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Come, gentle night! [Aliénor]

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Princesse Kumquat, le Glaçon Impérial.
Mei Long
Mei Long
Princesse Kumquat, le Glaçon Impérial.
ASHES YOU WERE

En un mot : Derrière elle, les traumatismes de l'Orient. Devant, ce spectaculaire et dangereux Occident. Entre les deux, cette douce torpeur, bourreau et gardienne de sa déraisonnable folie. De sa folle déraison.
Facultés : Quietus - Obténébration - Chimérie
Thème : Secret Garden - Adagio
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ASHES YOU WILL BE

Pseudo : Drustan
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Mer 13 Nov - 17:40 (#)


A Brave New World


Pétrichor.
Un soupir de plénitude s'exhale alors qu'elle offre sa gorge à la nuit, une main sur chaque battant de la fenêtre de sa chambre. Les yeux fermés, elle inspire à grands poumons dans ce geste qui n'est certes plus vital mais la contente plus que de raison. L'Immortelle savoure. Après tant d'années d'un sommeil forcé, qu'elle aime ce moment ! L'éveil. Le corps qui renaît, les sens à nouveau aiguisés, qui ne veulent rien perdre du spectacle, et toutes les possibilités offertes par cette nouvelle lune. Elle. Témoin de ses excès, compagne de sa folie, gardienne de ses secrets. Elle, drapée chaque nuit d'un voile différent. Ce soir, presque pleine, mais pas tout à fait. Ovoïde incomplet que le soleil boude sur son axe supérieur.
La Dame se reflète sur les pupilles charbon qui viennent de se rouvrir et qui la fixe avec défiance et respect. L’exaltation s'amenuise quand ses pensées dérivent vers l'un des prisonniers de l'Astre qui la domine du ciel. Le prisonnier. Le seul qui ait un jour compté. Et ça l'ennuie, de penser si régulièrement à lui. Depuis cette question posée par son aînée, sur les possibles contacts repris depuis son réveil. Des cadavres, la vampire en a laissés à la pelle, des amis, beaucoup moins. Sauf Lui. Et chaque nuit, c'est la même chose. Ses yeux se posent sur Dame la Lune et c'est le souvenir de son visage qui apparaît dans sa tortueuse mémoire. Est-il seulement en vie ? Et où ? Si peu de chances... lui, miroir de sa folie. Pourtant... génie de manipulation.
L'Orientale ferme à nouveau les yeux et inspire. Il a plu, cette dernière le devine à l'odeur particulière que chaque particule d'air transporte avec elle. Elle sait qu'elle ne doit pas se laisser gagner par cette nostalgie destructrice, qu'elle doit s'imposer de rester éloignée de sentiments trop complexes.

C'est pourquoi ces derniers mois l'ont vu occupé à rattraper le temps. Deux décennies d'Histoire, de progrès, de technologie, de miracles et de désastres. Si les vidéos l'ont aidé à vivre certains d'eux de façon plus crue, plus sordide, c'est tout de même dans les livres qu'elle s'est plongée avec une assiduité qui lui ressemble. Perfectionniste, et surtout avide d'apprendre, de ne plus vivre avec cette désagréable sensation d'être l'étrangère dans la pièce. Si désormais la Caïnite peut converser des conflits mondiaux des vingt dernières années, elle reste encore pataude pour les technologies modernes, qui ne l'intéressent d'ailleurs guère. C'est évidemment sur la Chine que se sont portées ses premières recherches. Première déception d'une longue liste. Vision cauchemardesque d'une nation moquée – et souvent à juste titre – par ceux désignés comme les puissants de ce monde. Les grandes dynasties d'autrefois ont été définitivement oubliées, enterrées par cette idéologie ''rouge'' qui a corrompue les masses. Le petit peuple n'est pas plus heureux qu'auparavant, et toujours le besoin d'une figure pour les guider tels les moutons qu'ils sont restés. Ironie et stupidité toute prolétaire que d'avoir désiré couper les têtes des derniers empereurs et de continuer à idolâtrer un Mao responsable de quatre-vingts-millions de morts.
Mais peu importe le pays finalement. Qu'ils soient Européens, Africains ou Américains, les gouvernements et les nations ont évolué dans un sens qui ne lui inspire que trop peu de respect. Ajoutée à tout cela la Révélation et cette nouvelle atmosphère dans laquelle elle baigne depuis maintenant plusieurs mois, l'asiatique se sent parfois encore sous la déferlante d'une vague impossible à dompter. Nage, nage, mais ne coule pas.

