NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
I became insane, with long intervals of long horrible sanity
En un mot : Engeance d'Hornet
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand
Pseudo : Achab
Célébrité : Rooney Mara
Double compte : Elinor V. Lanuit & Inna Archos
Messages : 1571
Date d'inscription : 28/03/2019
Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
Inertie et courbatures. La recette de la matinée, la somme de la nuit. Je fixais alors béatement l’écran éteint de ma télévision un bol de lait froid entre les mains où trempaient des corn-flakes ramollies, ma cuillère déformée lévitant au-dessus. Je maintenais ladite cuillère à mi-chemin entre ma bouche et mon petit-déjeuner des champions, les lèvres stupidement entrouvertes, en essayant de me remémorer l’enchaînement des événements nocturnes. C’était laborieux. Comme le vacarme de ma machine à laver souffreteuse, le moteur de ma mémoire peinait à remettre en branle ses neurones, comme encrassés par une inertie bourbeuse, où sautillait la tronche de ma mère, telle une horrible whack-a-mole.
J’ai fixé mon bol, dépitée. Mon pied droit m’a gratté. Mollement, je me suis redressée avec un grognement depuis le fond de mon divan fatiguée, la cuillère coincée dans la bouche, pour racler ma plante de pied nue. OK, la vieille et sa librairie, ses bestioles, puis la danseuse, là, ai-je résumé en m’affalant à nouveau dans le confort tout relatif des coussins de cuir fendillé. À côté de moi, était roulée en boule la vieille couverture qui m’avait servi de lit cette nuit dans l’inconfort de mon canapé, bercée par un sommeil exténué et sans rêves. Je n’avais même pas pris la peine de m’habiller depuis. Je traînais dans mon appartement en débardeur et pantalon de survêtement depuis une heure, l’œil éteint, la tronche de travers, et les cheveux en bataille.
L’un de ces lendemains difficiles ; ceux allant de trois à dix heures du matin. Les souvenirs ont commencé à se réassembler morceau par morceau, tandis que je mastiquais pensivement ces céréales molles.
Le plan de la vieille. La librairie. Les araignées. La danseuse. Les arcanes.
Alors, tout m’est revenu. Je me suis souvenue de cette colère volcanique, de cette haine envers la vieille, et de ce besoin viscéral de me défouler sur quelque chose. De l’épaisseur de l’obscurité entre les rayonnages, les hurlements des humains, et l’odeur écœurante de la chair qui se déchire. Puis ce raisonnement, soudain, la réalisation qu’une des clés de cet énorme puzzle se tenait peut-être avec nous, à portée de mandibules. J’ai arrêté de mastiquer un instant. Un enchaînement d’images et de sensations brouillées a cascadé dans mon crâne ; les contours de son expression, le goût de sa peau, les réflexes de sa terreur dans ma gueule.
J’ai fixé mes corn-flakes flotter dans le lait blanc-marron. Les immeubles de Mansfield avaient défilé autour de nous, tandis que le corps chaud de la danseuse demeurait inerte entre mes crocs, et que le sifflement de la brise emportait les cris de détresse des survivants. Nous avions filé dans l’obscurité. J’ai revu les ténèbres d’un parking souterrain anonyme, et une image s’en est détachée au milieu de mes souvenirs brutaux ; un dégueulis de matière brunâtre que le cafard avait éructé, où se mêlaient les restes de peau humaine, d’organes détruits, d’un sac à dos et du corps inanimée d’une jeune femme évanouie dégoulinante de bave.
Tous ses morceaux avaient cascadé sur le béton nu, au centre d’une flaque de vomi, tout juste éclairée par les diodes des issues de secours. Des morceaux poisseux, un peu comme mes corn-flakes. J’ai fixé l’intérieur de mon bol durant un moment de flottement, l’ai remué du bout de la cuillère, et continué à mastiquer ces céréales, sans beaucoup d’appétit. Ensuite… Ah oui, ensuite c’était la merde, ai-je réfléchi posément. Ensuite j’avais été forcée de recouvrir cette forme humaine, totalement nue. Mes mains avaient tâtonné dans les sucs gastriques étalés par terre, à la recherche des restes de mon sac à dos éclaboussé par les fragments de chair à demi digérée, à l’intérieur duquel se trouvait une poche en plastique pleine de vêtements propres.
À cet instant, mon attention chancelante s’est mise à errer au hasard dans l’appartement. Je me suis revue, hier soir, en vieux jean déchiré et t-shirt collant de bave surnaturelle, portant le corps poisseux de la femme dans les ruelles sordides et désertes de Mansfield. Un trajet infernal, me suis-je souvenu, avec la hantise de croiser quelques clochards ou camés au beau milieu de la nuit, qui aurait pu alerter tout le quartier devant ce duo bizarre. La danseuse pleine de bave, et la motarde à l’air déchirée. Grandiose. Quelques ruelles nous séparaient alors de mon immeuble, et j’avais comblé le reste à pied, tant bien que mal, avec ce poids mort sur les épaules, et les fesses serrées à l’idée de croiser un de mes voisins dans les escaliers.
Ça aurait pu vachement mal tourner, ai-je réalisé en mastiquant toujours. Qu’est-ce que j’aurais pu inventer comme excuse ? Une soirée lubrifiant façon "Requiem for a dream", qui aurait mal tourné ? Merde.
J’ai étouffé un bâillement en scrutant mon salon. Quelques boîtes de pizza vides traînaient dans un coin, où j’avais bazardé les restes de mon sac à dos dans un sac poubelle avachi contre le mur. La boîte de céréales vide traînait encore sur la table de la cuisine, tandis que le ronronnement poussif de ma machine à laver filtrait à travers le mur du placard à balais. Les vêtements de la danseuse séchaient sur le séchoir branlant dans ma chambre, où la concernée devait encore dormir à cette heure-ci. Je l’avais flanquée au lit comme un poids mort après l’avoir mise sous la douche, évanouie, avant de l’habiller d’un long t-shirt m’appartenant ; c’était ça, ou bien elle aurait imbibé toute ma literie de bave collante, laquelle exhalait une forte odeur de fromage rance.
Comment allais-je aborder la suite ? Elle allait certainement être paumée, m’en vouloir un minimum pour la douche forcée, et exiger des explications. Que pouvais-je lui dire ? Je t’ai sauvé la vie, voilà, ai-je marmonné en mon for intérieur. Ce qui, à défaut d’être totalement vrai, n’était pas totalement faux non plus. J’ai fixé les murs de plâtre nu et piquetés de petits trous de mon appartement vieillissant. Le soleil s’infiltrait déjà à flot entre les rideaux troués de la fenêtre du salon, où ses rayons serpentaient au sol, en se réfléchissant sur la surface lisse de ma télévision presque neuve, et sur la console que je m’étais payée dernièrement. Un calme relatif s’était appesanti sur l’immeuble, que je ne m’étais pas risquée à briser en allant voir mon invitée.
Elle dormait, je supposais. La danseuse avait eu son lot d’émotions, je supposais aussi. Pour ma part, j’aurais préféré que cette présence soit due à une soirée trop arrosée, qui aurait terminé sous les draps suivi d’une amnésie matinale. Cela, au moins, c’était humain. Facile à expliquer, facile à raisonner. J’ai lentement repris la mastication de mes céréales, le cerveau embrumé et les muscles endolories ; quant aux rouages dans ma cervelle, ils se remettaient mécaniquement en fonctionnement, des milliers de cliquetis minuscules, comme le bruit familier de milliers d’insectes au travail. Je les connaissais bien. Je savais qui présidait à tout cela.
Odelia di Stasio
When witches don't fight, we burn
AB UNO DICE OMNES
En un mot : some ghost
Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
______________
Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
Paralysée, évanouie, presque achevée par une peur infinie. Cohabitaient ici celle de Serguey, brute et inconsidérée, celle honteuse et déboussolée de Wilson, panique mais battante d’Emily, puis la sienne, lunatique, spongieuse, que la crainte de la folie avait fait grossir tant et si bien que l’horreur face à la blatte géante n’avait plus que constitué que le coup de grâce, celui qui inévitablement ferait atteindre à son cœur des sommets qu’il ne saurait supporter. Elle y avait cru. Qu’elle y était, que l’adrénaline qui s’y superposerait lui serait fatale. Que si tel n’était pas le cas, elle finirait broyée entre les crocs d’une affreuse créature qui, même dans sa version miniature, n’avait jamais été source que du plus profond dégoût pour son espèce. Une fois de plus, le goût pour le dramatique de Lia lui avait joué des tours : seule la faiblesse de son esprit par trop assailli était ici en cause, et le destin tragique qu’elle s’était présagé n’était pas supposé immédiatement arriver. Pour le moment, elle demeurait dans des limbes épais, putrides et collant à souhait, profondément enterrée en ces lieux sombres, tandis que ce qui n’était pas sien lentement se dissipait, s’évaporait, s’écoulait hors de ce contenant étranger. Ses nerfs avaient totalement paralysés sa conscience, qui se régénérait tranquillement, loin de tout, dans le silence le plus complet. Après tout, elle l’avait bien mérité.
Au réveil, elle serait fière probablement. Fière d’avoir encaissé successivement les assauts qu’on leur avait opposé, d’avoir tant drainé, d’avoir tant donné.
Si elle s’était réveillée paisiblement entre ses draps, c’est peut-être la première idée qui l’aurait frappée, la première émotion qui l’aurait bercée, en effet.
C’était loin d’être le cas.
Les paupières lourdes s’étirèrent sur des murs qu’elle ne reconnaissait pas. Sa tête roula, chercha un repère alentour, mais sa quête fût rapidement abandonnée : il n’y avait rien de tel alentour, et les vapeurs du sommeil qu’elle quittait tout juste se dissolurent instantanément. Lia se redressa sur le matelas anonyme et fit le point sur la situation : elle se retrouvait dans un tissu inconnu qu’elle ne se rappelait pas avoir enfilé, tout portait à croire qu’on avait pris soin d’elle, ses mouvements n’étaient pas entravés. Elle fit appel à sa mémoire douloureuse pour retracer les derniers événements dont elle se souvenait : émergeait-elle d’une amnésie temporaire ? Ses ultimes souvenirs étaient cauchemardesques : grouillants d’insectes monstrueux et difformes, aux dimensions surnaturelles, d’individus aux intentions malhonnêtes, l’instinct de survie, les vies innocentes qu’on voyait s’échapper, et puis cette carapace luisante de ténèbres, enfin cette gueule moribonde qui sur elle s’était refermée. Le pouls de son coeur s’était accéléré à nouveau alors que les images se succédaient dans son esprit. Plus rien après ça, elle en était certaine. Avait-on retrouvé son corps inerte suite à ça ? Elle haïssait cette incertitude fort. La ballerine fit pivoter son corps hors de la literie et chercha à poser pied à terre. La douleur violente au tibia qui s’en suivit déclencha la torsion de son faciès endormi et un hurlement qu’elle tenta d’étouffer par un juron, probablement mal, cependant. « Porca puttana troia ! » La surprise avait fait ressurgir l’italien renié. Voilà qui lui était totalement sorti de l’esprit. Ce douloureux rappel lui permettait d’éliminer la piste de la perte de mémoire: : sa blessure au tibia étaient loin d’être résorbée. L’idée d’épier - en bonne héroïne cinématographique – l’identité du propriétaire des lieux et d’aviser sa réaction à partir de là tombait probablement à l’eau, elle aussi. Ou aurait-elle dû, puisque à moins que l’appartement ne soit vide ou que le sus-nommé ait les oreilles couvertes d’un casque – ce qui ne serait pas bien malin en de telles circonstances, nous pouvons l’accorder -, son éveil ne serait pas passé inaperçu. Une fois encore, une fois de trop, une fois de plus, elle conservait espoir, naïve enfant. Candide s’approcha aussi doucement que possible de la porte, repérée dans la faible lueur solaire qui perçait, les dents s’enfonçant plus profondément à chaque pas dans la chair qui ourlait sa lèvre inférieure. Quelqu’un était là. Quelque chose la dérangeait. L’arcaniste n’aurait su dire qui, quoi. Elle restait là, adossée tout près de la porte, à se demander si elle devait l’ouvrir. Mais quelle autre option avait-elle, après tout ? Les récents événements n’avaient-ils pas fini de jouer avec ses nerfs, de nourrir sa méfiance ? Sûrement souffrait-elle simplement d’un choc, le genre dont le diagnostic finissait par tomber après maints chèques et discussions à cœur ouvert sur un sofa, après tout ça.
