses traits dans sa mémoire et il recompose une identité qui n’était que fragmentée jusqu’ici. Des éclats à peine capturés par des caméras de surveillance ou décrits vaguement pour ceux qui osaient l’évoquer. L’Infant. Le Souffle de l’Entropie. Si elle ne peut cibler exactement ce qu’il désire exactement, elle n’aura pas l’illusion de de penser que cette “visite” est le fruit du hasard ou qu’il ignore qui est en face d’elle. Medea hausse un sourcil à son exigence, puis à ses menaces outrancières.
-Vous avez conscience que menacer une agente du Gouvernement est une enfreinte à la Pax Romana qui existe entre nos races? Demande-t-elle, le ton légèrement ironique. Il sait qui elle est. Il sait qu’elle travaille pour la Nrd. Est il Humain lors de l’historique Pax Romana? Medea ignore tant à son sujet. -Je suis certaine que mes supérieurs seront ravis que vous leur facilitiez si aisément la tâche lorsqu’ils visionneront la vidéo de vos exploits de la caméra en train de vous filmer, qui envoie directement les images à un serveur protégé. -Déclare la profiler avec un aplomb absolu. Le choc passé, elle a retrouvé son sang froid et son intelligence ne l’abandonne pas. Quant à savoir si c’est vrai ou faux, est ce que son visiteur est prêt à prendre le risque? Elle suit ses instincts à ce sujet. Néanmoins, dans une vague tentative de conciliation, elle lui montre l’écran noir de son téléphone. S' il espérait vraiment qu’elle allait le lui remettre, il est d’une naïveté qui lui ferait presque pitié. Elle le garde dans sa main. Sur le haut de l’appareil, un léger pulsar rouge. L’italienne a enclenché la fonction d’enregistrement vocal. Comptant sur la méconnaissance probable du vampire pour les technologies modernes pour réaliser ce tour de passe passe.
Pour l’instant, elle choisit de ne pas entrer dans une confrontation directe. Bien qu’une partie de sa personnalité l’enjoint de régler cette intrusion dans la brutalité la plus abjecte. Après tout, elle est dans son droit. C’est lui qui est l’offenseur, ce soir. Elle accepte de rentrer la première dans le salon de la suite, bien que tout en elle se contracte lorsqu’elle lui présente la vulnérabilité de son dos. L’instant heureusement ne dure pas. -Vous savez que si vous vouliez “parler”, j’ai un bureau parfaitement adapté pour les rendez-vous! -Bien évidemment qu’elle remue le couteau dans la plaie. Son téléphone est posé bien à plat sur la table principale. Un ordre. Encore. Au lieu de prendre place dans le fauteuil, elle se dirige vers la bouilloire, la remplissant à nouveau d’eau. Elle lance par dessus son épaule, dans une nonchalance étudiée -Il va falloir que vous cessiez de vous comporter comme si vous pensiez vraiment que je vais accéder à la moindre de vos exigences. Cela nous fait perdre du temps à tous les deux.
Discrètement, la brune détache le petit crochet du filigrane d’argent de son poignet droit, les mouvements couverts par ses gestes rituels qui préparent l’eau. -Un thé? -Certains caïnites aiment entretenir certaines illusions de leurs vies passées, d’autres les abhorrent. Elle saura bientôt dans quelle catégorie il se classe. La chaîne d’argent reste encore maintenue à son bras mais elle pourra coulisser facilement si l’humaine a besoin de s’en servir. Elle se méfie de lui, comme elle pourrait se méfier d’un Cobra, bien qu’il n’ait rien de Royal, celui-ci. La dernière fois qu’elle s’est retrouvée dans une chambre d'hôtel avec un vampire, elle en a payé le prix avec son sang. Elle n’a pas l’intention de recommencer. Son flingue à balles d’argent est dans sa chambre. Inaccessible. Cependant, plusieurs des fournitures sont en bois. Néanmoins, il n’y a que dans les films que briser le pied d’une chaise se fait aisément, là elle risque plus de se péter le poignet si elle s’y risque. Cela ne peut être qu’en dernier recours.
