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Here we are... again - Nicola

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Cannot a Beast be tamed
Ethan Roman
Ethan Roman
Cannot a Beast be tamed
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En un mot : Loup-garou
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ASHES YOU WILL BE

Pseudo : Ethan Roman
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Mer 23 Mar - 19:11 (#)

Vautré dans mon canapé, je savoure ce début de soirée bien mérité. La manette de jeu collée entre mes pognes, une canette de bière sur la table à portée de main, accompagnée de chips, cacahuètes et autres biscuits apéritifs, je sens que ce week-end va être juste parfait. En plus, ils ont annoncé une météo exécrable pour cette fin de semaine, ce qui ajoute un petit plus savoureux à rester cloitré chez soi.

Les sons de la rue remontent jusqu’à mon deuxième étage me faisant lever les yeux au ciel. Un rappeur en herbe, c’est certainement installé sous mes fenêtres et donne un concert privé pour ses potes tandis, qu’un peu plus loin, une secte quelconque, munie d’un mégaphone loue les vertus de son église. Vient s’ajouter à cela le clebs qui aboie à tout va, les klaxons, le type du troisième qui se prend pour le roi du bricolage et le mioche du premier qui fait ses dents et chiale toutes les larmes de son corps. Je soupire et me promets de chercher un nouvel appart’ dans un quartier moins bruyant avec des voisins, moins curieux et intrusifs. Et s’il pouvait être proche du garage, ça serait un sacré plus. Pour palier à toute cette nuisance, je me coiffe d’un casque audio, monte le son et pars à l’assaut de Midgard pour rechercher une clef spéciale, le tout sans me perdre dans les limbes d’Yggdrasil. Les coudes sur les genoux, je guide mon personnage avec adresse tout en réfléchissant intensément à la résolution de l’énigme lorsque mon portable s’illumine, me happant hors de mon monde virtuel. Grognant légèrement, je jette un coup d’œil à l’écran et sursaute à la lecture de la notification.

MERDE !!!!

C’est ce soir que j’ai promis à Nico d’aller à son Club pour y passer une soirée avec lui. Heureusement que je me suis mis une alarme… Je n’ai plus une seconde à perdre surtout que je dois passer chez Sergio qui a promis de me mettre une bouteille de premier choix de côté. Avec précaution, je sauvegarde, range les accessoires de la Playstation et éteins le téléviseur pour ne pas être distrait et retenu par un quelconque fait divers.

Je fonce à la douche, qui se trouve sur le palier, croisant les doigts qu’elle soit libre et passe sous le jet tiède. La serviette autour de la taille, je retrouve mes pénates et opte pour un pantalon noir, des rangers imitation Dr. Martens et un pull à capuche blanc. Mes cheveux sont rassemblés sur l’arrière de mon crâne pour former une queue de cheval, puis monté en chignon. Le reflet renvoyé par le vieux miroir, quelque peu déformant, me convient parfaitement. J’attrape ma vieille veste en cuir sombre et jette sur mon épaule mon sac à dos. Faudrait un jour que je révise un peu mon look. Passé la trentaine et je ressemble toujours à ce jeune adulte de 18 ans qui a quitté sa Roumanie natale.

Sur le palier, je salue la porte de Jacqueline qui épie toutes les allées et venues et dévale l’escalier. Au bas de l’immeuble, je croise mon rappeur, affalé contre le mur et profondément enlisé dans des brumes de cannabis. Au moins, mes voisins ont gagné un peu de répit. Un taxi est hélé depuis le trottoir, il hésite, s’arrête et me le fais chiper par une grosse nana qui en plus me fait un doigt d’honneur en montant dans l’habitacle. Dubitatif et résigné, je hausse les épaules et attends une autre voiture qui ne tarde pas à arriver. Cette fois-ci, je suis prêt et grimpe sur la banquette arrière en montrant une adresse griffonnée sur un morceau de papier.

La circulation est dense, comme toujours les vendredis soir. Je sors mon téléphone et entame une partie de Soda Crush, gagnant un niveau lorsque la voiture s’arrête.

- Vous pouvez attendre, s’il vous plaît ? J’ai une commande à récupérer et après on va au Mad Dog.

Le chauffeur me fait signe que c’est d’accord et s’installe un peu plus confortablement sur son siège, abandonnant sa vigilance sur le trafic. La boutique de Sergio est fermée mais le bonhomme est derrière son comptoir, s’affairant à préparer de la marchandise pour le lendemain. Lorsqu’il me voit, il n’hésite pas à ouvrir et m’invite à le suivre.

- Tiens, voilà. Je l’ai emballée dans du papier transparent et j’ai mis du bolduc sur le goulot. J’espère que ça plaira à ton ami. En tout cas, je n’ai pas eu de réclamation d’autres clients, tous ont été ravis. Pour dire, ils reviennent régulièrement même.
- Je te fais confiance, Sergio. Merci beaucoup !

Le travail du commerçant est admiré avant de déposer avec délicatesse, le paquet dans mon sac à dos. Je règle le montant dû et retourne au taxi qui m’emmène rapidement à destination. J’attends que la voiture soit avalée par la circulation pour contourner le club, tombe sur une ruelle sombre et avise une petite porte à l’arrière du bâtiment. Trois coups rapides sont donnés contre le battant qui résonne dans l’espace réduit. Un homme, à la peau aussi foncée que la nuit, ouvre l’huis et me jette un regard dédaigneur. C’est sûr qu’à côté de lui, je fais pas vraiment le poids, j’ai l’impression d’être une crevette maigrichonne qui va se jeter dans l’immensité de l’océan.

- Heu salut… Monsieur Alighieri m’a invité. Je…
- Il est pas dispo.
- Ah bon ? Pourtant, il m’a envoyé un message.

Je plonge ma main dans ma poche afin de sortir mon téléphone quand le gorille en faction dégaine un révolver et le secoue sous mon nez. Je suspends immédiatement ma recherche et lève les mains, sentant mon rythme cardiaque s’accélérer drastiquement.

- Fais pas le con ! T’as aucune chance.
- Appelez Anas ! Il vous confirmera ma venue.

C’est fou comme une arme à feu force tout de suite le respect.

- C’est quoi ton nom ?
- Roman, Ethan… dites lui que le roumain est là.

Maintenant sa visée sur ma poitrine, il appuie sur son oreillette et répète mon nom. Visiblement, il parle à la bonne personne, vu que son arme s’abaisse et retrouve le holster sous son aisselle, libérant aussi ma respiration qui s’est partiellement arrêtée. Moins de trois minutes plus tard, je vois apparaître la tête de Anas dans le minuscule couloir qui mène dans les bas-fonds du club. Cette espèce de grande gigue touche presque le plafond. Tout en longueur, fin comme un fil de fer, son sourire m’accueille avec bonne humeur. Le vigile se déplace en me toisant d’un œil noir. S’il éternue soudainement, je sais que je vais sursauter malgré la présence de l’oriental.

- Sois, le bienvenu, Ethan Roman le Roumain. Je suis content que tu aies pu te libérer, Nicola va être heureux de te voir. Je crois qu’il a prévu un truc pour toi.
- Salut Anas…, juste Ethan, ça suffira hein.

J’hésite devant le couloir. Les murs sont si étroits et le plafond me semble terriblement bas. Je sais qu’il ne s’agit que de quelques minutes mais c’est difficile pour moi de traverser cet endroit exigu. La porte se referme, nous sommes dans le noir total. J’inspire profondément et avance en fermant les yeux, ce qui ne sert à rien et qui est profondément débile, mais ça m’aide. Les odeurs affluent bien avant le brouhaha, transpiration, sang, bière et autres effluves que je sais attribuer, un joyeux mélange pour un endroit terrible. La porte s’ouvre et soudain, mon espace devient assourdissant. On ne me remarque plus comme la première fois, je suis juste un humain, suivant la grande perche de Anas qui me mène jusqu’au coin VIP, réservé à Nicola.

Un sourire sincère illumine mes traits à la vue du vampire. J’oublie sa nature, c’est juste un ami, mon Meilleur Ami. Je me fous des convenances ou des us et coutumes qui l’entourent. J’efface la distance qui nous sépare et lui offre une accolade franche et virile, comme on le ferait chez moi.

- Salut mon « vieux » ! J’suis ravi d’être là ! Je recule d’un pas et fais pivoter mon sac sur ma poitrine. Tiens, je t’ai apporté un petit quelque chose. Je sors une bouteille, format vin rouge, et la tend au Caïnite. Il paraît que c’est un grand cru… prélevé sur ce qui se fait de mieux. J’espère que cela te conviendra. Je n'ai pas goûté... tu comprends pourquoi, hein.

Imitant Anas, je m’assieds dans le canapé moelleux, offrant une vue imprenable sur l’arène.

- Alors ? Comment tu vas ? Ca roule les affaires ? Pourquoi tu m’as fait venir ici ?
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Dim 10 Avr - 21:41 (#)



Eccoci di nuovo

« “Le regole sono per i bambini. Questa è la guerra, e in guerra l’unico crimine è quello di perdere.” Joe Abercrombie »

- « Juste une fois, est-ce que c’est possible de me trouver quelqu’un à la hauteur ? - demande Nicola après avoir poussé un soupir à fendre l’âme. Il retire lentement les bandages qui protègent ses jointures, qui ne sont pas tâchés de son sang.
- « Sérieusement ? Nicola, tu as huit-cents ans d’entraînement derrière toi ! - lui répond vertement Anas, manifestement à bout avec ce vieux vampire qui se la joue chaque fois que c’est son tour de se donner en spectacle. - Où veux-tu qu’on trouve quelqu’un qui aille ? Et t’imagines l’annonce ? On a déjà de la chance d'avoir des gens qui reviennent !
- « Merde, c’est du corps à corps, ça devrait être trouvable un vampire capable de se battre au corps-à-corps, je ne demande pas grand-chose ! »

Son entourage proche baisse la tête de concert, dans un ensemble déconcertant. Les quatre hommes et la femme qui le composent sont habitués au caractère soupe-au-lait de l’Italien. Lorsqu’il prend ce ton, mieux vaut filer doux. Ne surtout pas attirer l’attention sur soi. Personne ne veut devenir un exutoire. Côtoyer cet homme est une sorte d’exercice pour équilibriste : il s’agit d’être capable de lire dans les intonations et les micro-expressions de l’antiquité pour anticiper les colères. Si on y arrive, Nicola est facile à lire. Si on n’est pas un minimum empathique… Les déferlantes entraînent et détruisent tout sur leur passage.

