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Full Sweat Jacket | Anaïs & Selma

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Anonymous
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Mar 26 Avr - 18:00 (#)



Mansfield en Mars hésitait entre deux saisons.
L’hiver chétif de la Louisiane, moite et tiède, s’attardait encore çà et là, dans les branches raidies des arbres et leurs bourgeons paralysés de froid, qui souffraient et oscillaient en silence dans la brise polluée de la ville. Le printemps lui, n’était qu’une rumeur assourdie par les miasmes omniprésents de la misère. Leurs fumerolles nauséabondes et âcres émanaient des ruelles étroites, où croupissaient les bennes à ordures vomissant leurs détritus et les bouches d’égout fumant dans la fraicheur du matin, au milieu des inévitables odeurs de vieille urine et de bière bon marché.
La morosité des lieux contaminait vite votre humeur. J’ai regardé les derniers lambeaux de paysage uniforme défiler de part et d’autre des vitres de ma Jeep, avec leurs monstres de béton triste, aux angles coupants et durs, qui bouchaient sans fin l’horizon de couleurs mornes. J’ai levé les yeux en soupirant ; à neuf heures du matin, le ciel avait la texture d’une vieille bâche mitée. J’ai orienté ma voiture vers l’un des innombrables parking résidentiel, où je l’ai garé non loin de l’entrée, dans l’ombre rachitique d’un platane malade. J’ai coupé le contact d’un tour de clé un peu trop brutal.

Au travers du pare-brise de ma Wrangler noire, la silhouette écrasante de l’immeuble d’habitation crevait l’horizon fait de couleurs ternes, à la manière d’un index accusateur. Face à cette vue triste, je me suis sentie partagée entre une joyeuse impatience et un vague regret, un brin inutile.

Ils ne devraient pas habiter ici, ai-je songé en observant ces lieux miteux, qui suintaient l’insécurité, les rixes de caniveaux et la drogue bon marché. J’avais l’impression de voir la misère ramper partout dans l’ombre des bâtiments, monter à l’assaut des murs et des fenêtres, comme des tentacules qui tâchaient tout d’une encre indélébile et toxique. Même la lumière du jour se révélait impuissante à embellir ce paysage effrité et triste ; c’était ça l’Amérique des masses, touchante et sale.
La mélancolie de l’endroit s’infiltrait en moi. Quelque chose dans ces textures, ces couleurs passées et polluées, faisaient vibrer une corde inconsciente et remonter des souvenirs enfouis dans ma mémoire. Ceux d’une gamine de Philadelphie. Là-bas tout comme ici s’élevaient les mêmes balcons, les mêmes fenêtres sales, où l’on demeurait éternellement assis, à écouter la cadence des moteurs, parce qu’il n’y avait rien de mieux à faire. On fixait l’horizon et on plongeait dans ses pensées, parce qu’il n’y avait nulle part où fuir. J’exagérais sans doute. Je me souvenais mal de cette époque.

Bouge, ça va être l’heure.

Je me suis soudainement élancée et tortillée entre les deux fauteuils, pour attraper mon gros sac de sport posé sur la banquette arrière. Un vieil Adidas bleu et noir, aux lanières usées jusqu’à la corde. J’ai récupéré mes clés, défais ma ceinture, et poussé la portière, le sac jeté sur l’épaule, et les yeux plissés sous l’assaut conjugué du vent, du soleil et des odeurs âcres de la ville. J’ai ramené contre moi les pans de ma veste en cuir, qui cachaient un vieux pull, et le holster dissimulé dessous, attaché contre ma hanche. Une habitude. J’ai fermé la voiture en tournant les talons vers l’immeuble.
L’air m’a semblé moins lourd, moins nauséeux. J’ai commencé à marcher entre les voitures dans ce parking désert, le sac sur l’épaule, et le début d’un sourire sur les lèvres. Je n’y pouvais rien. Je me suis revue, voilà trois mois de cela, remontant ces allées désertes, empruntant les mêmes escaliers un mois de Décembre, le cœur tambourinant après l’appel d’Anaïs et sa révélation. J’avais trébuché au moins quatre ou cinq fois sur ces stupides marches, et le souvenir m’a fait sourire de plus belle.

J’ai regardé l’heure. Neuf heures cinquante. Elle doit bien être réveillée, ai-je réfléchi en poussant les doubles battants du hall d’entrée. L’heure m’avait paru appropriée ; pas trop tôt pour une jeune fille de son âge, et pas trop tard pour se ménager une pause déjeuner après l’entrainement.

Je me suis arrêtée sur le seuil à l’intérieur du hall. Les souvenirs ont afflué. Les odeurs de tabac froid et de détergeant industriel étaient restées les mêmes, les graffitis à côté de l’ascenseur aussi, et je me suis de nouveau vue lors de cette soirée de Décembre. Les marches avaient défilé, impalpables et floues comme dans un rêve, tandis que je remontai à toute allure vers l’appartement de Zach. J’étais alors restée un long moment, indécise, le doigt suspendu au-dessus de la sonnette, terrifiée à l’idée que tout cette nuit ne soit qu’une illusion, un fol espoir d’un cœur transi d’inquiétude.
Je m’étais trompée. Et lorsque son visage buriné avait paru dans l’entrebâillement, avant même que mon index n’appuie sur la sonnette, toutes mes pensées ont chaviré comme un château de cartes. Elles étaient encore vivaces aujourd’hui. L’explosion de joie, si violente et invraisemblable, qu’elle paraissait irréelle, la fureur et l’incompréhension de son absence, et le délire fiévreux de le revoir ; ça faisait mal comme un cœur qui n’avait plus battu depuis trop longtemps. Il s’en était suivi ce silence, celui qui arrête le temps et confond deux âmes, incapables de réaliser qu’elles se sont retrouvées.

Aujourd’hui encore dans ce hall désert, en contrebas de l’escalier, j’ai ressenti chaque sensation avec l’acuité terrible des souvenirs émotionnels. Ceux qui sont immortels. Le choc de notre étreinte, sa chaleur contre moi, et nos bras nous serrant l’un contre l’autre, sa force ridicule à me soulever du sol. Et nos rires, que l’on avait cru abandonner quelque part dans le désert afghan. Ces nuits-là appartenaient au domaine du roman, des happy end hollywoodiens, qui n’avaient aucune prise sur la dure réalité de la vie ; pourtant nous avions été réunis par la somme du hasard et Anaïs.
J’ai soupiré de contentement, seule dans ce hall. Le bonheur de ces retrouvailles était encore vivace, inscrites dans mon cœur telle une entaille bienfaisante, tout comme ma gratitude envers Anaïs. Je lui aurais tout accordé, ce soir-là. Même son petit mensonge lors de notre première rencontre n’avait alors plus la moindre importance et, au fil de mois, j’avais moi-aussi commencé à éprouver une vraie affection pour cette gamine que Zach protégeait de son mieux. Je me sentais redevable à présent.

Arrête de ressasser, aller, me suis-je reprochée, en chassant une mèche de cheveux tombée sur mon front, et l’humidité naissante, stupide, qui naissait dans mes paupières.

J’ai commencé à escalader les marches à longues foulées souples. Mes baskets crissaient contre les dalles émaillées de fissures, tandis que mes dreadlocks cavalaient sans ordre sur mes épaules. Je me sentais bien. Non pas ce même calme instable au silence amer qui m’avait poursuivi depuis mon arrivée au pays, mais le sentiment apaisé, déterminant, d’avoir clos un chapitre éprouvant de ma vie. Le sac ballotant sur mon bras, et le sourire collé au visage, j’ai compté machinalement les numéros des portes et me suis arrêtée devant l’appartement où Zach et Anaïs logeaient encore.
J’ai vérifié ma montre. Bientôt dix heures. Mon cœur tambourinait encore, non à cause des marches, mais d’un trop-plein émotionnel qui me frappait encore à chaque fois que je sonnais à cette porte. J’ai réajusté ma veste de cuir qui cachait en partie mon débardeur de sport, trop court pour masquer assez mes abdominaux trop prononcés pour une femme, assorti d’un jogging ample et fripé.

J’ai bêtement hésité encore sept ou huit secondes avant d’appuyer sur la sonnette.

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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Thème : Mama Cass Elliot - Make Your Own Kind Of Music
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Ven 29 Avr - 10:46 (#)



Un bruit, une sensation d’étouffement sur la poitrine et j’ouvre les yeux, accueillie par les pupilles rondes et suppliantes d’une boule de poil se mettant à miauler comme s’il était le plus malheureux du monde, réclamant une attention qu’il imagine mérité pour avoir ouvert la porte de ma chambre. Grognant à peine, je lui laisse la place de venir se nicher contre mon ventre et le voilà à ronronner en continu, me tirant un sourire et m’empêchant de dormir par la même occasion. Un coup d’œil et je soupire. 8h04. Même le weekend, pas moyen de grapiller quelques heures de sommeil en plus. Cela fait au moins un heureux que je caresse doucement en laissant mon esprit dériver sur tout ce qui fait ma vie aujourd’hui et qui me semble enfin calme et raisonnable. Quelque chose que je n’espérais même plus vraiment, à force. Cela semble durer, alors je n’ai plus qu’à espérer que ça restera ainsi et que le pire est derrière moi. Derrière nous.

Incapable de fermer l’œil à nouveau, je finis par me lever et prendre avec moi ce chat perturbateur de sommeil mérité, lui trop occupé à ronronner dans mes bras pour en avoir quelque chose à faire que mes cernes ne disparaissent pas à cause des veillées tardives où je perds la notion du temps avant de me rendre compte qu’une nuit de plus se fera avec moins de cinq heures de sommeil. Un sacrifice que je suis prête à faire, mais certainement pas le week-end, sauf quand le pacha du lieu en décide autrement. Baillant à m’en décrocher la mâchoire, je quitte ma chambre, et grattouille l’autre animal qui piaille de joie en voyant quelqu’un de réveillé.  Laissant les deux monstres à leurs gamelles lorsque je les ai remplis, je prépare d’un air absent mon propre repas en regardant l’heure. 8h21.  J’ai encore le temps avant qu’elle n’arrive. Je m’installe sur le canapé, tasse en main, plaid sur les jambes et fixe sans la voir la télévision, mes pensées se tournant plutôt sur la visiteuse supposée venir ce matin.

L’enchaînement des événements ayant conduit à ce matin me laisse encore un sourire aux lèvres en y repensant. Zach m’a bien fait comprendre que me mêler de ça n’était pas mon rôle et que j’aurai dû lui en parler, mais el fait qu’il me dise ça en me serrant à m’étouffer avec un grand sourire peint sur le visage m’a plutôt conforté dans l’idée que j’avais bien fait. J’avais hésité, après ma rencontre avec Selma, sur la marche à suivre. J’avais feuilleté à nouveau le journal de Zach et trouvé les allusions se référant à elle. Jamais de nom, mais des notes qui collaient avec ce que je savais d’elle. Du peu que je savais. J’avais essayé de chercher davantage sur le net, sans vraiment de succès. Alors j’avais fait la curieuse et m’étais renseigné, l’air de rien, auprès du principal concerné. Il ne m’avait pas fallu longtemps pour comprendre que ce n’était pas un mensonge, même si je ne demandais jamais directement des choses concernant Selma, refusant d’en parler sans certitudes.

Puis j’avais appelé Selma, lui disant que je savais où trouver Zach. Elle avait accouru sans attendre et leurs retrouvailles, sur le pas de la porte alors que j’observais la scène depuis la table de la salle à manger, m’avait confirmé que j’avais pris la bonne décision. Même si j’avais dû tout raconter ensuite à chacun d’eux en leur offrant des sourires d’excuses pour les omissions et les cachoteries sur le sujet. J’avais préféré être prudente. Si Selma n’avait pas été celle qu’elle prétendait, la vie de Zach et la mienne auraient volé en éclats à nouveau, et je ne voulais pas que ça arrive, il n’en était pas question. Pas alors que les choses s’étaient enfin adoucies. Lui et Sumire emblaient heureux et l’arrivée de Selma au tableau avait ajouté une touche supplémentaire qui avait permis à son visage de plus souvent afficher un sourire heureux qui semblait ne plus pouvoir s’installer après Halloween. Les choses s’arrangeaient pour nous tous.

Je ne sais même pas comment cette histoire de sortie sportive est venue, à l’origine. Selma et moi, on discutait quand elle passait de temps en temps. Au début elle venait voir Zach et les deux passaient du temps ensemble, rattrapaient le temps perdu et renouaient avec cette amitié qui leur allait si bien. Je me contentais d’être la silhouette silencieuse qui écoutait leurs histoires, un sourire aux lèvres alors que je fixai mes cours en faignant de ne pas les entendre. Peu à peu, je m’installai avec eux, racontais parfois quelques moments passés avec Zach, puis il arriva que Selma et moi on papotait sur tout et rien. Et l’idée d’aller dans une salle de sport était sortie comme ça, au détour d’une conversation. J’avais rarement bonne mine, le manque de sommeil, le stress et le manque d’exercice n’aidant guère. Alors sa proposition, j’avais accepté face au sourcil haussé de Zach. Il avait souris sans me dire pourquoi et j’avais convenu avec Selma qu’on ferait ça le samedi matin. Peut-être que ce serait différent du lycée et que ce serait agréable cette fois, après tout. Moi qui n’avais jamais aimé le sport, voilà que je demandais qu’on me traîne dans une salle…

Je sors à peine de la salle de bain, les cheveux encore humides lorsque la sonnette retentit. Je regarde l’heure et peste intérieurement. J’avais tellement pris mon temps, pour une fois, que je n’avais pas fait attention à l’heure. Faisant taire Rover qui s’empresse de se carapater sous mon regard pour aller piailler sur le canapé en espérant pouvoir revenir à la charge une fois que j’aurai le dos tourné, j’ouvre la porte, découvrant une Selma en veste de cuir et jogging ample. J’avais opté pour un simple t-shirt blanc tout bête et un truc qui ressemblait à un jogging que Rica m’avait envoyé à la figure lors de ma dernière visite, arguant qu’il m’irait comme un gant. Elle n’avait pas tort, mais le côté semi-moulant ne me plaisait pas trop, il allait falloir que je fasse un tour dans une boutique pour un truc plus ample si ce genre de sorties devenaient régulières.

- Bonjour Selma. Tu vas bien ? Entre, fais comme chez toi, tu connais la maisoo. Je termine de me préparer et j’arrive.

Je file dans la salle de bain pour attacher mes cheveux après les avoir essorés autant que possible, ferme mon sac à dos, rejoignant finalement Selma alors que Rover quémande des caresses et que Tyché, roi autoproclamé de cet endroit, n’observe la scène perchée sur le dossier du canapé avecun air de majesté contrarié. J’offre un sourire d’excuse à Selma.

- Désolée, je n’avais pas fait attention à l’heure... Zach n’est pas là, mais il sera rentré pour ce midi. Lui et Sumire sont allés dîner hier soir et… ‘fin tu imagines la suite…

Préférant en pas m’en aller vers ce terrain-là, je m’occupe plutôt les mains en calmant Rover qui finit par retourner sur le canapé. Je montre la cuisine du pouce à Selma, essayant d’être une hôtesse correcte.