Un mouvement en contrebas lui fait baisser la tête, pour croiser le regard d'un des nombreux visages peuplant le motel dans lequel elle a échoué. Elle n'est vêtue que d'une simple nuisette et si sa pudeur lui hurle de rabattre le rideau, son orgueil la fait défier cet importun, jusqu'à ce qu'il se détourne dans la nuit. Insecte.
Il a brisé son moment, peu importe son nom. L'immortelle se détourne à son tour, fermant la fenêtre doucement et tirant sur le rideau opaque d'un noir satiné. Cette dernière a obtenu gain de cause et loge dans la chambre mitoyenne de celle d'Aliénor. Plusieurs mois d'adaptation lui ont laissé le temps d'aménager l'endroit pour s'y sentir plus à l'aise, à défaut de s'y sentir réellement chez elle. Un  grand lit trône sur un côté de la pièce, drapé d'un rouge flamboyant, sa couleur favorite. Peu de meubles, mais une garde robe bien remplie, de même qu'une multitude d'accessoires en tout genre offerts par son amie.De l'autre côté, une simple commode en bois transformé en autel. Si de croyances la jeune femme ne s'est jamais encombrée, elle en a toujours appréciée le rituel, apaisant pour n esprit aussi torturé que le sien. Quelques pas lui suffisent pour s'en approcher et ses doigts glissent doucement, intimement presque sur la représentation de Guanyin, rare idole féminine dans le bouddhisme et révérée par les taoïstes comme Immortelle. Élevée au rang de divinité, la ferveur qu'elle suscite encore n'est plus à prouver. Craquant d'un geste vif une allumette, la vampire en apprécie le crépitement, avant d'approcher la flamme nouvelle sur le reste d'un bâtonnet d'encens pas complètement consumé encore. Une fois l'incandescence vérifiée, elle laisse la flamme danser quelques instant supplémentaires, jusqu'à ce qu'elle lui lèche les doigts, avant de la souffler, inhalant l'odeur si particulière laissée par celle-ci.

Elle n'a pas le temps ce soir pour les rituels, Aliénor lui a promis d'autres satisfactions. Un sourire loin d'être innocent étire ses lèvres tandis que ses pas la conduisent vers la salle de bains. Trois quarts d'heure plus tard, elle en ressort vêtue d'une robe rouge – qui la met nettement plus à son avantage que celle d'un noir terne offerte par Jenaro – et s'affaire devant le seul miroir de la pièce. Jamais trop de maquillage, cela lui rappelle trop vivement sa famille et toutes les obligations imposées à une femme de son rang. Juste de quoi souligner ses yeux en amande et sa bouche, et raviver un peu son teint. La Caïnite laisse ses cheveux retomber en une cascade interminable le long de son dos, ne s'embêtant pas à les travailler ce soir. Un collier, et une bague, voilà tout ce qui complète sa tenue. Elle n'a pas besoin de trop de fioritures, elle le sait. S'il y a bien une chose sur laquelle Mei Long n'a jamais eu aucun doute, c'est son physique et le potentiel qu'il représente.
Un dernier regard au miroir, et, satisfaite, elle fait quelques pas vers la porte qui sépare sa chambre de celle de son aînée. Elle frappe quelques coups, pour être certaine que son amie s'est extirpée de sa torpeur passagère, et surtout qu'elle est seule.