Medea se retourne pour lui faire face. Calme avant la tempête. Elle ne sous-estime pas sa célérité ou sa force. Elle est en danger. Encore diffus, mais bien réel. Sans le quitter du regard, elle pioche une cigarette qu’elle place entre ses doigts, celle qu’elle fumait sur le balcon, oubliée, puis récupère son zippo. La flamme vive qui s’élève, prête à lécher le tabac. Provocation assumée. Le feu et les vampires sont loin d’être amis. -Vous êtes bien silencieux, pour quelqu’un si impatient de faire ma connaissance qu’il a cru bon de s’introduire chez moi, observe-t-elle.
Il savait qu'il n'était pas en position de force. Que sa tentative avortée d'infiltration risquait à tout moment de se retourner contre lui. Le sourire qui perlait sur le coin des lèvres de la consultante souligne l'avantage perdu par son manque d'habileté, par un excès de confiance qui lui avait valu d'échouer pitoyablement, et de désormais évoluer à visage découvert face à elle. Trop tôt. Le Temps s'était joué de lui, avait démontré une fois de plus qu'on ne pouvait le contrôler aussi aisément que l'Oriental l'aurait espéré. Détestable mouvement de balancier, insulte déplaisante pour l'ancien horloger, autrefois si harmonisé avec les battements mécaniques de l’Éternité qui s'écoule, grain après grain. Face à ce sourire féminin qui en dit long, trop long sur la considération actuelle de la femme qui lui tient tête, il ressent chaque seconde s'écraser douloureusement contre sa nuque. Une honte indicible déforme légèrement son visage, même s'il tâche de demeurer de marbre face à elle, et une grimace tord le coin de sa bouche tandis qu'elle s'amuse, profite intelligemment du retournement de situation, sans perdre de son sang-froid.
L'Immortel grince des dents, davantage effrité par son orgueil bafoué que par ce rappel à l'ordre. Un sourcil se hausse, à peine, tandis que le faciès inerte se recompose. Les iris d'ambre étudient longuement l'aplomb de son interlocutrice. Il doit veiller à ne pas la laisser renverser totalement le rapport de force. Mais après son entrée manquée, il pouvait bien lui accorder un voire deux coups d'avance. « J'en ai conscience. Et je n'aurais pas eu à tenir de tels propos, si vous n'aviez pas fourré votre nez dans mes affaires. J'espère que vous avez une bonne raison de le faire. De nous deux, vous êtes celle qui perturbez le plus l'équilibre si fragile entre nos deux races. Je suis certain que vos… supérieurs… apprécient vos initiatives. » Un silence marqué, tandis qu'il l'observe passer devant lui, et ses pupilles traînent plus que de raison contre la nuque offerte à sa vue. Il désire lui faire sentir qu'il pourrait enfoncer autre chose qu'un regard, sous son derme sensible. Une menace implicite qu'aucune caméra ne saurait capturer.
Méfiant, il lui emboîte le pas et pénètre dans sa suite, tout en inspectant les angles du plafond, le mobilier, alerté par la menace proférée. Bluffe-t-elle ? Bien qu'il ne distingue aucun appareil susceptible d'enregistrer son image, ses lacunes en matière technologique ne jouent pas en sa faveur, et il n'exclue pas la possibilité qu'une nanotechnologie puisse opérer dans l'ombre, une machine indétectable pour ses sens vampiriques. Il serait surpris que Medea use de tant de précautions, mais il ne prendrait pas le risque d'ignorer cette possibilité. Mieux valait considérer que l'entretien était effectivement consigné sur des bandes d'enregistrement. Amusé par la défiance de l'Italienne, il décide de prendre lui-même place dans le fauteuil dédaigné par son hôte, ses longs doigts pianotant patiemment contre le bois de la table. Le téléphone attire son attention, par sa présence centrale, tout comme par cette nuisance visuelle qui attise son agacement. Une concentration bien vite arrachée par la flamme qui jaillit à quelques mètres de lui, et qui lui fait aussitôt relever la tête. Ses prunelles s'attardent un court instant sur le zippo, avant de remonter vers l'insolent visage. La flamme danse encore étrangement dans ses yeux lorsqu'il lui répond enfin et désigne la bouilloire. « Volontiers. Je vous remercie pour votre hospitalité. Malgré mon attitude quelque peu cavalière. Mais vous devez déjà avoir connaissance de ma marginalité… n'est-ce pas, Medea ? » Le prénom roule sur sa langue, qu'il goûte exagérément ; il en savoure chaque phonème avec une lenteur exaspérante, comme s'il pouvait en extraire le liquide carmin si précieux à sa vie, rien qu'en le prononçant.