Généralement, elle s’en sortait bien, même dans les situations qui s’annonçaient pourries jusqu’à la moelle. Elle invoqua cette bonne étoile factice, priant pour qu’elle ne l’abandonne pas aujourd’hui. Faisant face aléatoirement à son courage ou à sa stupidité, Odelia prit une longue inspiration et se détacha finalement du mur. Elle fit face à la porte dont elle tourna éventuellement la poignée. Celle-ci glissa sur son souffle coupé, se déroba sur un décor dans lequel trônait une silhouette ni vraiment inconnue, ni vraiment familière. Ce fût tout ce qu’elle nota, tout d’abord : l’identité de celle qui lui faisait face. Une identité qui ne se résumait pas un nom, depuis longtemps oublié, mais aux traits d’un visage que la particularité d’une aura avait gravé. « Qu... » Le salon dont les contours étaient déjà trop peu encrés sous sa rétine se dissipa davantage alors que grésillaient les courbes dévorantes de la relique avec laquelle elle avait tenté de renouer trop vite : elle n’était plus la même. Cette fille n’était plus la même, plus tout à fait. La part de son essence qui l’avait fait tiquer autrefois avait été exacerbée à un point qu’elle semblait prête à tout avaler autour d’elle. Instantanément, elle rembobina : elle recula du même pas osé quelques secondes plus tôt et referma d’un coup sec la porte derrière elle. Sa bonne étoile l’avait probablement quittée, ou alors, elle lui jouait une sacrée farce qu’elle ne serait pas prête d’oublier.
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
I became insane, with long intervals of long horrible sanity
En un mot : Engeance d'Hornet
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
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Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
J’ai failli me rendormir. La cuillère a émis un tintement humide en chutant dans mon bol désormais vide, me faisant soudainement prendre conscience de mon état végétatif. À neuf heures du matin, l’immeuble des Kingston était encore enveloppé de ce calme ensommeillé qui précédait le boucan motorisé des travailleurs filant à leurs boulots, et la frénésie des gosses courant après leurs bus. Derrière les vitres, que les averses salies par la pollution urbaine avaient ternies, un soleil arrogant dardait déjà ses rayons estivaux, brûlants, à l’intérieur de ma cuisine. J’ai étouffé un bâillement. Les crampes musculaires, la paresse et le silence matinal avaient transi mon corps, me laissant amorphe sur le divan, comme un phoque mollement échoué sur un rivage désert, hanté par les cauchemars. Une saveur acide s’attardait dans ma bouche, ainsi qu’un nœud à l’estomac.
Quelque chose que j’avais avalé. Dans la librairie, sans doute, cette antre d’obscurité moite et poussiéreuse, que les lubies de la vieille avait transformée en traquenard. J’ai essayé de me remémorer les détails. Des cris, des araignées, et la figure impavide de ma mère, au milieu d’un chaos de chitine et de chairs déchirées. Que faisait-elle à cette heure-ci, d’ailleurs ? J’ai ramassé mon téléphone enfoui entre les coussins à côté de moi ; elle n’avait même pas répondu à mes textos. Était-elle fière de sa prestation ? Avait-elle au moins bougé son gros cul pour camoufler les preuves ? Inconsciemment, j’ai serré les dents. Une flammèche de colère s’est embrasée de nouveau dans mes tripes au souvenir du fiasco de cette nuit et, d’un geste agacé, j’ai balancé mon téléphone contre le matelas de cuir usé.
J’ai ruminé ma fureur durant un moment. Quel avait été le but de cette fichue foire nocturne ? Admirer la terreur dans le blanc des yeux de quelques piteux humains ? Cela valait-il le risque de se faire remarquer ? ‘Fait chier, j’aurais pas dû accepter d’aider cette dingue, ai-je conclu au fond de moi, comme une saveur de regrets irritait mon palais. J’aurais dû le savoir mieux que quiconque. La vieille n’était qu’un nid à problème ; pire, elle était à moitié tarée et m’entraînait dans ses idées tordues d’illuminée. Tout cela méritait d’être réexaminé. Tout cela nécessitait une mise au point, non pas avec elle, il n’y avait rien à en tirer ; mais entre moi et moi. Que comptais-je faire des capacités qui m’avaient été offertes ? Des directives qui m’étaient attribuées ? J’avais bel et bien filé un coup de pouce à cette folle comme convenu, inutilement à priori, mais la suite des décisions ne m’appartenaient-elles pas ? Ne devais-je pas construire ma propre voie ?
Les conjectures se fracassaient les unes contre les autres dans mon crâne, comme une meute de chiens furieux. J’ai commencé à me ronger les ongles sans même m’en apercevoir. À l’intérieur de ma cervelle endolorie par un sommeil épuisé, une farandole de questions carillonnaient sans la moindre trêve, et je ne parvenais pas à les séparer les unes des autres. Devais-je absolument m’accrocher à la vieille ? Était-ce cela ma mission, servir d’accessoire à cette dingue ? Où était ma place dans tout cela, que devenait ma propre volonté ? J’ai scruté mon bol à l’émail écaillé, où flottait un fond de lait brunâtre, puis mon regard s’est porté sur la main qui le tenait ; j’ai levé mes doigts face aux lueurs du soleil naissant, et j’ai cherché une réponse dans ce membre fait d’os et chair factice, qui cachait une machine immonde et implacable.
Qu’allais-je faire de ma vie ?
Question bête. Question essentielle et existentielle. Des vieux sentiments de rébellion ont soudainement enflammé la surface de ma conscience, l’embrassant comme une nappe de pétrole. Une fumée noire a fait tousser mes propres pensées, masquant durant quelques instants ma propre terreur de Lui, son soleil mort, et cette fidélité de façade qu’Il m’avait forcé à adopter. J’ai cru entendre sa voix : très bien, enfant, tu es mûre. Ouais je t’emmerde, si j’suis mûre, j’ai aussi mon propre chemin à suivre, tu verras, ai-je ruminé en remuant pensivement la cuillère dans son récipient. J’ai levé paresseusement les yeux vers les lumières estivales, qui entraient à flot par les fenêtres tandis qu’une chaleur croissante prenait lentement possession de l’appartement. Je n’avais pas la climatisation ici. La saison chaude s’annonçait pénible.
Comme les derniers lambeaux de sommeil s’évaporaient de ma tête, au même titre que les pensées noires et furieuses qui rongeaient leurs chaînes au fond de mon âme, un cri de douleur a retenti dans l’autre pièce. Elle s’est vautrée du lit, me suis-je demandée en portant mon attention vers la porte de ma chambre. J’ai soupiré. Le moment de la confrontation s’approchait et, en dépit de toutes mes interrogations et de mes atermoiements intérieurs, je n’avais toujours guère d’explications à lui offrir. Furieuse ou choquée, voire les deux, la danseuse allait certainement débarquer hors de ma chambre, piteuse telle une âme en peine, ou bien affolée comme une furie. Je suis restée immobile et indécise durant un instant qui m’a paru des heures, à fixer l’écran de la télévision aussi vide et mort que ma motivation à ce moment-là.
Puis, derrière la fine cloison, j’ai perçu le déclic métallique du loquet de la porte, suivi du bruit sec d’un battant que l’on referme précipitamment. J’ai soupiré à nouveau. Je me suis finalement redressée, le bol entre les mains, et je me suis approchée de ladite porte pour y frapper doucement d’un revers de main.
« Hé, tu veux du café ou du thé ? Ou un truc à bouffer ? » lui ai-je demandé d’un ton las. « Si tu cherches tes fringues, elles sont en train de sécher dans la salle de bains. »
Les habits de la danseuse séchaient sur mon étendoir. Hier, je n’avais pas eu la présence d’esprit, encore moins l’énergie, de les laver durant la nuit, et je les avais jetés à la machine seulement ce matin, en me levant. J’ai traîné mes pantoufles noires jusqu’au plan de travail de la cuisine, pour déposer mon bol à l’intérieur du lave-vaisselle, en attendant que la princesse veuille bien sortir de ma piaule. Elle doit flipper, ai-je supposé, alors que la peur constituait chez moi un sentiment de moins en moins présent. J’ai étouffé un énième bâillement, en resserrant les cordons de mon jogging qui glissaient lentement sur mes hanches.
« Allez, sors, c’est bon, » ai-je marmonné pour moi-même.
J’ai commencé à sortir un nécessaire de café : une boîte de poudre, deux tasses et une bouteille d’eau. L’éclat du soleil irradiait mon épaule droite de ses doigts brûlants, tandis qu’une envie de clope s’ajoutait à la liste de mes désagréments matinaux. La discussion à venir promettait d’en rajouter d’autres.
Odelia di Stasio
When witches don't fight, we burn
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Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
______________
Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
Odelia se laissa couler contre la porte, assaillie d’une part par la douleur, de l’autre par les événements de la veille qui continuaient de se déverser par vagues boueuses sur son esprit, la déconnectant d’une réalité dans laquelle elle ressurgissait tout juste. Peut-être rien de tout cela n’était-il vrai. Jusqu’où pourrait-elle nier son existence ? Shreveport ? Son enfance ? Et si elle devenait folle, tout simplement ? La blessure ravivée au tibia déployait ses bras venimeux le long de sa jambe, en toutes directions. A l’image d’une araignée. Les billes multiples de leurs yeux qui se dessinaient sous ses paupières closes. Ce n’était que la deuxième agression à laquelle elle devait faire face en un peu plus d’un mois, après tout. Peut-être une troisième l’attendait-elle derrière cette porte – elle n’avait en tout cas pas une forme rassurante. Elle rouvrit les yeux alors que la voix du spécimen non identifié prétendait vouloir la ravitailler. Sa tête roula lourdement contre la porte vers son épaule droite, et elle mesura l’épuisement dont elle était la cible. Elle laissa le liquide qui bordait encore les mirettes finir de s’écouler. Elle prit plusieurs longues inspirations, comme Yelena le lui avait appris, au tout début, quand elle essayait encore d’apaiser le chaos qu’était son quotidien alors. Quel grand changement. Il n’était plus à l’intérieur, aujourd’hui, il se trouvait dehors. Partout autour d’elle. Elle ne pouvait le fuir. D’une façon ou d’une autre, il trouverait toujours un moyen d’être là, lui collant à la peau, toujours. Qu’importait la force qu’elle déployait à inverser le champ magnétique qu’elle s’imaginait l’attirer, elle s’en révélait toujours être l’aimant.
« Si tu cherches tes fringues, elles sont en train de sécher dans la salle de bains. » Son regard enroula les jambes nues qui dépassaient de l’unique vêtement ample la recouvrant. C’était une tenue qu’elle aurait pu choisir, pour elle, chez elle. Pourquoi avaient-elles besoin de sécher ? Comment était-elle arrivée ici, déjà ? Rien n’était clair, pour le moment, peu de choses faisaient sens. Malgré tout, une chose demeurait certaine.
Quelque chose n’allait pas. Ce sentiment, encore, qui dominait, faisait taire le reste des voix qui se disputaient la suprématie au royaume de ses pensées. Elle le savait, même si elle n’aurait su dire quoi. Quelque chose clochait avec cette nana, pour commencer, c’était certain. Elle tentait de ne pas avoir de préjugés, consciente qu’elle ne savait à quelle caste elle appartenait, quels secrets elle recelait, quelles différences les séparaient. Elle se souvenait, pourtant. La rouge se souvenait qu’elle était bien plus humaine, la dernière fois – quand était-ce alors ? Un an, deux ans auparavant, déjà ? -, qu’elle s’effaçait. Comment pouvait-elle estimer que c’était un mal, pour autant ? Comme on se plaisait à lui rappeler tant de fois dernièrement, les humains n’étaient pas eux-mêmes de parfaits modèles de vertu, loin s’en faut.
Elle essuya les gouttelettes faiblardes consécutivement sur ses joues puis sur le tissu sombre la recouvrant qu’elle étirait entre ses doigts, encourageant l’enfant à l’éducation impitoyable qui protestait intérieurement à le souiller ou à le déformer. Il n’y avait rien à faire, elle était complètement défaite. La fatigue, le choc des récents événements, l’énergie déployée à tenter de contrer les monstruosités qui avaient surgi du néant, l’incertitude qui achevait ses nerfs, tout la laissait là, à fleur de peau, sans plus de contrôle sur un pouvoir affaibli ni sur ses émotions en pagaille, l’un inévitablement lié à l’autre. Faisant face à une fatalité qu’elle ne saurait nier, elle chassa la multitude de craintes qui se bousculaient : il ne restait plus qu’à faire face, et prier. Les traits de son visage se resserrèrent alors qu’elle se paraît d’une carapace qui ne pourrait que lui être profitable, espérant qu’elle tiendrait le coup, que les maintes raisons qui la tenaient au-dessus du vide ne viendraient pas la craqueler trop vite. La main gauche se positionne sur le sol de sorte à faire levier au poids de son corps qu’elle redresse puis ressort. La sorcière claudique péniblement jusqu’à son hôtesse, s’aidant là où elle peut du mobilier et des murs ponctuant son passage. Cette traversée lui semble terriblement longue. Elle se sait ridicule, diminuée, faible. Enfin, elle atteint l’une des assises entourant la table. Sous son mouvement, la chaise grince sur le sol et l’italienne y interrompt sa lente ascension, le visage renfrogné. « Café. » La jeune femme s’y affairait déjà, visiblement. Elle n’avait pas vraiment envie de faire d’efforts et ne le cachait pas vraiment. Le liquide noirâtre réussirait-il à la dérider ? C’était une possibilité. Après tout, il agissait sur elle comme une potion magique. Sa mère aurait dit que cela coulait dans ses veines. « Tu vas m’dire c’que t’es, cette fois ? Ou c’que t’es d’venue, plutôt. » Sa bravade venait dissimulait les angoisses qui la tenient, ces milliers de questions sans réponse qui s’entrechoquaient dans le cerveau encore quelque peu assoupi. « Qu’est-ce que j’fous ici ? J’imagine que si ça avait été par charité tu m’aurais plutôt déposée à l’hôpital. » Elle était là, lui semblait-il, au moment où tout était arrivé. Elle se souvenait s’être inquiétée de la voir coincée dans la bibliothèque. Elle n’était jamais montée sur le toit. Pourtant, elle était là, indemne, quand Lia faisait pâle figure face à elle.