- Tu veux quelque hose à boire ? Ou on y va maintenant ? Je dois admettre ne pas trop savoir comment tu voyais les choses…
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Dim 8 Mai - 19:19 (#)



Décembre dernier, quatre mois. L’émotion était encore vive.
J’ai appuyé sur la sonnette. Mon cœur a accéléré comme à chacune de mes visites. C’était plus fort que moi. Ces quatre murs avaient vu défiler des souvenirs trop précieux, des sentiments à fleur de peau, et des blessures à vif ; ils résonnaient à l’intérieur de ce plâtre craquelé, et dans les odeurs doucereuses trainant dans la cuisine. Je les avais dans la peau. Je les avais à jamais dans mon crâne. L’odeur douceâtre du chocolat de Noël, le divan fatigué où dormaient un chien et un chat, la façon dont la lumière traversait la fenêtre un peu sale ; tout cela était chaud et beau comme un baiser secret.

Je devais afficher un sourire rêveur lorsque Anaïs a ouvert. Les senteurs familières de l’appartement m’ont caressé le visage, me faisant sourire de plus belle.

« Salut. » Je me suis éclaircie la voix. « Ça va pas mal merci, et toi ? J’espère que je ne te sors pas du lit trop tôt. »

Enfin, à dix heures du matin. Je m’étais levée à cinq heures. Une habitude inconsciente, mécanique, dont je n’arrivais même plus à me débarrasser depuis mon retour à la vie civile. Je n’essayais même pas en vérité. Les réveils matinaux étaient, au-delà d’une habitude tenace, la nostalgie des petits-déjeuners avec l’équipe, les discussions à cœur ouvert dans l’isolement d’une planque. Je me sentais seule au monde, une femme anonyme observant l’aube renaitre, le monde tâtonner en ouvrant les yeux et la brise murmurer. Je me sentais chaque fois privilégiée d’assister à ce spectacle.

Sans doute était-ce stupide de ma part. J’aurais aimé partager ça avec quelqu’un, ai-je pensé à part de notre conversation banale, et ça aussi c’était sûrement stupide de ma part. J’ai essayé de chasser ces illusions, et franchi le seuil de l’appartement d’Anaïs, un air rêveur dissimulé sous mes cheveux.

« Je vois bien, pas besoin de m’en dire plus, » lui ai-je répondu en observant l’intérieur, non sans ressentir encore ce pincement émotionnel.

Le chat m’a observé avec suspicion. J’ai fait quelques pas dans le living-room, le sac calé sur une épaule, une main dans la poche, et l’attention happée par les souvenirs qui trainaient çà et là, dans de minuscules touches mélancoliques. La table où nous avions diné durant ces fêtes de fin d’année. Le canapé où nous avions partagé nos vécus de ces derniers années, nos souvenirs de l’armée, ou nos blessures à mi-voix. L’aveu que Zach m’avait péniblement confié. L’amertume de sa mémoire qui s’effritait lentement, et ma propre tentative, maladroite, d’affirmer que nous allions gérer ça.

Arrête, c’est une journée sympa, me suis-je sermonnée, mais ça aussi, c’était plus fort que moi. Mes yeux m’ont piqué soudainement. J’ai détourné le regard vers la fenêtre ensoleillée.

L’horizon incurvé était piqueté d’immeubles, des arêtes lointaines à cette hauteur, entre des tâches de végétations tristes et dépouillées en cette saison. Des routes parcouraient la ville à la manière de rubans de mercure. J’ai déambulé vers les carreaux en attendant que Anaïs récupère ses affaires. À plus de quatre étages, ma voiture avait l’air d’un coléoptère endormi, sous son arbre rongé d’hiver ; la vue ne m’a guère aidé à dompter mes émotions. J’étais à fleur de peau entre ces murs.

« Non, non, tout va bien. On n’a aucun impératif à suivre, pas besoin de te dépêcher. Mais merci, j’ai mangé ce matin et pris de quoi boire. »

Je lui ai souri en me tournant vers elle. Le soleil m’a caressé la nuque. Je me sentais bien ici, malgré le trop-plein d’émotions tendres et vivaces, enracinées entre moi et ses murs.

« J’avais prévu une journée SEAL tu vois, une heure de course à 70% pour s’échauffer, et puis on ira travailler tout le haut du corps jusqu’à la pause de midi. On mange léger et on repart pour le reste du temps, avec dix minutes de pause par heure. »

Un ton sérieux. J’ai croisé les bras pour essayer de donner le change, mais mon sourire rieur était trop difficile à contenir. L’humour bien placée n’avait jamais été mon fort. Je me suis frottée la nuque machinalement, une chaleur soudaine irradiant mes joues : sans doute un reste de ma timidité.

« Non, en fait je pensais qu’on pourrait descendre dans une salle de sport. On peut prendre un truc à boire sur le chemin et s’arrêter à midi pour manger un bout en ville, » me suis-je dépêchée de dire.

Je la connais mal, en fait. Normal. Anaïs et moi, nous nous étions rencontrées en Novembre, comme deux opposées, entre une agent de la NRD, et une CESS en fugue, soucieuse de protéger le secret de son père adoptif. Je n’avais conservé aucune rancune envers cette jeune femme de bonne volonté, qui avait vécu trop de tourments trop vite, et beaucoup trop tôt. Cependant, quatre mois étaient bien courts pour apprendre à connaitre totalement quelqu’un, et je m’étais convaincue, peut-être inutilement, que cette sortie sportive était sans doute l’occasion de nouer un lien entre nous.
Machinalement, j’ai commencé à osciller d’un pied sur l’autre. L’immobilisme m’allait mal. Qui plus est, j’espérais sincèrement ne pas représenter un fardeau pour Anaïs, l’amie de son père, un peu maladroite, ennuyeuse et lourde, dont elle acceptait les invitations par simple politesse.

« La salle est dans le quartier, le Mad Dog. On peut y aller à pied ou en voiture, comme tu préfères, » ai-je déclaré, avant d’avancer vers la porte, les sourcils froncés, hésitante. « Mais d’ailleurs, si jamais tu n’as plus envie de faire ça, on peut annuler, ce n’est pas grave, je comprendrai. »

Elle avait sans doute mieux à faire, à son âge. Je supposais, du moins. Je n’avais jamais connu une vie d’étudiante en réalité. L’aube de ma vingtaine avait été rythmée par les exercices militaires à la caserne, et non par une trépidante vie sociale. Laquelle était toujours inexistante à ce jour, d’ailleurs. Les années suivantes avaient été coupées du monde par le désert et la guerre, et j’étais rentrée au pays comme une étrangère coupée de la civilisation. Je me suis sentie subitement démodée.

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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
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En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
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Lun 23 Mai - 22:38 (#)



La présence de Selma dans le giron de notre famille reliée par autre chose que les liens du sang, qui semblent bien ténus en comparaison, est devenue aussi naturelle que celle de Serguey ou Lilas. Une présence qui a fait beaucoup de bien à Zach et qui agrandit encore un peu plus ce cercle qui n’a de cesse de s’étendre au hasard des rencontres et retrouvailles qui surgissent sans prévenir. La voir déambuler dans l’appartement n’a plus cette étrangeté de la première fois qu’elle était venue où l’appréhension d’avoir commis une erreur m’avait étreinte durant toute l’attente qui avait précédé les retrouvailles. Je n’ai jamais été aussi heureuse d’avoir angoissée pour rien. Aujourd’hui je suis simplement contente de la voir et qu’elle m’ait invité à une sortie qui est loin de celles dont j’ai l’habitude. Me sortir de ma zone de confort est une chose rare que seule Rica parvenait vraiment à faire avec régularité, jusque-là. Je la rassure d’un haussement d’épaule. Dormir est devenu un luxe, mais je n’ai pas besoin d’entrer dans les détails.

- Non, ne t’en fais pas, je suis réveillée depuis quelques heures déjà.

Je la laisse vaquer à son examen de l’appartement, sous la surveillance imperturbable de Tyché qui voit toujours d’un mauvais œil les têtes encore trop peu familières à son goût. Je lui gratte les oreilles en passant pour récupérer mon sac, tirant un ronronnement et un coup de tête appréciateur au chat qui partage mon lit un peu trop souvent ces derniers temps. Une mauvaise habitude que je me refuse à abandonner, appréciant bien trop la présence, même minime, qu’elle m’apporte.

Ecoutant avec attention le programme concocté par Selma, je hoche la tête, avant d’écarquiller les yeux, ne sachant pas trop si elle se moque de moi ou si elle cherche secrètement à me tuer d’épuisement. Son sourire la trahit rapidement, mais un léger soupir de soulagement m’échappe tout de même. Je n’ai aucune idée de ce que peut vraiment être une journée SEAL, mais juste entendre Zach et elle parler de leurs séances quotidiennes lorsqu’ils étaient soldats m’a suffi. Je n’ai aucunement l’intention de subir ça, même sus la contrainte.

- Pendant un instant j’aurai pu y croire… Mais sinon le plan me convient. Le vrai plan, j’entends. L’autre je n’aurai pas tenu dix minutes.

Et encore, c’est si j’avais atteint ces dix minutes sans faire une syncope. Il est vraiment temps que je me prenne en main à ce niveau-là aussi. Maintenant que j’ai pris un rythme entre la magie, les études et le quotidien, je peux me permettre d’essayer de nouvelles choses. Et j’ai envie de connaître Selma, aussi. Tout ce que je sais d‘elle, c’est ce qu’elle a pu partager avec une connivence fraternelle avec Zach, rien de plus. Elle n’a rien dévoilé de sa vie quotidienne en dehors de ce qui est d’une banalité sans nom, telle madame tout le monde. Même son métier est resté vague, mais elle a tout de même avoué ne pas être du FBI, ce qui a retiré un poids conséquent de ma poitrine. Lui cacher des informations sur Zach pour le protéger était une chose, mais il y avait bien plus grave et je n’avais pas vraiment envie de m’aventurer sur ce terrain-là. Ma vie était assez compliquée comme cela…

- Oui, le Mad Dog. C’est assez connu dans le coin, donc je connais aussi. J’y suis allée une fois ou deux, mais pas plus et sans jamais toucher aux machines.

Une fois pour aller trouver Lilas alors qu’elle y travaillait, une autre parce que Zach m’avait dit qu’il y allait et que j’étais passée par là en rentrant d’une sortie avec Rica, faisant un arrêt pour voir s’il y était encore. J’avais jeté un œil, rien de plus. Ce genre d’endroit sentant la sueur, le cuir et la testostérone ne me semblait pas vraiment attrayant à l’époque. Ils ne le sont toujours pas maintenant, mais j’ai une raison de m’y rendre, au moins. Alors quand j’entends Selma me demander si je suis toujours partante, je la rassure dans même y réfléchir à deux fois.

- Plus envie ? Bien sûr que si ! Cela faisait un moment que j’envisageais, mais je ne me voyais pas y aller seule et pas plus avec Zach… Ce serait à moi de te demander si tu veux toujours, plutôt. Je ne suis pas… ‘fin ne t’attends pas à grand-chose, je n’ai jamais été très douée pour le sport en général, alors ne rigole pas trop si je finis en larve après dix minutes de course, d’accord ?

je plaisante à moitié, sachant pertinemment que je n’ai aucune appétence pour les efforts physiques et que j’ai toujours plus aimé lire ou écouter de la musique que suer en courant en rond autour d’une piste ou dans un gymnase. Le sport obligatoire dans ma scolarité a toujours été la seule et unique source d’efforts physiques pour lesquels je trainais souvent les pieds, la seule réelle obligation scolaire que je détestais de toute mon âme. AU moins la prise de conscience m’avait poussé à passer outre mon dégoût naturel pour el sport et j’en étais là, habillée et prête à partir avec quelqu’un qui pouvait sans doute me soulever sans trop d’effort en développé couché... Au moins je n’essaierais pas de me comparer à elle, je savais que j’avais d’office perdu si je jouais à ce petit jeu.

- On peut prendre ta voiture ? je n’ai pas très confiance en mes capacités à rentrer à pied une fois la séance terminée. Cela fait des années que je n’ai pas fait d’exercices de ce genre.
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Anonymous
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Jeu 26 Mai - 22:53 (#)



J'évoluais en terrain inconnu. Bien loin des collines blanchies au soleil du désert ou de la touffeur des jungles sud-américaines ; seulement dans un banal appartement de Shreveport, puis un club de boxe de quartier avec la fille adoptive de Zach. Pas de théâtres de combats ici, de commando à former ou de missions à haut risque, mais une chaleur douce et familiale à laquelle rien ne m’avait préparé. Je suis restée un instant sans voix. Bêtement désarmée au milieu de ce salon modeste, qui respirait le confort touchant des petites piaules populaires, avec leurs couleurs usées et leur agréable désordre routinier, au centre duquel on m’avait invité spontanément, voilà quelques mois de cela.

Je me sentais déplacée parfois. Étrangère. Je ne méritais pas de me tenir là, au milieu de cette petite cellule familiale que je connaissais encore si mal.

« Reçu, » ai-je échappé en me massant machinalement le bras. « Je veux dire, ne t’inquiète pas, je ne comptais pas sur une séance intensive. Je voulais plutôt te montrer des exercices, et puis discuter de ce qui te plairait de faire par la suite, si tu veux refaire ça régulièrement, ce genre-là. »

Le choc du retour me revenait en pleine face. Cet instant tétanisant où le conditionnement militaire ne m’était plus d’aucun secours, où je me sentais démunie face à la banalité de la routine d’une vie civile. Arrête d’exagérer, c’est juste une sortie sportive, me suis-je récriminée, mais ça n’a pas aidé. La masse importante de travail au sein de la NRD m’avait jusque-là fournie une excuse confortable pour me dérober à toute vie sociale depuis mon retour, et l’isolement de Haughton avait fait le reste.  

J’étais inadaptée. Maladroite et sûrement ridicule. Ou bien m’étais-je voilée la face tout ce temps, et mes vieux démons étaient encore là, au fond de moi, à attendre leur heure. Complexes à ma droite, timidité à ma gauche, tels étaient leurs noms. On ne se débarrassait jamais vraiment de soi-même.

« Enfin je ne sais pas, on verra bien. » J’ai haussé les épaules. « Oui, aller, prenons la voiture. Comme ça, on pourra aller manger un morceau en ville à midi. »

J’ai resserré machinalement la lanière de mon sac sur mon épaule, avant de vite retraverser le salon à grandes enjambées jusqu’au seuil de l’entrée, où j’ai attendu qu’Anaïs verrouille la porte.

L’action m’allait mieux. L’inertie à l’inverse, avait toujours révélé tous mes défauts, mes failles et mes malaises, qui semblaient remonter à la surface pour apparaitre sur mon visage en larges caractères clignotants. Attention, idiote incapable de se faire des amis. Attention, lesbienne non assumée.
C’était bête, je le savais bien. J’avais dépassé les trente ans maintenant, depuis quelques années, et cependant ces fardeaux-là me pendaient encore aux chevilles. Je menais ainsi un combat contre moi-même ; redresse-toi, assume-toi, aie confiance en toi. Regarde derrière toi, regarde tout ce que tu as accompli. Tu le mérites. Zach te l’a assez enfoncé dans le crâne, et Ed continue aujourd’hui.

Je me répétais ainsi leurs paroles, mais dans ma tête, ma voix sonnait creuse et lointaine, comme un filet de vent passant sous l’interstice d’un battant de fenêtre. Et d’ailleurs, que méritais-je au juste ? Je n’avais aucune réponse à ça. J’avais réfléchi à cette question durant bien des soirées solitaires, sur ma terrasse vide de Haughton, lorsque la lumière se faisait crépusculaire, et le ciel vide de nuages. Entre ces murs silencieux, cette litanie censée me donner confiance en moi, était lentement avalée par mes obligations professionnelles, ma liste interminable de choses à faire, et mes propres failles.

Alors, tout se terminait invariablement de la même manière. Plus tard. Les espaces vides devenaient ainsi des regards scrutateurs, qui m’irradiaient la peau comme des brûlures. Triste.