Et ce soir, Nicola est particulièrement sur les nerfs. Quelque chose semble le tracasser, mais personne n’a encore su deviner quoi exactement. Il ne veut pas en parler. Ce n’est probablement pas quelque chose qui concerne de simples humains comme eux, dans ce cas, et ils ne veulent pas savoir ce qui peut tracasser un vampire de huit siècles avec un passé de mercenaire. C’est prudent de leur part.

Torse nu, simplement vêtu d’un short de boxeur, cette antiquité vivante se laisse tomber sans façon sur la banquette du sofa bleu nuit. Tom lui tend une bouteille Thermos, dont l’intérieur n’est pas visible. C’est pour préserver leur sensibilité d’humain, Nicola leur a-t-il dit. Ils savent tous très bien ce qu’il y a dans cette bouteille, mais pas l’origine. Et finalement, là encore, a quoi leur servirait de savoir ? Il y a des vérités dont ils peuvent se passer.

- « C’est diablement ennuyant… Cette ville est pourtant bourrée de vampires… Et pas un ne veut m’affronter en combat à la loyale ? Comme c’est ennuyant…
- « Tout le monde a peur que tu changes d’avis en cours de route. - répond alors honnêtement Janet, culturiste depuis dix ans, sans lever la tête de son téléphone portable. Nicola fronce les sourcils et se redresse sur un coude. Anas profite d’une sonnerie pour s’excuser et quitter la pièce.
- « Comment ça, que je change d’avis ? Tu me trouves inconstant ?
- « Eh bien… Ce n’est pas le mot que j’aurais choisi. Imprévisible plutôt ?
- « Je ne les réduis pas en pièces, Janet.
- « Le dernier a failli perdre un œil suite à ton acharnement. »

Maintenant, Nicola est assis, ses coudes sur ses genoux, son regard bleu focalisé sur Janet, qui finit par timidement relever le sien.

Elle aurait du fermer sa gueule. Et elle sent que les trois autres hommes sont entièrement d’accord avec cette constatation, sans même qu’ils aient à parler. Heureusement, elle a des couilles, elle. Alors maintenant qu’elle a lancé la bombe, autant assumer.

- « Tu as démis les bras de l’avant-dernier. Celle d’avant, tu lui as cassé les deux jambes. Au bout d’un moment, faut pas t’étonner que personne ne souhaite plus relever le défi : personne ne s’engage dans quelque chose en se sachant déjà perdant. C’est comme jouer au loto.
- « Y’a plein de gens qui jouent au loto. Et 100 % des gagnants ont joué.
- « Tu m’as comprise. Et y’a carrément plus de chance de gagner au loto que de gagner contre toi.
- « Tu ne veux pas essayer ?
- « Ahaha, et puis quoi encore ?! - s’exclame-t-elle en riant, incrédule face à sa proposition. - Je suis un garou, j’ai un très bon instinct de survie. Je refuse catégoriquement de me retrouver en face de toi dans la cage. »

L’honnêteté brute de la culturiste fait pencher l’humeur de Nicola du bon côté.L’atmosphère s’allège immédiatement, au grand soulagement de toutes les autres personnes dans la pièce. Il se rallonge en riant, après avoir pris une gorgée de sa bouteille.

Et Anas revient, flanqué d’un nouveau venu. Un barbu, aux yeux très bleus lui aussi, qui ne paye pas de mine à première vue. Les humains l’observent avec méfiance alors que Janet tente de replacer son visage. Celui-ci à l’air d’être familier avec Nicola. Il s’est levé pour l’accueillir d’ailleurs, ce qui détend immédiatement le public restreint.

Nicola rend l’accolade virile avec une certaine douceur, conscient qu’il pourrait broyer la cage thoracique de son ami aisément. Ethan a bonne mine. C’est agréable de le voir serein et détendu. Et il a eu le bon goût de venir avec un cadeau ! Le vieux saisit la bouteille avec grâce, lit l’étiquette et hoche la tête de manière appréciative. Un bon cru, effectivement. Il aurait aimé le partager, mais son entourage y serait peu sensible.

Anas reprend sa place près de Janet, et il est rapidement imité par le nouveau venu. Tim l’observe encore avec curiosité, alors que les deux autres hommes échangent des messes-basses. Ça ne gêne pas le Roumain, qui enchaîne avec son enthousiasme caractéristique.

- « Les affaires vont bien, merci Ethan. Laisse-moi te faire les présentations avant de t’informer : Anas, que tu connais déjà, et à qui tu dois une bière. Janet, fleur parmi les hommes. Tim, ancien boxeur, Aaron, son ex-entraîneur et Dylan, chargé de cargaisons… Spéciales. »

Chacun salue Ethan avec plus ou moins de chaleur. Le plus vieux, Aaron, reprend aussitôt ses messes-basses en échangeant rapidement avec Dylan. Tim choisit de se lever et d’appuyer son épaule contre un mur. Et finalement, il reconnaît Ethan.

- « Oh ! T’es le mec qui a détruit le favori du patron l’autre fois ! La vache, je ne t’aurais pas reconnu, t’avais la gueule détruite la dernière fois. Heureux de voir que t’as bien été réparé.
- « Le patron a eu du nez. - s’amuse Janet en donnant un coup de coude joueur au barbu nouveau venu.

Nicola lui lance un clin d’œil.

- « Et ce soir, je te propose cette fois-ci d’être parmi les spectateurs. J’ai un match qui m’attend. Une revanche. Ça devrait être intéressant, et qui sait, peut-être que cette fois-ci, tu voudras tenterle Hasard contre moi ?
- « Le fait pas. - lui souffle immédiatement la femme à l’oreille, pas très discrètement. - L’est pas de meilleure humeur ce soir. »
- « Oh Janet… Je sais me tenir. »

Tout le monde dans la pièce pense immédiatement les mêmes mots.

C’est faux.


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Ethan Roman
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Dim 17 Avr - 20:25 (#)

A l’instar de ma première visite, où je me demandais carrément ce que je foutais dans cette bauge, je me sens totalement à ma place. Certes, je ne connais pas encore toute la smala de Nicola mais après une bonne soirée passée en leur compagnie, je ne doute pas que cela sera chose faite. Anas est un chic type au final, j’ai pas l’impression qu’il se prenne la tête. Il vit dans le sillage du vampire, sans que je sache véritablement ce qu’il y fait. Les autres non plus d’ailleurs. Je me doute bien qu’ils œuvrent la journée, gérant les affaires de mon ami. Ca me fait penser, qu’il faut absolument que j’aborde le sujet du garage même si je sais pas très bien comment amener la discussion sur ce terrain. La perspective que Nico devienne le propriétaire du Silver Tools et par extension mon patron, me fait marrer intérieurement. Mais j’avoue que ça serait quand même sacrément sympa de coopérer avec lui. La notoriété de l’établissement est bonne, en plus avec les échos que Dana a laissé sur le net, le chiffre d’affaires commence à grossir et la clientèle est de plus en plus nombreuse. Y’a même des jours où je suis obligé de refuser du monde. Je relègue ce point dans un coin de mon esprit et me concentre sur les différentes personnalités que l’Eternel me présente.

A l’évocation de la bière, je souris, abaisse la tête humblement, déposant ma main sur mon torse. Quelque part, si je n’avais pas percuté cette grande chose longiligne, jamais je n’aurais connu Nico. C’est bien plus qu’une pinte que je lui dois. Cette amitié, aussi étrange puisse-t-elle être, a été terriblement bénéfique pour moi.

- Prochaine tournée, c’est pour moi. Et pas que pour Anas, pour vous tous.

Peut-être que les deux gars du fond arrêteront du coup de blablater dans leur coin. Une impression étrange mais que trop bien connue m’inonde. Je suis l’intrus, une fois de plus, mais c’est devenu monnaie courante dans mon existence. Peu importe si ma présence les contrarie, je ne suis pas venu pour eux, ils devront faire avec.

Saluant tour à tour chaque protagoniste, je souris au dénommé Tim qui, sous une soudaine impulsion se souvient de mon passage.

- Oui enfin, c’était un coup de chance. Une occasion s’est présentée, je l’ai saisie.

Aucune fausse modestie ne se cache dans mes paroles, je suis plutôt mal à l’aise. J’ai échappé, je ne sais toujours pas comment, de me faire broyer par cet espèce de géant, armé de biscoteaux démesurés, grâce à un réflexe sortant de nulle part, le tout dans une semi-conscience. La petite Nénette joue des coudes, il se trame quelque chose. Je ne sais pas quoi, mais ils ont tous l’air d’être au courant d’un truc qui m’échappe. Nicola prend la parole, mettant un terme à mes spéculations internes. J’élève un sourcil ne comprenant pas très bien l’enjeux proposé par mon ami.

- Tu veux que je parie contre toi ? C’est ça ?

Une blondinette se pointe dans l’enclave du Seigneur des lieux, un plateau à la main, s’inquiétant des multiples verres vides séjournant sur la table basse. Levant la main, je lui fais signe de remettre la même chose à chacun ajoutant une pinte pour moi. A travers les hurlements d’encouragement, elle me tend un sourire en abaissant ses longs cils, me faisant comprendre qu’elle s’occupait de la commande. La serveuse tourne les talons, me laissant admirer en toute impunité, son magnifique postérieur. Quelque peu étourdis par cette vue divine, je me tourne vers le vampire et secoue énergiquement la tête.