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
I became insane, with long intervals of long horrible sanity
En un mot : Engeance d'Hornet
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand
Pseudo : Achab
Célébrité : Rooney Mara
Double compte : Elinor V. Lanuit & Inna Archos
Messages : 1571
Date d'inscription : 28/03/2019
Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
L’arôme du café réveillait ma lucidité. Triple dose. Café noir comme l’encre.
À quelques mètres de moi, des mains tremblantes ont finalement ouvert la porte de la chambre. Le bruit traînant et claudiquant sur le sol de pieds malmenés, a rythmé la préparation du café, alors que la danseuse se cramponnait maladroitement à mes murs pour tenir debout. J’ai jeté un coup d’œil à la dérobée. Elle avait vraiment une tête affreuse. Moi qui l’avait trouvée séduisante lors de notre première rencontre, cette nuit lui avait arraché toute prestance, tout ce charme tranchant et cette assurance qu’elle avait exhibée alors ; seules les ruines d’un maquillage, des cheveux en batailles et des cernes subsistaient à présent. Je n’ai rien dit. Elle avait subi une rude expérience, aussi ne pouvais-je la blâmer pour avoir perdu en chemin son sex-appeal.
J’ai enclenché la cafetière. Derrière moi, résonnaient les halètements moribonds d’un corps humain repoussé au-delà des limites physiques et mentales ; les sons pathétiques d’un phoque avec un couteau planté dans son ventre. Moi, je lui tournais le dos. Je connaissais déjà son état. Je l’avais vu de près. Et je n’éprouvais pas le besoin de m’appesantir sur ce délabrement humain, encore moins de m’en moquer ; ça aurait nui à mes intérêts. Quel était le mot juste, déjà ? Oui, ce serait manquer d’empathie. J’ai attendu en silence que le café soit prêt, le regard fixé sur les bulles qui se formaient et éclataient à l’intérieur du globe de verre ; la boisson avait déjà l’allure du pétrole. Ou bien de la chitine qui fond et se détériore, lors d’une métamorphose.
Un des deux. Ma tête était pleine de ces visions.
L’appareil a émis un bruit sec. À côté de moi, la danseuse a certainement ramassé toute sa bravoure, tandis que la première salve de questions étaient crachées d’une voix sèche et enrouée ; les inflexions n’ont même pas tremblé. Quel héroïsme. J’ai laissé s’écouler tout le sombre fiel de sa voix, en remplissant moi-même les deux tasses de café de la même couleur que son humeur ; à ras bord. Une vapeur épicée a saturé rapidement la minuscule cuisine, me procurant la sensation que tous les pores de ma peau s’ouvraient pour aspirer les arômes du café. Les engrenages de ma cervelle semblaient déjà s’actionner plus vite, alors que mon humeur restait minée par la rancune envers ma mère et une certaine résignation, qui conférait à la mollesse.
J’ai soupiré, en articulant à peine. « Je suis... » J’ai tiré une chaise et me suis assise, lourdement. « Quelque chose qui meurt, probablement. »
J’ai tiré ma tasse de café face à moi, et l’ai contemplé, pensive. À l’intérieur de mon crâne, c’était une ivresse créatrice qui dominait, cet état particulier entre transe visionnaire et abandon volontaire, qui m’entraînait toujours durant mes processus créatifs. J’ai saisi le fil de mon inspiration du moment, et l’ai simplement laissé se dérouler, comme une automate pendue au bout de fils de soie, à la douceur d’ailes de papillon.
« À l’hôpital ? » Un rictus ironique a animé mon expression. « Bien sûr, ouais, j’aurais eu juste à te porter là-bas, évanouie et blessée, à leur expliquer pourquoi t’étais couverte d’une matière surnaturelle, et pourquoi j’étais moitié à poil. Tout en évitant la tarée aux araignées qui voulait ta peau. »
J’ai soufflé sur mon café. « Aucun problème, ouais. Me remercie pas d’avoir sauvé ton cul. »
Qu’est-ce qui était vrai ? Rien ne l’était. Mais rien n’était faux non plus.
Même si j’avais voulu, l’emporter à l’hôpital aurait été une tâche impossible, pour ces raisons précises. La dissimuler à ma mère, qui aurait voulu la tuer, voire pire encore, s’était avéré aussi vital. Quant à ma nudité nocturne, eh bien, ce n’était pas tout à fait la vérité, mais l’explication n’était pas nécessaire pour l’instant. J’ai secoué la tête en lui jetant un regard torve. Elle était la seconde personne à qui j’avais sauvé la vie, et elle aussi ne m’offrait que méfiance et reproches à mots couverts, en retour de mes bons services.
Ces humains. À croire que ces mortels tenaient plus à leur liberté de choix, aussi mauvais soient-ils, qu’à leur propre vie.
« Ledit cul inconscient, qu’il m’a fallu passer à la douche et prêter mon plumard, d’ailleurs. » J’ai trempé mes lèvres dans le café fort. Trop chaud. « Mais ouais, j’peux pas dire que j’ai entièrement fait ça par empathie. »
Nouveau soupir. Mon humeur dérivait, entre vérités et dissimulations, au point que mes yeux ont fixé durant un moment un point en face de moi, sur le mur de plâtre blanc, tâché par l’usure. Il n’offrait pourtant que des craquelures. Durant ce court instant, je me suis perdue dans mes propres pensées.
J’ai soupiré, encore. « J’ai besoin d’aide. » Il n’y avait aucune once de mensonge dans ma voix, car j’avais véritablement besoin de l’aide d’une personne comme elle. « J’comprendrai si tu veux pas. Et si tu veux pas, bah… T’es pas prisonnière, hein. »
J’ai désigné la porte d’un signe de tête. Jouer la comédie ne m’était pas nécessaire. Pas quand la sincérité ressemblait à un dieu à deux faces.
Odelia di Stasio
When witches don't fight, we burn
AB UNO DICE OMNES
En un mot : some ghost
Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
______________
Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
Elle déposa les tasses odorantes sur la table. Lia étira le bras aussi sec pour attraper la sienne – elle avait besoin de son café le matin, mais celui-ci, particulièrement. Ses doigts se détachèrent à mi chemin. Il était trop chaud encore. Elle l’aurait bien pris glacé, mais elle n’était malheureusement pas en sa demeure – ce qui n’était en réalité pas nécessairement un problème, pour peu qu’elle ait des faveurs à échanger -, alors la bienséance retenait sa langue. Son attention se redirigea vers son hôte qui avançait une réponse peu satisfaisante. Probablement ? Est-ce qu’elle cherchait à l’effrayer ? Est-ce que c’était un déplaisant trait d’humour qu’elle tentait là ? Mystère. Elles ne se connaissaient absolument pas. La voilà à présent qui se foutait de sa gueule pour avoir suggéré de l’amener à l’hôpital. Ses yeux se plissent alors qu’elle résume leur soirée de la veille. Fun. Dire que le programme, à la base, c’était un bain frais arrosé d’huiles et d’herbes infusées, un bouquin tout juste chiné, un bon bédo et un verre de rosé piscine. Elle se souvenait encore statuer sur la question, avant de se motiver à rejoindre Shreveport. Sur l’échelle du pathétisme, on reculait déjà de quelques pas.
« Me remercie pas d’avoir sauvé ton cul. » Quelque chose clochait. Pourquoi rien ne faisait sens dans ce foutu crâne ? L’européenne fronça les sourcils, ses lèvres se tordirent alors qu’elle s’apprêtait à protester, mais déjà sa ravisseuse reprenait. Elle avait dû la passer à la douche ? Derrière son épaule, sa nonna sifflait : ferme la bouche, mal élevée. Lia s’exécuta aussitôt.
Les prunelles sombres se fondent dans le béton comme si leur propriétaire y cherchait une réponse. Probablement le mensonge qu’elle comptait lui débiter incessamment sous peu. Elle n’a que trop peu de moyens de s’en prévenir, jouant contre ce désert énergétique. La surface se ride à peine de quelques vaguelettes d’émotion tout juste esquissées, que la marée quasi-statique rappelle à elle presque instantanément. Pendant ce temps, Odelia porte la main à sa jambe, y appliquant de petites pressions afin d’en évaluer l’état, éventuellement réaliser une estimation des dommages. Le reste de l’été était probablement gâché. Un mois minimum – bien plus. Elle pria pour que ça n’empiète pas trop sur la rentrée.
Son appel à l’aide ne l’émeut pas vraiment. Difficile de ressentir quoique ce soit dans de telles conditions : l’environnement était définitivement hostile à toute émotion. Malgré tout, mille et une questions ont commencé à envahir son esprit malgré l’atrophie dont il était victime. Elle chatouillait l’un des points faibles d’Odelia. A cette liste pourtant s’ajoutait l’impatience, rappelant fréquemment à l’ordre la première. « C’est bon à savoir. » La distillation de la culpabilité dissimulée entre ses mots se faisait finalement. Peut-être se montrait-elle trop agressive. Peut-être avait-elle une bonne raison. Peut-être avait-elle réellement tenté de l’aider. Se montrait-elle ronchon. Ingrate. Paranoïaque. « Merci, j’imagine. » lâcha-t-elle, sans vraiment y croire pour autant, toujours le cul entre deux chaises. « Tu t’es faite engloutir par des montagnes de livres dans une pièce pleine de… d’araignées géantes et co. » Alice ? Elle était presque sûre que c’était Alice. Ce n’était pas le moment de lui signaler qu’elle avait oublié son prénom, si toutefois il était que cette fille lui ait sauvé les fesses. La brume sur ses idées se lève légèrement, et dans sa tête, ses paroles précédentes résonnent enfin. « Pourquoi t’étais à moitié à poil ? Quelle matière surnaturelle ? » Quelque chose la démangeait. Il lui manquait quelque chose. « T’as vu mon téléphone ? Et… du sucre ? » Quoi? Elle lui demandait service après tout. Et c’était sûrement la seule raison qui l’avait conduite en ces lieux. Qu’importe ce qu’elle disait – ou ce qu’elle ne disait pas -, elle peinait à deviner une quelconque bonté de cœur dans ses actions. De toute évidence, il n’y a qu’elle ici. Qu’est-il arrivé aux autres ? Calmati. Elle se fatiguait toute seule. Tant de questions, si peu de réponses. Éternelle répétition. Il y avait celles qu’elle ne formulait pas encore, mais aussi celles que sa samaritaine du dimanche évitaient. Il faudrait pourtant passer par les bases, si elle espérait lui tirer quelque chose. Son regard s’était posé au-dessus des pommettes saillantes, tentant de deviner ce qui lui était si facile d’extraire, habituellement. Des intentions.
Sa tête était si lourde. Elle abandonna assez vite, peu confiante en ses capacités quand les tentacules s’empoissaient ici, et ne trouvaient rien à se mettre sous la dent. Le vide. Le néant. Et dans l’air, quelque chose qui traînait, presque corrosif. Pas l’odeur du café, non. Bien sûr, elle songea à sonder les environs, mais se ravisa assez vite : si son corps et ses pensées peinaient à lui obéir, ce ne serait certainement pas sa magie qui le ferait. Elle n’avait aucune intention de s’éterniser ici plus que nécessaire. Comme toujours, sa foutue curiosité l’y retenait, pour le moment.
Alexandra Zimmer
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- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
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C’est bon à savoir. Oh chérie, tant d’autres choses sont bonnes à savoir.
J’ai finalement arrêté de fixer le mur. Mon attention a sauté de l’horizon usé de cet appartement, poussière et plâtre livide, à ma boisson fumante, intacte, en écoutant la voix éraillée de cette femme qui déballait une foule de questions à côté de moi. J’ai levé les yeux vers elle, curieuse. Face à moi, s’étalait la face fissurée de fatigue d’une créature corrodée par une nuit d’horreurs et de révélations, aux cernes creuses, aux paupières brûlées, et aux intonations cassantes, incertaines, rompues comme une brindille noircie au feu. Par-dessus cette vision décevante, se sont interposés dans mon esprit les souvenirs de notre rencontre au bar, voilà un siècle de cela, et sa tenue d’alors, sa cambrure, son parfum, son assurance qui n’avaient rien en commun avec l’épave de ce matin. Dans ce retour en arrière, flottaient aussi mes propres vannes idiotes, ma tentative impulsive de flirt, ridicule, qui semblait, avec le recul des années, appartenir à une autre.