Il s'amuse à décortiquer ses réactions et à étirer une nouvelle fois le silence entre eux – un mutisme presque incongru, en contraste parfait avec son intrusion. Était-il là pour s'entretenir avec elle, comme il le lui avait affirmé précédemment ? Ou n'était-ce qu'une brumeuse promesse, un voile uniquement destiné à lui faire gagner du temps, tandis qu'il adaptait sa stratégie ? Finalement, il quitte le fauteuil sur lequel il prenait déjà ses aises, et lui tourne le dos à son tour, un bref instant, comme pour lui montrer qu'il ne se méfie pas. Qu'il se croit supérieur. Ce qu'il aurait tendance à croire, mais il n'oublie pas les confessions d'Al Jezhia. Tout comme la fin précipitée qu'il avait connue, de par sa fierté à se croire intouchable. Il avait sous-estimé la femme, il avait sous-estimé la mortelle. L'Israélite ne commettrait pas cette erreur.
Lentement, il effectue le tour de la pièce, et éprouve toutes les difficultés du monde à se retenir de toucher à ses effets personnels. Les doigts se contentent de passer contre les objets, sans jamais les frôler, insufflent simplement l'idée qu'il marque son territoire, qu'il sera désormais cette invisible présence dont elle ne se débarrassera jamais. Son exploration le conduit jusqu'aux dossiers disposés sur le bureau, qu'il inspecte d'un œil curieux avant de s'en saisir. Rapidement, il en parcourt la première page d'un regard en apparence peu concerné. Sans explication, il pivote et revient à son point de départ ; avec élégance, il reprend place dans le fauteuil, place les feuillets à côté du téléphone et les pousse d'un geste aussi ferme que délicat vers Medea. Un rictus détestable, tandis qu'il s'installe plus confortablement contre l'assise, avec cette indolence propre aux orientaux. Les jambes croisées, le bras replié sur l'accoudoir, sa main amputée pianote contre la table. Patiente, elle découd le rythme d'un tapotement irrégulier. Invraisemblable. En réalité, elle n'attend qu'une chose. Que la tasse fumante parvienne à sa portée, et que d'un geste presque lascif, elle ne s'empare du téléphone pour le plonger dans l'eau bouillante du thé offert. Son buste se penche alors, davantage pour scruter Medea que pour s'emplir du parfum qui s'échappe du récipient. « J'ai dit : pas de téléphone. » Ses lèvres s'écartent à peine lorsqu'il articule l'exigence en un murmure. Puis elles s'étirent, dans ce qui ressemble à tout sauf à un sourire humain, comme pour parfaire son capricieux propos. Provocation assumée, envers celle qui tente de mener la danse, sous les crépitements de la machine qui agonise sous la chaleur.
Cette fois, il joint ses mains devant lui et la regarde presque avec courtoisie. D'égal à égal. Si la moindre bande vidéo enregistre réellement l'entrevue, sa silhouette s'y imprimerait comme étant calme. Diplomate. Pas un geste plus vif que l'autre, aucune menace dans son attitude. « Vous avez raison sur un point. Ni vous ni moi ne souhaitons perdre notre temps. Je n'espère pas vous surprendre en vous révélant que je suis venu pour ceci. » D'un simple coup de menton, il lui désigne les dossiers des informations cumulées de l'investigation, auxquelles il n'avait jeté qu'un bref coup d’œil. Simplement pour vérifier ce qu'il craignait, sans encore en creuser le contenu : elle enquêtait sur lui. Sur eux. Et il devait découvrir ce qu'elle désirait leur arracher. « Soyez gentille, faites-moi la lecture. L'anglais n'est pas ma langue natale. » Sans que la surface de son visage insondable ne soit déformée par la moindre émotion, il baisse d'un ton lorsqu'il poursuit, ayant peut-être décidé de jouer cartes sur table, finalement. « Ou bien gagnez du temps et dites-moi ce que vous cherchez. Nous ne sommes pas dans votre bureau, certes, mais je suis tout de même ici, face à vous. Profitez-en. L'occasion ne se représentera peut-être pas. » Un voile de mystère entoure ses dernières paroles énigmatiques, tandis qu'il plonge ses prunelles dans les siennes, pour lui indiquer qu'elle bénéficie de toute son attention.