- T’es dingue ou quoi ? Je ne parierai pas un seul Leu sur ton adversaire. Tout le monde le sait ici. Tu es imbattable ! Mais par contre, je veux bien voir comment tu te bats.

Se penchant légèrement en avant, Janet pose une main délicate sur mon genou, réquisitionnant mon attention. Son index, solitaire, s’élève de son poing et s’agite de manière négative dans l’air. Son regard est chaud mais la malice pétille au fond de ses prunelles. Lentement, elle secoue la tête et m’attire vers elle afin de murmurer quelques paroles à l’oreille.

- Je ne suis pas certaine que tu aies compris l’enjeux, mon cher. Tu ne dois pas parier, mais combattre… contre lui.

Je me redresse rapidement, émets un gloussement, son qui pourrait vaguement s’apparenter à un dindon qui glougloute et les regarde les uns après les autres. Toute la troupe est suspendue à mes lèvres, attendant ma décision finale. Totalement déboussolé, je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Est-ce une plaisanterie ? Ai-je manqué la chute de la blague ?

- Heu…

Pour une fois, les mots me manquent ne comprenant pas pourquoi une telle proposition m’est faite. Les boissons sont déposées devant chaque convive, je ne remarque même plus les formes avantageuses de la miss, totalement absorbé par les mots qui tournent dans ma tête. Machinalement, je saisis ma choppe, la lève en direction de Anas et en prends une bonne lampée.

- Mais pourquoi tu veux que je me batte contre toi ? Nous savons tous les deux qu’une simple pichenette de ta part m’enverra valdinguer à l’autre bout de l’arène, si elle ne me tue pas avant… Tu sais, si tu veux te débarrasser de moi, y’a des moyens plus simples de le faire.

La main griffue ayant mis en pièce la marionnette lors d’une précédente sortie me revient en mémoire, me faisant frissonner. C’est idiot, totalement irréaliste. Finalement, je ris de bon cœur, secouant ma crinière.

- Vous me faites marchez, les gars. Vous avez presque réussi. Allez mon coco, ma main se pose sur l’épaule du caïnite dans un léger claquement. Va te faire plaisir en te roulant dans la sciure. Je bouge pas d'ici et je te mettrai une note, promis, je ne serai pas trop sévère.

Totalement détendu, je prends une bonne gorgée de bière et m’installe confortablement au fond du canapé, posant une cheville sur mon genou, sans me défaire de ma bonne humeur.

Il s’agissait bien d’une plaisanterie… n’est-ce pas ?
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Mer 11 Mai - 16:01 (#)



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La capacité d’adaptation du trentenaire est tout bonnement surprenante. Nicola l’observe plaisanter et s’installer parmi les membres de cette énième clique avec une désinvolture épatante, allant même jusqu’à commander une petite bière. Il n’a peur de rien, semble-t-il. Ou ne calcule tout simplement pas le danger.

Janet a la bonté de le corriger. On mettra sa méprise sur le compte de la tenue aguicheuse de la serveuse qui vient d’apporter les commandes du petit groupe. Dévoilez un peu de peau à des endroits stratégiques, et voilà que les clients vous mangent dans la main tout en remplissant le tiroir-caisse du bar. Astucieux. Une fois que la lumière s’est faite dans le crâne du Roumain, voilà qu’il écarte cette opportunité d’un revers de main, comme si on lui demandait s’il voulait des glaçons avec sa bière. Nicola se vexe.

- « Je te proposais de voir un de ms matchs avant que tu ne te retrouves devant moi sur le ring. Tu sais, pour avoir un avantage. Mais si tu as peur de te faire ridiculiser… - il hausse les épaules, faussement nonchalant. - De toute manière, je ne comptais pas te rendre tes coups. Tu serais réduit en morceaux en quelques secondes, et ça n’aurait rien de divertissant, ni pour l’assemblée, ni pour moi. »

Le vieux se fend d’un sourire hypocrite, que tout son entourage juge malsain. Mais il exerce une étrange fascination sur ceux qui le côtoient, qui sont donc prompts à outrepasser le malaise qu’il leur inspire dans l’espoir d’assister à des choses extraordinaires. C’est comme s’asseoir près d’un prédateur, seulement séparé d’une barrière de verre. Théoriquement, il ne devrait rien se passer. Pourtant, ce frisson de méfiance inquiète est là, à la base de la nuque, suscité par le cerveau reptilien qui se doit de garantir la survie d’un hôte, peu importe le score de son Q.I..

- « J’ai un adversaire plus ou moins volontaire avant toi : une autre vampire, plutôt jeune. Les humains ne craignent rien, je suis là, et je suis un bon pédagogue. C'est son premier rodéo.
- Un bon dresseur, tu veux dire… - grommela une voix masculine dans le fond de la salle, sans oser affronter directement le vampire.
- Tu nous prend pour des animaux ? - la question est sans détour, typique de Nicola. Aaron pousse un long soupir et baisse les yeux.
- Non, bien sûr…
- Mais ?
- Ok. Merde Nicola, j’ai les foies. J’ai pas envie d’être aux premières loges et de servir d’appât pour jeune vampire assoiffée. Et si la cage tient pas, hein ? Si elle te prend de court ? Nous, on ne sera pas assez rapide pour décamper fissa, et encore moins capable de riposter. Et toi, t’es pas ce qu’elle cherchera à grailler. »

Aaron relève les yeux vers lui, courageux jusqu’au bout. Nicola pince les lèvres et se frotte le menton. Il peut comprendre d’où vient cette angoisse. Elle est légitime.

- « Merci pour ton honnêteté. Quelque d’autre partage le même avis ? - trois mains se lèvent timidement : Tim, Anas et Janet.  - Bien. Alors restez-là. Ethan, libre à toi de choisir ton point d’observation. »

Il ne se formalise pas de ce doute envers ses capacités. Au contraire : il juge cela plutôt intelligent. Pas étonnant que cela vienne de ces trois-là, leur prudence est louable. Effectivement, qui pourrait prédire les réactions d’un Nouveau-Né laissant carte blanche à sa Bête ?

Personne, pas même un vampire expérimenté. Est-ce que la foule sortira indemne de cette rencontre ? C’est un pari risqué. Juste le genre qu’il aime.

C’est un peu égoïste de sa part, puisque lui ne risque rien.

L’antiquité attrape ses bandages de boxe et commence à les nouer pensivement, exécutant les gestes avec facilité pour les avoir cent fois répétés. Cherche-t-il à avertir ainsi Ethan du fossé qui les sépare ? La rencontre malodorante de la goule ne lui est pas sortie de l’esprit : l’humain doit comprendre qu’en restant dans son entourage, il risque sa peau. Simplement parce que, éventuellement, lui aussi, malgré son contrôle sur sa Bête, il pourrait se jeter sur lui pour s’abreuver en ressentirait-il le besoin intense. Ethan a beau avoir perdu un membre de sa famille aux crocs d’un vampire, il continue à rechercher sa présence. A l’appeler « ami ».

Il doit ouvrir les yeux sur ce dont est capable Nicola.

Peu importe si cela le terrorise au point de ne plus jamais vouloir le revoir.

- « La bière est bonne ? » - demande-t-il d’un ton léger, terminant d’enrubanner sa main droite. La main « faible ». Les habitués ont-ils remarqué cette faiblesse ?


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Mer 15 Juin - 14:21 (#)

Détendu et heureux d’être du bon côté du publique, je sirote ma bière lorsque le visage de Nicola se chiffonne. Aurais-je heurté la bienveillance de l’Eternel ? Immédiatement mes muscles se contractent et j’abandonne la posture nonchalante en me redressant pour écouter attentivement sa réplique.

- Non attends !

Je secoue intensément la tête, hors de question de me fâcher avec lui. L’amitié que je lui porte est sincère et bien trop importante à mes yeux pour que je lui refuse quoi que ce soit. Les soirées passées en sa compagnie ont toujours été fantastiques, même si parfois un peu étrange. Je ne compte plus les heures de discussion qui se sont écoulées, celles où il me parlait de son passé, où il a appris le mien.

- Nicola, s’il te plaît, écoute-moi. Je n’ai pas compris ce que tu me proposais mais très bien, j’accepte, je relève ton défi.

Sous mon crâne s’impriment, quelques images, sorties d’une autre époque, j’imagine le caïnite vêtu d’une culotte enfoncée dans de grande botte en cuir, réhaussé d’une chemise à jabot et recouverte d’une longue veste en brocart, me giflant à l’aide d’une paire de gant en cuir fin. La bière perd soudainement de sa saveur, laissant un goût âcre planer sur ma langue. Je n’ai aucune envie d’affronter Nicola et encore moins de lever la main sur lui, surtout connaissant ses atouts. J’espère juste qu’il ne va pas prendre cette forme de lambic ou de je ne sais quoi quand il s’est faufilé dans le garage.

Il poursuit sa tirade, ce n’est donc plus une proposition, c’est un fait. Il a clairement décidé que nous nous retrouverions dans l’arène. Je soupire, profondément, élaborant vainement quelques esquives suivies d’une riposte minable. Jamais je ne parviendrai à le toucher, c’est une évidence, la partie est perdu d’avance. Pourtant la voix de Vasili résonne dans ma tête, suivie de celle de ma tendre Garance. « N’abandonne jamais et surtout pas avant d’avoir débuté le combat ». Ce ne sont peut-être pas les mots exacts qu’ils ont prononcés, mais ça résume bien leurs conseils.