La nuit promet bien plus que celles vécues ces derniers mois, employées à se mettre au goût du jour. Elle a besoin de cet exutoire. Et avec Aliénor Bellovaque, on ne peut pas être déçu. Encore moins à ce niveau là.
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ADMIN ۰ Dalida - Elle devra choisir entre son amour et sa mort.
Aliénor Bellovaque
Aliénor Bellovaque
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♚ TAKE AWAY THE COLOUR ♚

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"Eh bien ; la guerre."

En un mot : La Vipère sous la rose.
Qui es-tu ? :
"Don't die with a clean sword."

♚ Caïnite âgée de trois siècles ; Accomplie du bel âge à portée d'ongles carmins.
♚ L'Ambition la ronge, mais laquelle ? ; le vide de nuits interminables la détruit plus sûrement que n'importe quelle balle en argent. L'Ennui pour seul véritable danger.
♚ Gorgone gauloise, sa réputation parle pour elle, surnommée Mère sanglante ou Reine rouge. Nombre d'enfants sont tombés sous ses crocs.
♚ Fille de corsaire, héritière de ses lettres de Marque ; navigua au service de Louis XV dans les eaux des Caraïbes à la tête de l'Espérance, frégate à l'équipage composé de deux centaines d'hommes.
♚ Trahie par un Britannique ; capturée et ramenée de force sur l'île de Mona, torturée , abusée, échappée - mourante (malaria). Transformée par un autre, à l'aube de sa trentaine.
♚ Éprise de coups d'État et féroce opposante à l'Essaim. Antique imperméable à l'ordre. À la tête du clan du Chaos. Danseuse sur le fil acéré de leur rigueur.
♚ Maudite ; aucun enfant n'a pu sortir de son ventre. Aucun Infant n'a pu résister à son vice, transmis tel un fléau. Sire matricide par deux fois. Échec toujours en gestation.
♚ Sang turc dans les veines, manie les us et coutumes perses. Son réseau d'Orient et d'Occident est dessiné comme une arachnide file sa soie.
♚ Incapable d'aimer son époque ; craintive pour l'avenir, répudiant son passé.
♚ Se joue d'une beauté en laquelle seuls les autres croient. Ancienne compagne de Serguey Diatlov, mère de substitution de Yago Mustafaï, protectrice de Mei Long et amante éternelle de Jenaro Silva.
♚ Pie voleuse, elle a dérobé le Clan du Chaos aux mains trop glissantes de Salâh ad-Dîn Amjad, qu'elle compte bien refonder en un ordre sérieux pour s'opposer à la Mascarade ainsi qu'au dictat de l'Essaim en place.

♚ SLAVE TO DEATH ♚

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"I know where you sleep."

Facultés : ♚ Vicissitude (niveau III)
♚ Mains de la destruction (niveau I)
♚ Chimérie (niveau I)
♚ Stratège. Rapide. Teigneuse.
Thème : Sleep Alone ♚ Bat for Lashes
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Ven 23 Oct - 4:53 (#)

♛ Dead but dreaming
Wings of Satan, orb my heart! It burns with love for you. And it is ready now, to receive thee. Claws of darkness, tear my soul! For I have chosen the night and branded its seal into my flesh. Lead me to the catacombs, where light of neither sun nor moon disturbs the dark in vaults, possessed by molten evil manifest.

▼▲▼

Trois mois.