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Medea Comucci
Sugar Mommy, la randonnée c'est ma vie (et mes collines ne demandent qu'à être explorées)
I will stop at Nothing
En un mot : Humaine. Profiler pour le FBI et consultante pour la NRD
Qui es-tu ? : A cinquante ans, je rassemble les bris de ma carrière explosée dix ans plus tot. Travailleuse acharnée, animée par un désir de vengeance qui me couple le souffle. Je ne m'arrêterais que lorsque ma Némésis sera morte ou sous les verrous. En parallèle, à la tête d'une cellule spéciale, je suis chargée d'incarcérer les CESS qui s'imaginent au dessus des Lois.
Facultés : J'attire les ennuis. Très facilement. Et souvent, je vais à leur rencontre.
Un vampire dans son salon. Dire que la soirée avait si bien commencé. Medea n’était pas prête. Cette intrusion dans sa sphère privée est intolérable. Depuis combien de temps le Non-Vivant se tient-il dans son intimité, fils des ombres dévoyées? Un coup d'œil machinal aux dossiers épars qui cannibalisent l’espace de la table centrale. La chambre d'hôtel si impersonnelle malgré les semaines qui s’évadent lentement en mois depuis son arrivée en Louisiane. Elle a manqué de prudence. Aurait du songer à tous les paramètres. Mentalement, un soupir de plus. Il n’y a aura pas de seconde intrusion vampirique. La recherche d’un lieu de vie à elle s’impose, barrière naturelle contre les caïnites. Au moins, celui-ci semble avoir raté l’examen de cambriolage et dissimulation. Pour l’un des Nocturnes si haut placé dans la hiérarchie du nouveau Clan, il a tout d’un cancre.
Bien sûr que l’italienne en rajoute et appuie la pointe d’une lame rouillée dans cette blessure d’égo fraîchement ouverte. Néanmoins, elle reste prudente. Ne sous-estime pas sa force, sa célérité et la rouerie dont il peut faire preuve. La panique n’est pas une option. Perdre son sang froid non plus. Il aurait pu la tuer cent fois. Le regard qu’elle lui adresse est d’un calme paravent des émotions plus bouillantes qui frondent au fond de ses prunelles et de son ventre. Un sourire de guivre qui promet au prédateur qu’il pourrait bien se trouver face à plus carnassier que lui.
Un rappel de la balance des Lois entre eux. Indispensable. Ils sont deux citoyens de souverainetés différentes qui cohabitent sous le même territoire. Ils sont trop insignifiants pour fermer la porte de l’armistice, pas assez pour que l’Offense ne soit pas relevée. Un sourcil parfaitement épilé se soulève à sa remarque. Il démontre son peu d’expérience de la lourde bureaucratie humaine. Des rouages de la Nrd et de son rôle en particulier. -Ha? Vraiment? Mes seules initiatives sont celles de l’observation sans ingérence. Ce qui est justement, une des raisons pour laquelle je suis si bien payée. Vous êtes tout à fait libre de faire remonter une complainte à mes supérieurs. Vous voulez le numéro direct de ma superviseure? lui demande-t-elle sans le quitter des yeux. Tout de sucre et de poison. C’est un risque qu’elle prend et qui ne lui coûte pas. Medea a lancé les dés. Certaine qu’il n’a aucunement envie d’affirmer le Clan de manière officielle sur l’échiquier des politiques vampiriques. Pas la volonté d'attiser la curiosité des autorités humaines quand il joue dans les Ombres.