Les craintes exprimées par Aaron viennent à peine effleurer les miennes. Les insinuations sont claires, limpides même. Sans compter que la clique de l’Eternel a de l’expérience et seront, en cas de problème, plus prompt au mouvement que moi qui, serait sans défense face à la menace. La cage n’a pas l’air bancale, loin de là, au vu de tout ce qui se passe dans l’arène. Mais j’ai surtout confiance en Nicola, c’est l’homme de toutes les situations, même si, pour le coup, de le retrouver dans la sciure, me fait froid dans le dos. Toutefois, les dires de l’humain font naître des questions. J’hésite une seconde puis me lance. Ne suis-je pas au meilleur endroit pour avoir des réponses ?

- Aaron, je me retourne sur mon assise, cherchant à capter son attention et celle des autres. Quel est le danger d’un jeune vampire ?

Mon regard clair passe d’une personne à l’autre, finissant par s’échouer dans celui, similaire au mien, de mon Ami. Je sais que ma demande peut paraître naïve, presque enfantine, mais je n’ai jamais pris la peine de me renseigner sur les capacités des êtres nocturnes, jeunes ou vieux. Déni ou refus inconscient, je ne saurai le dire et surtout je m’en fiche. J’apprends sur le tas et grâce à mon pote de huit cent ans, mes connaissances s’élargissent rapidement. Je m’en fiche de passer pour le crétin de service, ils vivent dans le sillage d’un gars né aux alentours du treizième siècle, donc, oui, ils doivent tout connaître sur les us et coutume des morts-vivants.

Haussant les épaules, j’essaye de trouver un « coin » plus sécure. Si une furie parvient à sortir de l’arène, je ne donne pas cher de qui que ce soit dans la salle. Autant rester le plus proche de celui qui est le plus à même de me protéger.

- Je vais me rapprocher, histoire de pouvoir bien observer tes feintes et attaques. A défaut de savoir me battre contre un vampire, je saurai à quoi je dois particulièrement faire attention. Bien que… vu la vitesse à laquelle vous vous déplacez… Je sens que ça va être compliqué.

Une peur sourde grandit dans mes entrailles, telle une anguille, louvoyant entre mes omoplates. J’ai pas envie de me retrouver au sein de toutes les attentions, de lever la main sur cette personne que j’apprécie véritablement. Refuser est un affront, accepter est contre nature. Et si je prenais simplement la fuite ? L’amitié perdurerait-elle ?

Je quitte mon assise avec le besoin de me dégourdir les jambes, la nécessité de faire quelque chose, ne pas rester statique. Chopine en main, je passe à côté du caïnite et souris à sa question. Dos tourné à sa cour, voilant ainsi et mon geste et mes paroles, je lève les yeux vers lui, une pointe de défi plantant dans ma voix et dans mes pupilles. Présentant mon poignet, je chuchote.

- Excellente ! Tu veux goûter ?
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Dim 21 Aoû - 20:43 (#)



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Nicola sourit, satisfait d’avoir triomphé des réticences de son ami humain.

Il termine de se protéger les mains. Le ruban rouge détonne terriblement sur la pâleur de sa peau. Sur ses bras nus, on voit clairement les chemins entrelacés des veines où circule un sang fait de plusieurs autres. Un sang qui n’est qu’une imitation de celui qui coulait autrefois dans ces mêmes veines, huit-cents ans plus tôt.

Ethan se rapproche de lui, bière à la main. Il l’observe avec flegme. Avec le temps, le goût de la bière est un vrai mystère pour lui. Et quand bien même il s’en souviendrait, il serait probablement différent de celui de cette bière du XXIe siècle. Un hochement de tête accueille le verdict d’Ethan et alors qu’il pense s’en tenir à là, le voici qui lui tend son poignet. Nicola a un rire bref.

- « Dis-moi, pour un gars qui m’assurait qu’il faudrait que je le tue pour goûter son sang, je te trouve de plus en plus à l’aise avec l’idée ! » - il saisit le poignet tendu et dégaine ses crocs. Lentement, il perce la peau fine, y fait perler le sang, jette un coup d’œil à l’humain. Nul doute qu’il jouait simplement avec le feu. Ethan a tendance à vouloir tester les limites, c’est amusant. Et qui est-il pour lui en imposer ?

Alors il goûte ce sang qu’il promettait ne jamais lui offrir. C’est déjà la deuxième fois.

Sous les yeux de la petite assistance, Nicola prend plusieurs gorgées. Pas trop, car il ne voudrait pas qu’Ethan tourne de l’œil. C’est un petit plus avant le combat qui l’attend, quelque chose pour le mettre en jambes, comme on dit. Puis il relâche le bras de son ami et se passe la langue sur les lèvres.

- « Excellent. Je ne te propose pas de goûter. »

L’effet est toujours immédiat, avec le sang. Il sent son cœur accélérer le rythme et une douce chaleur envahir son corps. Ses jointures semblent plus souples, ses muscles plus réactifs. C’est comme un shot d’adrénaline. Qu’est-ce que c’est bon !

- « Bon, il est temps de passer aux réjouissances, n'est-ce pas ? - Nicola se fend d'un sourire et commence à sautiller sur place. - Je ne voudrais pas faire attendre mon public. On n'a pas tous des siècles devant nous. »

Il dit ça d’un ton si léger, pensent tous les humains de la salle, avec un peu de rancune. C’est facile pour lui.

Après une tape dans le dos au Roumain, il pénètre dans la cage. Derrière lui, des mécanismes s’enclenchent pour garantir la sécurité totale du public en condamnant temporairement les accès au ring. Les grandes vitres sont renforcées. Il y a une zone de sas qui entoure le ring en lui-même.

Nicola attend, s’étirant avec nonchalance, adressant des saluts aux gens venus assister au combat. Finalement, au bout de deux minutes, apparaît une femme dans la trentaine, d’origine indienne. Elle porte des protections aux coudes et aux genoux, ainsi qu’au buste. Elle a l’air extrêmement mal à l’aise.

L’antiquité s’approche d’elle les bras écartés et l’accueille avec un sourire bienveillant. Le public ne peut pas entendre leur conversation, mais lorsqu’il retourne à sa place, la femme à l’air un peu plus sereine.

La cloche du début de combat retentit.

Nicola reste à sa place, les mains dans le dos, pendant que son adversaire semble en proie à une lutte intérieure. Lentement, elle se recroqueville sur elle-même, les mains sur la tête. L’Italien lève ostensiblement les yeux au ciel et lui lance ce qui doit être une provocation, puisqu’elle se redresse, les yeux luisant de colère, les crocs à découvert, et se jette sur lui.

C’est bestial et violent. La violence des coups fait trembler les vitres renforcées lorsqu’ils se projettent contre. Le choc des poings qui se rencontrent se répercutent autour d’eux dans un bruit sourd, qui fait grincer des dents le public. Personne ne voudrait être à leur place dans ce ring.

La Nouvelle-Née est rapide, bien plus mobile que Nicola, mais elle s’épuise inutilement, à jouer au chat et à la souris. Les coups de son adversaire font mouche régulièrement, et ils ont un effet dévastateur. Les protections des genoux ont tôt fait d’être arrachées, puisque inutiles : elles bloquent les mouvements plus qu’elles ne protègent.

Le but de Nicola est simple : l’empêcher de bouger suffisamment longtemps pour la mettre K.O..

Et il finit par y arriver. Il la saisit au vol par le cou et la plaque violemment contre le sol. Les vitres tremblent comme si un séisme avait eu lieu. Elle se débat avec férocité, griffant tout ce qu’elle peut, donnant des coups de pieds vicieux, mais rien n’y fait contre la poigne de l’antiquité.

Un coup de coude assomme la Nouvelle-Née proprement.

Et juste comme ça, Nicola se redresse, fait la moue en roulant son épaule droite, puis retourne vers ses humains.

Ses griffures se referment à vue d’œil.

Il est accueilli par un silence éloquent.

Sans un mot, puisque de toute manière le son est bloqué, il fait signe à Ethan de le rejoindre, tout sourire.

Personne n’a envie d’être à sa place.


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Ven 9 Sep - 18:27 (#)

Plaisanteries et ambiance plus légères avant la mise à mort ? Je porte mon verre à mes lèvres, mon regard bleuté plongé dans celui de Nicola. Il n’a pas la moindre hésitation, aucun nuage ne traverse l’azure de ses pupilles. Déjà ses doigts se referment sur mon bras pour l’attirer vers ses lèvres. Avec fascination, je le regarde dévoiler ses crocs. Ma conscience hurle, se débats et jure mais je ne bouge pas. Je le regarde percer ma peau. Des gouttes carmine s’échappent, elles fuient mon cops que j’ai promis de protéger contre ses êtres non soumis au sablier du temps. Nos âmes se croisent, il sait que ce n’était qu’un jeu, je sais qu’il le ferait. Jusqu’où suis-je prêt à aller ?

Ancré dans mon poignet, j’inspire la bouche ouverte. L’euphorie vient troubler ma contrariété, une douce chaleur chasse la sueur froide. Aucune révolte ne bouscule ma conscience. J’apprécie, j’aime, je savoure l’ivresse qui m’envahit. Un hoquet silencieux s’échappe. Est-ce la surprise du geste qui n’a eu aucune hésitation ou le constat de la béatitude qui me submerge. Mais déjà il se retire, trop vite, trop court. Hébété par la bousculade des sentiments contradictoires, je reste immobile, figé par l’expérience bien trop plaisante. L’envie de recommencer est déjà là. Je hais cette tentation naissante.

La voix de Nicola me pousse hors de ma torpeur. Rageur, je ramène mon bras vers mon corps qui baigne encore dans un bien-être hors du commun. Sans même regarder la plaie, je fourre ma main dans ma poche, hausse les épaules et réponds avidement.