Trois mois passés à s’installer dans le confort précaire de nouvelles habitudes, d’un quotidien à réapprivoiser. Cela n’est pas allé sans mal. Au début, elle a eu du mal à accepter que les choses aient échappé à son contrôle. Frisant l’autisme de par ses réactions disproportionnées, elle a pu rester des heures assise, fixant un pan de mur, comme pour faire défiler dans son esprit ces dernières semaines, ces derniers mois, années, décades, décennies. Quelle erreur avait-elle commise ? Aurait-elle dû demeurer plus proche de Jenaro ? Ils s’étaient séparés après la mise en torpeur de Mei tel l’un de ces duos modernes ayant réglé la question de l’enfant du couple. Plus rien ne les retenait, alors, de partir faire leur vie ailleurs, de se séparer afin de ne plus avoir à se supporter, à tolérer la présence de l’autre dans une même pièce. Risible. Cependant, et comme souvent dans ces tableaux absurdes qui la voient encore préférer l’organisation d’antan – qu’elle n’a pourtant jamais connue –, l’Immortelle n’est pas dupe. Mei a payé au prix fort leur incompétence, l’ayant vu contraints de l’enfermer en guise de solution toute trouvée. Une solution qui, si elle semble avoir porté ses fruits, n’endort pas pour autant les craintes d’Aliénor. La poupée chinoise a beau ressembler à la Méditerranée par temps calme, elle la sait capable de laisser éclater les pires tempêtes, telles que les marins les plus expérimentés ne sauraient affronter ; digne du Cap de Bonne Espérance. Elle attend, redoute et appréhende la prochaine faille. Elle ne peut s’empêcher de guetter, chaque fois que possible, le visage impénétrable de son amie et compagne. Un mouvement d’humeur, un geste trop brusque, un sourcil qui se fronce ou le coin des lèvres qui se tord. Mei contient encore tant de mystères, que cette simple pensée lui paraît vertigineuse. Comme lorsqu’on tente d’imaginer le dernier sol des fonds marins. Non. Elle empêche cette rengaine presque enfantine, tortueuse et sournoise de venir la hanter maintenant. Pas alors que son corps choit au fond d’une baignoire remplie d’eau chaude, bourrée de mousse. Aucune musique autre que les rumeurs lointaines provenant des couloirs du premier étage ne lui parvient. Pas de voix bourdonnante, ni de vidéo abrutissante. Son téléphone est là, quelque part dans la chambre, sans qu’elle ne s’en soucie. Serguey travaille. Yago, elle ne sait où. Il n’y aura qu’elles deux. Elle abandonne sur le rebord glissant le savon dont elle s’est enduite. Sa crinière surélevée par une pince inélégante, frottant sa peau comme n’importe quelle mortelle du bas peuple, elle s’amuse presque de ce moment de paresse qui l’éloigne tant de ce qu’elle est en substance. Mauvaise. Même son amant ignore à quel point elle ne vaut guère mieux qu’une épine souillée distillant la maladie, tordant les corps, bousillant les nerfs, provoquant les spasmes les plus immondes. Tétanos. Elle est une gangrène déguisée en remède, la plus informe des bactéries maquillée sous l’apparence d’anticorps protecteurs. Elle est l’une des véritables mauvaises fées du monde, sorcière bien plus redoutable que les meilleures arcanistes de Louisiane. Elle rince sa peau soyeuse et se déplie, petit bout de femme qui se contemple à la sortie du bain, en tête à tête avec son reflet. Le miroir est immense. Bien trop grand pour elle. Elle se défait de la pince, laissant sa masse de cheveux bouclés retomber de part et d’autre de ses joues réchauffées. Avec attention, elle observe les globes de ses seins, les auréoles rosées, disparaissant si promptement entre les lèvres de l’Estonien pendant les nuits d'amour. Elle suit la ligne d’un buste étendu jusqu’à un ventre vierge de toute cicatrice, en apparence. Elle en connaît l’intérieur ravagé, mille fois, et à cette seule pensée, ses épaules manquent de s’affaisser. Sans rien pour éponger l’eau qui dévale en une myriade de caresses de ses bras à ses chevilles, elle se vide de toute pensée, se noie en elle-même. Elle a toujours peur de ces moments risquant de la faire basculer, et elle en resserre brutalement les cuisses, étouffant une plainte. D’un bras qui s’étend loin, replié contre sa poitrine puis de l’autre côté du miroir, elle étire sa main pour venir griffer une omoplate. Elle connaît trop bien les longues balafres qui défigurent tout son dos. Il ne serait que stupidité et masochisme que de s’abîmer dans une énième contemplation, la voyant se contorsionner pour les dévisager, les toiser et se dégoûter d'elle-même une fois de plus.