Ma vision des choses était différente alors. Mes yeux aussi.
Débordants d’appels à l’aide muets, qui sonnaient faux dans le désert social de ma vie, où mes pas avaient perpétuellement résonné seuls, comme le clocher d’une tour démente, ou le sinistre tic-tac d’une pendule. Et aujourd’hui, je contemplais cette femme d’un air neuf, curieux, cherchant dans cette chair vulnérable les traces d’attirance d’hier qui m’avaient poussé à lui parler ; en vain. Face à l’ourlet de ses lèvres, je ne sentais plus le désir, mais les restes de bave séchée, sa chevelure noire ne créait plus la sensualité, mais les relents de sueur imbibée dans son cuir chevelu. Je ne discernais, à présent, qu’un tas de viande brisé, avec ses nerfs et ses os à fleur de peau, frêles et chauds, dont la silhouette bancale n’évoquait désormais qu’une réflexion muette chez moi : cette sorcière, si tant est qu’elle en soit une, pouvait-elle vraiment m’être utile ?
J’ai finalement tiqué. Une sincère surprise a bouleversé mon expression, m’arrachant à mes considérations anatomiques. « Quoi ?… Tu te souviens pas de tout ? »
J’ai continué à la scruter, dubitative. Durant un court instant, l’idée que cette donzelle tentait de me prendre à mon propre jeu des mensonges et des vérités, m’a traversé l’esprit ; l’humain est menteur, somme toute. Plus que jamais méfiante, je me suis relevée, mollement, abandonnant mon café brûlant, pour récupérer le pot rempli de carrés de sucre dans un placard au-dessus du lavabo. Je l’ai déposé en face de la danseuse, dont je continuais de surveiller l’expression du coin de l’œil, avant de m’asseoir lourdement à nouveau.
« Non, j’sais pas où il est. » J’ai haussé les épaules, en repoussant le moment de répondre aux questions les plus délicates. « On aura de la veine s’il est pas tombé quelque part. Ou alors, il est dans tes poches de froc, et je l’ai pas vu. Si t’as besoin, sers-toi du mien. »
Mon échine s’est amollie. J’ai fini à demi avachi sur le bord de la table, le nez au-dessus du café fumant, l’œil inquisiteur, la tête appuyée contre ma paume, et l’autre remuant ma cuillère. Notre discussion en était donc là. Sur le fil du rasoir. J’ai furieusement cherché la meilleure manière d’expliquer mon cas et mon passé.
« Bon. Le mieux, c’est de raconter dès le début. » J’ai arrêté le mouvement circulaire de la cuillère. « Prends patience encore trente secondes, c’est pas facile de la faire courte. »
Mouvement de cuillère. Encore. J’ai fixé la surface mouvante de la boisson, que je remuais machinalement à ce stade, pour y puiser l’inspiration. Autour de moi, s’attardaient les vapeurs puissantes du café, et celle, un peu acre, de la peau imbibée de sommeil de la femme en face de moi. Je me suis éclaircie la voix, et j’ai commencé mon chemin de croix vers ce passé, aussi pavé de bonnes intentions que l’enfer.
« J’ai une pote, Morgane. Il y a un an, j’étais tellement à bout, que je lui ai tout raconté sur la recherche de ma nature. C’était ça, ou sauter par la fenêtre. Surprise, elle avait aussi un secret : c’était une sorcière. » J’ai secoué la tête, désabusée, à ce souvenir. « Elle m’a proposé un coup de main. J’étais suffisamment au bout de ma vie pour accepter de la suivre dans une sorte de… rituel ou transe, dans cette même pièce. »
J’ai balayé l’air d’un revers de main, en débitant mon histoire sur un timbre atone. « Un cercle, des herbes, des potions et tout un bordel, les détails on en parlera après. Bref, j’sais pas ce qu’elle m’a fait, mais au bout de quelques jours, j’ai constaté des effets chez moi. Et pas agréables du tout. Le hic, c’est que Morgane m’a laissé tomber aussitôt fait, que j’ai aucune idée où elle est, et que mes putains de symptômes empirent. »
Un tintement de cuillère a ponctué mon récit. « J’veux faire machine arrière avant de perdre totalement les pédales. J’suis prête à payer, ou rendre n’importe quel service pour ça. »
J’ai cessé de fixer ma tasse pour détailler la réaction de la danseuse, sans me départir de mon air fatigué. Je n’avais que peu d’efforts à fournir pour bâtir mon histoire, tant l’essentiel n’était que pure vérité : Morgane avait provoqué chez moi des bouleversements, que même elle n’aurait jamais pu anticiper.
« J’sais qu’on s’connaît à peine. Mais t’as la même… odeur qu’elle, si j’puis dire. C’est pour ça, j’ai pensé que tu en étais une, surtout que tu m’avais parlé des auras. Mais j’ai besoin de savoir si j’peux te faire confiance pour m’aider, parce que c’est carrément pas un secret que j’veux confier à n’importe qui. »
Je suis restée de marbre durant un moment, à étudier l’humaine, comme l’on fixe un curieux spécimen d’insecte poinçonné dans un cadre de verre ; autant son expression faciale, que la forme de son crâne. Au milieu des esquisses de scénarios, des pertes et des profits, que cette discussion me promettait, d’autres questionnements papillonnaient : Ce crâne, serais-je capable de le broyer au besoin ? Quelle proportion de métamorphose serait nécessaire pour se faire ? Que ferais-je ensuite du cadavre ? J’ai soupiré. Enfin, pour la première fois, j’ai porté la tasse à ma bouche et laissé un raz-de-marée d’arômes forts imbiber mes cellules. Aucune n’était humaine. Morgane avait bien travaillé.
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Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
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Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
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Elle aperçoit finalement un mouvement, sous les ondes tourbillonnantes du néant l’entourant. Sont-ce des simulacres de couleur, qu’elle croit apercevoir, sous le voile tout juste soulevé par ce vent ? Ou est-ce simplement son esprit embrumé d’épuisement qui lui joue des tours ? « Merci. » apprécia-t-elle quand la brune lui céda un pot de sucre. Son contentement fût de courte durée, et elle eût du mal à contenir sa colère qui passerait probablement pour superficielle, quand on ignorait que ce n’était rien de plus que le quatrième de ces engins à disparaître cette année, et que le dernier de la série n’avait qu’un mois à peine. Mentalement, elle prenait la résolution d’abandonner ces gadgets trop sophistiqués au profit de modèles qui ne produiraient que le strict nécessaire : retour à l’âge de pierre, puisque sa sécurité ces jours-ci y était similaire.
« Un cercle, des herbes, des potions et tout un bordel, les détails on en parlera après. » Voilà qui expliquait probablement le sale ressenti de l’endroit. Elle baignait dans la magie d’une autre. Si c’était ce qui avait créé un changement dans sa nature – une amplification ? -, alors ce devait être assez costaud. L’envie de se barrer poursuivit sa traversée vers les organes vitaux.
Elle tenta de se rappeler leur propre rencontre. Odelia se souvenait vaguement des avances de la jeune femme – à peine, certainement aucun détail, si ce n’était sa propre gêne découlant d’inévitables questionnements sur la forme à employer. Elle avait oublié son nom, enfoui ses traits si loin dans sa mémoire qu’elle ne l’avait même pas reconnue à la librairie. Elle se demandait toujours comment son esprit l’y positionnait aujourd’hui. La seule chose dont elle se souvenait, qui l’avait replacée sur les pavés des souvenirs, c’était cette aura, qui avait tant changé pourtant : ce qu’elle était alors n’était qu’une vague esquisse du spectacle qu’elle lui offrait désormais. Toute l’humanité qui transparaissait naguère - recouverte, ensevelie, à peine perceptible dorénavant. Fallait-il seulement gratter la surface afin de la faire réapparaître ? Se pouvait-il qu’il s’agisse d’une protection, quelle qu’elle soit, empêchant sa lecture ? Comment expliquer alors ce malaise qui la prenait, cette impression qu’elle pourrait y être aspirée, les tremblements de ses tripes grelottantes : cours. Face à elle, elle se sentait démunie, désarmée. N’était-ce alors que l’inconnu, l’incertitude auxquels faisaient face tous ces autres êtres dépourvus de ces capacités ? Elle n’était absolument pas certaine de pouvoir le gérer.
Lia passa ses doigts dans la chevelure emmêlée, nœuds butant contre nœuds. Ses mains se mirent à tirer les crins sombres, les plaquant méthodiquement en arrière alors qu’elle cherchait à faire de la place à ses pensées. Elle les torsada avant de les nouer naturellement, l’extrémité de la mèche enroulée passant sous le chignon naturel.
En différé, ses pensées s’affairant d’une drôle de manière alors que son énergie se dispersait de façon disparate entre ses différents sujets, la question de l’étrangère résonna à nouveau dans sa tête. Une fois de plus, elle tenta une reconstitution de la veille. Sa recherche d’un bouquin. Serguey, flirtant avec une rouquine. Outre. Des araignées géantes. Un cafard géant. Une garou. Chitineuse. Une foutue légende urbaine qui avait pris vie sous ses yeux. Un vampire qui lui avait éclaté le tibia dans les escaliers, sûrement associé à ce délire dont elle ne parvenait toujours pas à comprendre le sens. Pourquoi voudrait-on attaquer une librairie ? Des ados. La bulle insonorisée qui l’avait enveloppée. Le corps enseveli du libraire. Le toit. Les étagères qui s’écroulaient. Les flashs s’enchaînaient, décousus, sans qu’elle ne parvienne à relier les pièces du puzzle encore. Si la douleur n’avait pas été réelle, flamboyante dans sa jambe, elle aurait pu croire à un simple cauchemar. Bienvenue à Shreveport. Après ça, elle ne parvenait même pas à douter de l’histoire rocambolesque de cette femme.
« Donc si j’récapitule… Tu vas pas m’expliquer comment j’ai atterri ici après avoir vécu l’horreur, t’as besoin d’aide, et c’est moi qui doit te supplier de me laisser t’aider ? » Une main se posa sur sa tempe et en entama le massage, quand la seconde s’empara de sa tasse et la rapprocha finalement du rebord de la table. Toujours trop chaude. Lia laissa un sucre s’y écrouler et se mit à son tour à agiter la cuillère dans le récipient, espérant ainsi en écourter le processus de refroidissement. Elle prenait soin de ne pas en gratter les bords, ni même le fond autrement que pour en décoller les grains en fonte, dût s’y reprendre quelques fois afin de trouver le mouvement juste qui épargnerait les grincements de sa migraine. « Ah non. Tu suggères une contrepartie. Pas trop l’style de la maison. J’fais plutôt dans l’trop bonne trop conne, mais j’ai quand même des limites. » conclue-t-elle avec la même amertume que celle qu’elle rêvait d’absorber. Le liquide formait doucement en son cœur un trou noir qui n’était pas sans lui rappeler ce qu’elle voyait se dessiner autour de son hôtesse. A son tour, elle laisse s’échapper un soupir, mélange de lassitude et de frustration. « Comment souhaiterais-tu évaluer ta confiance en moi ? » , se discrédita-t-elle instantanément, formelle mais rongée par la culpabilité que lui évoquait toute personne dans le besoin qu’elle dépassait, inévitablement. Sa gratitude pour les mains tendues l’ayant extraite des Enfers finirait par l’y balancer à nouveau sans ménagement, inévitablement. Elle pourrait alors rire de l’ironie de cet ouroboros tragique, si tant est que suffisamment d’humour demeure en son sein lorsque viendraient la dévorer les flammes sinistres.
L’éternelle rescapée s’essaya à une gorgée de la boisson qui attaqua immédiatement les pupilles à l’extrémité de sa langue, brûla la peau du palais qui assurément finirait pas se détacher plus tard, inutile. Prévisible. Son humeur se noircit un peu plus. Ni café, ni repos, et une ribambelle de mystères qu’elle ne percerait possiblement jamais.
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
I became insane, with long intervals of long horrible sanity
En un mot : Engeance d'Hornet
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand
Pseudo : Achab
Célébrité : Rooney Mara
Double compte : Elinor V. Lanuit & Inna Archos
Messages : 1571
Date d'inscription : 28/03/2019
Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
L’oubli était-il suffisant pour effacer cette nuit ? Cette question me taraudait désormais. Une perplexité non feinte froissa mon expression indifférente. À cet instant, la caféine avait ravivé les souvenirs douloureux d’hier, cris de terreurs et froissements duveteux, où l’écrin sinistre d’une librairie s’était fait abattoir le temps d’une nuit. Ma cervelle en conservait les blessures. Boyaux éparpillés, os brisés et faces paralysées d’horreur, ma mémoire réanimait avec précision chacun des individus, leurs exclamations de panique, de même que ma propre chute dans l’obscurité grouillante. Puis, venaient les touches froides et les chatouillis des milliers de milliers prenant d’assaut mon corps, cherchant à se faufiler à l’intérieur de ma bouche, et s’attaquant même à mes vêtements selon une frénésie aveugle qui n’avait rien d’un comportement naturel. Non, définitivement, mon propre cerveau ne me ferait pas la grâce d’effacer ces souvenirs immondes, au contraire, il les conservait dans de vifs et sinistres détails.