- Non, ca va aller ! Pas de commentaire ! On en reparlera… un jour… peut-être…

Il change de sujet, heureusement. Efface ce moment gênant, ce trou dans le temps, qui n’a pas existé et qui, pourtant, perdurera à tout jamais dans ma mémoire. Ça m’apprendra à vouloir jouer avec le feu. A présent, je sais. Je comprends. Et j’en veux encore.

Attentif à ses paroles, j’écoute, presque gêné d’entrer dans ce monde que je réfute à grands cris. Je hoche la tête, sans réellement savoir à quoi m’attendre. Comment peuvent-ils être encore plus rapides, mon œil d’humain lambda ne va même pas percevoir les mouvements. Sadiquement et pour ce qui s’est produit il y a quelques minutes, je souhaite intérieurement que Nicola se prenne une rouste. Idée tout de suite niée, je ne veux pas qu’il souffre, je veux qu’il en ressorte vainqueur. Je me déteste d’évoluer dans ce monde empli de contradictions. Mon attachement envers ce vieux vampire est réel, tout en exécrant sa nature d’immortel.

Qu’est-ce qu’une Bête ? Je ne suis pas à l’aise avec ce vocabulaire qui m’est étranger. J’aimerai avoir plus de temps pour comprendre, mais Nicola a déjà l’esprit tourné vers le combat. Je pourrais demander à Aaron ou aux autres, mais je souhaite assister ce quoi je dois m’attendre. Un long frisson parcourt mon échine. Et si le nouveau-né avait raison de l’Ancêtre ? Qu’il parvienne à sortir de la cage, le carnage serait immédiat. Que faire, rester près de l’arène ou au contraire trouver un endroit éventuellement salutaire ? Je veux voir. Je veux voir ce que mes yeux d’humains me permettent de voir.

Aucune animosité plane dans leur regard. Des paroles sont échangées, inaudibles pour le public. Mon Ami est serein, elle, nettement moins, même après les quelques phrases délivrées par l’Aîné. Cloche qui sonne le glas, observation et action. Les coups sont terribles, je recule lorsque les parois tremblent. Comment survivre à ça ? L’agilité de la femme est envieuse mais il est trop fort, trop aguerrit et surtout beaucoup plus expérimenté que la demoiselle. Les griffures suintent à peine que déjà les striures vives se referment. Le temps défile, trop vite, qu’elle est déjà à terre, assommée par un coup de coude d’une rare violence. Je bats des cils, imaginant mon crâne explosé comme une pastèque qu’on aurait lâchée du cinquième étage, s’il porte le même coup à ma propre tête.

L’adversaire inerte est évacuée rapidement sous un tonnerre d’applaudissements. Aucun membre de son clan, par contre, ne lève un petit doigt, blasés de voir le Maître triompher aussi facilement. Puis, son regard se tourne vers moi, comme ceux de la majorité des spectateurs.

Mon sang se glace dans mes veines, ma respiration se bloque et mon cœur commence à battre plus fort. Nerveusement, je passe une main dans mes cheveux puis vide ma chope d’un trait. De toute façon, ça ne changera rien à l’issue du combat. Les jambes en coton, je contourne le ring tout en m’occupant de rassembler ma tignasse en un chignon serré. Malgré l’apport récent en bière, j’ai la bouche sèche et je sens une sueur froide naître sur mon front. Dans quoi je me suis encore fourré ?

En pénétrant sur le ring, un cocktail d’odeurs m’empli les narines, me faisant plisser le nez. Je me débarrasse de mon blouson que j’abandonne près de la porte qui s’est refermée sur moi. Les acclamations sont étouffées, il n’y a plus que Nico et moi. Ses blessures sont effacées, avalées par son éternité, ce qui ne sera pas mon cas. Je me baisse, attrape une poignée de sciure et la frotte contre mes paumes moites. J’aurai dû passer aux toilettes avant. Si je me fais dessus, ça aurait pu être moins dramatique. Je déglutis, une fois de plus, ne trouvant toujours pas de salive à avaler. Une seule pichenette suffit à me mettre KO, j’en suis conscient.

Pourquoi veut-il se battre contre moi ? Cela n’a aucun sens. Je n’ai aucune chance.

- Nico, pourquoi ?

La morsure, douce et délicieuse, se rejoue dans mon esprit, accompagnée de cette énergie euphorisante qui m’a gagné. Elle court encore en moi, je crois que je peux la sentir, où n’est-ce que mon imagination ? Qu’importe. Ma tête s’abaisse légèrement et les bleus de nos iris s’affrontent. Je souris, pris soudainement d’une envie de rire. Nerveux et proche de l’aliénation. Mes paupières se ferment, rompant l’échange. J’inspire profondément, cherchant derrière mon rempart quelques images apaisantes. Rien ne vient hormis une frayeur grandissante. La terreur exsude de chaque pore que je possède.

Je m’avance vers mon adversaire d’une démarche qui se veut décontractée, alors que j’ai l’impression de me déplacer de manière saccadée comme un robot qui menace de tomber en panne. Je n’ai qu’une solution pour espérer avoir le dessus durant trois secondes, après quoi, il me mettra à terre en moins de temps qu’il faut pour le dire : la surprise.

La petite poignée de sciure dort toujours dans mon poing fermé. Mon cœur tape si fort que je crois l’entendre résonner. Mes joues se colorent, j’ai chaud, chaque membre tremble, je vais me faire laminer. A portée de jet, je lance la poussière de bois à la face du vampire. Je n’ai aucune idée si elle atteint son but, pas le temps de vérifier. Une feinte gauche – droite, je le contourne pour me retrouver derrière lui et passe mon bras droit par-dessus ses épaules, plaquant mon avant-bras contre sa gorge, mes mains se rejoignent, formant un poing, donnant plus de force à mon étreinte. Puis je recule, cherchant à le faire tomber en arrière. Ça, c’est la théorie, la pratique…

Est-ce vraiment une bonne idée que de vouloir étrangler un être qui n’a pas besoin d’air pour vivre ? Pas certain que ma conception d’un combat contre un Eternel soit vraiment la bonne… Il fallait bien tenter quelque chose. Toutefois, écraser sa pomme d’Adams ne doit pas être agréable.

- J’veux pas te faire de mal. Je ne suis pas un adversaire digne de toi. Désolé.
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Mar 7 Fév - 22:01 (#)



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Voir s’approcher Ethan, blanc comme un linge, les jambes tremblantes, Nicola se demande s’il n’est pas un cruel envers cet humain qui lui rappelle tant Settimo. Puis il chasse cette pensée d’un simple sourire en coin. Il sait bien, qu’il est cruel. Ce n’est pas maintenant que ça changera. Et puis il faut bien qu’il teste les limites de cet homme ; qu’il voit où commence le courage et s’arrête… la confiance aveugle ? La foi en l’humanité, et en la sienne en particulier ? l’idiotie ? Comment savoir exactement, sans le mettre à l’épreuve ? Sans le voir confronté à la menace qu’il représente pour tout humain, le prédateur absolu conçu pour incarner la peur ; pour rappeler aux hommes qu’il y a plus haut qu’eux dans la chaîne alimentaire ?

Ethan devrait déjà le savoir. N’a-t-il pas confessé haïr les vampires ? Et pourtant le voilà qui entre volontairement dans l’arène affronter un de ces êtres honnis, qu’il appelle "mon ami" et à qui il a offert son sang. Jusqu’à où le considère-t-il différent des autres "monstres" assoiffés d’hémoglobine ? Parce qu’il a beau avoir l’allure d’un homme du monde, l’air d’un être civilisé du XXIe siècle ; d’avoir parfait sa maîtrise de la Bête qui sommeille en tout cainite, Nicola est et reste un vampire.

Et comme tout vampire, pour continuer à arpenter cette terre, il lui faut du sang. Ce qui fait de lui un monstre.

Ethan est dans l’arène, prêt à défaillir plutôt que se battre. Settimo avait arboré la même expression, à quelques détails près, lors de leur rencontre fatidique dans la jungle.

L’enfer vert…

Ses yeux bleus ressortent d’une manière saisissante. L’Ancien pousse un soupir. Il sait bien qu’il ne pourra jamais faire revivre le passé, que ce Roumain des temps modernes est fondamentalement différent de l’Italien du XVIIIe, et pourtant… Pourtant il ne peut s’empêcher d’espérer, de désirer une seconde chance avec cet homme qui semble de toute évidence prêt à tout pour se montrer digne de son amitié.

Le mouvement leste pour ramasser un peu de la sciure qui couvre le sol de l’arène n’a pas échappé à ses yeux acérés. L’Ancien prend une inspiration à pleins poumons, gonflant son ventre appréciant l’afflux d’oxygène dans son organisme, puis exhale lentement, la bouche entrouverte. Ethan hésite, mais son tempérament le poussera à lancer l’assaut tôt ou tard. Il n’est pas des plus patients.

Nicola l’est juste un tout petit peu plus que lui.

Devant sa question  innocente , la même que la première fois où il l’a lancé dans une cage, il hausse simplement les épaules. Il n’a rien à répondre d’autre que "et pourquoi pas ?" et ce ne serait probablement pas suffisant pour l’homme en face de lui. Le vieux ne sait pas ce qui le motive. Ou plutôt, il n’a pas envie de l’avouer.

L’humain s’élance enfin ; le feintant par deux fois, ce qui l’amuse beaucoup ; puis il tente une approche peu réglementaire. C’est moche, de prendre à revers son adversaire. Il lui écrase la gorge et tente de l’entraîner vers l’arrière pour le déséquilibrer, grinçant entre ses dents qu’il ne veut pas lui faire de mal. Nicola éclaterait d’un rire franc si personne ne tentait de l’étouffer à l’heure actuelle. A la place, il tousse et se laisse aller en arrière. Puis il fait volte-face en sentant la prise de son adversaire se relâcher naturellement pour suivre son mouvement vers le sol, puisqu’il va dans son sens. Son poing vient s’écraser dans le ventre du Roumain, qu'il tient par la nuque.