Mais voilà qu’on toque à sa porte, lui épargnant ce dilemme ridicule.
Le son ne provient pas du couloir, mais bien de la pièce adjacente, qu’a investi Mei avec une suprématie toute personnelle. Elle envisage de s’emparer d’un peignoir de soie pour couvrir sa silhouette. Cependant, une autre idée lui vient en tête. C’est plus fort qu’elle. En quelques secondes, elle a tangué. Puis a choisi sa route. Mordillant sa lèvre inférieure de ses dents du bonheur, elle pivote et s’approche, féline, un pas après l’autre. Sans qu’elle n’ait besoin d’y réfléchir, ses hanches lui font adopter une démarche plus lascive, et son visage s’incline, laissant ses mèches enlacer comme le lierre le ferait d’une statue antique, ses traits de Caïnite. Depuis son arrivée, la rigueur et la retenue de sa protégée ne lui ont jamais fait défaut. S’instruisant avec une application rare et ayant suscité son admiration, Aliénor s’est longtemps tenue à distance respectueuse ; une trop belle excuse pour lui donner le temps nécessaire de s’acclimater à ce voisinage impromptu. Elle oublie Serguey, rebutée de voir ces deux êtres si différents se fréquenter. Elle devine par ailleurs que Mei n’éprouve aucune attirance à l’égard de « son » homme, et la Succube ignore si ce triste constat avive son dépit ou son soulagement. Cette nuit, elle lui a promis autre chose qu’une soirée studieuse et des échanges superflus. Alors, comme s’il s’agissait de la chose la plus naturelle sur cette terre, la Reine rouge ouvre le battant, apparaissant superbement nue, un rire de gorge en guise de salut. La vision olympienne qui s’offre à elle se grave derrière ses rétines. Cette image, même son immortalité ne pourra la lui enlever. Elles ne pourraient être plus différentes, alors. Mei étincelle, revêtue de cette nuance royale qui lui a toujours siée. Sa mise, parfaite, son élégance, si puissante qu’elle pourrait, dans ses mauvaise jours, s’en voir consumée de jalousie. Plus grande qu’elle, ses cheveux plus soyeux attirent son regard, et un désir étrange, né d’une gorgée ou deux de Tru Blood de fortune, paraît se nicher là où plus rien pourtant ne s’agite. Il n’y a rien de commun avec le désir opposant traditionnellement deux êtres bien vivants. Il s’agit d’une pulsion plus enfouie. Une étincelle, une résurgence, que la Mort n’a pas su lui ôter. La Mort n’a pas fini le travail. La Mort elle-même ne peut rien contre les folies furieuses de l’Aphrodite des mers.

« Quelle vision. »

Une main s’appuie contre le chambranle, lui donnant l’occasion de creuser là où sa taille se plisse, pour mieux laisser une hanche pousser, en exergue. « Des fois, je regrette réellement de ne pas être née homme. J’aurais tué pour posséder une aussi jolie plante. » Elle feint la nonchalance, toujours. Rien ne vaut d’être grave, pourvu qu’elle puisse flotter, et c’est avec la même impudence qu’elle se hisse sur ses orteils pour pivoter et lui tourner le dos. Les effluves de ses parfums et onguents planent autour d’elle. « Je sais, je suis en retard. Serguey me gronde tout le temps à cause de cela. Je ne suis jamais prête à l'heure promise. » Elle trottine, se dirige vers son lit où ses habits l’attendent. Saisissant sa lingerie noire, elle se penche sans vulgarité, avec juste assez d’audace pour évoquer les sculptures des cariatides qu’elle adore. Elle en a l’aplomb, une croupe que d’aucuns qualifieraient sans mal de callipyge, et la malice qui saupoudre toutes ces créations d’une autre époque. Bientôt, ses reins et ses cuisses se moulent d’ébène, de l’un de ces shorts en jean solides, dont la teinte sombre se voit plus élégante que les tissus délavés. Un chemisier de soie peint d’ocre et d’or vient couvrir ses épaules et sa poitrine ; elle ne nimbe ses seins d’aucun cocon de dentelle. « Alors ? Comment imagines-tu notre soirée ? As-tu eu le temps de la fantasmer ? De la rêver… ? »