Le cerveau humain, lui, écartait sans doute l’insoutenable. Refouler l’horreur pour préserver la raison. Classique.
Ça se tient.
Chez moi, la raison était une notion précaire. J’ai soupiré aux dires de la danseuse, en tâtant mes poches de jogging à la recherche d’un paquet de clopes et d’un briquet. Elle n’avait pas tort. De son point de vue, ma requête était, en effet, assez indécente dans ces circonstances, et je réalisais peu à peu combien ma propre inhumanité empêchait tout effort empathique. Elle était épuisée, méfiante, en terrain inconnu, et tout cela était autant de paramètres à prendre compte dans les interactions sociales ; c’était à moi de montrer patte blanche en premier lieu. Lui présenter quelques raisons, peu importe lesquelles, éclaircissant la conclusion de la nuit précédente, où sa carcasse de primate avait terminé dans mon douillet nid de bonheur. J’ai réussi à trouver enfin le paquet cartonné et le briquet dans une poche arrière et, pensive, j’en ai tiré une.
« Bon. Je m’excuse. C’est vrai que vu comme ça... » J’ai coincé la cigarette entre mes lèvres. « Je trouverai ça sacrément culotté comme demande, si j’étais à ta place. »
J’ai activé le briquet. Le cylindre de tabac a fumé, et j’ai laissé les toxines envahir mes poumons surnaturels, probablement immunisés contre le cancer. « En fait, j’ai pas beaucoup plus d’informations que toi. »
La voix légèrement déformée par les volutes de tabac expirées, j’ai soulevé ma tasse de café et utilisé sa soucoupe comme un cendrier, selon un geste rôdé par l’habitude. Ma main nerveuse a balayé mes cheveux en désordre, avant que je ne passe sans attendre aux révélations, de crainte que mes hésitations ne passent pour une tentative de mensonge. Ce n’était pas le cas, du moins, pas entièrement encore une fois.
« Donc, tu l’as vu, j’suis tombée de l’étage. J’sais pas si quelqu’un m’a poussé ou quoi, il faisait noir, et j’étais à demi assommée une fois en bas. Après, la masse de… bestioles m’est tombée dessus. »
Rictus de dégoût. Il n’avait rien de feint : une avalanche d’araignées sur la tronche n’avait rien de plaisant. Je me souvenais de la texture duveteuse des pattes dans mes narines, et celle, épaisse, collante et écœurante comme de la morve, du suc d’insecte que mes dents écrasaient par inadvertance.
« Je me suis tortillée un moment dans cet enfer. J’en avais dans les vêtements, tellement que j’me souviens en avoir arraché une partie dans la panique. Ou alors, elles les ont bouffé, dur à dire dans le noir complet. En tout cas, quand elles ont abandonné, il me restait que des lambeaux et mon sac. »
J’ai tapoté ma clope dans le cendrier improvisé. « Bref. J’ai survécu parce que j’ai une… capacité, justement depuis ce rituel ou je sais pas quoi. Ma peau est blindée. J’sais que c’est bizarre dit comme ça, mais c’est vrai et c’est pas terrible. Plus les mois passent, plus elle devient résistante, et ça me fait flipper. »
Les voilà tes raisons. Le voilà ton réconfort. Es-tu contentée ainsi, pauvre tas de chair frêle qui a besoin d’un cadre ordonné et compréhensible pour mener ta destinée ? Est-ce ainsi que tu survis, misérable existence menée dans un monde tristement matériel, alors que l’extraordinaire est littéralement dans ta main ? Je me suis laissée emporter par un éclat de colère aussi soudain que bref, comme si cette étape explicative était une perte de temps monumentale. J’ai fixé la danseuse dans les yeux, soufflant mon tabac, et totalement à l’aise pour citer des demi vérités, les yeux dans les yeux, la main sur la Bible si tel était son souhait.
Merde. On peut passer aux choses intéressantes ?
J’ai repris mon récit, de ce même ton morne et épuisé, comme un esquif oscillant sur un courant dont il se fichait éperdument. Un petit cumulus de tabac s’était accumulé au-dessus de moi, près du plafond, tâchant la lumière matinale qui se déversait de la fenêtre, d’une sombre couleur d’orage.
« Ensuite, c’est assez simple. J’ai trouvé une fenêtre pétée au rez-de-chaussée. Comme ça hurlait plus haut, sur le toit j’ai supposé, je me suis barrée en vitesse. Je t’ai trouvé une rue plus loin, dans les vapes et t’étais toute gluante comme si un truc t’avait vomi dessus. Tu connais la suite. »
J’ai soupiré. Des écheveaux de fumée se tortillaient autour de moi, comme encadrant la face du démon. Poétique. D’un mouvement sec du menton, j’ai désigné les tiroirs parsemant les meubles de la cuisine, avant de retrousser ma manche et d’allonger mon bras gauche sur la table, paume offerte vers le haut.
« Dans les tiroirs là. Il y a des couteaux. Plante un sur ma main si tu veux une preuve de confiance, tu verras que je mens pas. »
J’ai attendu son verdict. La brume du tabac planait au-dessus de cette main tendue, déférente, un symbole qui aurait pu tout aussi bien annoncer le début d’une trêve, qu’un pacte d’entraide, entre deux provinces voisines, bordant chacune un enfer personnel.
Odelia di Stasio
When witches don't fight, we burn
AB UNO DICE OMNES
En un mot : some ghost
Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
______________
Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
Lia l’observa tirer une cigarette, hypnotisée lorsque résonna le roulement de la pierre du briquet, fascinée par la flamme qui se rapprochait de l’extrémité du tube empoisonné. Elle sentit le rythme de son coeur s’accélérer, le sang pulser plus fort dans ses veines alors que s’éveillait le manque de nicotine. Ses paupières se closent une seconde lorsque les volutes s’échappent. Elle avait suffisamment quémandé, et ne pouvait se résoudre à émettre une requête de plus auprès de son hôte. Qui, qui, n’offrait pas de cigarette en s’en allumant une ? La fatigue facilitait l’irritation, accentuait ses faiblesses, exagérait tout à la fois son impatience et son intolérance. Elle ne se pensait pas vraiment en colère contre cette femme. Ou peut-être que si. Ce n’étaient plus que les seules réactions, brutes, primaires, qu’elle pouvait ressentir en ce moment, le cerveau grillé, les pouvoirs court-circuités, ne tirant plus aucune conclusion. Elle ne se faisait même plus confiance.
Se sachant ainsi désarmée, elle écouta son récit, chercha à imprimer chacun de ses mots dans sa mémoire défaillante. Au milieu de la brume, cela semblait faire à peu près sens. Il lui manquait quelques détails, mais l’essentiel était là, certainement. Son regard glissa sur la coupelle qui se souillait de cendres, puis remonta à nouveau sur la conteuse, toujours aussi lasse et détachée alors qu’elle énumérait les faits répugnants. Seule l’évocation des araignées l’avait animée – bien grand mot – un court instant. A croire que ces événements n’avaient rien de choquant, d’étrange, ou même d’inhabituel.
« Dans les tiroirs là. Il y a des couteaux. Plante un sur ma main si tu veux une preuve de confiance, tu verras que je mens pas. » La sorcière envisagea sa proposition, un rictus souriant ourlant ses lèvres. Le fait qu’elle le lui propose devait être suffisant pour la convaincre – à moins qu’elle ne bluffe, mais elle ferait mieux alors d’avoir une meilleure connaissance de son adversaire -, et ça l’était. Si l’histoire était à dormir debout, ils se trouvaient à Shreveport, et l’étonnement quotidien s’était fait routinier sur ce genre de choses au moins, devenant coutume alors que la réputation de la ville se construisait. Les ourlets labiaux se muèrent en une moue sceptique tandis que ses épaules se haussaient avant de l’aider à s’écarter de la table. Elle s’avança péniblement jusqu’aux tiroirs désignés. Alice n’en avait pas indiqué de particulier, le mouvement avait été vague, sans conviction aucune. Y avait-il des couteaux dans chacun d’entre eux ? Ce serait sacrément curieux. Elle en trouva pourtant dès la première introspection, en retira un couteau de taille moyenne. Elle n’avait pas besoin d’être convaincue, plutôt de voir à qui elle avait affaire : après une courte hésitation – si elle bluffait en effet ? Non. - , elle fit s’abattre de son bras frêle et dépourvu de son habituelle vitalité le poignard improvisé qui aurait dû pénétrer le beurre de la chair si tendre des humains.
Il n’en fût rien. Bien entendu. Les maigres forces restantes déployées lui valurent un rebond fort heureusement maîtrisé, à la suite de quoi elle put admirer que le bout de la lame avait légèrement plié. « Hmm. » Elle savait que seul son état actuel prévenait la panique et le flux de pensées chaotique qui aurait dû l’agiter. La sorcière faisait face à l’inconnu. Rien de ce qu’elle connaissait ne répondait à telle capacité – mais l’aura avait déjà vendu cette partie de la mèche, alors… « Franchement, c’est ce que j’appellerai un super pouvoir ces derniers temps, dans le coin. Quels sont les autres symptômes ? » Rarement bénédiction venait-elle seule, c’est ce que la magie lui avait appris. Si cette dernière n’avait pas l’air mêlée exactement à cet être désabusé, il y avait définitivement quelque chose de surnaturel là-dedans. Bien sûr, le fait qu’elle vint de lui planter un couteau dans la main sans qu’il ne la traverse était un signe – mais bon, aujourd’hui, avec les progrès que la science faisait, et considérant les récentes découvertes des CESS, elle ne se serait pas étonnée d’une riposte humaine repoussant les frontières d’une éthique plus que jamais bancale, nourrie par la crainte qui de tous temps l’avait poussée aux plus sombres folies. « Faudrait qu’j’en sache plus sur ta… condition, et sur le rituel, ça va de soi. Je peux rien t’promettre, mais je peux me renseigner, au moins. » Ce qui était clair, c’était qu’elle ne lui serait pas d’une grande utilité, là tout de suite. « J’veux bien ton téléphone, au fait. »
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- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
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La balance de sa crédulité a oscillé. De la méfiance à l’abdication, j’ai observé l’étincelle du doute naître sur l’horizon défait de sa vulnérabilité ; la danseuse baissait les armes. Ou plus exactement, le supposais-je, elle succombait à une éternelle tentation, présentée sous la forme d’une main offerte à la morsure d’une lame. Mon autre main blottit contre la tasse de café brûlante, j’ai contemplé son rictus malin, cruel même, froisser le chiffon maladif de son expression. Que ressentait-elle à cet instant ? Éprouvait-elle un plaisir insidieux à la perspective de me faire mal ? Ou bien aimait-elle l’idée de reprendre un peu de contrôle ce matin-là ?
Toucher pour croire. Faire souffrir pour comprendre.
Ce cheminement avait quelque chose de biblique. Elle marchait sur ce sentier parsemé de miettes de vérité, dont ni elle ni moi ne connaissions la destination. J’ai attendu sa décision. Elle s’est finalement levée, au son traînant des pattes de sa chaise crissant sur le sol, et sa silhouette tremblante, silencieuse, s’est étirée dans la lumière pâle, qui pénétrait avec difficulté par la petite fenêtre de la cuisine. Les raies blafardes assaillaient son unique et ample vêtement de traits poussiéreux, tandis qu’elle obéissant docilement à la tentation.
Le credo des humains ne se résumait-il qu’à la violence ? La clé de sa confiance ne semblait être qu’un coup de couteau. Cela me semblait si facile.
Le tiroir s’est ouvert. Une main diaphane s’est emparée d’un couteau, lequel paraissait démesuré dans cet instant surréaliste où des os mortels et minces brandissaient une arme dans l’espoir de trouver la vérité. Je m’amusais bien, en vérité. Je trouvais même une forme d’inspiration dans cet acte, où l’âme de la danseuse se laissait apprivoiser par le moindre choix qui lui était offert ; la violence pour prouver. Le contrôle pour se sentir forte. Je l’observais, muette, hochant simplement la tête lors de sa brève hésitation, approuvant ainsi son initiative. Planter une arme pour instaurer la confiance ; cela semblait fou et à la mesure du reste.
Mais cette femme avait choisi de suivre le lapin blanc dans son terrier, où nous étions toutes folles. Je l’étais, elle l’était. Le discernement s’était consumé dans un essaim d’arachnides.
