O luna mia, la notte sembra vuota...
« Siamo al mondo solo questa volta e so che anche tra gli abissi può crescere un fiore. » - Marco Giannetti
C’est la quatrième fois qu’il passe par ce couloir. L’air de rien, sans jamais s’arrêter en face de la porte qui l’intéresse. Il la dépasse pour faire le tour de l’étage et finalement repasser devant, encore une fois, dix minutes plus tard, toujours « par hasard ». On devrait pouvoir augmenter la taille des guillemets. Et à force de tourner en rond, en proie à une hésitation sans commune mesure qui ne lui ressemble pas, sa patience fond comme neige au soleil. Ce n’est pas son genre, de tergiverser, d’hésiter. Lui, il fonce dans le tas. Réfléchir, prévoir, il le fait lorsque c’est vraiment nécessaire, pour une attaque par exemple, une bataille éclair ou un coup en traître, pas pour… pour… ça ! Et cette hésitation augmente sa hargne naturelle.
S’il attend encore, il va tout simplement annoncer sa présence en défonçant cette foutue porte.
Pas sûr qu’Aurora appréciera cette entrée cavalière, ce n’est pas le style de la dame. Et agacer Aurora, ce n’est pas dans son intérêt, ni même dans son intention. Il vient en paix. La diplomatie Coleman-Lanuit l’intéresse particulièrement suite à son échange secret avec une CEO anglaise et ambitieuse. Il a besoin d’informations, histoire d’éviter de se prendre les pieds dans le tapis en s’acoquinant avec cette Lanuit en particulier.
Son amitié avec Alaric est plus ou un moins un secret de Polichinelle, puisqu’elle arrange bien les pontes de la hiérarchie vampirique. Ils laissent les « très vieux » discuter dans leur coin, et comme il s’agit avant tout de deux guerriers d’autrefois, c’est un peu comme laisser deux piliers de bar refaire le monde dans un coin de la salle. Du moment qu’ils ne font pas de grabuge, on les laisse tranquille. Personne, à sa connaissance, ne leur a encore fait de reproches déguisés ou de remarques caustiques : cette amitié est avantageuse pour les deux camps de toute façon. Quand ils sont tous les deux, c’est plus facile de les surveiller.
Peut-être est-il trop paranoïaque, pense-t-il en passant pour la sixième fois devant cette terrible porte. La poignée a été réparée depuis sa dernière visite. Peut-être qu’on ne les surveille pas, et qu’il se pense plus important qu’il n’est vraiment. Après tout, tous ces jeunes vampires se croient sortis de la cuisse de Jupiter et de ce fait, bien trop malins pour qu’il les prennent à revers.
Agacé, il lève les yeux au ciel. C’est un tout maintenant : les jeunes vampires, Aurora, ses questions, cette porte.
Eh puis merde. Il a des questions, elle a des réponses. S’il entre à l’improviste, elle n’aura sûrement pas le temps de l’accueillir par une de ses piques ironiques.
L’Italien lève le bras et toque doucement de ses phalanges avant d’appuyer sur la nouvelle poignée pour entrer. Il n’attend pas l’invitation, tant pis pour la bienséance. Il n’en a définitivement pas la patience !
La blondinette est là, c’est déjà ça.
Tergiverser devant son bureau n’aura pas été totalement inutile.
Pendant quelques secondes, il la détaille avec admiration. Ce qu’elle est belle, cette française au caractère bien trempé ! Avec son petit nez retroussé et ses mains blanches… Sous le soleil, ses cheveux blonds devaient ressembler à des fils d’or du plus bel effet. Les Lanuit ont de bons gènes, à n’en point douter.
- « Bonsoir, Aurora. C’est un plaisir de vous trouver à votre poste. - oui, il ouvre avec des banalités, et alors ? Il aurait peut-être eu le temps de trouver une meilleure entrée en matière si ses doutes l’avaient laissé tranquille un instant lorsqu’il arpentait cet étage. - Je viens vous réclamer un peu de votre temps. Serait-ce possible ? »