Chacun de ses mouvements est suivi, pesé. Il ose s'attarder sur la ligne de sa gorge. Il n’a rien d’un matou endormi, elle ne l’oubliera. Un pouce vagabond dessine le tracé de sa carotide, depuis la mâchoire jusqu’à la croisée de son épaule. Défiance et insolence. As-tu Faim, parasite?. Le reste de la conversation sera entre les quatre murs. Une fois à l’intérieur, la psychologue s’assure qu’il y ait toujours un meuble entre eux, obstacle insignifiant mais qui pourrait lui permettre de gagner de précieuses secondes si la situation s’emballe. Son téléphone en contradiction directe avec ses “instructions”. Pour autant, Medea embrasse le masque de la Madone italienne qui tient sa cour dans son salon mondain. Une tasse de thé offerte et acceptée bien que la finesse de celle-ci sera perdue pour les papilles de cendre de son hôte. Cependant, elle n’en est pas tout à fait certaine. Certains Fils de Cain affichent un goût pour le vin ou autres boissons mortelles. La cigarette qui retrouve ses lèvres est la bienvenue
Les notes de son prénom dans sa bouche ont une saveur trop intime, trop personnelle. Seuls ses amants ont le droit de le prononcer avec cet accent de gourmandise épicurienne. Il se l’approprie avec bien trop de liberté. Frisson désagréable qui lui parcourt l’échine. La vipère n’est pas restée inactive pendant ces derniers mois. -Je n’aurais pas su mieux dire, Enfant de Jérusalem. -Elle s’est tournée vers lui et s’apprête à lui rendre la monnaie de sa pièce. A piller de sa langue ce qui lui était si précieux, autrefois. Refuser la Mascarade à un coût, et c’est celui du Secret. Il a oublié à quel point cette dernière ne protège pas seulement les humains. Ses iris Pieuvre l’harponnent sans douceur ni amabilité, bien que le ton de sa voix en soit presque tendre. -Les ocres profonds du Néguev ne vous manquent-il pas trop, perdu que vous êtes dans la verdure luxuriante des Bayous? Les parfums d’épices et de fleurs d’oranger doivent vous paraître si lointains… J’admire cet esprit nomade qui vous a poussé si loin de la Tour de David. -Elle ajoute, suave. -Seriez vous mon guide en vos terres natales si nous devenions amis?
Ils ne seront jamais amis. Elle vient de créer une faille impitoyable qui ne sera jamais comblée. L’Italienne n’est douée que pour se créer des inimitiés. C’est dans la violence et les larmes qu’elle s’enracine. Elle en a presque oublié que cela n’a pas toujours été le cas. Le silence retombe entre après cette passe d’arme. Pas pressée de le rompre. Le sifflement de la bouilloire alors que l’impudent se lève. Sa cigarette se consume à ses lèvres, une bouffée de nicotine qu’elle inspire pour juguler la pulsion d'irritation qui lui grignote les entrailles. Il s’arroge propriétaire des maigres possessions personnelles qui habillent un peu la neutralité élégante de la suite. Il commet une erreur cruciale qu’elle ne se privera pas d’exploiter. La pulpe de ses doigts sur ses feuillets. Empreintes digitales qu’il sème à tout vent et qu’elle ne se privera pas de relever, plus tard. Cela rend presque tolérable qu’il ose en bafouer le contenu de son indiscrétion. Il trône dans son fauteuil, une fois sa pantomime achevée et elle pourrait sourire de sa théâtralité. Elle exhale un soupir de condescendance. Souffrant ses enfantillages par pure magnanimité.
Ce qui l’amuse beaucoup moins, c’est cette main…. cette main amputée et bien trop réelle qui se balade sur le bois, détachée du membre auquel elle appartient. C’est dérangeant. C’est morbide. Quand elle s’avance pour déposer la tasse, il y a un soin particulier chez la mortelle à ne surtout pas effleurer l'appendice sinistre. A nouveau elle recule. Retrouve l’appui du mur contre son dos, non loin de la bouilloire encore fumante. Flamme de colère blanche qui noie sa vision. Pas tant la perte matérielle que l’audace dont le Vampire fait preuve. Les données sont sauvegardées régulièrement dans son cloud, les photos sur un compte annexe. Non. C’est le principe.
Medea attrape la poignée de la bouilloire. Son bras décrit un large cercle, projetant l’eau à plus de cent degrés sur le visage séduisant de son adversaire. Ho la beauté de son visage fumant. Des cloques qui fondent sa peau comme de l’acide. Des yeux qui popent comme les plus macabres des pop corns. Des cris de l’Insupportable.
Sa main droite desserre le poing qu’elle avait formé. Croissants de lune imprimée contre la chaire sensible. Sa main gauche s’éloigne de l’appareil électrique. En aucun cas elle ne peut se permettre d’entamer la première les escarmouches physiques. Prête à répondre à toutes agressions. Sa chaîne d’argent, serpent aux crocs rentrés n’attend qu’un bref mouvement. -Je vous enverrais la facture pour celui-ci, se contente d’elle de laisser tomber froidement. L’appareil aurait pu survivre à son immersion dans l’eau. Mais les composants ne sont pas faits pour supporter une température pareille.