- «  Ethan, me faire mal ? Mais tu devrais être comme moi pour cela… et avoir quelques centaines années de plus. »

Et maintenant que l’idée est lancée… Sa main part vers les cheveux longs, trop longs, de son adversaire et les agrippe telle une serre d’oiseau de proie se refermant. Il l’oblige à tourner son visage vers lui et l’étudie un court instant.

- «  Je me demande… Si tu étais comme moi... »

Il ne termine pas sa phrase.  De ses deux mains, il ré-assure Ethan sur ses pieds et rajuste sa chemise.

- « Tu n’as pas idée de ce que je représente, n’est-ce pas ? Un vampire de huit-cent ans ? C’est tout simplement inconcevable,ça n’a plus de sens qu’un vampire de cent ou deux-cents ans. Ce que j’ai vu, ce que j’ai fait, comment j’ai vécu ; tu penses probablement que ça ne peut pas être si différent que ce que tu vis actuellement. Tu n’as pas peur pour les bonnes raisons, tu sais juste que je suis plus fort que toi. »

Nicola s’éloigne de deux pas, laissant à Ethan le temps de se remettre de cette première passe et du choc.Pas une seule personne saine d’esprit ne l’aurait suivi dans cette arène, surtout pas à sa demande, et pourtant, voici l’homme en face de lui, coincée, devant des spectateurs. Sur le ring, face à une horreur de la nature.

C’est presque risible, qu’il s’obstine à oublier leur différence fondamentale.

Comment lui montrer clairement ce qu’il est ? Maintenant qu’il a échappé à la Mort ? Comment lui faire comprendre, ou tout du moins envisager, les époques qui les séparent réellement ? Le don d’illusions de Salâh lui aurait été bien utile à ce moment pour lui permettre d’illustrer ses paroles.

- «  Ethan… Jeune Ethan, je suis vieux. Ma chair devrait avoir pourrie, mes os être redevenus poussière, mon nom oublié…. Tu as face à toi un vestige, quelque chose qui a vu ce pays naître. Selon votre calendrier, je date de 1197. Approximativement.Tu as face à toi un homme qui date littéralement du 13e siècle. Qui vient d’une île minuscule d’Italie, dont il porte le nom parce que ses parents étaient à court d’idées pour le quatrième garçon. Pour qui le voyage de sa vie s’est résumé à des semaines à bord d’un bateau puant et surchargé d’autres pauvres hères affamés voulant défendre la Sainte-Terre. - Nicola peine à se souvenir des détails de ce voyage. La seule chose qui lui revient, qu’il ressent encore au plus profond de son être, c’est de la faim qui le tiraillait. Bien pire encore que la Soif d’un Vampire lors d ses pires moments. - Et à peine débarqués, ces gens ont été jetés à l'eau par les Maures. Moi, j’étais jeune, robuste malgré le scorbut et la vermine me couvrant le corps. A dix-huit ans, Ethan, que faisais-tu ? Moi j’étais racheté en tant qu’esclave. Je suis devenu chien de guerre. Et, comme tu le sais déjà, je suis mort sur un champs de bataille oublié par la grande Histoire. »

Le vieux retrace la courbe de l’arme qui lui a défoncé la cage thoracique, venant amener une de ses côtes à perforer un poumon, provoquant une lente asphyxie douloureuse. Son regard bleu ne quitte pas le visage d’Ethan qui semble se morpher en d’autres traits plus jeunes, plus durs, plus rugueux.

- « J’aurais été vivant, nous deux à la même époque face à face dans cette arène, je t’aurais probablement tué. Aujourd’hui, sans aucun doute, je te tue. Tu le sais, et pourtant, tu m’as suivi dans l’arène. Tu m’as vu défoncer un crane sans mal, tu m’as vu mettre à terre une des miens, tu m’as laissé boire ton sang, et pourtant, tu es là. Pourquoi ? »

Il est temps de corser les choses. De choquer définitivement Ethan, pour qu’il ouvre les yeux sur ce qu’il a réellement face à lui. Nicola découvre ses crocs, qui luisent sous la lueur froide des néons. La foule ne peut pas en voir exactement la longueur, les spectateurs ne peuvent qu'interpréter ce geste que comme de l'intimidation, tout le monde connaissant cette histoire de crocs de vampire sans que personne n'en connaissent la longueur exacte.

- « Ethan… Me trouves-tu toujours homme ? »


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Jeu 6 Avr - 18:31 (#)

L'issue du combat est connue d'avance, il n'y aura pas de surprise, pas de suspens, tout le monde le sait. La pression sur la gorge de Nicola est maintenue tant que je peux. J’ai l’impression de me battre contre une statue de pierre et de vouloir écraser la glotte d’un géant de granit. Les gens crient, nous insultent, nous encourage, rient et parient. Ils ne misent pas sur le vainqueur mais sur la façon de comment le petit humain va crever. Exsangue, les membres arrachés ? Que va faire le vampire ? Va-t-il jouer avec sa proie, lui offrir une mort lente et cruelle ? Ou au contraire, l’achèvera-t-il bien trop rapidement, retirant le plaisir sadique à ce publique qui réclame une arène souillée de son sang ?  

Je ne serai rien de tout ça. Je vais leur prouver, si Nico m’en laisse le temps, qu’ils se trompent tous. Si j’ai tort, je le paierai de ma vie. Je suis prêt à accepter ce prix-là.

Nos corps basculent en arrière. Mon dos heurte brièvement la robuste grille qui nous entoure. Je m’attendais à une résistance, or, c’est tout le contraire qui se produit. Il suit mon mouvement, me faisant lâcher prise. Il en profite, c’est de bonne guerre, pour me frapper. Un boulet de canon heurte mon ventre, mes organes protestent, un flot de bière remonte et je crache la dernière gorgée en me pliant en deux, mes mains ayant abandonné le cou du vampire, se crispant sur mon estomac. La paume froide de l’Immortel se pose sur ma nuque et s’accroche à ma chevelure. Décidément, il est grand temps que je coupe cette tignasse. Sa voix parvient à se frayer un chemin dans mon univers douloureux et malgré les vagues de souffrance que m’envoie mon abdomen, je parviens à ricaner.

Je ne suis plus maître de mes mouvements. Son visage, si proche du mien me permet de plonger dans l’abîme de ses pupilles qui ressemblent à des cristaux luisants.

- Non, je ne suis pas comme toi mais nous sommes pareils.

Haletant, je me retrouve sur mes deux pieds et il réajuste sa tenue. La foule exprime son indignation, elle veut que ça saigne et là, elle est frustrée. Malgré les conjectures, je perçois la voix de Nicola. 800 ans. Il a raison, je ne peux imaginer, moi qui ne suis sur cette terre que depuis presque 35 ans. Je fouille ma mémoire, mon pays n’existait même pas, il n’y avait que la Valachie et la Moldavie. Il y a bien un roi hongrois, nommé André II qui a lancé une campagne militaire en Transylvanie, mais c’est à peu près tout ce que je sais. Je préfère m’accrocher à un truc qui me parle nettement plus. Les opus des Assassin’s Creed débutent dans les années 1190, lors de la Troisième Croisade. A-t-il vécu ce que j’ai joué ?

Les paroles sont abruptes et je ne sais pas où il veut en venir. Qu’importe ce qu’il a vu, ce qu’il a vécu, je crois à l’Amitié, la Vraie. Suis-je utopiste ou simplement profondément crédule ? Combien de fois ai-je essayé d’imaginer sa longue existence, les guerres, les joies, les peines, les pertes, les personnalités politiques, les artistes. Durant nos conversations, j’ai tenté de comprendre, de savoir et je n’ai reçu que des bribes. Mais je ne cesserai de lui demander de me conter sa vie, jusqu’au jour où sa langue se déliera.

- Tout est différent, je hausse les épaules, impuissant. Comment pourrais-je imaginer ? Je n’ai que ce que les livres d’histoire veulent bien me donner. Les époques que tu as traversées ne se ressemblent pas et n’ont rien à voir les unes avec les autres, mais encore, comment pourrais-je me les représenter ?

Le tumulte gronde, le public s’impatiente. Pourtant, je ne bouge pas et ne leur accorde aucun intérêt. Je veux savoir pourquoi il m’a fait venir dans cette arène et je ne m’en irai pas tant que je n’aurai pas de réponse, que ce soit en un morceau ou plusieurs.

- Beaucoup plus fort, oui. Et ? Si tu avais voulu me tuer, il y a bien longtemps que cela serait fait.

Je me redresse, retrouvant une verticalité moins bancale. Les bras balans, je ne me battrais pas contre lui. Cela n’a aucun sens, cela n’est même pas distrayant pour lui, car bien trop facile, surtout dans cet enclos où il n’y a nulle échappatoire ou cachette. Il est têtu, mais moi aussi.

Deux minuscules mètres nous séparent. Je ne bouge pas, mais écoute attentivement. Le Mad Dog disparaît au fil de ses mots, je me projette dans ses dires. Moi aussi, je viens de l’ancien continent. J’utilise ce que ma mémoire à bien voulu garder, des films, de ma propre imagination, des jeux vidéo pour créer un fil conducteur de son existence. Mes paupières se sont abaissées pour mieux laisser les images défiler. Sa mort éveille un rictus compatissant, mais ce n’est qu’une projection, pas un souvenir.

La réalité reprend ses droits lorsque j’ouvre les yeux. Une longue liste de ses exploits est énumérée avec une question finale. Je souris. Tous ces siècles ne lui ont donc rien appris ? N’a-t-il jamais pu, su faire confiance à quelqu’un ? Sincèrement et entièrement ?

- Parce que je crois en toi.

Mon sourire se tarit mais je suis serein. Mes muscles sont détendus et mon attitude n’exprime aucune agressivité pour le plus grand déplaisir des spectateurs. Je les oublie, il n’y a que Nicola qui compte.