« Parée ? » ai-je lancé à Anaïs, plus pour meubler mon silence maladroit que pour obtenir une réelle réponse.

Nous avons descendu les escaliers vides et luisants de l’immeuble. L’odeur de nettoyants industriels était devenue plus forte maintenant que le soleil s’infiltrait au travers des vitres du hall. J’ai tenu les battants à Anaïs, et nous sommes sortis sur le parking désert, moi un peu hagarde, à chercher une discussion qui ne venait pas. Dehors, le vent a charrié les relents de fritures et de vieux café, qui retombaient en cascade des fenêtres anonymes, laissées béantes depuis les étages supérieurs.
J’ai désigné de l’index ma Jeep assoupie sous l’arbre moribond, aux branches tartinées des couleurs moroses de la saison. Feuilles mortes et écorce noircies par les fumées de la récession.

« C’est celle-ci. Tu peux balancer ton sac sur la banquette arrière. »

Sacré conversation, elle doit se dire que tu es chiante à mourir, me suis-je dit, et j’ai aussitôt cherché un moyen d’y ajouter une touche d’humour. Rien ne m’est venu à l’esprit pourtant.

Nous avons alors traversé la surface bétonnée, moi cherchant toujours à meubler le silence, tandis que ma main cherchait à extirper de ma poche la clé de contact. J’ai trouvé le bouton d’ouverture, mais pas la conversation, et la Jeep s’est déverrouillée avec un claquement sec. Je me suis installée du côté conducteur, en lançant mon sac de sport entre les sièges, avant de mettre le contact.
Des senteurs boisées s’attardaient encore à l’intérieur de l’habitacle. Fleurs séchées et aiguilles de pins. Les cadeaux dominicaux de Ed, sous la forme d’une pochette faite à la main. Un peu désuet.

« Au fait, » ai-je commencé, tout en faisant sortir la voiture du parking. « Comment va Zach ? Et toi ? Tes études se passent bien ? »

Je me suis concentrée sur la route. Encore une excuse. Avoir l’air absorbée m’aidait à dissimuler ce désespérant manque de conversation qui me caractérisait et qui, j’en étais intimement persuadée, était aussi évident que pathétique. J’ai fixé le paysage au-delà du pare-brise. Les rues de Mansfield s’ouvraient devant nous, un défilé d’immeubles et de commerces identiques, qui ne proposaient rien de mieux que d’infimes variations de l’ennui. Cette sortie était peut-être une mauvaise idée.

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En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Jeu 2 Juin - 22:36 (#)




Le plan est fait et je suis plus que partante pour l’idée que Selma propose. Un essai, voir où tut cela nous mène pour d’éventuelles autres sorties du genre. Tout ce que je voulais, en somme. Quelque chose de simple pour me lancer et comprendre de quoi j’ai besoin. Son accord énoncé concernant l’aller-retour en voiture, je m’empare des clés et trottine à sa suite alors qu’elle sort de l’appartement, verrouillant mon chez-moi en faisant un dernier aurevoir aux deux boules de poils qui sont déjà retournées se coucher. Retenant un rire qui aurait l’air ridicule à ce moment précis je suis Selma jusqu’au dehors, remerciant silencieusement el temps de ne pas encore nous offrir la chaleur trop étouffante que l’on connaît parfois dès les premiers mois de l’année. Une vieille odeur de friture me fait froncer le nez une fois sur le parking et je cherche comme Selma la voiture sensée nous emmener au ma Dog, lieu où je ne pensais plus remettre les pieds, et certainement pas dans de telles conditions.

Face à la voiture de Selma, je ne peux m’empêcher de m’arrêter et de hausser un sourcil. Peut-être que c’est juste une impression, mais le côté militaire de son véhicule me fait un drôle d’effet. Bien sûr, je sais qu’elle a fait l’armée, mais c’est la première fois que ça ressort autant autrement que par des expressions qu’elle emploie parfois et qui me font penser à ces films de guerre que Rica m’a fait regarder ou via les histoires qu’elle et Zach ont échangé, oubliant ma présence silencieuse, mais attentive, curieuse de connaître les récits de leurs passés respectifs. Je la suis finalement et fait comme elle dit, posant mon sac sur la banquette arrière après avoir grimpé – presque littéralement – dans la voiture qui est pourtant plutôt confortable et qui sent une odeur me rappelant les méditations en forêt avec Daphné. Rien d’entêtant, juste une odeur presque distante mais néanmoins présente.

- C’est… une chouette voiture… Spacieuse en tout cas.

Enorme serait plus approprié, mais je me garde bien de le dire. Le genre de trucs qui, si je passe un jour le permis, resteront bien sagement chez le concessionnaire, pour ma part. Comment elle arrive à gérer un engin pareil ? je sais bien qu’ici on aime les grosses voitures, mais quand même… je me contente de l’observer manœuvrer sa voiture avec l’assurance et la manière d’une personne sachant parfaitement bien comment le faire – ce qui m’échappe complètement – et souris à sa question, toujours heureuse de papoter avec elle. Depuis qu’elle est apparue, Zach a semblé reprendre une sorte de second souffle, comme si tous les malheurs qui semblaient nous suivre avaient fait une pause et qu’on pouvait tous souffler un peu et reprendre une vie plus calme et normale. Lui et Sumire sont plus proches que jamais et les moments passés avec Selma garantissent de le voir sourire au moins jusqu’au lendemain.  

- Mieux. Il va bien mieux. Passer du temps avec toi ça l’aide beaucoup, je pense. Il commence à faire des Dad’s joke… ça m’inquiète ça, par contre… Essaie de lui en parler, j’ai peur qu’il sombre dans un humour vraiment malaisant.

Je ne peux m’empêcher de sourire en le revoyant fier de lui face à mon regard atterré et au fou rire difficilement contrôlé de Sumire qui s’efforçait de ne pas se moquer de lui alors que je roulais des yeux avec assez de force pour les sortir de leurs orbites. S’il se met à faire des blagues comme Serguey, je sens que certains repas vont devenir longs, mais longs… Je les adore, mais parfois ils me désespèrent.

- Hésite pas à passer quand tu as le temps, il est toujours ravi de te voir arriver. Sinon, ls études ça va. J’ai eu de bons résultats aux derniers examens et j’ai un ou deux projets en cours en plus pour obtenir des points supplémentaires pour les derniers de l’année. Je ne pense pas être majeure de promo, le premier est une brute, mais rester dans le top trois me paraît faisable.

Si je continue à travailler d’arrache-pied pendant le reste de l’année, cela va de soi. Certains pensent que je passe trop de temps le nez plongé dans les bouquins, les notes et les examens blancs à m’entrainer, apprendre et tester mes connaissances, mais je ne veux pas gâcher la chance que j’ai de pouvoir aller à la LSU alors que j’aurais très bien pu ne jamais y entrer et aller de job merdiques en job merdiques juste pour pouvoir avoir de quoi manger sur la table. Si eux se satisfont de ce qu’ils ont, tant mieux pour eux, mais je ne vais pas faire la même chose. J’abuse parfois et Zach en se gêne pas pour me faire comprendre que je dois aussi faire autre chose. Ce qui nous amène à cette sortie un peu étonnante, mais bienvenue dans mon quotidien.

- Dans l’ensemble, tout roule et ça fait du bien. Et toi alors ? Le travail ? Tu fais quoi à la NRD exactement ? Je ne sais pas si t’as le droit d’en parler… mais ça se passe bien ?

Elle n’en parle pas vraiment, il faut l’avouer. La plupart des choses que j’entends sont vagues ou non simplement aucun rapport avec son travail et plus avec le passé. Même sa vie quotidienne est un mystère. Je me demande ce qu’elle fait quand elle n’est pas au travail, car je n’ai aucune idée de ce qui rythme ses journées. Peut-être était-elle sérieuse concernant les entraînements dont elle a parlé plus tôt en essayant de me faire marcher et qu’elle passe beaucoup de temps à faire des exercices et à crapahuter je ne sais où. Je ne sais pas à quoi m’attendre, honnêtement. Cette sortie, c’est aussi une occasion en or pour en savoir un peu plus sur elle
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Dim 12 Juin - 18:05 (#)



La morosité de Mansfield tâchait l’humeur.
Des carrés d’immeubles aussi similaires les uns que les autres, dont aucun ne méritait vraiment une description. La lumière délavée d’un soleil de Mars timide se déversait sur les routes sales, et sur les carreaux des habitations pauvres, qui lançaient alors leurs reflets blafards sur le bitume moite. Nous avons croisé le chemin de quelques sacs en plastiques errants. Un junkie nous a fait de grands signes depuis un carrefour, en brandissant une pancarte "Jésus m’a tué". Un pick-up bardé de stickers de Trump nous a devancé dans un énorme nuage de pollution et un vacarme de mécanique à l’agonie.
Good morning america. Je me suis concentrée sur la route, dans ce silence vacillant, alors lentement bercée par le ronronnement bas du moteur et notre timide début de conversation. J’ai essayé de ne pas laisser mes incertitudes et mon insécurité gâcher notre escapade qui était, après tout, destinée à nous relaxer. J’ai hoché la tête en scrutant l’avenue, à la recherche du Mag Dog.

« C’est ce que je me suis dit aussi, » ai-je doucement répondu. « Quand je l’ai revu l’année dernière, il était tellement différent de mes souvenirs. Il m’a semblé si… usé. Je ne sais pas trop comment dire autrement. J’étais contente de le revoir mais, oui, j’ai tout de suite ressenti qu’il s’était passé pas mal de choses terribles. »

J’ai fixé l’horizon maussade sans y découvrir de réponse satisfaisante. Un vol d’oiseaux a traversé le carré de ciel moribond visible entre les toits sales, et je les ai suivis des yeux, pensive, en arrêtant la voiture à un carrefour. Le souvenir des aveux de Zach a réveillé une saveur métallique sur ma langue, comme un goût de tristesse et de colère contenue. Une fois encore, j’ai verrouillé ces émotions-là.
J’ai haussé les épaules, en retrouvant peu à peu un sourire hésitant. De la même manière que ces rues exhalaient une humeur déprimante, Anaïs possédait une gaieté désarmante.

J’ai commencé à me laisser prendre au jeu. « L’essentiel, c’est qu’il aille mieux, oui, et peu importe comment. Même si ça passe par l’humour douteux, c’est peut-être mieux, non ? Par contre, je ne sais pas si je peux faire grand-chose sur les Dad’s joke, mais j’essayerai d’y penser la prochaine fois. »

L’idée m’a fait sourire de plus belle. La voix d’Anaïs a envahi de nouveau l’habitacle. Au fond de moi, j’ai eu la certitude que Zach était sur la bonne voie ; c’était bon de le savoir capable à nouveau d’un peu d’humour, aussi douteux soit-il. Bon et réconfortant. Sans doute devait-il retenir ses blagues les plus grasses par égard pour Anaïs, mais ça, j’ai préféré ne rien en dire. Des souvenirs de nos nuits avec notre unité m’ont traversé l’esprit, et se sont imposées sur mon champ de vision, superposées par-dessus la fadeur du paysage comme un filtre de couleurs vives et chaudes.
Des camarades d’alors, lançant des vannes cochonnes les unes après les autres. J’ai essayé de visualiser Anaïs assistant aux pires traits comiques de son père adoptif. J’ai refoulé un éclat de rire.

Mon humeur commençait à s’améliorer. Un point en moins pour Mansfield.

« C’est super alors. Je suis sûr que tu vas réussir. Bon, je ne saurais pas t’aider pour tes études, mais si jamais tu as besoin d’occasion comme celles-ci pour te vider la tête, n’hésite pas. Voire carrément te déposer à l’université, je pars tôt le matin et ça doit être sur ma route. »

J’ai jeté un coup d’œil rapide vers elle. Une hésitation a fait flancher ma voix. « Enfin, je ne voudrais pas être collante. Je veux dire, si tu n’as pas envie de trainer avec l’amie de ton père, je comprendrai que tu veuilles être avec des amies. »

J’ai fait tourner la Jeep au coin d’une rue, où un Walmart flambant neuf jetait son ombre sur un arrêt de bus délabré, en face d’une étendue bétonnée où dormaient quelques voitures mal entretenues. Devant nous, l’avenue s’étendait alors jusqu’à l’horizon, avec ses quelques rares boutiques modestes encore ouvertes, au milieu de poubelles pleines à ras-bord de cannettes, et des mendiants étalés sur les trottoirs. Ici, les stigmates de la récession et des ouragans suppuraient à ciel ouvert, et tout était tâché de cette misère jaunâtre, tel le vieux plâtre érodé d’un immeuble miteux.
Au loin, coincée entre deux bâtiments de bureaux identiques aux fenêtres voilées de stores fatigués, j’ai repéré la silhouette du Mag Dog, avec son enseigne tâchée par les averses polluées venant du centre de Shreveport. Je me suis rattachée à la conversation à la volée en cherchant une place.

« Ça peut aller, » ai-je commencé à dire, quelque peu prise au dépourvu sur la manière d’aborder le sujet de la NRD avec elle.

J’ai arrêté la Jeep au dernier carrefour. Un mini-bus crachotant a stoppé à notre droite, masquant en bonne partie le feu de circulation au son de basses qui battaient à l’intérieur. J’ai pincé les lèvres, et fini par cracher le morceau ; Zach m’avait fait confiance, à mon tour de dévoiler quelque chose.

« Eh bien, pour faire simple, on fait la police pour les affaires où le surnaturel est impliqué. Souvent ça se passe bien, parfois non. J’aime penser que ma priorité c’est d’abord d’aider les personnes qui en ont besoin, et d’éviter les conflits avant qu’ils n’éclatent. Mais ce n’est pas toujours le cas. »

J’ai lâché un soupir. « Comme tout boulot en fait, des hauts et des bas. Je dois dire qu’on est pas mal occupés ces dernières années, t’imagines bien pourquoi. Mais on fait avec. »

Ma voix s’est éteinte sur une note triste, que je n’avais pas prévu. Tout m’est retombé dessus durant une fraction de seconde. Les journées de boulot éreintantes. Les CESS en détresse que je n’avais pas pu aider. Les conflits. Les extrémistes. La hiérarchie et ces décisions parfois stupides. Hypocrites. J’ai ressenti le besoin pressent de prendre des vacances et de me sentir moins seule au monde.

Puis, le mini-bus a redémarré. J’ai ravalé toute cette amertume au fond de moi, comme d’habitude, dans ce silence qui rythmait ma vie depuis si longtemps. Je savais encaisser seule.

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Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
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Dim 19 Juin - 12:59 (#)




Mansfield de jour a cette ambiance qui me fait toujours me demander comment j’arrive à encore vivre là après tout ce temps dans cette ville. Parce que je ne veux pas laisser Zach, parce que je n’y passe pas tant de temps que ça au final, parce que j’y suis habituée ou parce que je n’ai pas vraiment les moyens d’en partir, tout l’argent que je reçois partant pour rembourser l’emprunt pour les études qui coûtent honteusement un bras. Croiser un illuminé ou des types suivant avec un peu trop de zèle le second amendement et se croyant ainsi tout permis n’est pas si rare que ça et entendre le bruit d’un coup de feu dans le lointain a presque cessé de m’empêcher de dormir. On s’habitue à tout et c’est parfois terrifiant d’en prendre conscience, de voir à quel point on s’adapte facilement pour vivre. Ou simplement survivre.