Elle s’éloigne de la tentation de la bouilloire, retraverse la pièce. Il n’a aucun bénéfice du doute. Pas la moindre bribe de confiance. Elle détaille ses traits. Grave son attitude. Analyse son arrogance. Une franchise qui détonne avec ses petits jeux de manipulations. Il est venu pour ses dossiers. Elle répond par une question -Pourquoi vous sentez vous aussi menacé par cet embryon d’investigation? Je n’ai pas empiété sur votre territoire. Craignez-vous que votre manque de loyauté soit exposée à la Nuit? Sa réflexion concernant une possible lecture de sa part ne mérite même pas la moindre réaction, tant il est évident que c’est une basse provocation de sa part. Ce manque de subtilité est ridicule. Elle écrase le mégot de sa cigarette dans le cendrier qui trône sur la table basse. Tournant à nouveau les yeux sur lui. -Je cherche à déterminer quels sont les risques pour les mortels dont vous vous entourez et qui seront en première de ligne de front lorsque votre schisme explosera en un conflit moins larvé. -Son ton est dur, presque brutal. Elle a croisé les bras sur sa poitrine, le pli de sa bouche à l’amertume marquée. -Je ne doute pas que vous trouviez ces raisons triviales et peu dignes de votre stature, mais croyez moi que si vos marqués et vos mordus, ceux qui sont en adoration devant vous commencent à tomber comme des mouches, je n’aurais aucune hésitation à présenter mon rapport au Juge Alaric Lanuit.
Si cela sonne comme une menace, c’est probablement une menace. Il y a une détermination glacée à ne pas voir le sang des mortels en dommage collatéral teinter les caniveaux de d’hémoglobine. Medea n’est pas hostile aux Cess. Cependant, dans ce genre de cas, ses inquiétudes sont pour les plus fragiles. Elle n’a pas eu de contact direct avec le Juge vampirique jusqu’ici. Cela ne lui pose aucun problème de faire appel à lui si elle en a besoin. -Peut-être d’ailleurs devrais je lui demander une audience. Je suis lasse de vos enfantillages et de la manière dont vous empoisonnez mes nuits ces dernières semaines. Son intervention sera peut être plus efficace que la mienne!
C’est une intuition et non une certitude. Mais le malaise qu’elle a ressenti ces nuits passées lui apparaît maintenant sous un nouveau jour. Tout comme ses impressions d’être suivie, épiée n’étaient pas une manifestation de paranoïa rampante. Il n’y pas de coincidence, dans son monde. Le vampire a prouvé qu’il était plutôt bien renseigné sur elle. Sensation totalement détestable. Medea revient vers lui. Plante les deux mains à plat sur la table devant lui, le buste légèrement incurvé vers lui. Plus proche proche qu’elle n’a jamais été. Ses muscles sont bandés, en éveil. Prête à se défendre si besoin. L’argent délicat n’est qu’à un souffle de ses doigts. -Je n’ai pas peur de vous. Vos techniques d'intimidation n’ont pas d’autres effets que de m’inciter à creuser bien plus.
Silence glacial. Mépris réciproque, tout juste dissimulé. Haussement de sourcils en reflet à l'affront féminin. Elle joue la carte de la transparence. Se moque-t-elle de lui ? Comme pour les caméras, il ne dispose d'aucun levier de vérification, en tout cas pas immédiat. Il a bien fait de ne pas la sous-estimer. Elle dissémine les informations, éparpille les pièges, positionne intelligemment les appâts, attend de voir s'il mordra. Il ne sait ce qu'il l'amuserait le plus : de la voir échouer, ou d'au contraire, répondre un peu trop franchement à la perche tendue. Il avait encore toute la soirée pour décider. « Donnez-moi donc ce numéro de téléphone, je vous prie. » Une politesse exagérée, pour une information dont il ne ferait probablement rien. Mais il excluait la possibilité d'admettre, par son silence, qu'il ne souhaitait nullement provoquer de remous du côté de la NRD. Le doute demeurait sa meilleure arme, et puisqu'ils jouaient tous deux avec les mêmes règles…
Ou peut-être que cette vérité trop intime, qui ne cessait de crépiter sous son derme, l'avait suffisamment agacé pour qu'il décide de passer à l'offensive, au diable la prudence. Enfant de Jérusalem. Pour de simples observations, elle avait soigneusement poussé le trait. Il n'aimait pas la façon dont elle investiguait sur lui. Sur eux. Trop loin. Trop dangereusement. Quelle effrontée. Le froncement de sourcils l'avait trahi, tout comme ce détestable rictus lorsqu'elle l'avait déstabilisé. Il détestait se sentir ainsi livré à l'Ennemie, transparent et impudique, sous les yeux d'une femme de peu de scrupules. Car c'est ce qu'elle était, n'est-ce pas ? Pour le décortiquer ainsi sans craindre de se brûler les ailes. Il allait le lui faire payer. « Apprécieriez-vous seulement les richesses de mes terres natales ? » Une pique sans consistance, un coup d'épée dans l'eau. Il a conscience de ne pas trouver de prise à chaque tentative. Depuis qu'elle l'a débusqué sur son balcon, il a accepté qu'il n'avait plus de coup d'avance. C'était cela aussi, le goût du risque. Qu'elle gagne du terrain autant que lui, sans qu'ils ne sachent tout à fait respectivement où se situait l'autre, dans la zone brumeuse centrale de l'échiquier invisible.