Au prix de je ne sais quel effort, l’Immortel change, se transforme en une sorte d’homme-lézard. Malgré l’effroi qui me submerge et la peur qui se fraye un chemin insidieux le long de ma colonne vertébrale, je garde mon regard rivé sur la créature. A-t-il oublié le soir où il s’est introduit dans le garage ? Son paraitre était plus repoussant que celui adopté actuellement. Un sourire sans joie refait surface et je secoue imperceptiblement la tête de manière négative. Pauvre Nicola. Pense-t-il véritablement que c’est l’apparence qui fait ce qu’il est ?

Avec lenteur, je mets genoux à terre, sans jamais le lâcher du regard. Agenouillé, je hausse les sourcils et le questionne muettement. Il me semble que je suis immobilisé, qu'aucun mouvement n'est possible.

Le temps semble s’arrêter, les cris et vociférations s’estompent pour mourir dans une autre dimension. Nous sommes seuls dans cette arène, seuls au monde. Les minutes s’égrainent, adoptant une démarche hésitante, jusqu’à l’arrêt. Ce n’est qu’une perception, je le sais, mais qu’importe. D’une voix fine, qui sera entendue par le caïnite seul, je réplique.

- Quelle que soit l’enveloppe que tu choisiras, tu resteras Nicola Alighieri. Ce n’est pas l’apparence qui fait l’homme que tu es. J’ai confiance en toi.
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Lun 10 Avr - 17:14 (#)



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« “Le regole sono per i bambini. Questa è la guerra, e in guerra l’unico crimine è quello di perdere.” Joe Abercrombie »


Il semble qu’Ethan trouvera toujours le moyen de le surprendre. Nicola le regarde s’agenouiller devant lui, ignorant la foule et le silence de mort qui pèse sur la salle, ses yeux ne quittant pas les siens.

Bonne Mère, ce Roumain n’a pas de sens de survie. En oubliant le fait qu’il l’ait suivi volontairement sur ce ring, le voilà maintenant qui appelle à son instinct de prédateur en lui tendant presque son cou ! Le vieux l’observe avec de grands yeux, sans même se rendre compte que sa mâchoire s’est décrochée sous l’effet de la surprise. Cet homme se met en position de faiblesse alors qu’il est déjà à sa merci. Nicola ne revient pas de ce comportement terriblement dangereux pour lui, alors que son instinct animal lui crie de passer à table.

C’est un miracle qu’il ait dépassé les trente ans, pense-il en l’écoutant, abasourdi par la tournure des événements.

Son comportement aussi bien que par cette loyauté qui semble indéfectible, et cette confiance absolument aveugle envers un être qui appartient à la race responsable de la mort de sa femme, le rend absolument perplexe. Il ne pensait pas lui avoir fait une telle impression.

De temps à autres, les humains qui sont amenés à le côtoyer réagissent ainsi : ils cherchent à s’attirer ses bonnes grâces en étant de dévoués hommes et femmes de main. Partant du principe qu’il vaut mieux satisfaire les désirs d’un monstre plutôt que de tenter de le chasser, par peur des représailles, ces mortels exaucent ses souhaits, lui vouaient même un culte fut un temps, se rendent agréables et utiles dans l’espoir d’apaiser le monstre assoiffé de sang et de bénéficier de sa protection.

Mais à cette époque précise, ce comportement n’a plus de raison d’être, et même si Ethan vient de la campagne roumaine, Nicola peine à comprendre l’origine de cette attitude, surtout chez un farouche opposant aux vampires.

Ses griffes disparaissent, ses écailles se résorbent et sa langue redevient humaine, ce qui lui permet de répondre sans sifflement désagréable.

- « Je crois que de nous deux, c’est toi le plus fou, Ethan. - son ton laisse paraître son incrédulité totale. - Heureusement que tu n’es pas comme moi. Tu aurais été tout simplement terrifiant. »

Il ne comprendra probablement jamais comment cet homme fonctionne. Même ses Infants, bien que loyaux au possible, avaient eu une raison de vouloir se tenir à ses côtés dans l’éternité : la puissance. Il avait été ravi d’exercer à son tour le rôle de mentor, de partager ses connaissances et de les guider sur leur chemin, bien que plus court que le sien, mais pas un n’aurait accepté de se tenir enfermé dans une cage avec lui en étant encore humain. Settimo savait que son salut passait par lui, tout comme Dmitri. Son cœur… elle désirait la puissance, il pouvait lui offrir et ainsi, peut-être obtenir une place à ses côté.

Peut-être Kikue.

L’Italien regarde d’un œil nouveau l’homme encore agenouillé, comme prêt à accepter d’être sacrifié sur il ne savait quel autel. Non, il ne comprend pas, ce n’est pas un raisonnement qu’il est capable de suivre, mais il l’a déjà vu à l’œuvre. Ce n’était pas à Settimo en vérité qu’il lui faisait penser, mais à cette incroyable Japonaise dévouée corps et âme.

Il finit par sourire, paternaliste. Lentement, pour ne pas l’effrayer davantage et accélérer encore le rythme du cœur qui bat contre sa poitrine, le vieux s’approche du jeune homme. Il lui pose la main sur le haut du crâne, et il sent les tremblements qui le parcourt tout entier.

- « Si un jour la peur de la Mort se fait trop forte, viens me trouver. En attendant, je suis heureux que tu traverses ma route. »

Après lui avoir ébouriffé amicalement les cheveux, Nicola se retourne sans ajouter quoi que ce soit d’autre et  fait signe que le combat est terminé. La foule est déçue, à en juger par les cris, mais il s’en moque. C’est tout pour cet adversaire, qui frôle la crise cardiaque. Les portes se descellent dans un chuintement agréable, et il se dirige vers la sortie. Il en a assez vu.

Avant de quitter le ring, il se retourne vers Ethan et lui adresse un signe d’encouragement.

- « Tu peux me suivre. Des bières t’attendent sûrement. »


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Mar 11 Avr - 18:41 (#)

Tremblant comme une feuille, le regard rivé sur les étoiles scintillantes que sont les yeux de Nicola, j’ai l’impression que le combat, qui n’a jamais vraiment commencé, est terminé. Mon t-shirt colle à ma peau, trempé de sueur, des copeaux de bois en guise de décoration. L’estomac au bord des lèvres, je n’ose bouger. Mes muscles hurlent de douleurs, tétanisés par la peur, par l’appréhension des coups à venir, de la souffrance à ingérer.

Mais rien ne vient. Je lis sur son visage l’incrédulité totale et cela me réjouis intérieurement. Malgré ses huit siècles, lui qui croyait avoir tout vu, tout vécu, se laisse encore surprendre par l’être éphémère que je suis. Que suis-je dans son existence ? Un battement de cil, rien de plus. Et pourtant, je suis là, devant lui, sans une égratignure.

L’apparence reptilienne régresse et finit par disparaître, ne laissant que l’humain, me permettant de respirer plus librement. Je ne sais quelle magie est à l’œuvre et comment il fait pour imposer cette transformation à son corps, qu’importe, j’avais raison. Le paraître n’est qu’une coquille, ce qui est important, c’est ce qui fait l’homme.

Des mots tombent. Dérivé d’un compliment ? La folie, fait-elle partie de l’éternité ? Ce soir, il a joué, m’imposant d’entrer dans l’arène. Ce soir, j’aurai des réponses. Un touché, rapide, comme une caresse que l’on offre à un bon chien, est dédiée mon crâne et une gestuelle est effectuée, ordonnant l’ouverture de la cage.

Le publique hue, siffle, certains applaudissent. Qu’importe. La nuit est encore jeune, d’autres combats vont suivre, rassasiant ce besoin bestiale qu’ils attendent. Le sang coulera mais ça ne sera pas le mien.

Lentement, j’impose à mes muscles le redressement. Grimaçant, alors qu’aucune blessure n’est visible, je me lève. L’immortel semble fuir le cercle et me promet à boire. Bien plus difficilement que je l’imaginai, je lui emboîte le pas, sans un regard pour cette foule qui me hait pour avoir saboté l’affrontement. J’allonge tant bien que mal, mon enjambée afin de rattraper Nicola.

Le tumulte meurt dès la lourde porte refermée, apportant un peu de paix à mon esprit en ébullition. Nous sommes seuls dans ce couloir, il n’a pas besoin de protection, de soins, il est le Maître en ces lieux, l’Invaincu. J’attrape son épaule et l’oblige à se retourner, chose improbable mais il se laisse faire. Une nouvelle fois, nous nous faisons face, mais cette fois-ci, il n’y pas de public, pas de cri, pas de jugement.

- Nicola, pourquoi as-tu fait cela ?

Je suis en colère mais ma voix est exempte de toute fureur, elle est même douce. J’inspire profondément, évitant à la bile qui tapisse ma gorge de remonter. Les émotions trop fortes ne me réussissent pas. Je ne lui laisse pas le temps de répondre et j’enchaîne. Le besoin d’exprimer mes ressentis est impérieux, je ne peux contenir ce flot qui me submerge.

- Je sais ce que tu es. Le Prédateur Ultime. Il te suffisait d’une pichenette pour m’envoyer au tapis, ou tout droit au cimetière. Pensais-tu vraiment que je n’ai aucune idée de tes capacités, de ta supériorité ? Je n’ai pas besoin que tu m’entraînes dans une arène pour découvrir que tu possèdes une force surhumaine. Je le sais, car je t’ai vu à l'œuvre... pour me sauver la vie. L’as-tu déjà oublié ? Si tu n’avais pas été là, je serais très certainement déjà six pieds sous terre. Pour ta gouverne, oui, j’ai eu peur et je n’ai pas honte de le dire, mais je savais que tu n’allais pas agir. Mais tu ne comprends pas pourquoi et tu pensais certainement trouver des réponses en me tabassant ? En me mettant à terre comme un taureau bardé de banderilles ? Tu dis que je parle trop, tu entends mes paroles mais ne les écoutes pas. Ne suis-je donc pas digne de ton intérêt ?