Zach m’a dit qu’il aimerait qu’on vive ailleurs et j’ai bien compris que le « on » me désignait moi, mais j’ai rapidement mis fin à cette conversation. Je n’irai nulle part en le laissant derrière tant que lui et Sumire ne s’installeraient pas ensemble pour de bon. Peut-être que c’est ridicule, que moi, du haut de mes presque dix-neuf ans, j’essaie de prendre soin de lui alors qu’il est cent fois plus à même de se débrouiller que je ne le serai jamais, mais je refuse de le revoir dans l’état qu’il a été pendant trop longtemps et entendre Selma affirmer qu’il semble aller mieux, cela me rassure, me confirme dans ma décision. Lui et sa mémoire défaillante, je n’étais pas prête à les abandonner. Pour lui, mais aussi pour moi. Je me sentais en sécurité dans cet appartement parce qu’il était là. Il y avait peu d’endroits en ville où je pouvais me sentir parfaitement en sécurité, et il était tout en haut de la liste. Certains pourraient arguer que la sécurité pouvait être relative auprès d’un ours garou qui admettait lui-même son instabilité à se contrôler, mais je m’en fichais. Depuis des années on vivait ainsi et je me sentais bien. Je n’avais pas besoin d’autre chose.

Selma était pour beaucoup dans le changement d’humeur de Zach ces derniers mois. Une part de moi dont je ne soupçonnais pas l’existence, s’était sentie un peu blessée de voir qu’elle arrivait à le faire sourire là où il semblait seulement ressasser de mauvaises choses quand il me voyait. Son regard avait fini par changer et j’avais fini par arrêter d’être idiote et de me croire au centre de tout ce qui le concernait. Il retrouvait une amie de longue date, un équilibre et une stabilité qu’il recherchait depuis si longtemps et je n’allais certainement pas faire la rabat-joie pour une question d’égo ridicule qui n’avait pas lieu d’être. Le voir sourire et plaisanter suffisait à me convaincre que les choses s’arrangeaient pour nous tous et que mon rôle était de ne pas lui causer de tort ou de soucis autan que d’apporter un peu de bonheur dans sa vie. Même si cela passait par devoir subir ses blagues et celles de Serguey quand il était là. M’entendre rire à certaines d’entre elles me mortifiait à chaque fois et cela semblait les enhardir un peu plus. Je craignais un peu mes vingt-et-un ans et ce qui me tomberait dessus à ce moment-là…

- C’est peut-être mieux oui… mais t’es pas la cible de ses blagues… Enfin, je suis contente de le voir sourire et je survivrai.

Me concentrant davantage sur Selma, je remarque le sourire qu’i a enfin pris place sur son visage et qui étire le mien alors qu’on passe un carrefour où les voitures semblent essayer de faire le concours de qui aura la plus grosse. Sa proposition me surprend et je prends sérieusement le temps d’y réfléchir. Prendre le bus est devenue une habitude comme une autre depuis que je vais à l’université, n'ayant pas les moyens d’avoir un véhicule pour mon usage personnel. Ce qui fait que je me fais conduire par un peu tout le monde en possédant un. Serguey pour aller et venir au camp, Heidi pour nos sorties, Rica pour d’autres sorties ou aller chez elle. J’ai l’impression d’être un espèce de bagage qu’ils ont décidé de balader. Je préfère ça que le bus, bien sûr, mais ça me gêne toujours et j’ai l’impression de profiter un peu trop. Je finis par donner la réponse que je donne dès qu’on me le propose.

- Si tu veux oui, ça me changera du bus, c’est rarement agréable…

Son hésitation me surprend un peu, mais je hausse négligemment les épaules. Ce n’est pas si important, même si j’ai l’impression d’être une espèce d’asociale en disant cela.

- Je n’ai pas… ‘fin je n’ai pas vraiment d’amis à la LSU, donc si vraiment ça ne t’ennuie pas, ça serait sympa de temps en temps. Mais seulement si c’est sur ta route.

Après la trahison de ceux que je considérais comme mes amis à LaFayette, je n’ai pas vraiment tenté de sociabiliser avec mes camarades, que ce soit pendant l’année de lycée passé à Shreveport ou maintenant à la LSU. Devenir du jour au lendemain une paria parmi ceux que je pensais être des amis m’a fait comprendre que je devais me concentrer sur ceux qui en valient la peine. Ceux qui savaient qui j’étais, ce que j’étais et ne cherchais pas à me faire rentrer dans un moule pour finalement m’éjecter sans aucun scrupule quand je me révélais différente de leurs attentes. J’avais des amis de mon âge au camp, des éveillés et des humains qui savaient tous qui j’étais et ça me suffisait. La LSU, c’était pour les études et rien d’autre et j’étais devenue la solitaire de la promo, le nez plongé dans les livres et sans plus d’interactions que le strict nécessaire. Cela me convenait très bien. Mais entendre Selma hésiter m’étonné, parce que je n’avais jamais chercher à la repousse, au contraire. Je ne pus m’empêcher de sourire.

- Tu sais… C’est pas parce que tu es l’amie de Zach qu’on peut pas l’être aussi. Je ne me force pas à accepter quoi que ce soit pour lui faire plaisir ou quoi. C’est pas mon genre de faire semblant pour faire plaisir.

Zach avait d’autres amis que je considérais comme tel également. Serguey, pour tout ce que je pouvais râler en l’entendant plaisanter, c’était quelqu’un que j’aimais beaucoup et qui semblait avoir à cœur de m’aider à sa manière, comme un genre d’oncle à l’humour douteux. Je n’avais aucune raison de ne pas apprécier Selma simplement parce qu’elle était l’amie de Zach.

- Pour être franche, j’ai des millions de trucs à faire, tout le temps, avec mes cours et tout ce qui va avec, mon apprentissage, passer du temps avec les gens qui comptent pour moi et si je n’avais pas envie d’être là, je ne serai pas venue, parce que j’ai pas le temps. Alors si t’as envie, n’hésite pas à m’envoyer un message, si je peux venir, je le ferai. Sauf si tu comptes m’envoyer dans tes entrainements des enfers. Ça c’est non.

Je lui adresse un sourire avant de remarquer l’enseigne du Mad Dog non loin. Je grimace en entendant soudainement les basses généreusement offertes par un minibus sur notre gauche, mais capte tout de même ce que Selma dévoile de son travail. Cela ressemble à l’idée que je m’en faisais. Plus ou moins. Je pensais la NRD plus dans la répression, mais ma vision de la justice américaine a tellement pris un coup ces dernière années que mon jugement a dû quelque peu noircir le tableau. Et je comprends très bien où elle veut en venir. « Depuis quelques années ». Depuis Halloween, en somme. J’inspire et observe un instant les rues alentour où les passants vaquent à leurs occupations, inconscient de ce qu’il s’est passé. Ni que l’une de ceux ayant participé se trouve dans une voiture avec un agent qui aimerait sans doute lui mettre la main dessus si la vérité venait à sortir. Ironique, quand on y pense.

- Je vois…

Une fois de plus, la culpabilité et l’envie de tout lui raconter me monte à la gorge, mais la lâcheté reprend le dessus et je reste muette, trop effrayée par ce que cela impliquerait. Pour elle, pour Zach, pour tous ceux ayant vécu l’enfer. Pour moi et ma survie, avant tout. Egoïstement, je garde le silence sur tout ça. Je peux me donner toutes les excuses du monde, dire que j’étais manipulée, inconsciente du danger, trop effrayée ou que je manquais de connaissance. Au final, j’ai agi et c‘est tout ce qui compte.

- Je suis sûre que tu fais le maximum et c’est le plus important.

Je me sens à la fois hypocrite et ridicule à dire ça et je la laisse trouver une place pour se garer tandis que j’observe le dehors avant de finalement ajouter, sans trop savoir où cela va mener.

- Si tu as besoin, je serai heureuse de t’aider, tu sais. J’ai beaucoup de respect pour ceux qui essaient  d’aider les autres et c’est aussi ce que je veux faire, d’une manière différente. Et je ne parle pas forcément pour ton travail, parce que je vois mal comment je pourrais être utile, mais.. enfin n’hésite pas, si jamais tu as besoin.
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Sam 25 Juin - 23:29 (#)



La rumeur sourde des basses a décru lentement au loin. Des volutes d’essence se dissolvant dans l’air matinal et l’éclat du soleil sur sa tôle, il s’effaçait contre ce ciel à la texture de vieux bronze.

Derrière la vitre du mini-bus, j’ai aperçu une jeune femme chahuter à l’arrière, tandis qu’il remontait l’avenue à toute allure. Les reflets du soleil ont conféré à sa silhouette souple un aspect sombre et torsadée. L’engin a emporté son ambiance festive et bruyante, dissonante au milieu de ces bâtiments silencieux, décrépis et franchement déprimants. J’ai accéléré à mon tour. Nous avons laissé derrière nous ce dernier carrefour, où les feux de circulation rouillés terminaient de se courber sous la chaleur de la Louisiane. Un silence particulier a enserré le quartier. Une étreinte étouffante, parasitées ici et là par les rumeurs des postes de télévision, les toux sifflantes et les crachotements des moteurs.

J’ai descendu doucement la vitre à côté de moi. Le filet d’air sentait la chaleur montante, l’humidité sale des caniveaux et le café matinal bon marché. Rien d’étonnant. Ça sentait Mansfield.

« OK. Ça ne me dérange pas du tout non, » lui ai-je répondu, un mince sourire aux lèvres.

J’ai orienté la Jeep à droite, sous des arbres nus enfermés dans des cercles de béton, qui marquaient l’entrée du parking du Mad Dog. L’ombre carré du club de boxe nous a enveloppé. Quelques voitures fixaient déjà les vitres teintées du bâtiment, dont la peinture blanche avait été tâché par les années de soleil du Sud, les crachats noirâtres de la pollution et la pluie industrielle. J’ai orienté la Jeep vers une place à l’écart des autres, juste à côté d’une armoire électrique, contre le trottoir usé.
Le moteur s’est tu. La rumeur de la ville s’est engouffrée par la vitre ouverte, que j’ai vite fermé avant de fourrer les clés dans la poche de mon jogging, et de me tourner vers Anaïs.

« Ça me fera plaisir. Honnêtement, hors du boulot, je ne fréquente pas grand monde, mis à part Zach maintenant et quelques fois mon ancien mentor de la NRD les dimanches. »

J’ai haussé les épaules. Tout s’est arrêté. Comme si le bruit des alentours s’était transformé en boue dans mes oreilles. J’ai haussé les épaules, encore. Les mots se coinçaient et se heurtaient au fond de ma gorge, comme à chaque fois que je m’apprêtai à évoquer ma vie, moi et mes cicatrices.

J’ai fixé le vide extérieur. Inconsciemment, mes mains se sont resserrées sur le volant. Arrête ça, arrête d'y penser. Ça n'a pas aidé. « Je ne sais pas si je fais le maximum justement, » ai-je murmuré sans même m’en rendre compte.

Je me suis reprise. « C’est… un boulot épuisant, moralement. Ça me fait du bien ces sorties, avoir la tête ailleurs, tu vois. Débrancher. Rien que ça me suffit, et je t’en remercie, ça m’aide déjà beaucoup. »

J’ai essayé de sourire en fixant le mur délavé du Mad Dog, au-delà du capot refroidissant de la Jeep. Un rictus malhabile. Pathétique, sûrement. Je l’ai masqué de mon mieux, derrière mes cheveux et en me penchant vers la banquette arrière pour rattraper mon sac de sport coincé entre les sièges.

« On y va ? » lui ai-je fait. « Je te promets, ce ne sera pas un entrainement des enfers. Je te montre les machines et puis on fera ce qu’on peut avant d’aller manger à midi. »

Je suis sorti. Un vent sifflant m’a accueilli ; il avait une odeur aigre. J’ai claqué la portière de la voiture derrière moi, attendu que Anaïs en sorte, et verrouillé la Jeep noire ensuite. Les lieux étaient calmes. Quelques éclats de voix filtraient au travers des baies vitrées opaques, depuis l’intérieur des salles du Mad Dog ; des invectives masculines, le crissement des semelles sur le plancher, et les couinements ténus des machines. J’ai contourné la voiture et remonté l’allée en rejoignant Anaïs.
Je me suis forcée à laisser derrière moi mon boulot, mes emmerdes, et ces fumerolles de mal-être qui s’enroulaient trop souvent autour de mon cou.

« Les gars sont sympa, le peu que j’ai croisé, » ai-je commencé, en orientant la discussion loin de ma vie personnelle. « Quelques types lourds peut-être, mais dans l’ensemble, je n’ai pas eu à me plaindre le peu de fois que je suis venue. »

Je me suis arrêtée devant l’entrée, la main sur les doubles battants bardés d’affiches et de traces de mains, qui miroitaient sous le soleil naissant. Mon sac ballottait sur mon épaule droite quand je me suis tournée vers Anaïs, en lui ouvrant les portes. Un sourire timide est revenu sur mes lèvres.

« Et puis… Je t’apprendrai à les mettre au sol, si quelqu’un t’ennuie. »

Une bouffée d’air chaud nous a assailli depuis l’intérieur. Une onde de sueur, de cuir et de plastique chauffé par les corps bouillants. L’énorme ring de boxe trônait au milieu de la salle, écrasant par son volume les quelques machines dispersées çà et là, avec leurs armoires remplies de poids de toutes les tailles. Je me suis faufilée à l’intérieur derrière Anaïs, alors que deux combattants s’entrainaient sur le ring, dans ce calme matinal qui avait laissé la salle aux trois quarts vide.

« Je te montre les vestiaires, qu’on pose tout ça ? Ceux des femmes sont propres, et puis on peut verrouiller les armoires. »

J’ai commencé à avoir chaud. J’ai retiré ma veste de cuir, dévoilant ainsi mon vieux pull qui affichait le slogan "Twilight was right", et l’ai fourré dans mon sac de sport avec le reste de mes affaires.

« Puis on pourra commencer les séances de 100 pompes que tu m’avais promise, » ai-je ajouté, un sourire taquin revenant s’installer sur mes traits en lui désignant le chemin des vestiaires.

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En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Mar 26 Juil - 1:04 (#)


Les environs du Mad Dog. L’exemple type de ce qu’on peut trouver à Mansfield. Des enseignes plus très récentes qui restent ouvertes tard pour espérer attirer ceux rentrant tardivement chez eux, passant par les rues encombrées et sales tandis que le trafic sans fin emplit l’atmosphère d’autant de bruit que d’odeurs qu’on n’arrive qu’à apprécier derrière la protection des vites nous en protégeant partiellement. Je ne compte plus le nombre de fois où on m’a posé la question. Pourquoi tu restes dans ce quartier ? Personne n’a envie d’y rester, après tout. Il y a bien plus agréable, bien moins dangereux et sain dans d’autres endroits de la ville ou en dehors. Je me contente généralement de hausser les épaules et d’ignorer la question, parce que je n’ai pas vraiment de réponse à offrir. C’est pas cher, personne n’est regardant et Zach ne m’a pas posé la question. Peut-être que s’il demandait à ce qu’on bouge, on le ferait, mais je n’ai pas l’envie de le faire par moi-même. C’est confortable, de ne pas vivre seule, même s’il est parfois absent. M’imaginer rentrer dans un appartement vide chaque jouer me donne le cafard. Mansfield donc. On fait avec. On s’habitue.

C’est presque une réponse universelle. On s’habitue à tout. S’adapter ou mourir, comme on dit. J’ai chaque matin la preuve dans el miroir que ce n’est pas aussi simple, mais est-ce que j’ai un autre choix, au final ? C’est pour ça que la perspective de sortir un peu du quotidien est toujours quelque chose qui m’intéresse. On pourrait me rétorquer que faire un apprentissage magique est loin d’être un quotidien normal, et pourtant, j’en suis là, avec Selma, descendant de sa voiture beaucoup trop énorme pour entrer dans le temple de la testostérone et de la sueur alors que j’ai toujours eu horreur de ça depuis toute petite. Je suis persuadée de me demander pourquoi j’ai eu cette idée d’ici une heure, quand j’aurai les poumons en feu et les jambes en guimauve. Ou l’inverse.