Il scrute ses allées et venues, impassible, non sans la satisfaction d'avoir cru déceler dans son attitude une pulsion sanguinaire, l'espace d'une seconde. Elle le déteste. Il décide de bien le lui rendre. Elle cessera de fouler la Terre avant lui, il pouvait bien l'honorer de cette attention particulière. Et puis, elle représentait cette figure féminine qu'il abhorrait : tête brûlée mais stratège, effrontée mais pas écervelée, avec un caractère tout à fait méditerranéen. Il peinait encore à la cerner, et devait donc redoubler de prudence. « Mon manque de loyauté ? Vous ne manquez pas d'audace. Aurais-je trahi ? Et si oui, qui ? Quand bien même cela vous concernerait ? » Nouveau froncement de sourcils. Que sais-tu ? Tout ne pouvait être que du bluff. Elle avait forcément mis le doigt sur quelque chose, sur le premier rouage d'un engrenage qu'elle cherchait à déterrer, comme une archéologue avide. N'était-ce réellement que la curiosité qui la poussait à enquêter avec autant d'énergie ? L'ennui, peut-être ? N'avait-elle pas d'autres affaires à mener, plus urgentes ? Et puis, l'explication se déroule, s'approche peut-être enfin de la vérité ou tout du moins, de quelque chose qui tenait à cœur à la mortelle. Quelque chose qu'il avait parfois eu le loisir d'observer, lorsqu'il avait entamé sa filature. La protection des plus faibles. Car c'était ce que les éphémères représentaient, n'est-ce pas ? Des êtres menacés par des races plus puissantes, qui se devaient d'élire parmi eux des représentants, qui assureraient la sécurité du troupeau.
Ainsi donc, il s'agissait de cela, au moins en partie. Des inquiétudes trop humaines pour qu'il n'en saisisse la véritable intonation. Les années avaient effacé cette considération trop prononcée pour l'humanité. S'il en restait curieux, il ne s'émouvait que peu des pertes liées aux famines, aux guerres, et encore moins aux meurtres liées à la nécessité vampirique de maintenir à tout prix leur existence. C'est l'ordre des choses. Que tu le veuilles ou non. Une fatalité qu'il avait acceptée, mais contre laquelle elle avait visiblement décidé de se dresser. Qu'il en soit ainsi. « Je vois. Vous agissez donc à titre préventif ? Car je suppose que vous n'avez rien découvert. Puisqu'il n'y a rien à découvrir. Sinon, nous n'en serions pas là, n'est-ce pas ? Vous à vous épuiser sur une observation vaine, moi à perdre mon temps à tenter de comprendre ce qui vous intéresse tant. » Avec mépris, il roule des yeux vers le plafond, presque déçu de l'invocation du nom du Juge. Seulement en apparence. « Vraiment ? Je serais curieux d'assister à la manière dont vous vous y prendriez, pour affirmer à Alaric Lanuit que je suis la source de vos insomnies. Et moi qui croyais qu'il s'agissait plutôt de votre penchant pour la bouteille. Mais je vous en prie, faites donc. » Et, incessamment provoquant, il lui désigne d'un coup de menton le téléphone hors service au fond de la tasse, un geste ponctué d'un étirement labial qui ressemble à tout sauf à un sourire humain.