Elle boutonne juste assez pour que son décolleté se fasse opulent, mais guère violent. Elle sait qu’à côté de Mei, elle fait pâle figure. Ses pieds se nimbent de bottines de cuir aux talons fins, la hissant presque comme l’égale de sa fille, sœur, et meilleure amie d’adoption. Elle confesse, sans la regarder, se glissant derrière sa coiffeuse attirée. « Je n’ai pas été très présente récemment. Tu semblais très occupée à étudier. »

CODAGE PAR AMATIS


Before I'm dead

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Mer 28 Oct - 11:01 (#)


A Brave New World


Impudique Aliénor.
Sa nudité la frappe sans qu'elle ne sache comment réagir. La surprise la laisse muette, enracinée dans la position prise durant la courte attente entre leur deux mondes. L'Immortelle ne sait si elle doit détourner le regard et donner raison à sa gêne ou supporter le défi tacite souligné par cette entrée, elle le sait, soigneusement étudiée. Redressant le dos, les mains sagement liées à hauteur de son bassin, elle laisse ses yeux courir un instant le long de ses courbes, témoignage flagrant d'une beauté impérissable d'un autre temps. L'imagination n'a rien à lui envier qu'elle ne possède déjà. Succube. Et toujours cette jalousie, cette Envie. Pas de ses courbes mais de l'utilisation que son aînée en fait. Si libre, si loin au-dessus des jugements et des barrières imposés par la bienséance, les normes sociales ou simplement la prison d'un esprit englué dans ses propres limites. Pourquoi fallait-il que Mei doive laisser son Autre prendre le dessus pour goûter aux joies charnelles ? Pourquoi devait-elle ressentir, en contre partie, ce dégoût infâme envers sa propre personne ? Pourquoi le prix à payer pour une chose en apparence si aisée pour toutes les autres femmes – et encore plus celles de ce nouveau millénaire – était-il aussi lourd pour elle ? Vermine. Catins.
Et voilà bien l'une des choses qui différencie Aliénor des autres. Elle lui inspire l'envie, mais le mépris n'existe pas. Plus depuis leur première rencontre, quand alors l'orientale s'est permis de la juger plus vulgairement encore que la dernière des putes. Mais comment savoir, en ce temps là, qu'une créature à la fois si semblable et diamétralement opposée rencontrerait son chemin et ferait naître une telle relation. Comment supposer des destins si intimement liés ?

Si semblables. Et si différentes.
La pudeur. L'exaltation des sens.

Un simple sourire étire les lèvres aux premiers mots prononcées par son amie. Elle n'aurait dit mieux. Et quand cette dernière la flatte faussement d'un qualificatif qui ne lui sied guère, du moins de son strict point de vue, elle arque un sourcil. L'impudique se détourne et Mei s'autorise quelques pas dans la chambre, respectant le caractère intime de cette dernière bien qu'elle se sait être la bienvenue. « Tes compliments ne valent guère mieux que les leurs, j'imagine que c'est un bon début. » Si les mots sont acides le ton n'en reste pas moins amusé. Belle plante. La brune lève les yeux au ciel tandis que sa comparse cache enfin sa nudité. Se détournant vers la fenêtre, elle laisse son regard planer dans le vide de la nuit, les mots l'impactant plus qu'elle ne le laisse paraître. Bien que les plaisirs saphiques auxquels s'adonne volontiers son égale lui semblent toujours aussi peu naturels, il lui faut avouer que les plaisirs charnels conventionnels en ont aussi la résonance. Leurs caresses maladroites et moites la révulsent, leur odeur aux relents de sueur et d'alcool la dégoûte et l'acte en lui-même la renvoie de manière trop lucide à des mains de bourreaux dont elle n'est jamais parvenue à se défaire. « Ne regrette rien. Tu aurais eu moins de chance encore en étant homme. » La Vampire ne s'attarde pas davantage en détails et laisse, volontairement ou non, planer un voile de mystère sur cette affirmation. Au moins acceptait-elle les caresses et les étreintes de son amie sans craintes. Elle, aux yeux océan, si sûre de sa personne et de ses charmes, incapable de saisir qu'elle comble un manque qui consume sa cadette plus sûrement encore que sa Soif. De cette haptophobie dont elle est prisonnière depuis des décennies déjà, elle en est un remède des plus savoureux. Toucher, et être touchée. Sans visions cauchemardesques, sans revivre ces immondes sévices. Seulement le contact d'une peau glacée tout contre la sienne, d'un simple frôlement ou d'une étreinte plus appuyée. De ce besoin qu'ont toutes les créatures vivantes sur cette Terre et dont elle s'est privée par la force des choses. Les autres n'ont pas cette confiance, les hommes encore moins. Aliénor si. La confiance, et l'autorisation tacite d'en abuser, dans une certaine mesure.