- De toute façon si je ne peux plus bouger, cela ruine un peu l’expérience. Je te fais confiance.

Sac en main, sourire aux lèvres et un joli bouquet de souvenirs en tête, je suis Selma vers la porte, apercevant déjà des armoires lever des poids sans doute plus lourds que moi. Je n’ai été au Mad Dog qu’une fois auparavant et cela ne m’a jamais donné envie d’y retourner par moi-même. Y aller avec quelqu’un, c’était la seule façon de m’y faire rentrer et j’ai beau avoir pu voir Zach à l’intérieur, j’étais certaine de ne jamais vouloir y aller avec lui. Il aurait sans doute pu faire des pompes avec moi en train de bouquiner sur son dos. L’idée de faire cette sortie avec Selma, c’était un peu le seul moyen d’en arriver là. Et l’idée semble nous convenir à toute les deux.

- Oh, je suis carrément partante pour ça. Ça rassurerait tout le monde quand je sors. Moi y compris. Et ça serait cool, en plus. Tu me montreras ?

Suivant Selma à l’intérieur, je sens aussitôt, les odeurs de cuir, de sueur et d’autres trucs moins identifiables qui m’agressent un peu les narines au premier orteil passé la porte. Au centre du ring présent presque au beau milieu de la pièce, deux types semblaient s’échauffer doucement tandis que le reste de la salle est, pour la majeure partie, vide. Moi qui m’imaginais voir des salles combles un samedi matin, me voilà presque déçue. Presque, parce que l’idée de faire de l’effort physique dans une salle bondée ne m’enchante guère et la situation me convient parfaitement. Hochant la tête, je suis Selma vers les vestiaires, haussant un sourcil à la vue de son t-shirt qui me tire un souffle amusé ainsi qu’un regard entendu dans sa direction. Elle a souvent des fringues qui crée cet effet-là chez moi. Une espèce de pensée sarcastique qu’elle affiche avec une nonchalance non-feinte. Ou alors elle y croit vraiment et je me suis fourvoyée depuis le début… Peu probable.

- Etonnant que les vestiaires soient propres. Dans mes souvenirs de lycée, c’était toujours dégueulasse…

Une raison de plus de détester y entrer pour faire du sport. On pourrait croire que les filles sont plus soigneuses et moins bordélique que les mecs, mais que dalle. Il y avait souvent des fringues laissées au hasard, des odeurs pas terribles et des poubelles pleines d’accessoires féminins usagés. A croire que toutes les bonnes manières que tout le monde affichait se faisaient aspirer une fois la porte des vestiaires passée, comme une sorte d’antre fabuleuse consacré au foutoir d’adolescentes trop habituées à être de parfaites futures femmes au foyer dans le pur style puritain. Rien que d’y repenser me file un frisson de dégout, mais seul un sourire répond à la taquinerie de Selma.

- Si j’arrive à en faire dix, ce sera déjà un miracle. J’ai pas fait de sport depuis des années et encore moins des pompes. Tu me devras un verre si j’y arrive. Sinon c’est moi qui offre.

Je ne suis pas certaine qu’elle ait choisie la partenaire idéale, je ne suis certainement pas à son niveau et je n’ai pas spécialement envie qu’elle s’ennuie. Ou qu’elle se paie ma tête en me voyant galérer avec le corps trempé de sueur. Finalement, en entrant dans les vestiaires, je constate qu’ils sont propres. Pas immaculés, mais propres et c’est déjà un bon point de départ. Une fois les affaires rangées et la veste retirée, je me tourne vers Selma alors qu’on retourne dans la salle.

- Et… on commence par quoi ? Echauffement j’imagine ? C’est toi l’experte, donc je m’en remets à ton jugement.

Je suis à la fois excitée et un peu nerveuse. Je me demande dans quel état je vais ressortir de cette séance…
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Mer 3 Aoû - 13:00 (#)



Les vestiaires sentaient fort le désodorisant. Citron industriel. Classique.
J’ai poussé le lourd battant et laissé entrer Anaïs. Le sol a crissé sous les semelles de mes baskets un peu défraichies, tandis que la rumeur de la salle a disparu une fois la porte close. J’ai déposé mon sac sur l’un des bancs accolés aux rangées de casiers d’un bleu métallique, cabossés pour certains, lisses et neufs pour d’autres. Tous brillaient de propreté. Les froufrous de nos habits ont résonné dans cet espace vide. J’ai ouvert l’un des casiers, le numéro six, en récupérant la clé ; l’intérieur était décoré des inévitables étiquettes de sport à demi déchirées pour la plupart, avec leurs muscles en sueur. J’ai pris la bouteille d’eau compacte dans mon sac et me suis assise sur le banc, en attendant Anaïs.

La routine habituelle. Je commençais à retrouver une réelle bonne humeur. Je me suis tournée vers la jeune femme en souriant.

« Ce n’est pas étonnant ici. Celle qui s’en occupe est une boxeuse qui a même fait de la compétition au niveau national. Elle est très sympa, mais tu n’as pas envie de lui chercher des problèmes. »

Et elle a un joli sourire. J’ai ravalé cette précision. Non seulement ça me semblait puéril, mais surtout parce que celle-ci était fiancée. J’ai poursuivi d’un ton égal, sans y penser davantage.

« Elle s’appelle Aya, si jamais tu as un soucis, tu peux lui demander. Elle est un peu intimidante, mais tu ne risques rien avec elle. C’est toujours bien de savoir à qui te fier dans le coin. »

Et elle a un joli sourire. Bref. J’ai retiré sans empressement mon pull Twilight, Deva en raffolerait de celui-ci, et me suis mise en tenue de sport, ce confortable débardeur kaki qui m’arrivait au-dessus des abdominaux. J’ai verrouillé le casier et, bouteille à la main, clé dans ma poche, j’ai accompagné Anaïs au cœur du sujet, dans l’antre de la sueur et du muscle. Des larmes, aussi, même si celles-ci n’étaient pas prévu au programme. Du sang aussi, encore moins à l’ordre du jour pour nous.
J’ai ouvert la porte pour Anaïs une fois encore. Le citron industriel s’est effacé. Des senteurs de sueur fraiche, de cuir et de plastique nous ont assaillis, avec des exclamations masculines en direction du ring. J’ai inspiré lentement. La bonne humeur s’installait chez moi. L’ombre du boulot, mes doutes, mes erreurs, se sont peu à peu estompées au profit d’une sérénité éphémère, déconnectée par les repères familiers du dépassement physique. Je me suis sentie bien, au moins pour cette matinée.

« Oui, je voulais te proposer de t’échauffer avec le vélo, » lui ai-je expliqué en montrant ledit vélo de fitness, entreposé dans un coin de la salle. « C’est doux, mais excellent pour s’échauffer. Disons, cinq ou dix minutes, selon comment tu te sens. »

J’ai haussé machinalement les épaules. Je tenais à débuter doucement. Je n’avais aucune envie de lui laisser des mauvais souvenirs, encore moins des douleurs musculaires insupportables qui la feraient fuir. Zach s’y attendait, sans doute. Je l’imaginais aisément attendre à l’appartement, préparant une ou deux vannes gentiment moqueuses devant la mine déconfite et épuisée d’Anaïs. J’ai esquissé un sourire spontané. J’ai réfléchi un instant à la meilleure manière d’aborder cette séance pour elle.

« Tu sais, l’essentiel ce n’est pas la masse musculaire… » ai-je commencé avant d’être interrompu par une voix de femme.

« Salut Selma ! »

Une femme en veste de survêtement, t-shirt et short, nous a croisé en levant la main. Des cheveux noirs, un teint hâlé. Physionomie arabe. Aya me rappelait une autre, que j’avais connu pendant mon déploiement en Afghanistan ; les mêmes yeux sombres, la même arabesque de ses lèvres. Le sourire était différent. Celui d’Aya était éclatant, dépourvu de la moindre mélancolie ou de colère. Mon souvenir était le strict opposé, si bien que la comparaison s’arrêtait là, entre la jeune fille que j’avais connu et celle qui entretenait l’hygiène de cette salle de sport d’une main de fer.

J’ai dû rêvasser un instant. Elle a vraiment un joli sourire. Je me suis empressée de lever la main à son encontre.

« Salut, » ai-je fait rapidement, tandis qu’elle s’éloignait en direction du ring.

Je me suis retournée vers Anaïs. J’avais perdu le fil de la discussion un instant. J’ai réfléchi quelques secondes, en fronçant les sourcils, avant de le retrouver. Ah oui, l’endurance.

« Oui je disais, l’essentiel ce n’est pas de devenir une armoire. Le mieux c’est de se bâtir une bonne endurance, avoir une base solide c’est super important. »

J’ai commencé à l’entrainer dans la direction du vélo. À l’autre bout du Mad Dog, Aya supervisait les entrainements des boxeurs, les mains sur les hanches, ses épaules bien carrés reconnaissables. Je me suis concentrée sur Anaïs, bien résolue à lui donner de bons conseils et une bonne expérience qu’elle aimerait renouveler. Je me suis arrêtée à côté du vélo, en tapotant machinalement la selle.

« Même dans les sélections militaires, tu vois des Schwarzenegger s’effondrer parce qu’ils n’ont pas travaillé l’endurance pour porter longtemps toute leur masse. Enfin je ne t’apprends rien, je pense avec tes études. »

Je me suis arrêtée devant le vélo avec un sourire. « Tu verras, mettre des types au sol c’est aussi le même principe. On n’a pas besoin de gros muscles pour le faire. »

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Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
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Ven 26 Aoû - 18:17 (#)


Si on m’avait dit un jour que j’irai volontairement dans une salle de sport avec une ex-militaire pour réellement me mettre au sport, je n’y aurai pas cru. Et pourtant, me voilà en train d’ouvrir un casier pour y ranger mon sac tandis que Selma me parle de la gérante et des raisons expliquant l’étonnante propreté du lieu. Sortant la bouteille d’eau qu’elle m’a conseillé de prendre, je remarque les restes d’une photo qui a été arraché de l’intérieur du casier. Sans doute que certains ici ont leurs habitudes et ont des casiers réservés, un peu comme les casiers dans les couloirs du lycée. Je ferme les yeux en y repensant, chassant l’image de mon esprit avant qu’elle ne s’y ancre et ferme le casier, glissant la clé dans la poche de mon survêtement pour suivre Selma qui m’attends déjà. Mes yeux tombent rapidement sur son ventre nu et les abdos parfaitement visibles et je me dis que jamais je n’irai jusque-là. Cela lui va bien, mais alors je n’ai aucunement envie de pouvoir briser des briques sur mon ventre sans même utiliser mes mains.

- Aya ? D’accord, je n’hésiterais pas.

Je compte davantage sur la présence de Selma pour m’aider, mais elle ira sans doute faire ses propres exercices à un moment ou un autre, donc c’est toujours bon à savoir. Quitter l’odeur citronnée des vestiaires pour celle du cuir et de la sueur de la salle de sport me fait froncer le nez tandis que je jette un œil à nouveau dans la salle en suivant Selma qui se dirige vers les vélos. L’idée de commencer par ça me semble être effectivement la meilleure chose à faire et dix minutes ne me semblent pas être un effort insurmontable.

Depuis que l’on est rentrées dans le Mad Dog, elle semble plus à l’aise et son sourire se fait plus large et facilement, comme si elle se retenait jusque-là. Peut-être suis-je en train d’imaginer des choses, mais la mélancolie qui se dégageait d’elle durant le trajet semble avoir tout bonnement été aspirée ailleurs dès que nous sommes entrées dans les vestiaires. Elle est probablement davantage dans son élément ici qu’à papoter avec moi dans le salon de l’appartement. Et alors qu’elle allait m’expliquer ce qui allait se passer, une femme la salue avec un sourire ressortant sur son visage au teint hâlé encadré de cheveux noirs. Ce qui m’étonne sur le coup ce n’est pas la façon qu’elle a de saluer Selma, ce fut Selma elle-même. Elle semble soudainement avoir l’esprit ailleurs et fixe la jeune femme avec un air un peu perdu, comme si son esprit avait dérivé ailleurs. La jeune femme me fait un signe auquel je réponds et Selma finit enfin par réagir aven rapide « Salut » tout en la suivant brièvement du regard, me faisant hausser un sourcil.

je me garde bien du moindre commentaire alors qu’elle m’explique que l’important ce n’est pas les muscles, mais l’endurance alors qu’elle m’accompagne près du vélo, non sans jeter un regard à la jeune femme, me faisant de nouveau hausser un sourcil avant de grimper sur le vélo après son invitation, écoutant religieusement son explication. Cela fait sens, je dois bien l’avouer et je n’ai jamais eu l’impression d’avoir la moindre parcelle d’endurance, sauf dans des situations extrêmes où j’ai l’impression que je pourrai m’envoler en courant suffisamment vite pour ça. Et à nouveau ce sourire alors qu’elle m’assure que mettre des types balèzes au sol ne requiert pas tant de forces que ça. Je ne peux m’empêcher de sourire à mon tour.

- Je vais te faire confiance. Je me voyais mal développer mes muscles au point d’avoir des bras comme des troncs d’arbres, donc ce n’est pas plus mal.

J’ai assez de gros bras dans mon entourage. Entre Zach et Serguey, c’est un miracle qu’ils ne m’aient pas broyé un os ou deux, sans parler de certains au camp Gitan qui pourraient très bien faire valoir leurs arguments contre eux. En observant Selma de plus près, je me demande si elle tombe dans la catégorie des gros bras, mais rejette rapidement l’idée. Elle est musclée, mais ça n’a rien de similaire avec ce que j’ai pu voir. Sans atteindre son niveau, je me demande si je pourrai arriver à un résultat satisfaisant en n’allant faire du sport qu’une fois par semaine… Je me vois mal faire davantage de toute façon, au moins pour le moment. Peut-être qu’une fois la première année à la LSU passée j’aurais plus de temps.

- J’avoue aimer l’idée de pouvoir apprendre à mettre Zach au sol, ce serait drôle.

Cela me fait sourire. Non seulement l’image me plaît, mais en plus elle rassurerait beaucoup mon entourage. Je n’ai pas vraiment envie de continuer à être la gamine qu’on protège de tout parce que je ne suis pas capable de m’en sortir seule. Alors je commence l’échauffement avec le vélo, essayant de trouer un rythme qui ne va pas annihiler tout mon énergie en quelques minutes. Restons simple.

- La femme qui t’as salué, c’est Aya c’est ça ? Elle a l’air sympa.

Si elle pensait que je n’avais pas remarqué son regard et la façon dont elle semblait rêveuse après l’avoir salué, elle se mettait le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Je tourne la tête vers elle avec un sourire à la fois curieux et narquois. Je n’avais pas vraiment relevé la façon dont elle avait parlé d’elle, mais elle semblait la tenir en estime et tout ça combiné me faisait me dire qu’il y avait peut-être plus que simplement un respect. Je pouvais me tromper, mais j’avais déjà vu ce genre de regard destiné à d’autres personnes et ça ne voulait pas dire cinquante choses différentes.

- Tu peux aller la voir pendant que je m’échauffe si tu veux.