Le verdict s’est alors abattu avec toute la force d’un macaroni cuit. Le couteau a rebondit comme d’ordinaire et j’ai aussitôt levé les yeux vers mon assaillante molasse ; un mince sourire a chassé mon indifférence. J’ai hoché la tête, approuvant ainsi sa décision et en réponse à son marmonnement pensif. Elle m’avait écouté. C’était un bon début. Le premier pas vers une entente, ou tout du moins, le départ d’une confiance pourrie et jaunâtre, comme un monstre de Frankenstein qui n’aurait jamais dû voir le jour. Mais l’issue était une inconnue, et nous n’étions toujours qu’à l’étape du café, de la clope et du sucre en poudre.
J’ai expiré une volumineuse bouffée de tabac. À croire que je m’étais retenue de respirer. « Mouais. J’trouve ça plutôt flippant de se réveiller avec du kevlar dans le corps sans explication. »
Et les questions venaient ensuite. Ah, ma partie favorite. J’ai hoché la tête en me levant aussitôt, la clope au bec, et les pieds traînant à la recherche de mon téléphone. « Pas de problème. Attends, j’vais le trouver. »
L’objet avait échoué entre les coussins du canapé. J’ai marché jusque là, poursuivie par des petites colonnes de fumée comme la locomotive de mes poumons remettait ma malice sur les rails. Un effort plus tard, j’ai ramassé mon smartphone avant de rejoindre la danseuse, en essuyant les traces de derme sur l’écran avec le bord retourné de mon t-shirt. Je lui ai posé devant ses mains : un cadeau. Pas de lutte, ni négociation.
« J’peux commencer par te raconter le rituel. » Le cendrier improvisé s’est rempli de nouveau. J’ai enchaîné, la voix traînante. « Déjà elle m’a fait brûler des herbes. C’était un paquet de machins qui fumaient, et elle m’a dit de répandre ça partout dans l’appartement. Ensuite, elle a tracé un cercle par terre et m’a fait boire un truc. Aucune idée de ce que c’était. Elle en a bu aussi, et on s’est allongées dans le cercle. »
J’ai échappé un rire cynique. « J’ai l’impression de raconter un sale trip. » Haussement d’épaules. « Bref. J’ai fermé les yeux et ça a été le trou noir. Quand je les ai ouverts, je me sentais comme à l’intérieur d’un rêve mais… J’avais conscience de ne pas être dans le réel, tu vois ce que j’veux dire ? »
Je me suis laissée tomber contre le dossier de la chaise dans un soupir, où s’entendaient quelques hoquets. Les mauvais souvenirs ont afflué, et avec eux la cohorte de sensations terrifiantes, un vortex étourdissant de souffrances et l’attention d’une malveillance à l’affût. J’ai préféré édulcorer les pires passages. La vue de ma mère, plus monstrueuse qu’en réalité, et les myriades d’élytres acclamant la venue de leur maître.
J’ai froncé les sourcils, en fixant le cendrier, emportée par ce récit mémoriel. « On était dans un désert fait d’un sable noir et brillant. Il y avait un soleil qui ressemblait à un œil couleur d’un hématome, et qui saignait du sable mort. C’était surréaliste. J’dis on, parce que ma pote était avec moi dans cet espèce de rêve. »
Un frisson m’a secoué. « J’ai pas de souvenirs de ce qu’il s’est passé ensuite. Je me suis réveillée à l’intérieur du cercle, et elle était déjà partie. Depuis, c’est un rêve récurrent. J’ai des insomnies, j’ai la tête ailleurs. J’ai cette impression de ne plus être moi-même, comme si elle avait modifié un truc dans ma tête, tu vois ? »
Vérité viciée, mais vérité quand même. J’ai finalement levé les yeux vers mon interlocutrice, et j’ai ressenti à nouveau ce même sentiment d’anéantissement qui avait suivi mon éveil jadis. Comme si ce bref récit venait de réanimer les braises d’une âme humaine, aujourd’hui réduite à l’état de charbon stérile.
« Plus rien m’étonne dans cette ville, » ai-je conclu dans un souffle las. « Après une sorcière qui maîtrise une armée d’araignées, pourquoi pas une autre qui trafique ma cervelle. »
Une constante source d’émerveillement.
Odelia di Stasio
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Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
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Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
La fumée l’entourait complètement, là où elle se trouvait. Elle aurait souhaité être de ces fragiles qui pestaient contre cette odeur à vous filer la nausée, mais non, ce n’était pas le dégoût qui agitait le myocarde épris, seulement une idylle répugnante qu’elle n’avait jamais eu la force d’interrompre. Leurs premiers ébats remontaient à si longtemps, à présent, à un âge qui la faisait vivre dans le délit ; ce qui bien sûr n’avait rendu cet amant que plus attrayant encore. Elle s’observait, comme à l’extérieur de son corps, se figurait retirer cette cigarette d’entre ses lèvres et la rapprocher des siennes, mais il y avait la bienséance, ce manque d’une proximité qui ne se construirait probablement jamais, et la soucoupe qui servait de cendrier. Son esprit réintégra son corps, ses mains se saisirent de l’appareil qu’on lui tendait, elle bredouilla un remerciement et plongea dans le récit de la brunette désabusée dans l’espoir d’oublier toutes les douleurs que son enveloppe subissait, son pouce ne lâchant pas l’écran qui menaçait de se verrouiller faute de caresses.
L’éclopée avait retrouvé sa place initiale, les fesses clouées à une chaise qu’elle n’aurait probablement pas dû quitter, si elle n’avait pas cédé aux sirènes de l’exutoire et de la curiosité. « J’avais conscience de ne pas être dans le réel, tu vois ce que j’veux dire ? » Elle l’observa d’un air encourageant, l’incitant à continuer, ignorant l’allusion au ‘mauvais trip’ qui venait d’être faite. Elle comprenait parfaitement que le récit d’un rituel, ou le simple fait de le vivre, atteigne des summums d’étrangeté pour un cowan. C’était un autre monde qui les berçaient, où le surnaturel n’avait pas sa place, où la nature n’était qu’un tableau mort dans lequel ils évoluaient, dont ils usaient et abusaient au-delà de leurs besoins, selon leurs volontés capricieuses et éternellement inassouvies. Les herbes, la fumée, la connexion entre les autres, tout cela relevait d’une mystique proche de la folie, quand elle n’était pas monstrueuse. Tour à tour soignés et empoisonnés par des pilules fabriquées en laboratoire, abreuvés de mensonges qu’on diffusait en masse sur les ondes, manipulés par les images qui déferlaient sur les écrans hypnotisants, rares étaient ceux qui prenaient encore le temps de s’aventurer régulièrement auprès de la Terre Mère qui souffrait leur dévastatrice présence. Sans la Révélation, cela aurait probablement été son destin à elle aussi. Elle se serait perdue entre les pirouettes, les galas, les cocktails et les robes pompeuses, les diamants à la pureté questionnable, les tas de tulle, et tout ce qui aurait pu combler ce vide criant en elle, ne serait-ce que pour un bref instant.
Sable noir. Soleil œil hématome saignant du sable. Elle répéta plusieurs fois ces mots-clés intérieurement, tentant de les graver dans sa mémoire, se disant que cela pourrait lui être utile plus tard. En tout cas, au milieu de tout ça, c’était bien ce qui lui semblait le plus intéressant, ce qui ressemblait le plus à des indices, parce que le reste grattait tout juste la surface.
« J’ai cette impression de ne plus être moi-même, comme si elle avait modifié un truc dans ma tête, tu vois ? » Peut-être. Peut-être pas. Elle noya ses doutes dans la tasse de café. Ses pairs avaient eu de tout temps des pratiques diverses, plus ou moins étranges, souvent à haut-risque pour ceux qui pénétraient leurs cercles. Il y avait tant de raisons qui pouvaient expliquer le ressenti d’Alice, et en même temps, aucune qui ne se détachait clairement du lot, que ce soit à cause de la brume mentale qui ne désépaississait pas malgré les requêtes infinies de sa propriétaire, ou simplement car son ignorance dans le domaine était critique. « Après une sorcière qui maîtrise une armée d’araignées, pourquoi pas une autre qui trafique ma cervelle. » Elle plongea à nouveau dans les ténèbres du liquide supposément revigorant, assimilant autant d’informations qu’elle le pouvait. Sable noir. Soleil œil hématome saignant du sable. « Ca doit être déroutant, de traverser ça seule et sans aucune idée de ce qui s’est passé. » ponctua-t-elle en relevant les yeux vers la conteuse. Elle s’empêcha de s’excuser à nouveau au nom de sa caste toute entière, portant un fardeau qui ne lui appartenait pas vraiment, esquive d’autant plus facilement évitée que trop consciente que certains éléments lui manquaient.
La sorcière reporta son attention sur l’appareil qu’elle tenait toujours aussi fermement. Ses doigts glissèrent sur le clavier, composant le seul numéro qu’elle connaissait par cœur, si on excluait celui de l’Arche. Elle n’était pas prête pour ça. Une fois. Deux fois. Avec un soupir de lassitude, trois fois. Puis quatre. Lorsque les tonalités s’interrompirent, elle se leva, s’éloignant légèrement du lieu du récit.
« Ouais ? Sa voix était aussi enrouée et sèche que ce à quoi elle avait pu s’attendre à une heure pareille. Stan avait tendance à disparaître de la surface de la terre en ces heures matinales, quand il ne jouait pas les prolongations. - C’est Lia. - J’vais t’buter. - J’le suis déjà à moitié. - C’est quoi ce numéro ? - Bonne question. Écoute j’viens d’passer une nuit en enfer. J’ai une jambe dans un sale état, j’ai b’soin qu’tu viennes me récupérer. - T’es sérieuse ? - J’crains qu’oui. » Elle l’entendit s’étirer de l’autre côté, accompagnant le tout d’un grognement caractéristique. « Envoie l’adresse. - De suite. Hé, Stan ? Roule-m’en un s’teuplaît. » conclut-elle plus bas.
« On va venir me chercher. J’vais ptet éviter de partager ta localisation, t’aurais une adresse à m’donner ? » l’interrogea-t-elle en revenant sur ses pas, prenant toujours garde à ne pas perdre l’éclat du mobile étranger. Elle tapota ses indications et plaça le téléphone au centre de la table.
Une nouvelle gorgée, et ses pensées se rattachèrent à leurs affaires. « Ta pote, tu sais quel genre de magie elle pratiquait ? Sa couleur ? Si elle faisait partie d’un… groupe quelconque ? » Elle se sentait comme une inspectrice enchaînant les questions, évaluant son suspect. Un léger soupir s’échappa d’entre ses lèvres, écho à tous ceux que sa comparse avait lâché avant elle. Sa lassitude en disait long sur la façon dont elles risquaient d’être prises. Bien que l’objectif soit initialement de l’aider, leur connaissance et appréciation l’une de l’autre demeurait si mince que l’échange sonnait au moins formel, au mieux commercial. Ce n’était pas vraiment le genre de discussions avec lesquelles elle se sentait à l’aise. Elle ne put s’empêcher de noter que l’absence de ses émotions alentour l’empêchait certainement de se connecter à elle, de ressentir l’empathie qui l’envahissait habituellement. Si cette femme confiait un épisode intime et douloureux à une quasi-inconnue, pour la rouge également, c’était excessivement déroutant. « J’veux pas te faire crouler sous les questions, mais la magie, c’est assez large. On la pratique pas tous de la même manière. Au plus j’ai de détails ou d’infos me permettant d’en obtenir, au plus je peux me rapprocher d’une piste qui nous permettra de comprendre ce qui s’est passé, qui plus est si tu veux savoir s’il est possible de… faire machine arrière. C’qui est encore une autre paire de manches. »
Alexandra Zimmer
NAPALM ROACH : j'adore l'odeur du non-respect au petit matin
I became insane, with long intervals of long horrible sanity
En un mot : Engeance d'Hornet
Qui es-tu ? :
- Infréquentable et associable romancière pleine de mauvaises humeurs, d'ironie cinglante et d'indifférence, cachant une âme noire et liée aux enfers.
- Allergique à l’autorité avec une langue trop bien pendue pour sa propre sécurité, elle cherche à fuir ce monde humain dans lequel elle se sent étrangère.
- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
Thème : Nick Cave & The Bad Seeds : Red Right Hand
You'll see him in your nightmares
You'll see him in your dreams
He'll appear out of nowhere but
He ain't what he seems
You'll see him in your head
On the TV screen
Hey buddy, I'm warning
You to turn it off
He's a ghost, he's a god
He's a man, he's a guru
You're one microscopic cog
In his catastrophic plan
Designed and directed by
His red right hand
Pseudo : Achab
Célébrité : Rooney Mara
Double compte : Elinor V. Lanuit & Inna Archos
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Date d'inscription : 28/03/2019
Crédits : Lyrics: Nick Cave & The Bad Seeds ; Avatar: @vestae-vocivus
L’avais-je été un jour, seule ? Cette vie factice d’humaine écorchée avait-elle jamais été la mienne ? Ou bien ce tissu de vices endormis avaient-ils été cousus à l’avance sur mes lèvres, un atroce bâillon cédant à l’instant désiré ? Je n’avais que des conjectures à ce jour. Les déchirures de ma mémoire continuaient de retomber à l’intérieur de mon crâne, des poussières d’Alexandra s’accumulant dans un recoin sombre, en un petit tas de poussière livide. Mais ces doutes avaient-ils la moindre importance ? J’avançai aujourd’hui sur un sentier qui me plaisait, nul doute à ça, et que celui-ci ait été pavé à l’avance pour moi ne m’offrirait rien de plus que de la fierté. Pourquoi pas ? Qu’un dieu infernal m’ait préparé une place à sa cour, n’était-ce pas une reconnaissance implicite de mon potentiel ? Cette idée brillait d’un éclat aussi séduisant qu’impie.
L’enfant crucifiée par sa mère, désormais ascendante. J’étais prête à en rire. Comme toute cette discussion, ce concept-là détenait quelque chose de foutrement biblique et de parfaitement blasphématoire.
« Hm, » ai-je soufflé machinalement, emportée par les implications d’un tel questionnement, et amusée par ces références pieuses assez déplacées dans mon cas.
Bénie soit Alex, sainte bestiole du Monarque. Avec un tel don miraculeux, je pouvais recevoir des pains, au lieu de les multiplier. Sacrée foutue destinée. Et quelle était la suite, d’ailleurs ? Cette femme qui composait un numéro sur mon propre téléphone, quel rôle lui était destinée ? Une apôtre, alors témoin du miracle, qui venait de toucher pour croire ? L’inversion des symboles réveillait mon inspiration d’artiste, pourtant laissée exsangue après l’écriture de mon seul et unique livre. J’observais alors l’italienne prendre ses distances, tant bien que mal, mon appareil collé à l’oreille et des tremblements nerveux dans sa voix. Des phrases que j’ai tâché de capter l’air de rien, mon regard éteint fixé sur le tas de cendres accumulées dans la coupe.
D’autres idées insidieuses ont naquis chez moi. Devais-je vraiment la laisser partir ? J’ai lancé un coup d’œil par-dessus mon épaule, vers sa silhouette incertaine, épuisée, et sa fine tête vulnérable. Comme il serait alors simple de la transformer en un œuvre d’art conceptuelle, ici et là, contre le blanc fade de ces murs.
Pastiche Wiccan à l’italienne. Une bonne idée de titre.
Une ébauche de sourire a flotté sur ma bouche, au moment où elle revenait. « Ouais, il y a un Target à deux blocs d’ici. »
J’ai ramené le téléphone vers moi, et ai complété les indications avec l’adresse du supermarché, ma clope à demi consumée semant des cendres sur l’écran. Je les ai soufflé en lui redonnant l’appareil, un froncement de sourcils accueillant sa nouvelle salve de questions. Je me suis accordée quelques secondes de réflexion, à l’abri derrière l’écharpe de tabac qui s’étirait paresseusement depuis mes narines jusque dans mes cheveux.
« Déjà, elle m’a dit qu’elle faisait pas partie des Wiccans. Elle m’a aussi dit avoir le don de marcher dans les rêves ou les souvenirs, les siens ou ceux des autres. Connaître aussi les potions, runes et protections, j’crois, et qu’elle avait un mentor, un autre sorcier. »
J’ai haussé les épaules. Certains souvenirs de notre conversation juste avant le saut de la foi, s’étaient étiolés avec le temps, surtout ceux me concernant, mais ma mémoire conservait avec avidité les explications de ma sorcière d’amie. Le timbre traînant de sa voix résonnait encore dans mon crâne, où vivaient ces bribes d’un monde de mystères et de magie dont l’apprentie sorcière m’avait imprudemment ouvert les portes.
« Me souviens aussi qu’elle m’a dit avoir été adoptée, et que son père lui a posé une sorte de… verrou sur ces souvenirs ? Si ça peut faire sens. Après moi j’y connais rien. Tout ce que j’savais de la magie avant, c’était ce que j’avais lu sur internet ou entendu dans la presse… J’savais même pas que la magie était colorée. »
Intéressant concept. Plus les sorcières se succédaient entre ces quatre murs, plus ma connaissance s’ouvrait sur ces pratiques, quoique modestement. Des ordres de sorciers existaient ainsi en dehors des Wiccans, où s’apprenaient les potions, les sorts, les runes, les protections et l’utilisation des herbes. Des informations en vrac, dont je n’avais aucune manière d’exploiter le potentiel pour l’instant ; à moins que…
« Elle s’appelle Morgane Wuntherson, si ça t’dit un truc, » ai-je continué en alimentant le cendrier, le regard rivé vers mon interlocutrice. « Elle étudiait à l’université de Shreveport, mais elle n’y est plus, j’ai cherché. »
Tout du moins, ma mère m’avait rendu ce service. À cette pensée, mon attention s’est attardée de nouveau sur mon téléphone : une chance que la vieille ne réponde à aucun de mes SMS. Je me suis laissée retomber contre le dossier de la chaise, à la recherche des derniers souvenirs pertinents de ce rituel.
« J’crois que c’est tout. J’avais noté tous les détails de cette expérience après, pour ne rien oublier tu vois, et plus tard, je m’en suis servie pour écrire un livre. Une manière de… d’essayer d’exciser et de comprendre ce qui m’arrivait. Le seul que j’ai réussi à faire éditer d’ailleurs. J’peux t’en filer un exemplaire, si tu veux. »
Ma main a balayé l’air, comme j’étais soudainement éprise d’un besoin d’alléger la conversation. « Bon, c’est très dilué à l’intérieur d’un roman par contre. Mais si ça peut t’aider. Et c’est cadeau. ‘Fin, c’est une façon de dire merci pour le coup de main. »
J’ai remué mollement sur ma chaise. Un embarras visible est remonté à la surface de mon visage, comme à chaque fois que je tentais de renouer avec les conventions sociales. « Désolé, j’suis tout juste fonctionnelle socialement parlant, j’suis pas très douée pour ces discussions. Ni ces circonstances. Je réalise à peine l’état de ma vie, alors la nuit d’hier… Je t’avoue que j’ai l’impression que c’était juste un cauchemar de plus. »
Ma clope était terminée. J’ai écrasé le mégot dans le cendrier d’une main nerveuse. J’ai soupiré, l’expression à nouveau lasse, incapable de mimer la moindre chaleur : cela aurait sonné faux de toute manière. « Bref, je sais qu’on est pas partie du bon pied, mais c’est juste de la maladresse catastrophique de mon côté, pas de la méchanceté. »
Et ça, mesdames et messieurs, fut le plus majestueux bobard de la matinée.
Odelia di Stasio
When witches don't fight, we burn
AB UNO DICE OMNES
En un mot : some ghost
Qui es-tu ? : Φ sorcière rouge de 29 ans, constamment en recherche de sensations fortes.
Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
______________
Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
Deux blocs. Alice tenait visiblement véritablement à son intraçabilité. Pas que ça ne l’étonnât vraiment au vu du déroulement de leur échange – c’était probablement ce qui l’avait poussée à le suggérer. Deux blocs en cet instant, elle se le figurait comme l’autre bout de la ville. Elle n’en dit rien, refusant de mettre plus à mal sa fierté déjà si lourdement attaquée. A la place, elle récupéra le téléphone, tira sur le vêtement trop court qui l’habillait. Elle devait se changer. Ses fringues ne devaient pas avoir fini de sécher. Ses doigts se remirent à tapoter sur l’écran tout juste redirigé : « Agrippe un t-shirt large au passage tu s’ras mignon. - C supposé me convaincre ? » Elle ignora le téléphone jusqu’à la vibration suivante. « Jsui la ds 15min » Odelia clôtura alors la conversation d’un émoji et effaça le tout, plus par pudeur que par tentative d’enterrer quoique ce soit, pas suffisamment naïve pour croire en une telle opportunité. Si elle n’était pas une crack de la tech, elle avait juste assez de curiosité – de paranoïa – pour connaître le B.A.BA en matière de sécurité, sûrement un chouïa plus que cela – tout était relatif, n’est-ce pas ?
L’éclopée vérifia l’itinéraire pour rejoindre le point suggéré par la Pierre – son nouveau surnom, puisque tout en elle semblait fait de cette matière : sa peau, son visage impassible, ce cœur dont elle ne pouvait lire les émotions. Se pouvait-il que ce qui bloquait la pénétration du couteau dans sa chair prévienne également l’intrusion des tentacules ? Cette question était l’une des moins stupides qu’elle ait pu se poser ce matin. Elle l’enregistra dans le tiroir VIP des milliers de pensées que cette matinée avait fait s’entasser.
Lia ajouta une nouvelle entrée aux contacts du mobile et le reposa sur la table alors que sa détentrice s’était remise à parler. Elle dirigea à nouveau son attention sur cette dernière tandis que ses ongles s’ancraient dans sa chair, cherchant à faire taire l’appel de nicotine qui se faisait hurlement. Régulièrement, elle laissait s’écouler le liquide noirâtre le long de sa trachée, le seul baume qu’elle pouvait présentement savourer. De nouveau, tant d’informations qu’elle aurait souhaité pouvoir noter pour plus tard. On avait pas idée à quel point la technologie avait révolutionné nos vies, nous accompagnaient dans le quotidien, nous rendaient plus productifs. Bien sûr, il y avait de ces choses que l’on ne pouvait louper, mais également toutes ces petites qui passaient inaperçues tant elles étaient sur l’instant dérisoires. Un nom, une non-appartenance, une passif sordide, digne d’une sorcière – plus elle en apprenait sur ses pairs, plus il semblait que la plupart de leurs histoires familiales avaient quelque chose de sinon tragique au moins sensationnel, et bien souvent dysfonctionnel. En cela elle n’était pas une exception. Elle tiqua sur le fait qu’elle ne soit pas même retrouvable à l’université. Candidement, elle s’était simplement imaginée que l’« amie » en question l’avait ghostée – probablement à cause de la froideur de la voix de la conteuse, qui n’avait au nom de cette amitié pas manifesté inquiétude ou déception. A sa décharge, elle avait tout de même enquêté quelque peu sur la situation… Ou bien était-ce inquiétant ? Cette indécision dont elle était la proie la rendait folle.
Toujours est-il que l’histoire sonnait soudainement plus glauque encore. Un rituel, des pouvoirs et une disparition. Pas étonnant que ça lui ait inspiré un bouquin.
La sorcière se mordit la lèvre pour ne pas hoqueter dédaigneusement quand elle parla de cadeau. Aussi admirative fût-elle du fait que la jeune femme lui faisant face ait écrit un bouquin tout entier, qui plus est en moins d’une année – peut-être étaient-ce ses lacunes en la matière, mais ça sonnait comme le fruit d’une inspiration divine -, quand sa propre créativité pouvait rivaliser avec celle d’un gamin de cinq ans aimant à griffonner, elle osait espérer qu’elle n’impliquait pas que normalement elle aurait dû passer des heures à parcourir un ouvrage duquel il allait falloir séparer fiction et réalité à ses frais, sans même savoir si la plume en valait le coup. Elle misait sur un pavé sombre et cynique. Elle devait pourtant bien admettre que ça pouvait lui être utile, étant donné les informations éparses dont elle disposait, et le risque que sa mémoire ait effacé une partie de leur conversation d’ici son prochain éveil. Tant et si peu. Elle rentrerait et s’empresserait de tout mettre sur papier, évidemment – ou de les taper dans une nouvelle note sur son Mac, plutôt.
Elle s’apprêtait à plier bagage quand elle fût surprise par la politesse soudaine de son interlocutrice. Une seconde passa durant laquelle elle chercha à évaluer comment elle devait réagir, réellement prise de court. Une partie d’elle appréciait qu’elle prenne la peine de normaliser cet échange humainement perturbant. « T’inquiètes. J’sais bien que je suis la plus agréable qui soit là tout d’suite non plus. J’ai du mal à réaliser ce qui vient d’nous arriver et… j’ai vraiment besoin d’dormir. Et d’savoir ce qui est arrivé à ma jambe, aussi. Bref. On est toutes les deux à cran. Merci pour… le ramassage, et le café et... » Nerveuse, ses mains s’agitaient, désignant tantôt la chambre derrière elle, plus tard la tasse presque vide face à elle. « J’vais repasser mes fringues et te débarrasser l’plancher. J’t’ai ajouté mon numéro. Odelia. Laisse-moi juste deux-trois jours au moins, que j’récupère un téléphone, déjà, et sûrement un peu plus que je puisse commencer à m’plonger dans tout ça. J’veux bien l’bouquin, d’ailleurs, merci. » A tête reposée et le verdict tombé, il faudrait clairement redéfinir ses priorités.