Il savait se rendre détestable, pour quiconque le provoquait. Et l'attitude corporelle de Medea ne l'aidait nullement à redresser son attitude. Lorsqu'elle s'approche avec franchise, il ne peut contenir un mouvement de recul, face à ce buste féminin qui se penche vers lui. Il déteste ce mouvement de bascule, même infime, qui rapproche les corps plus que de raison. Cherche-t-elle à le mettre mal à l'aise pour lui extorquer une information ? Elle s'y prendrait plutôt bien. « Je ne cherche nullement à vous effrayer. Vous oui, peut-être ? Vous savez, je suis un être sensible. » Il minaude, curieuse défense alors qu'il s'est soigneusement reculé dans son siège afin de creuser à nouveau une distance entre eux, malgré lui étonné par ce courage dont elle fait preuve pour le confronter de si près. Un coup de dents serait si vite arrivé. Une mâchoire, si vite brisée. A quoi ressemblerait-elle, avec la pommette fracturée et la gencive pendouillant à travers une joue arrachée ? Il penche curieusement la tête sur le côté, se plaît un court instant à imaginer le tableau. Peut-être la dessinera-t-elle.
Prudemment, il se cambre à son tour – non pas vers elle, mais vers le dossier qu'il attrape habilement et rapatrie dans son périmètre proche. « Puis-je y jeter un œil, à titre consultatif ? Je pourrais peut-être vous aider. » Fausse politesse, provocation délibérée, il ouvre le dossier qui demeure sur la table, et feuillette les pages d'un doigt distrait, sans baisser le regard vers les écrits et éventuelles photographies. C'est elle qu'il scrute, attendant de voir si elle tentera quelque chose pour récupérer son bien, si elle souhaite lui dissimuler ses découvertes. « Mais vous admettrez que notre rencontre vous ferait gagner un temps précieux, si vous ravaliez votre fierté et admettiez que vous n'avez rien à vous mettre sous la dent. Je suis là, autant en profiter. Vous devriez vous détendre. Votre tisane n'a pas eu l'effet escompté. Souhaiteriez-vous que je vous masse ? J'ai les mains souples, tenez, regardez. » Il les lui tend, une expression narquoise affichée en travers du visage, les paumes vers le ciel, sans illusion cette fois, seulement deux dextres viciées et blafardes, l'une trouée par une promesse tacite pour laquelle il n'avait pas eu l'occasion de donner son consentement. Sans que le regard n'appuie ses propos, il évoque les phalanges manquantes sans nostalgie, d'une voix froide et antipathique. « Il est quelque part dans le Néguev, si jamais vous vous posiez la question. Vous aviez l'air de connaître l'endroit, et vous avez un sens de l'observation très aiguisé. » Un peu trop à son goût. « On trouverait beaucoup de choses dans le désert, si l'on prenait la peine de les déterrer. Beaucoup de choses perdues ou abandonnées, je voulais dire. Arrachées. » Un infime rictus, cette fois, ponctue les dernières syllabes. Une réaction qui suffit à l'extirper de son immobilisme et à se redresser, un peu trop brutalement peut-être, serpent sur le qui-vive, prêt à se jeter sur elle pour le simple plaisir de provoquer l'accélération de la respiration, le raffermissement des muscles, la dilatation des pupilles. Il passe juste à côté d'elle, la frôle de son flanc contre le sien malgré le dégoût que la sensation lui inspire, trop rapide pour être saisi. Un simulacre d'instant qui n'a peut-être pas vraiment existé. L'a-t-il réellement touchée, ou ne s'agissait-il que de la caresse d'une illusion ?
Il est debout, face à la baie vitrée. Cette fois, il prend le risque de lui tourner le dos. Il a délaissé la paperasse sur la table, tout comme la prudence de conserver Medea dans son champ de vision. Après tout, ni l'un ni l'autre n'était effrayé, n'est-ce pas ? « Je vous le propose une dernière fois. Je suis ici, chez vous, et même si les choses ne se sont probablement pas passées comme prévu, profitez donc de ma présence. Posez-moi vos questions. Épargnez-vous des mois d'investigation inutile. Contrairement à moi, le temps vous est compté. Souhaitez-vous le gaspiller ainsi ? Je peux vous soulager, Medea. Votre enquête vous aurait de toute façon menée à moi, tôt ou tard. Nous avons simplement sauté quelques étapes. Alors, je vous écoute. » Elle comprendrait probablement que ceci constituait un ultime avertissement.