Je ne sais pas du tout si Selma est attirée par les hommes, les femmes ou les deux et je ne suis même pas sûre qu’elle ait envie d’en parler avec moi, mais en y repensant, il y avait une femme décrite dans les mémoires de Zach comme étant dans son équipe et aimant les femmes. Je n’y avais jamais prêté attention jusqu’à maintenant, mais avec le regard qu’elle a eu en direction de la gérante, je commence à avoir plus que des soupçons. Reste que ce n’est pas vraiment mes affaires, mais puisque Selma et moi essayons toutes les deux de connaître l’autre…

- J’ai juste vu comment tu la regardais… Enfin je veux pas te mettre mal à l’aise.
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Dim 4 Sep - 14:21 (#)



La ventilation au-dessus de nous m’a fait frissonner. Elle diffusait cette odeur acidulée, familière, que l’on retrouvait souvent dans ces salles de sport. Une senteur relaxante, à mes yeux. J’y retrouvai les sensations délicieuses effaçant ma réalité fade et mes problèmes, pour une solitude bienvenue. Des vieilles amies. Elles ne m’avaient jamais vraiment quitté. J’ai tiré un tabouret à côté du vélo pour y déposer ma bouteille encore fraiche, tandis qu’Anaïs s’installait maladroitement sur la selle.
Dans le recoin à côté de nous, entre les supports bardés d’haltères, des tapis d’entrainements étaient entreposés à la base des murs. Ce vélo tout comme les machines moins populaires, étaient laissées là, en retrait des endroits les plus fréquentés ; le ring notamment où les coups résonnaient jusqu’à nous avec des bruits sourds. J’ai effacé de mon esprit la rencontre précédente. C’était une habitude. Solitude et oubli, mon cocktail salvateur. Je me suis reconcentrée sur Anaïs avec bonne humeur.

« Alors, » ai-je fait en souriant de plus belle. « Je ne pourrais pas te garantir d’être capable de mettre Zach au sol, mais si ça peut te motiver, pourquoi pas. »

Mon humeur s’adoucissait. J’oubliai mon boulot. J’oubliai sa cohorte d’ennuis, ses tâches toutes plus barbantes les unes que les autres, ses affaires non élucidées et ses coéquipiers insupportables. Je me sentais mieux et un sourire irrésistible était rivé à mes lèvres. J’ai surveillé le début de l’échauffement d’Anaïs sans m’en départir, attentive aux réglages et aux raclements légèrement bruyants de l’engin. Mes soucis s’évaporaient lentement. Au rythme des pédales et des cris des boxeurs, j’ai senti l’effet cathartique du plaisir sportif m’envahir, décrisper mes nerfs et effacer mes idées noires.

« Oui c’est elle. » J’ai vérifié machinalement le tableau de commandes du vélo. « Elle l’est, si tu as un souci, tu peux lui dire sans problème. »

J’ai commencé à réfléchir à la suite de l’entrainement. Les bras non, mais le tapis…, ai-je énuméré en observant la cadence d’Anaïs. Je n’avais plus élaboré de programmes pour les débutantes depuis un bail, une bonne dizaine d’années, et même mes simples routines d’aujourd’hui me paraissaient trop intenses pour elle. J’ai cherché ma bouteille à tâtons sans cesser d’évaluer l’allure de ma comparse, la tête ailleurs, entièrement fixée sur le casse-tête de cette matinée. Le tapis, peut-être oui, la course, pensais-je, concentrée, avant qu’elle ne me lâche soudainement sa bombe à la figure.
Je me suis raidie, la bouteille à la main. Ma bouche s’est asséchée. J’ai fixé Anaïs en cherchant à me persuader que cette première proposition était parfaitement innocente. Que je n’avais pas été aussi facile à lire. Que je n’avais pas été aussi indiscrète devant elle. Je me trompais. J’ai senti une violente chaleur m’irradier les joues à la seconde affirmation d’Anaïs, incapable de prononcer un mot.

Silence. Il s’est étiré de manière interminable et douloureux, alors que je cherchai une parade avec tout l’embarras d’un poisson jeté hors de l’eau. La bouteille a craqué dans ma main. J’ai inventé.

« Je l’ai salué… » Je n’ai pas trouvé la suite. Lamentable. « Tu ne me mets pas mal à l’aise, t’inquiète, tu t’es juste imaginé des choses. »

Je mentais si mal. J’ai haussé les épaules. La bouteille a encore craqué. Arrête de la serrer. J’ai relâché la pression de ma main, mais la chaleur sur mes joues a persisté. Je me suis sentie idiote. Totalement et définitivement idiote. Honteuse, aussi. J’étais revenue subitement, en deux questions, à ce stade d’adolescente mal dans sa peau, tiraillée d’embarras sous le feu du regard d’autrui. Je me suis laissée retomber sur le tabouret, en évitant le regard d’Anaïs, cherchant désespérément une manière de ne pas ressembler à une parfaite imbécile. C’était sans doute peine perdue à ce stade.

Nier était immature. Pire, c’était évident. Je me suis humectée les lèvres nerveusement, sans cesser de tortiller mes doigts contre la bouteille.

« Écoute, je… Je suis désolée, je ne suis pas douée pour parler de ça. » J’ai pris une inspiration. « Elle a déjà quelqu’un en plus. »

J’ai fixé le mur en face. Mon cœur frappait violemment l’intérieur de ma poitrine, à la même cadence que mes pensées qui se fracassaient en tous sens. Moi qui croyais avoir passé ce cap, ai-je songé avec amertume en recommençant à faire craquer cette fichu bouteille. Ça n’a pas aidé. Je m’en suis voulu de cette débâcle mentale. J’ai essayé de maintenir maladroitement la face, en dépit d’une boule de gêne douloureusement coincée en travers de ma gorge. Un soupir. Briser le silence était un progrès.

« Garde ça pour toi s’il te plait, » ai-je finalement lâché, pressée d’effacer cette honte et ma réaction plus qu’idiote.

Les années n’effaçaient jamais entièrement l’ardoise. Je rendais encore des comptes à l’adolescente effacée, cloitrée au fond de moi, que j’avais essayé d’oublier. La bataille avec soi-même avait souvent une saveur de défaite. Mon sourire lui, avait déserté.

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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
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En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Dim 25 Sep - 10:20 (#)


Je commence rapidement à prendre mes marques et à entamer un rythme qui n’ira pas me fatiguer en moins de dix minutes. Je n’ai jamais été du genre sportive, préférant le calme des bibliothèques aux salles de sport et la douce mélodie d’un casque sur les oreilles aux bruits des machines ou des spectateurs. Il ne faut donc pas longtemps pour que je sente une fine sueur se développer sur mon front et je pourrais presque regretter l’idée d’avoir accepté l’invitation de Selma. Ce n’est pas tant l’effort fourni qui me gêne, mais c’est la sensation poisseuse et l’envie immédiate de prendre une douche qui me fait détester les efforts physiques de ce genre. On me dira sans doute que si j’avais fait du sport régulièrement ce serait moins le cas, mais ça n’enlève rien au dégoût que je ressens en me rendant compte que je transpire sous l’effort. Au moins le vélo est quelque chose d’assez agréable. Du moment qu’elle ne me demande pas de faire des pompes tout de suite…

Je m’attendais à beaucoup de choses, mais certainement pas à sa réaction suite à ce que je viens de lui dire. Elle se ferme, essaie de nier, semble mal à l’aise alors que je n’avais aucune réelle arrière-pensée et le sourire qui avait étiré ses lèvres jusque-là n’est plus qu’un lointain souvenir. Je me pince les lèvres, continuant à pédaler en cherchant à rattraper ma bourde. Je n’avais pas pensé que cela la mettrait si mal à l’aise de parler de ça, ni même de simplement prendre conscience que j’avais remarqué la façon dont elle la regarde. Je soupire, ralentis le rythme pour finalement me tourner vers elle en essuyant du pouce un peu de sueur qui coulait sur ma tempe.

- Désolée, je ne pensais pas que ça te gênerait.

Je ne connais pas sa vie, après tout, il a sans doute été difficile pour elle d’assumer sa préférence, à une époque bien moins ouverte d’esprit que ça ne l’est actuellement. Je n’avais jamais eu de souci avec ça, étrangement. Parmi toutes les choses qui m’étaient tombé sur le coin du nez, avoir du mal à assumer mon attirance pour les femmes n’en a jamais été un. Je n’ai pas eu à me cacher et je fichais pas mal de ce que des inconnus pouvaient en penser. Ceux qui comptaient pour moi avaient accepter sans problème ce fait et c’était bien plus que suffisant à mes yeux. La voir réagir ainsi me laissait un goût amer. Elle n’aurait pas dû avoir honte ou être gênée d’en parler, ce n’était en rien quelque chose de mal, malgré tout ce que certains voulaient bien faire croire.

- Promis, ça reste entre nous. Mais si jamais tu veux en parler… et bien je suis là ? Peut-être pas ce que tu espérais, mais c’est mieux que rien ?

Je souris, essaie de retrouver la légèreté qui s’était installée en entrant dans la salle de sport et reprends l’échauffement que j’avais momentanément interrompu. Je recommence à pédaler à un rythme tranquille, jetant un regard en coin à Selma, assise sur son banc juste à côté. Elle semblait réellement mal à l’aise maintenant et je n’avais aucune idée de ce qui pourrait l’apaiser. Peut-être qu’en lui expliquant que je comprenais ? ça ne changerait rien pour elle, mais peut-être qu’elle serait moins mal à l’aise et comprendrait que je n’avais pas l’intention de la gêner ou de l’ennuyer avec ça.

- J’ai une petite amie.

Chose dont nous n’avions jamais discuté, donc elle n’était sans doute pas au courant, sauf si Zach avait vendu la mèche. Rien qui me semblait impossible, mais qui n’aurait sans doute aucun intérêt dans une de leurs conversations, ni même une place. Peut-être que Selma se sentirait plus à l’aise en comprenant qu’on était similaire, au moins sur ce terrain-là.

- Ce que je veux dire, c’est que t’as pas à t’en faire et que j’ai remarqué parce qu’on a ça en commun et… Enfin voilà.

Mes capacités oratoires sont toujours aussi incroyables quand il s’agit de mettre à l’aise quelqu’un après avoir réussi l’exploit de faire une bourde sans le vouloir. Un nouveau sourire, un peu plus contrit celui-là, étire mes lèvres et je me focalise sur l’entrainement, raison principale de notre venue ici à toutes les deux. Peut-être que simplement se concentrer sur le sport uniquement suffira à faire passer le malaise qui s’est installé depuis que j’ai ouvert la bouche, trop curieuse pour mon propre bien, et visiblement pour celui de Selma également. Viendra un jour où je saurais tenir ma langue au lieu de dire des énormités sans le savoir.

- C’est quoi la suite du programme ?

Faire passer le moment gênant, essayer d’oublier ce malaise persistant en se concentrant uniquement sur la raison e notre présence devrait aider à retrouver la gaieté qui s’était installée, non ? Je m’en voudrais de lui couper l’envie de discuter et d’aller à la salle avec moi à cause de ce que j’ai dit. Non pas que je me sois soudainement mise à adorer transpirer et sentir mes muscles me demander ce que je peux bien fabriquer pour qu’ils galèrent à ce point, mais j’avais envie de bien m’entendre avec Selma. J’espère ne pas lui avoir tout simplement ôté tout envie de continuer.
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Sam 8 Oct - 17:52 (#)



La honte a reflué à contrecœur. Elle a cherché à réveiller mes souffrances, comme autrefois. J’ai revu alors brièvement les soirées d’une autre époque, mes pleurs solitaires sur un trottoir désert, et le froid nocturne. Durant un court instant, j’ai ressenti à nouveau la nausée de mon adolescence, les restes de sa saveur écœurante sur ma langue, et l’étourdissement du malaise. Ma chère mémoire émotionnelle à moi. Un sac poubelle à moitié éventré, que j’aurais dû jeter depuis longtemps. Tu parles...

J’ai verrouillé ces sentiments. Je savais le faire désormais, mieux que la Selma à fleur de peau, mieux que celle écorchée par ses propres émotions naissantes.

« Ce n’est pas grave, » ai-je soufflé, en esquissant un pauvre sourire envers Anaïs, qui semblait toute aussi embarrassée que moi.

Je me suis sentie couturée de frissons. Exposée. J’ai frotté machinalement mon bras droit, le regard dévié vers le ring, où de nouveaux combattants prenaient place. Le besoin de me défouler s’est fait sentir. Parce que l’épuisement physique avait toujours été un exutoire aux faiblesses mentales, et que je n’avais que ça pour tout placebo, quand d’autres usent de tabac ou de drogues. Je voulais avoir mal au corps, pour avoir moins mal au cœur. Racler ma peau jusqu’à l’os. Quand on est seule, on se bat avec soi-même.

J’avais passé cette étape. À peu près. Ces vieilles cicatrices revenaient de temps en temps, tout comme le feraient les douleurs d’une ancienne fracture les jours d’un hiver pluvieux.

« Merci, j’y penserai. » J’ai tenté un sourire. Je savais qu’elle faisait de son mieux pour rattraper sa bourde, et quelque part, je m’en voulais aussi d’avoir gâché notre sortie.

C’était ma faute. Celle d’avoir eu une telle réaction, puérile et maladroite, idiote et pathétique, exactement celle d’une gamine de Philadelphie qui aurait eu vingt ans de moins que moi. C’est minable, ai-je conclu en guise de punition envers moi-même. Je me suis absorbée dans la contemplation de mes chaussures durant quelques secondes, j’ai dérivé, dans ma tête et dans le temps, avec la désagréable impression de régresser.

Tu sais, j’aimerai vivre aussi. Vivre comme je veux. Casser ce silence en moi et me souvenir de la raison de mes pleurs. Mais je n’y parviens pas. Je ne me souviens pas, si j’en ai été capable un jour. Peut-être n’ai-je jamais été accordée à cela. Tout ce dont je me souviens, c’est le ciel, d’un bleu vide et sans espoir.

Mais j’ai conservé le silence. Parce que toutes ces pensées n’avaient aucune importance, n’avaient aucun intérêt pour Anaïs, ou pour qui que ce soit d’autre ; c’était mes affaires, des vieilleries écornées, et rien qui ne soit digne d’être raconté. J’ai entrouvert la bouche pour esquisser une réponse, rassurante, combien je n’accordais aucune importance à ce petit incident -et c’était vrai-, mais Anaïs a continué sur sa lancée. J’ai essayé de sourire. J’ai eu l’impression de ne parvenir qu’à lui adresser une grimace laide et forcée.

« Tu as de la chance, » ai-je murmuré très bas, et je n’étais pas certaine qu’elle m’ait entendu. « Je ne t’en veux pas, ne t’inquiète pas, il n’y a pas de problème. »

J’ai inspiré. Sans doute le meilleur remède à tout cela, était-il encore de continuer à assumer cette enfance déchirée et cette honte que je conservais encore en moi, comme un vieux bibelot moche. J’avais entamé ce travail sur moi, voilà des années de cela, et tout restait encore imparfait, chancelant et fragile. J’ai inspiré, encore. J’ai fixé à nouveau le ring au loin, l’esprit ailleurs, le programme de notre escapade sportive relayée à un objectif flou et lointain, tel un rêve fiévreux. Aller, c’est bon, tu as 30 ans, mince, me suis-je intimée, et ces pensées ont résonné avec la voix rocailleuse de Zach. Tu peux en parler sans vomir maintenant.

« C’est juste que tu m’as prise au dépourvu. J’ai… Je n’ai jamais été à l’aise sur ces sujets-là. J’ai été éduqué comme ça, grandi comme ça, et je ne suis pas encore totalement en paix là-dessus. »

La chaleur sur mes joues était encore là. C’était les mêmes vieilles sensations que devant l’équipe, lorsque je leur avais tout avoué, morte de honte, le cœur à cent à l’heure et une pellicule de sueur dans le cou. J’ai haché mes mots avec la lenteur du torturé qui avoue ses secrets. J’ai fini par lever les yeux vers Anaïs, avec ce pauvre sourire qui, pour moi, devait être aussi laid qu’un rictus macabre et moqueur.