Quelques secondes s’écoulent, le temps de prendre mon souffle, mais je n’en ai pas terminé, loin de là. Les choses doivent être dites. Et ce soir, je ne m’en priverai pas. Je lève la main, lui refusant la parole.

- Ne m’interromps pas et surtout ne lève pas les yeux au ciel, c’est extrêmement désobligeant. Tu as tout un cheptel de personnes autour de toi, mais pourquoi sont-ils avec toi ? L’argent ? La notoriété ? L’immortalité ? Y’en a-t-il un parmi eux, un seul qui serait entré dans cette fichue arène ? Réfléchis bien à ce que tu vas dire. Il n’y a personne que tu dois épater, il n’y a que toi et moi. Tu sais, le petit garagiste, crédule, ignorant toutes ces choses qui se sont révélées il y a quelques années. Celui de qui on peut se moquer sans qu’il en prenne outrage. J’ai eu de la chance la première fois quand je suis venu ici, un sursaut de lucidité qui m’a fait gagner, suscitant ton intérêt. Sauf que ça a éveillé autre chose. Moi, je suis resté le même et mon amitié, je te l’ai offerte, sans condition. Simplement. Me foutant éperdument de ce que tu es, car ce n’est pas ta condition, ta richesse, ton savoir, ou ton interminable errance sur ce caillou qui fait que je te trouve cool et sympa. Je ne veux rien de tout ça, juste ton amitié. Es-tu capable de me la donner ?

Le couloir dans lequel nous nous tenons est étroit et le plafond un peu trop bas à mon goût. L’air me manque mais je souhaite terminer cette conversation qui s'apparente à un monologue, j'en ai bien conscience. J’inspire lentement, faisant taire cette angoisse paralysante qui commence à m’envahir.

- Je crois en cette amitié, sincèrement. Je ne serai que de passage dans ton immortalité, une virgule, rien de plus. Mais si durant ce temps, je peux t’amener un peu de bonheur et quelques sourires, alors j’aurai tout gagné… et toi aussi.

J’étouffe. Il faut que je fasse abstraction de ce lieu un peu trop confiné. Ce n’est que mon imagination, tout va bien. Je me force à respirer lentement, normalement. Mes poings se serrent, obligeant ma conscience à se concentrer sur cette infime douleur et non à mon environnement. De la sueur froide coule sur mon front que j’essuie d’une main tremblante. Il pourra mettre cela sur le compte du contrecoup. Ou peut-être se souviendra-t-il de ma claustrophobie.

- Je savais que tu n’allais pas me blesser. Je suis une proie bien trop facile, inintéressant, mais tu voulais voir jusqu’où je pouvais aller. Je pense que tu as ta réponse. Et si un jour, je devais me saigner pour te garder "en vie", tu sais parfaitement ce que je ferai. Comprends-tu pourquoi je suis entré dans cette arène, maintenant ?
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Jeu 20 Avr - 13:08 (#)



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Il faut croire que les émotions fortes ont réveillé sa langue. Un déluge de paroles s’abat sur Nicola alors qu’ils se retrouvent à l’abri des yeux de la foule dans ce couloir étroit, et même si le vieux s’est amélioré en anglais, il a du mal à suivre. Il fronce les sourcils et se concentre, se demandant d’où viennent toutes ces questions. Pourquoi, pourquoi, pourquoi… Il aimerait répondre, réussir à en placer une entre ces phrases qui se suivent sans pause, peut-être même se justifier. Ce serait quelque chose à marquer d’une pierre blanche, car il ne le fait que rarement désormais, habitué à ce que le monde autour de lui suive ses caprices et ses délires sans pouvoir rien y faire.

Plusieurs fois, il ouvre la bouche, le premier mot de sa phrase mourant sur sa langue. Et l’humain ose même lever la main pour lui interdire de l’interrompre. Nicola se vexe, croisant les bras devant lui, le regard dur maintenant. Que cherche-t-il exactement ? Qu’y a-t-il de plus à comprendre de ce qui vient de se passer ? Nicola l’a testé, à vu sa détermination, sa confiance absolue, et il l’a laissé en vie, que peut-il demander de plus ? Il retrousse les lèvres, maintenant agacé, prêt à lui lancer quelque chose de blessant. Heureusement, avec les années, il a appris à réfléchir avant de parler.

Mais l’envie reste présente. Que veut-il, qu’il lui dise qu’il est spécial ? Que personne d’autre avant lui n’a osé faire ce qu’il a fait ? C’est faux, Ethan doit bien se douter qu’en huit cents ans, il a pu voir la variété des caractères et des motivations des gens, bien sûr qu’il a eu droit à des humains se prenant d’amitié pour lui, plaçant la loyauté au même niveau qu’il l’a fait jadis, quand il n’était encore qu’un mortel sous l’égide d’un vampire de trois cents ans.

Ethan tremble, ce qu’il met sur le contre-coup de leur « affrontement ». Et il transpire abondamment, en plus d’être d’une pâleur préoccupante. Nicola a une révélation : il va tourner de l’œil. A cause de lui ? A cause de ce qu’il lui a fait subir dans l’arène, devant une foule d’inconnus ? Le vieux décroise les bras, prêt à rattraper l’humain au cas où il viendrait à s’effondrer. En balayant le couloir des yeux, il prend finalement que le couloir est relativement étroit, qu’il n’est éclairé que par des néons à la lumière froide et qu’il n’a même pas à tendre entièrement le bras pour toucher Ethan.

Claustrophobe.

Bien sûr, il le lui avait dit plus tôt.

- « Je peux parler maintenant ? - l’interrompt-il avec brusquerie, gardant néanmoins la voix basse. Sa main droite vient se poser sur le biceps de l’humain, qui semble prêt à s’effondrer. - C’est une magnifique déclaration d’amour viril Ethan, et c’est bien que tu te sentes en confiance pour t’exprimer, mais je crois que le moment est  mal choisi. Si je te lâche, tu tombes. »

Il l’entraîne derrière lui, veillant à ne pas le blesser, vers la sortie de ce couloir exigu. On les accueille, les autres mortels sont prêts à féliciter Ethan d’avoir ainsi défier le vampire, mais Nicola les repousse de son autre bras et continue à traîner derrière lui le pauvre mécano, qui a une tête à faire peur. Il claque des doigts et demande du sucre, puis disparaît dans une autre pièce, la même que celle où Ethan lui a été amené après leur combat inégal. Il l’installe dans le même canapé, espérant que la différence de hauteur de plafond lui fasse du bien. Ne manquerait plus qu’il fasse une crise de panique en plus.

Il s’installe à même le sol, les jambes croisées, le poids de son torse sur ses bras derrière lui, et il observe l’humain.

- «  Tu es un des gars les plus étranges que j’ai eu l’occasion de croiser sur ma route. Tu tiens tant que ça à ce que je te considère comme un ami moi aussi ? Je pensais que c’était déjà évident… »

Nicola lui sourit, et ajoute avec une sincérité rare :

- « Je vais souvent trop loin, je sais, mais… je suis content de te compter parmi mes amis. Pardonne les excentricités d’un vieil Italien. »


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Mer 10 Mai - 11:46 (#)

Les murs du couloir semblent se rapprocher, si on ne sort pas de là rapidement, ils vont finir par nous engloutir. Les sons sont ouatés, emmitouflés dans un épais cocon. La main de Nicola me fait émerger brusquement me permettant d’inspirer profondément. Sa poigne se referme sur mon bras, je ne proteste pas, luttant contre les taches noires qui font leurs apparitions devant mes yeux. Mollement, je le suis, pour déboucher enfin dans une salle emplie de monde. Trop de monde. Trop de bruit. Visiblement Nicola est partisan de calme, ce qui m’arrange sacrément. Notre discussion n’est pas terminée. J’ai besoin d’avoir son avis, de connaître ses pensées même si je l’ai saoulé avec mes paroles.

Nous retrouvons le calme et la quiétude de cette petite pièce, là où tout à commencer. Est-ce là que tout finira ? Sincèrement, je ne l’espère pas. L’oppression disparaît et je peux à nouveau respirer normalement. Mes pensées s’ordonnent. Nos bleus se retrouvent.

Je retrouve mon Ami, celui pour qui je donnerai jusqu’à ma vie pour que la sienne perdure. Ne l’a-t-il pas sauvée par deux fois déjà ? Ou plus, sans que je ne le sache ? Ce qui est fort probable. Avachi dans ce canapé qui se souvient de mon anatomie, j’écoute et finis par sourire au vampire.

- Nicola, j’aime tes excentricités justement. Et malgré mon aversion pour les « pas tout à fait mort », tu es l’être le plus cher à mon cœur, que je connaisse. Ma famille vit sur un autre continent. Ma…

Un verre d’eau accompagné de quelques sachets de sucre sont amenés par un gars que je ne connais pas. Il dépose le tout sur la table basse, ainsi qu’une bouteille au verre opaque. Je n’ai aucun doute sur le contenu.

- Mon épouse est décédée. Des amis, des vrais, des sincères… Je ne suis jamais resté suffisamment longtemps pour m’en faire. Toi… Tu m’acceptes comme je suis, même si je suis un bizarre. Je hausse les épaules en réponse à sa confession. Bah, peut-être que c’est aussi ce qui me plait en toi. Cet extrémisme qui me pousse dans mes retranchements. Ne change pas, tu es parfait ! Hum..

Je porte ma main à mon menton faisant mine de réfléchir et finis par secouer négativement la tête mais finis par éclater de rire.

- Je retire ce que j’ai dit, tu vas encore prendre la grosse tête. Tu es loin d’être parfait.



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Ven 12 Mai - 22:10 (#)

Sujet terminé
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