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- Écrivaine autrefois invisible dont seul le site internet attestait de son existence, elle est l'auteur anonyme d'un livre étrange et dérangeant, dicté par son propre père.
- Américaine et pourtant guère attachée au moindre patriotisme, elle erra longtemps sans attaches ni allégeances, avant d'être l'alliée forcée du plus terrifiant des Princes.
- Une antre modeste dans les Kingston Buildings masque ses noirceurs, ses poches trouées, ses écrits en vrac et une Honda 350 récemment achetée.
Facultés :
- Fille longtemps ignorante du Prince Hornet, l’ombre de celui-ci a influé sur sa vie, en étouffant une à une les dernières lueurs de son âme.
- Au gré des rencontres, des créatures de la nuit et du rêve d'une sorcière noire, ses perceptions se sont aiguisées et lui ont révélé bien des choses.
- Monstrueuse créature, la forme du cafard l'habite depuis toujours, bientôt sublimée et portée à son paroxysme par l'influence d'Hornet.
- Remarquable plume, ses mots sonnent justes, acérés, et empreints d'une ombre beaucoup plus grande qu'elle-même.
- Une insupportable teigne dont les répliques teintées de fiel déclenchent vexations, colères et peines autour d'elle.
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Polie comme une macchabée. La tronche en biais, le teint cireux, l’humeur méchante, et un sourire tendu à craquer comme l’ultime convulsion d’un cœur qui défaille. D’une âme qui défaille, dans mon cas. À voir la surprise apparaissant sur la face de l’italienne, mes conventions sociales moribondes devaient être d’une telle maladresse, ou à défaut, d’une telle fausseté, qu’elles s’avéraient plus efficaces pour la déstabiliser que toute autre révélation horrifique. L’ironie. J’aurais peut-être dû commencer par là, en la soudoyant avec des croissants et une cloque, à la câliner avec des sourires sucrés et des serviettes, comme un joyeux paquet de chair frêle et prête à se rompre ; un petit animal dodu, apeuré, à rassurer avant de l’amener à l’abattoir.
Une opportunité loupée. Comme les conventions humaines me filaient entre les doigts. Des filaments de vie d’une autre époque, d’une autre Alexandra, que l’air ahuri de la danseuse mettait en évidence. Cela me passait totalement à côté, et qu’y pouvais-je réellement ? Je ne voyais, n’avais jamais vu la nécessité de tous ces ronds de jambes, pas plus que la compassion envers une personne qui n’était rien pour moi. Je me suis alors absorbée dans la contemplation des cendres palpitantes du mégot écrasé face à moi, dans le cendrier, dont le filet de fumée mort se déroulait dans cette cuisine aux relents de méfiance mêlés aux corps épuisés.
Je lui ai répondu, l’air mal à l’aise. La crainte d’en faire trop, de sonner faux, tapait mes tempes comme cette bonne migraine qui montait. « C’est rien va. J’veux dire, j’aurais dû m’y prendre autrement ce matin mais… C’est tellement le merdier dans ma tête d’habitude, alors depuis hier… » J’ai pincé les lèvres, l’expression de travers. « Je dirais bien la prochaine fois, je ferai mieux, mais hé… On va éviter une prochaine comme ça. »
Une tirade sans intérêt. Débitée d’un ton morne qui n’avait d’autre utilité que de meubler ce silence gauche, où le tissu de la normalité semblait sur le point de se rompre à chaque syllabe. Quant à ma nausée, celle-ci ne faisait qu’empirer, malmenée par cette conversation banale, terriblement humaine. Je me suis redressée sur ma chaise, les neurones oscillant d’un bord à l’autre comme au lendemain d’une nuit d’ivresse.
« OK, c’est noté. » J’ai désigné sa jambe en vrac d’un coup de menton. « T’as pas besoin d’un coup de main ? J’dois avoir un sèche-cheveux pour sécher tout ça plus vite. »
Je me suis levée lentement, tel un mollusque détaché de son galet, les muscles des jambes encore endoloris par les acrobaties nocturnes, et j’ai marché vers la salle de bain à petits pas traînant. Les vêtements d’Odelia séchaient encore là, sur mon modeste séchoir de prolétaire, où pendouillaient les frusques ayant mijoté dans l’estomac d’une créature que l’absence de confiance refusait de décrire. J’ai récupéré dans un tiroir ledit sèche-cheveux, l’ai posé sur le meuble à côté du lavabo, avant de lui laisser le champ libre ; les humains adoraient leur intimité et leur espace personnel -sécurisant- autour d’eux.
« Et hm... » ai-je pensé en ressortant de la salle de bain. Ma main ébouriffait machinalement ma chevelure en vrac. « J’peux t’emmener jusqu’au Target aussi. J’comprends si t’en as marre de voir ma tronche. Mais j’ai une moto sinon, ce sera pas le meilleur confort, mais peut-être mieux que clopiner jusque là-bas. »
Je me suis sentie antiquaire. Exploratrice des confins de ma sociabilité, enfouie sous une tonne de poussière livide, dont les ornements sonnaient déplacés comme les motifs désuets de vieux bibelots dans une vitrine moderne. J’ai oscillé d’un pied sur l’autre, indécise sur la manière de me comporter. J’ai haussé les épaules.
« Bref, t’auras qu’à me dire. Prends le temps qu’il te faut là-dedans, » ai-je finalement articulé en montrant la salle de bains. « J’peux au moins te proposer un moment pour souffler après ce réveil à la con. Le livre, je te le laisse sur la table de la cuisine, pour quand tu partiras. J’ai laissé toutes tes affaires sur le séchoir. »
N’était-ce pas la bonne approche ? À défaut d’un bon souvenir, en laisser un supportable ? N’était-ce pas ce qui préoccupait les humains, conserver les apparences ? Offrir coûte que coûte une bonne façade ? L’air mal à l’aise, enfin une expression sincère de ma part, j’ai tourné les talons, et suis retournée dans la cuisine pour laver les tasses, jeter les cendres, et ouvrir la fenêtre pour laisser échapper les odeurs de fumée.
Une citation m’est revenue : Laisse entrer le soleil et sortir ma vie. Dans mon cas, il n’a fait que m’éblouir.
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Φ offre son énergie à l'Arch, association ayant pour but d'accompagner les CESS dans leur intégration dans la ville. La fondatrice et chamane Yelena Tehrt, est son mentor.
Φ bien qu'elle l'ignore, fût élevée par des purificateurs. Ceux-ci ont tout fait pour dissimuler la vraie nature de sa magie. Bien que tentant désormais de combler les années perdues, sa maîtrise des arcanes reste instable.
Φ professeure de danse classique, anciennement en tournée avec une compagnie de ballet.
Φ installée à shreveport depuis 2013. habite actuellement mooringsport, à la frontière du triangle de foi.
Facultés : MANIPULATION DES ENERGIES VITALES
Φ Manipulation des émotions. Injection, détection, effacement, remplacement des émotions. maîtrisé
Φ Utilisation des émotions dans sa magie. plutôt bien maîtrisé
Φ Manipulation des auras. Modification, dissimulation de parties d'auras. très peu maîtrisé
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Φ Lecture d'auras. Emotion, race, inclinaison, forme d'un thérianthrope.
Φ Capable de sentir les esprits mais mal à l'aise avec tout ce qui y a trait.
appartement d'alex, kingston buildings, mansfield 7 juillet 2021
L’étrangère observa, secouée par une surprise qu’elle fit de son mieux pour dissimuler, la Pierre fondre peu à peu, prise d’une hésitation soudaine alors qu’elle cumulait des offres lui ressemblant peu. Le personnage dont elle avait analysé les faits et gestes durant les dix précédentes minutes se défaisait pour se recomposer à nouveau sous ses yeux : il y avait eu un changement dans son attitude, et il était loin d’être imperceptible. Démunie, elle se raccrochait à sa perception dans ce qu’elle avait de plus humaine, sans grande confiance en celle qu’elle avait souvent délaissée au profit de sa sœur surnaturelle, plus puissante, plus tonitruante, plus fiable... Pas cette fois. Malgré le manque d’attention qu’elle lui avait porté ces dernières années, elle se reposerait sur elle pour conclure que c’était trop flagrant, trop d’un coup, qu’importe qu’elle appréciât bien plus cette nouvelle disposition à son égard. La sorcière butée chercha à nouveau dans son aura des traces d’une quelconque modification : qui sait, peut-être que quelque chose s’était ravivé chez elle par la même occasion. Rien. Ce n’était même pas la fatigue qui l’empêchait de creuser : il n’y avait simplement rien de visible. Quand elle se concentrait, elle n’avait alors que cette vague sensation d’être attirée par le vide, sa propre aura tordue à son contact, un vide sans la moindre couleur, aux contours bien présents mais sans matière pourtant, dépourvu du moindre indice sur une émotion traversante. Etait-ce seulement possible ? Pouvait-elle se perdre dans cette chose ? Sa chair se hérissa à cette pensée. Elle ne souhaitait pas vraiment le découvrir.
Ce nouveau trajet jusqu’à la salle de bain, sur une jambe que chaque pas irradiait de douleur, gomma les effets motivants du café tout juste avalé. Elle ferma la porte derrière elle, brancha le sèche-cheveux qu’on lui avait laissé là et entreprit de lui trouver un emplacement qui lui permettrait de souffler sur le short en jean empli d’eau sans assistance. Elle prit un moment pour regrouper ses forces, là, sur le sol de cette pièce qui lui accordait un instant d’une solitude qu’elle ne savait encore réparatrice ou dangereuse. Les angoisses ne tardèrent pas à menacer sa poitrine, à déborder au travers l’eau de ses yeux, alors elle se releva, refusant de montrer une faiblesse supplémentaire en ces lieux qui la trouvaient déjà si fragile. Ses os craquèrent sous le mouvement, ses muscles se tendirent, protestant contre cet ego qui ne leur laissait aucun répit. Tant pis. L’humidité du short ne s’était bien entendu pas totalement évaporée après ce trop court laps de temps, et alors qu’elle se glissait dans les vêtements imbibés, elle sentit instantanément ses glandes sudorales saturer. Ca n’arrangeait pas son cas. Partir. Vite.
Odelia rouvrit la porte de la salle de bains avec plus de force qu’elle ne pensait en avoir encore et se dirigea vers le seuil de l’appartement où elle récupéra le livre délaissé plus tôt par son autrice. Elle sentit la démangeaison terrible de la fierté qu’on asséchait alors qu’elle s’apprêtait à réclamer une aide dont elle ne saurait réellement se passer. « Merci. Si ta proposition tient toujours, je veux bien que tu me déposes, oui. J’pense pas pouvoir aller très loin comme ça. »
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« J’le vois. » Elle s’empressa de mettre pied à terre dès que son escorte s’arrêta, récupéra poliment les affaires laissées devant et rejoignit Stan aussi rapidement que possible après avoir salué sa potentielle bienfaitrice, à moins qu’il ne s’agisse là de sa tortionnaire - il était encore trop tôt pour le dire. « T’as une gueule à faire peur meuf. – J’suis au courant. – C’était qui ? – Quelqu’un à qui on fait pas vraiment confiance. Mais qu’on va probablement aider quand même, j’imagine. T’as le t-shirt ? » s’enquit-elle avant que le tissu imbibé n’humidifie le siège de la voiture. Stan lui tendit l’objet de sa convoitise qu’elle changea sans égards pour les passants potentiels autour d’eux – ils n’avaient qu’à pas être si curieux, au pire rince-toi l’œil papi on sait tous que t’es en manque d’action. Alors qu’elle passait la tête par le col de sa robe de fortune tant bien que mal au milieu du bordel ambiant, elle se trouva sous son nez un cône de papier d’une perfection absolue entre deux doigts moins ragoutants. Son corps s’emplit d’un tel soulagement qu’elle sentit les larmes lui monter. « Merci. Merci merci merci ! T’as pas idée à quel point j’en avais besoin. » Sa main s’approche d’un briquet traînant sur la boîte à gants et les poumons s’engorgent de la fumée bienvenue, parfait mélange de tabac, de nicotine et de marijuana. Ses yeux se ferment un peu et sa tête roule sur l’appuie-tête du siège confortablement enfoncé. Elle tousse sous la bouffée lourde, sa gorge la gratte. Son système tout entier la lâchait. « Hosto poto. – Là maintenant tout de suite ? – Il est quelle heure ? – 10h45. – J’devrai y être depuis hier. Tu veux qu’on m’ampute la jambe ou t’es juste con ? – Ca va, ça va, tu peux pas la jouer plus dramaqueen peut-être ? – J’penserai à te demander ça la prochaine fois qu’t’es en train d’me saigner entre les doigts. – J’vais en entendre parler encore longtemps ? – Absolument. T’es ma pute. Allez roule. »
Ca faisait du bien d’être en terrain connu, jambe crevée ou pas. Sous ses yeux dansa l’aura parfaitement bestiale de son ami et elle soupira de soulagement : ce n’était vraiment pas elle, le problème.