« Tu dois trouver ça bête à mon âge, après tout ce que j’ai accompli dans la vie. Et ça l’est d’ailleurs. Mais je fais des efforts pour être moins empotée et moins stupide. »

Je me suis massée le cou. Nerveuse. Réflexes inutiles et machinaux, comme si mon corps, et tout mon être me tiraillait d’un millier de crochets plantés sous ma peau.

« Bon, » ai-je essayé de conclure maladroitement. « Excuse-moi d’avoir gâché la matinée avec toutes mes bêtises. »

Je me suis levée, les mains contre mes hanches, inutiles. Un pantin de muscle malhabile et idiote. J’ai serré ma bouteille d’une main, avant d’en prendre une rasade, et de désigner les tapis vides juste à côté, posés contre le mur. Je devais revenir à la routine. C’était mieux pour Anaïs et pour ma dignité.

« Tu veux que je te montre quelques mouvements d’étirement ? Ensuite on pourra réfléchir à quels exercices tu voudrais t’essayer. Peut-être courir si tu veux. »

J’ai tenté de réfléchir à voix haute. Enfiler à nouveau l’uniforme, la nouvelle Selma, la carapace brûlée au soleil du désert. La chaleur sur mes joues a reflué. Un premier pas répété encore et encore.

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* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
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Mer 26 Oct - 0:42 (#)


Est-ce qu’elle se calme ? j’en ai vaguement l’impression. Son regard dérive un instant ailleurs, mais il ne semble plus aussi triste qu’avant. Elle se collecte. Je doute que mes mots aient changé grand-chose, mais je tenais à ce qu’elle sache qu’elle n’ait pas seule. Mon but n’a jamais été de l’ennuyer ou la mettre mal à l’aise. Et nous voilà toutes deux en train de prendre des pincettes avec l’autre parce que j’ai été trop curieuse à son sujet. Je soupire intérieurement, ne sachant pas trop comment rattraper tout ça sur le moment. Je doute qu’elle m’en veuille, mais mon cœur se serre un petit peu malgré tout. La culpabilité trouve toujours son chemin, c’en est presque risible à ce niveau.

C’est étonnant, malgré tout, de la voir ainsi et, pendant un bref instant, j’ai l’impression de me voir à travers elle. Les raisons étaient différentes, le passé également, mais la réaction était si similaire qu’elle aurait pu être copiée et collée tel qu’elle. Peur du regard des autres, incompréhension concernant la raison de tout ça. Pourquoi moi ? Pourquoi dois-je être différente des autres ? Pourquoi est-ce que ça importe tant à tout le monde que je ne sois pas comme eux, au final ? Je ne sais toujours pas comment j’en suis venue à ne plus vraiment en avoir quelque chose à faire. Je garde ça secret pour me protéger, pas par peur du simple regard des autres. Il me passe au-dessus, à présent. J’ai passé ce cap il y a quelques temps, et voir Selma être encore en train de lutter comme ça me fait de la peine.

- Je comprends bien.

J’ai passé seize ans de ma vie à me croire normale, humaine, pour finalement découvrir que tout ça était faux. Puis je me suis découverte une attirance pour les femmes et toute l’éducation familiale a définitivement volé en éclat. Je ne suis plus la gentille fille de mes parents, qui devait aller vers des études de droit, se marier, avoir des enfants et vivre une vie parfaitement rangée. Au lieu de ça, je danse dans les bois en faisant de la magie, sort avec une fille formidable et étudie la médecine avec tellement d’idées en tête que je doute d’avoir un jour une vie rangée. Vraiment, tout ça est tellement bizarre, avec le recul.

- Je ne me pensais pas … différente. J’ai vécu plusieurs chocs ces dernières années, je n’ai pas besoin de t’expliquer lesquels, dis-je en souriant doucement. J’ai juste eu de la chance d’avoir les bonnes personnes pour m’entourer et m’aider à m’accepter et… je pense juste que c’est peut-être ce dont tu as besoin aussi.

Je fixe un instant mes mains serrées autour du guidon du vélo que je n’ai toujours pas quitté et sur lequel je pédale depuis plusieurs minutes. Une file sueur me coule déjà du front et malgré mon dégoût pour cette sensation, je continue. L’idée c’était quand même que je fasse du sport, à la base.

- Il n’y a pas d’âge pour changer ou s’accepter. Je ne trouve pas ça bête, non. Je trouverai ça bête de ne pas essayer de se sentir bien et de rester tel que les autres voudraient qu’on soit.

Je hausse les épaules, pas certaine de lui dire les bons mots, mais ils quittent mes lèvres dès que j’y pense. Ils sont sincères, c’est tout ce que je peux affirmer avec certitude.

Je finis par ralentir et la conversation se relance sur le sujet principal et la raison de notre venue dans ce temple de la sueur et du muscle. Ayant le premier mais le second, je prends le temps de souffler un peu, appréciant étonnamment la sensation d’avoir les jambes chauffées par l’effort.

- Tu n’as rien gâché du tout, vraiment. Tu n’as pas à t’en faire. C’est moi qui suis trop curieuse. Ça ne me regardait pas.

Je souris, essayant de lui faire comprendre qu’elle n’a rien à se reprocher, bien au contraire. Je lui suis infiniment reconnaissante d’être revenue dans la vie de Zach et d’apporter une certaine stabilité dans une période qui est loin d’être évidente pour nous. Elle a été comme une bouée de sauvetage apparu au bon moment et je veux simplement qu’elle se sente à sa place parmi nous.

Je ne peux hélas pas empêcher une grimace d’apparaître sur mon visage. Je secoue la tête lorsqu’elle jette un œil aux tapis de course. S’il y a bien une chose que je ne veux absolument pas faire, c’est ça.

- Euhm.. Alors étirement oui, avec plaisir. Courir en revanche… Franchement je déteste ça. J’ai une cardio affreuse en plus. Si tu penses que c’est nécessaire, je le ferais, mais si on peut l’éviter, franchement ça m’arrange. Je préfère encore faire des pompes…

Sans blague, je n’ai jamais rien ressenti de plus horrible que de sentir mon corps souffrir après une course. Non seulement t’as plus de souffle, mais t’as mal aux bras, aux jambes et même à la nuque. Quel enfer.

- Au final, c’est toi la patronne… enfin la coach. C’est toi qui vois ce qui est pertinent.
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Lun 31 Oct - 11:18 (#)



Fais un effort. Parle-toi. Tu avais juré.
Le credo subsistait encore dans ma mémoire. Un faible écho d’un serment à un ami, que les vents du retour au pays et une amertume solitaire avaient mis en lambeaux, au point de l’étouffer sous une épaisse couche de routine. Je l’avais étouffé, moi. Derrière un rideau aux couleurs des USA et de la NRD, derrière un idéal obsessionnel et une bienveillance qui ne m’offraient rien d’autre qu’une médaille militaire moisissant dans un tiroir et une maison vide, silencieuse, seize heures sur vingt-quatre. Tu avais juré de sortir de ce silence.

Je l’avais fait, durant un temps. Puis le démon des habitudes et des heures, ce petit familier ricanant avait avalé mes résolutions, et je m’étais oubliée dans un abandon accommodant. Je m’étais convaincue que j’y reviendrais plus tard. Que j’avais mieux à faire que de m’occuper de moi-même.

Je me suis rassise en écoutant Anaïs. J’avais du mal à tenir en place. Je sentais remuer en moi cette gamine d’autrefois, celle qui cherchait des cachettes à l’intérieur d’une maison aux murs de verre, derrière lesquels se cachaient ceux qui jugent, et ceux qui épient. Elle se voulait à l’abri des yeux et à l’abri du monde. J’ai appuyé machinalement sur cette fichue bouteille, en hochant la tête de temps à autre aux propos d’Anaïs, mais mes pensées chaviraient ailleurs, entre inconfort et réprimandes, entre passé et présent incertain.

J’ai essayé de raccrocher les wagons. « Je ne t’en veux pas, vraiment. En fait... » Je me suis massée le haut du bras en cherchant ces mots qui se dérobaient. « Je m’exprime mal, c’est stupide. »

Vas-y. Fais-le, cet effort.

J’ai soupiré. Le décor était bien différent d’alors, mais le déjà-vu était bourré de cette même ironie amère qui empoisonnait mes pensées et mon existence. L’odeur cuivrée de la poussière désertique était absente, remplacée par celle des tapis d’exercices, aux relents de sueur et de déodorants, mais Selma était la même. Selma qui hésite. Selma qui se perd en elle-même. Selma qui ne s’aime pas vraiment, qui bégaie et peine à partager à voix haute une vérité, pourtant simple, à des amis qui n’avaient rien de commun avec des yeux de verre cachés derrière une paroi glacée. C’est dur de parler avec des êtres humains : ils vous répondent.

Je me suis faite violence. J’ai essayé de m’ouvrir un peu. Juste un peu.

« Ça fait un moment que je me suis faite une raison sur moi-même, mais… Voilà, disons que j’ai du mal à en parler ouvertement. Zach est au courant mais, tu sais, ça n’a pas été facile de lui dire à l’époque. »

Un nœud s’est dénoué en moi. J’ai laissé couler les mots, comme je l’avais fait voilà des années de ça, dans un autre lieu, d’autres circonstances. Tout est sorti d’une traite.

« Je sais que je ne devrais pas en avoir honte, mais c’est difficile de se débarrasser des vieilles manies, et de ne plus écouter cette partie de soi. Cette toute petite partie encore terrifiée à l’idée d’être moquée, d’être rejetée, de ne pas être à la hauteur, d’être maladroite et totalement ridicule. »

J’ai haussé les épaules. Pauvre sourire. Encore. Je n’avais rien de vraiment mieux à offrir que mon embarras et une difficulté à exprimer ce que je ressentais véritablement au fond de moi.

« Crois-moi, j’ai essayé de me débarrasser de ça, » ai-je continué en fixant ma bouteille.
« J’aimerai mieux sortir et rencontrer du monde. Mais je n’ai pas vraiment le temps, j’ai toujours un dossier à examiner, une personne à aider, un serment à respecter. Et lorsque j’ai du temps libre, je ne ressens plus la motivation de travailler sur moi-même, de m’habiller, de sortir, et je remets tout ça à plus tard. »

« Des excuses commodes, tu me diras, » ai-je terminé. « Mais c’est sans doute mieux comme ça, plutôt que me questionner sans arrêt sur moi-même, mes sentiments, mon physique, tout ça... »

Des éclats de voix ont brisé le train de mes réflexions. Au centre du hall, le ring se remplissait de nouveaux combattants, qui s’invectivaient les uns les autres dans une bonne humeur contagieuse. Cela ressemblait à l’ambiance d’un centre d’entraînement. Cela ressemblait à quelque chose que j’avais perdu. Un cœur, une équipe, des amis. J’ai senti une pincée de nostalgie oppresser ma respiration, comme un moment de pure claustrophobie dans ma propre corps. Je me suis de nouveau perdue dans l’un de ces éternels silences, ceux-là qui offraient le même réconfort qu’une injection de drogue, ou le fond d’une bouteille d’alcool.

La même vieille Selma. Selma la muette. Selma sans boussole. Enfin…

« Enfin... » ai-je soupiré en reprenant mes esprits. « Je ne devrais pas te dire tout ça, c’est mes problèmes à moi, ça finira par passer. Et accessoirement, c’est carrément déprimant à écouter. »

J’avais juré, mais s’ouvrir n’apporte rien. Rien de mieux qu’une discussion autour de la machine à café. Rien de mieux qu’environ trente secondes de sincérité. Parce que c’est ça l’humanité que je défendais. Celle qui attend son tour pour parler dans la conversation, plutôt que d’écouter vraiment son voisin.

Je me suis massée les cheveux, en relevant les yeux vers Anaïs. Rideau sur Selma. Elle venait de rassembler les morceaux de sa cuirasse, celle qui lui permettait de tenir debout jour après jour.

« On peut faire des étirements, » ai-je déclaré en lui montrant les tapis enroulés dans un coin. « Comme ça, je te montre quelques prises de lutte, si tu veux. Ça fait de l’exercice, c’est marrant et ça te fera sûrement assez d’activités pour un premier jour. »

Je lui ai souri, faiblement. J’avais osé, durant un court instant, semer quelques morceaux craintifs de moi-même, ceux qui n’osaient jamais venir face à la lumière du jour. Qu’est-ce que cela m’avait apporté jusqu’à présent ? Peu de choses. Je préférai l’oubli salutaire du travail et de l’exercice physique. Ces placebos-là m’évitaient de dériver bêtement dans mes sentiments.

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Ven 9 Déc - 4:22 (#)

Anaïs illustration

Fut un temps où c’était moi qui agissais comme elle le fait.  Si on n’en parle pas, ça ne pas nous faire du mal, pas vrai ? Le déni, c’est une solution si simple et efficace. On laisse ça de côté et on attend de voir. Si ça explose pas, c’est qu’on avait pas besoin de s’en soucier, pas vrai ? Aujourd’hui encore, j’ai une bombe à retardement que j’ignore sciemment, la reléguant sans cesse dans un coin e mon esprit. Cloisonné, cadenassé. Espérant que rien ne va jamais en ressurgir. Est-ce la bonne chose à faire ? Sans doute pas. Est-ce qu’en parler aiderait ? Sans doute pas non plus, en plus de créer d’autres problèmes. Rien dont j’ai besoin ni envie en ce moment.

Difficile de lui jeter la pierre. Si elle en a parlé à Zach, cela devrait suffire, mais ce n’est visiblement pas le cas. Je n’ai aucun mal à imaginer ce qu’elle a pu traverser, même si elle a vécu ça bien plus longtemps que moi. Être moquée, insultée, rejetée, personne n’a envie de ça. Encore moins lorsqu’on l’a déjà connu auparavant. Chaque jour je croise les doigts pour que personne à la LSU n’apprenne que je suis une CESS et pas juste la rouquine qui bosse trop. Peut-être que ça ne changerait rien, mais peut-être aussi que ça me mettrait dans une position délicate et avec une part des étudiants voulant ma peau ou me virer de là, sans même savoir ce dont je suis vraiment capable. Personne ne voudrait prendre ce risque.

Alors est-ce que je vais réussir, moi, du haut de mon mètre soixante-cinq, et mes dix-neuf années d’expérience sur terre, à l’aider. Peu probable. Mes paroles doivent sonner creuses, voire naïve à ses yeux. Un sentiment que j’ai souvent en donnant mon point de vue sur certains sujets avec des adultes bien plus vieux. Peut-être que j’essaie trop de voir le bon côté des choses, mais c’est ça ou ne vivre que vers le côté sombre du gris du monde et je n’ai pas envie de ça. LA vie est déjà assez compliquée sans tout cet apitoiement qu’on peut volontairement s’infliger. Je soupire et me frotte la nuque, incertaine.

- Je comprends, tu sais. Je… je suis passée, passe encore par là. Les doutes, la peur d’être jugée et l’envie de garder tout en ordre en évitant les problèmes.

C’était presque un crédo ces jours-ci. Eviter les emmerdes, vivre et espérer que tout se tasse, loin derrière nous Et ça marchait pas trop mal, si on en croit les semaines entières sans la moindre catastrophe pointant le bout de son nez. Peut-être que c’est finalement l’heure d’être en paix et d’avancer pour de bon.

- Je voulais pas te forcer à en parler. Mais c’est pas moi qui vais te juger. Je suis même pas humaine, en plus d’être lesbienne. J’ai plein de raisons qui font que je comprends ce que tu vis. Alors si jamais t’as besoin, je suis là.

Retour au front, donc. Enfin à la salle de sport, à la sueur, aux efforts et aux muscles qui travaillent, pour mon plus grand plaisir. Il faut que je dise à Zach que son sarcasme me déteinds trop dessus. Lui ou celui d’Heidi, elle est douée pour ça, elle aussi. Lorsqu’elle désigne les tapis pour s’étirer dans un coin, je hoche la tête et l’accompagne. Ça ne devrait pas être trop difficile. J’ai découvert que je suis étonnamment souple malgré mon aversion pour le sport dans sa globalité. Courtoisie de Rica et ses idées farfelues de s’inscrire au yoga et de m’en faire « profiter » quand elle passe.

- On peut faire ça, oui. Vas-y doucement avec la lutte, hein. J’ai pas spécialement l’habitude de donner des coups.

En recevoir… c’est déjà arrivé. Plus de fois que je ne l’aurais voulu, mais ce n’est pas vraiment un sujet que j’ai envie d’aborder non plus. Mais c’est une des raisons pour lesquelles je suis là, après tout. Arrêtez d’être sans défense et la demoiselle en détresse qui est un poids. Le genre de personne qui reste derrière et se ronge les ongles quand les autres font des trucs utiles.

Je déroule le tapis au sol et m’installe dessus en écartant les jambes avant d’essayer d’atteindre mon pied avec mes mains. Sans trop de difficulté, au final, mais je sens bien que ça tire, donc c’est que c’est ce qu’on doit faire. Je suis les instructions de Selma et prend exemple sur elle. C’est sûrement moins emmerdant que courire, et moins fatiguant, et c’est le genre de choses que je peux faire chez moi. Peut-être qu’avant une méditation quotidienne, ce serait un bon moyen d’évacuer un peu. Il faudrait que j’essaie.

- Tiens, je me demandais. Tu connais des arts martiaux ou des trucs dans le genre ?

J’ai jamais vraiment vu Zach se battre, dieu merci, mais je l’imagine mal faire des coups de pied sautés ou des technique comme on voit dans les films. Plutôt le genre bourrin genre Punisher ; Selma en revanche… D’accord, elle est musclée, mais comparé à Zach… Sans parler de personne de la carrure de Serguey par exemple, frôlant les deux mètres.

- J’ai eu..  ‘fin je me dis que si je pouvais me défendre correctement, j’aurais pas à apprendre à me servir d’un.. flingue.

J’ai vraiment pas envie de passer cette ligne. Apprendre à désarmer, Zach m’a pratiquement forcé à le faire et, en toute franchise, c’est une bonne idée. Mais m’en servir derrière ? l’iie me fait trembler rien que d’y penser. J’entends encore les coups de feu et les bruits de balles qui fusent autour de nous dans les couloirs du Mall. Je revois encore le canon de cette arme pointée sur la tête de Rica. Et le sang…

- Enfin je.. c’était juste au cas où…

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Anonymous
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Jeu 15 Déc - 22:47 (#)

Full Sweat Jacket

Le nœud s’est défait. Mes poumons se sont vidés. Lentement.
J’ai eu l’impression, tout à fait infantile, de retrouver cette réalité que mes confessions toutes aussi futiles avaient suspendu durant ce court instant d’incertitude et et de vulnérabilité. Faire chanceler mon monde. Cet espace clos où se terraient mes sentiments, simples reliques d’un cœur vivant à l’intérieur d’un autre, et d’un autre encore ; la mécanique d’une boite à déni systématique. J’ai hoché la tête machinalement. Un sourire a fleuri sur mes lèvres, et je me suis surprise à éprouver un sentiment étrange de calme retrouvé.

Une once de consolation. Unique ; une étincelle dans un âtre éteint. J’ai attrapé ce sourire, et je l’ai cultivé en réponse à Anaïs.

« Tu es adorable, tu sais, » l’ai-je taquiné en lui tapotant affectueusement l’épaule. « J’y penserai, vraiment, ça me touche beaucoup. »

Je me suis sentie à moitié malhonnête. Parce qu’au fond de moi, j’entendais cette minuscule voix dictant le silence de mon existence, et qui savait pertinemment que je ne me confierai pas, ou peu. Tu as autre chose à vivre que de m’écouter me plaindre, ai-je pensé en me levant pour récupérer un tapis d’exercice pour elle.  Et c’était vrai, je le savais. Elle avait plus de dix ans de moins que moi, toute une vie d’étudiante devant elle, et moi, je croupissais dans un métier cannibale et un désert sentimentale. Je n’avais aucun droit de la forcer à supporter ce vieux mal-être qui m’habitait et qui aurait mieux fait de rester enterré au fond de mon âme.

C’était entre moi et moi. Elle n’avait pas besoin de cela dans sa vie. J’ai ravalé ce constat intérieur, et je suis revenue à la réalité de l’entraînement, pourtant bien ébréché par ces errances sentimentales.

« On va survoler aujourd’hui, j’aurais dû mieux organiser la matinée. Tu peux faire des mouvements comme ça, et compter dix secondes dans ces positions, » lui ai-je expliqué en enchaînant les diverses postures.

J’ai démontré sans vraiment m’étirer. Somme toute, nous n’avions fait que discuter de mes petits soucis, si bien que tout mon corps était froid et, pour être honnête, je n’étais guère motivée. Je l’ai observé faire en ajoutant quelques conseils ici et là, entre flexions, étirements, fléchissements et positions statiques, que je savais bien mieux gérer que mes humeurs intérieures. Puéril, vraiment. J’ai vainement essayé de chasser ces considérations désabusées nées de notre conversation et qui fanaient mon humeur, mais celles-ci sont restées là, persistantes et flottantes à la lisière de mes pensées comme des nuages sur un ciel vide.

Je me suis concentrée sur l’exercice, tant bien que mal. Je n’étais plus vraiment dans l’ambiance d’une salle de sport. Quelle idiote je suis.

« Les arts martiaux ?... »

J’ai senti un irrésistible sourire revenir. Je me suis assise sur un banc en écoutant Anaïs, et autour de moi, la salle et sa réalité ont paru reprendre consistance, comme une vidéo que l’on remet en route. Un soupçon de bonne humeur a éclos en dépit de tout, en dépit de moi et de ma satanée insécurité.

« Ça pourrait être amusant à faire. » J’ai réfléchi rapidement à l’idée. « C’est ça qui te conviendrait comme sport ? Le but c’est de s’amuser, mais si ça peut t’être utile aussi, pourquoi pas. »

J’ai jeté un coup d’œil pensif vers le ring. Les contours d’un programme commençaient à se faire jour dans ma tête, entre routine et matériel à prévoir pour une débutante.

« Ce qu’on pourrait faire, c’est des arts martiaux mixes. Tu sais, du MMA. Ça sonne brutal comme ça, mais on le fera seulement à petites doses et entre nous deux. Je te montrerai quelques prises, un peu de boxe, et puis ce serait un bon moyen de se dépenser. »

J’ai cherché à la rassurer tout de suite. Bien sûr, mon but n’était pas de la lâcher au beau milieu d’un ring à se battre pour un tournoi, mais de lui enseigner quelques rudiments d’auto-défense. J’ai tâché d’être claire.

« L’idée, ce n’est pas tout à fait de faire du combat. Mais plutôt la maîtrise du corps, connaître quelques prises, apprendre à dévier les coups, etc. Je ne te demanderai pas de te battre avec quelqu’un, bien sûr, on pourra utiliser du matériel, comme des sacs par exemple. »

Je me suis relevée. Tout cela était un domaine que je maîtrisais autrement mieux que mes sentiments, et je lui ai souris à nouveau, comme sa proposition faisait naître chez moi un enthousiasme contagieux.

« Tu sais quoi ? » J’ai levé l’index. « Aujourd’hui, c’est trop tard, on n’a rien préparé. Mais on peut se faire ça la prochaine fois. Comme ça, je prépare un programme doux et on te trouve du matériel à ta taille. Il va nous falloir des protections, comme des gants. »

Je n’étais pas entièrement certaine de la manière dont Zach allait accueillir l’idée. Certainement avec des yeux ronds, au minimum. Cela m’a fait sourire de plus belle.

« Ça te dirait ? Moi ça me ferait plaisir en tout cas. Tu veux continuer encore un peu pour aujourd’hui ou on remet tout ça à la semaine prochaine ? »

Retour à la réalité. Le reste, je m’en occuperai plus tard, comme je l’avais toujours fait.

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Baby Chaos - Là où je passe, la paix trépasse.
Anaïs Wilhm
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A SONG OF BLOOD

En un mot : Outre en perdition
Qui es-tu ? : *Un esprit traumatisé par la cruauté de ceux qu'elle pensait être ses camarades, à jamais marqué par l'absurdité de la violence humaine.
* Fille émancipée d'une famille humaine qu'elle a fui pour sa propre sécurité. Outre dans un monde d'humains qui ne cherchaient pas à la comprendre, juste à la plier au conformisme réconfortant de la normalité.
* Apprentie curieuse et consciencieuse de Daphné Calabrezzi. S'est lancée sur la voie du chamanisme, marchant dans les pas de sa mentore avec patience et détermination, persuadée d'avoir trouvé la voie qu'il lui fallait.
* Inscrite à la LSU, en médecine. Malgré un dossier scolaire chaotique à cause d'une année de fugue, se démène pour prouver, aux autres et à elle-même, qu'elle réussira.
Facultés : *Hémokinésie, contrôle du fluide vital
*Apprentie chamane, amie des loups et des gitans
*Etudiante en médecine, acharnée et consciencieuse, pleine de projets en tête.
*Musicienne et chanteuse amateur ne sortant jamais sans son casque. Danseuse du dimanche. Incollable sur la musique, sa passion, son refuge.
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Dim 8 Jan - 2:35 (#)

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Au milieu des odeurs de sueurs et du bruit des machines qu’on soulevait ou poussait, notre conversation faisait un peu tâche. Et pourtant, je ne la regrettais pas. Voir la façon dont Selma réagissait m’a fait prendre conscience qu’elle avait aussi ses propres démons. J’ai eu envie d’en savoir plus. Pas par curiosité mal placée, bien que ce ne soit jamais loin, mais parce que j’ai envie de connaître et comprendre cette femme qui a ramené un sourire plus franc sur le visage de Zach. Mettre un nom et un visage sur les histoires que Zach me racontait, les émergeant de sa mémoire vacillante, c’était important. Pour lui. Pour elle. Et je voulais que cela dure.

Alors voir un sourire s’afficher sur ses lèvres me rassure. Je n’ai pas fait de bourde et son tapotement d’épaule taquin me le confirme. Je m’empourpre stupidement sans rien ajouter. Heureuse qu’elle comprenne que j’essaie de bien faire et qu’elle sache qu’une porte est ouverte. Un peu vexée de toujours être traitée comme une enfant parfois. Adorable ouais…

On est vite revenues au sujet du jour. À savoir essayer de faire quelque chose de mes quarante-cinq kilos tout mouillés. J’imite calmement les mouvements qu’elle fait, sans essayer de faire vite. S’il y a bien une chose que j’ai apprise auprès d Daphné, c’est que peu importe le nombre fois que je peu échouer ou en pas faire les choses parfaitement, je peux toujours faire mieux la fois suivante. Ce ne sont que des exercices d’échauffement. J’écoute ses explications, suis ses conseils et sens plusieurs fois cette sensation de légèreté qui précède une autre, plus douloureuse, d’étirement. Cela faisait vraiment longtemps que je n’avais pas fait le moindre effort physique. Selma semble… un peu absente, lorsqu’elle ne parle pas. Je commence à me dire que j’ai peut-être sous-estimé l’impact de mes paroles…

Mais à l’instant où j’ouvre la bouche pour demander si elle peut m’aider à me défendre, le sourire revient et ses yeux se mettent à briller. Quant à savoir si ça me conviendrait…

- Quitte à souffrir, autant que ça m’aide. Et j’aurais moins l’impression d’être impuissante…

Le nombre de fois où j’aurai aimé avoir les moyens de coller des roustes à certaines personnes…  Un simple coup de poing et j’ai eu l’impression de me briser les phalanges. Ça rassurerait tout le monde, moi la première, de savoir que je peux un peu de me défendre, même si ce n’est qu’un tout petit peu. De là à passer au MMA …

- T’es sûre ?

la seule image que j’avais du MMA c’était des bourrins qui se mettait sur la tronche dans un octogone. Alors oui je pourrais me défendre, mais de là à vouloir me faire taper sur la tronche par une ex-militaire… Mais elle est rassurante et je me dis que, quitte à apprendre à frapper, autant y aller à fond. Dévier les coups et faire des prises, ça me semble déjà bien plus faisable et réaliste. Avec mon gabarit, même avec 10 ans d’entraînement, jamais je ne pourrais me mesurer à quelqu’un comme Zach. Ou Heidi, qui sait se battre et l’a prouvé. Selma a en tout cas l’air plus qu’emballée par l’idée.

J’ai rapidement pesé le pour et le contre. Je devais faire du sport. Je devais apprendre à me défendre. Selma a l’air emballée par l’idée et je suis sûr que Zach le sera aussi, après m’avoir demandé si j’allais bien. Je hoche la tête, un sourire semblable au sien se dessinant sur mon visage.

- Je suis partante ! C’est pas le genre de choses à laquelle je m’attendais, mais j’ai envie d’essayer.

Un rendez-vous hebdomadaire pour apprendre à se battre. Personne n’allait le voir venir. Même si l’idée me trottait dans la tête depuis un moment, j’imaginais que je finirais par me balader avec un taser ou une bombe au poivre à tout moment. L’un n’empêche pas l’autre, mais me dire que je vais faire du MMA avec une ex-militaire quelque chose de… complètement ahurissant.

Je me redresse et essuie mon front. Continuer ? Je hausse les épaules. Je ne suis pas particulièrement fatiguée, mais je sais que mon corps, une fois refroidie, va durement me faire payer toutes ces années à ne pas l’entretenir convenablement. Je m’imagine déjà en train de grimacer en faisant le moindre mouvement, une paire d’yeux moqueur suivant mes déambulations douloureuses. Je soupire en souriant malgré moi.

- On peut remettre ça, je sens que je vais regretter mon immobilisme ces dernières années. Est-ce que tu peux le faire en semaine ? Par exemple le jeudi ? Je sais que tu travailles, mais le week-end je… je serai jamais vraiment disponible.

Je ne peux pas vraiment lui dire que je fais un apprentissage chamanique en parallèle. Mieux vaut la laisser en dehors de ça. Daphné n’apprécierait sans doute pas. Selma est une amie de Zach, mais elle reste une agente de la NRD aux yeux des autres. Particulièrement aux yeux des Eveillés que je fréquente.

- On peut aller acheter ce qu’il faut, si tu veux ? Tu as parlé de gants, j’imagine que je n’en trouverais pas à ma taille au Mad Dog.

Pas vraiment taillées pour la bagarre. Elles ont plus l’habitude du papier et de l’encre que du plastique et de la sueur.

- Merci, en tout cas. C’était vraiment quelque chose qui me tenait à cœur. Je sais à quel point tout le monde s’inquiète quand je sors, je voudrais au moins pouvoir les rassurer un minimum.

Et me rassurer moi aussi, quand je rentre en pleine nuit et que je perçois la marche d’un inconnu derrière moi. Paranoïa ou non, j’aimerais être capable de me défendre si les choses devaient en arriver là.

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