Offrant à nouveau son attention à l'Immortelle qui termine de se préparer, elle retient un jugement quant au choix de la tenue, se disant que ça aurait pu être pire. Chassant ses critiques d'un léger geste de la tête, c'est finalement un nouveau sourire qui vient étirer ses traits de poupée. « Je passe la nuit avec toi Aliénor. Même mon esprit centenaire ne parviendrait pas à assimiler toutes les possibilités qui s'ouvrent devant moi. » Elle se rapproche, penchant la tête sur le côté. « Je sais, la flatterie ne me va pas. » Laissant sa camarade se diriger vers sa coiffeuse, c'est à travers le reflet de son miroir qu'elle continue de lui parler. « La solitude ne m'a pas dérangé, j'avais beaucoup à rattraper.... » Deux décennies pour être précise. « Un joli patchwork de désillusions et de déceptions en tout genre si tu veux mon avis. » Si la Chine avait su percer économiquement et se faire une place de choix sur le marché mondial elle restait l'ombre d'elle-même, une grotesque plaisanterie à laquelle personne ne croyait et dont le dirigeant se réduisait à un dictateur déguisé sans classe, imposant son pouvoir et usant de la technologie pour contrôler les populations. Quant à ce pays, celui-là même qu'elle avait vu un jour comme la contrée des promesses, n'était devenu qu'un amas de libéraux en tout genre opposés à une caste de bons patriotes persuadés d'être les hommes les plus puissants du monde. Alors quand ils ne construisaient pas de grandes tours – Freud aurait eu à dire sur le sujet – ils continuaient à se faire la guerre, parfois pour des raisons plus ou moins valables dans un cercle dont ils ne sortaient finalement jamais, répétant inlassablement le même schéma en espérant un résultat différent. Et c'était elle qu'on traitait de folle alors qu'ils en incarnaient l'exacte définition.
N'ayant cependant que moyennement envie de débattre économie ou politique présentement, Mei revient sur une question précédente, s'approchant encore de son aînée. « Je connais New York. Et une bonne partie de la côte Est. Mais je suis encore étrangère au Sud. Bien que je pense le regretter au terme de cette longue nuit, je veux m'imprégner de cet endroit. À défaut de m'y sentir pleinement chez moi, je ne veux plus me sentir comme une complète étrangère. » Se penchant derrière sa jumelle, son visage vient se poser sur son épaule tandis que ses perles noires rencontrent l'azur des siennes au travers du petit miroir. « Fais-moi me souvenir de notre première vraie nuit ensemble ici pour l'éternité. Rend la... mémorable. » Léger sourire, autant pour la connivence que pour le défi.
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Aliénor Bellovaque
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"Mind if I cut in?"

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Mer 25 Nov - 0:00 (#)

♛ Dead but dreaming
Wings of Satan, orb my heart! It burns with love for you. And it is ready now, to receive thee. Claws of darkness, tear my soul! For I have chosen the night and branded its seal into my flesh. Lead me to the catacombs, where light of neither sun nor moon disturbs the dark in vaults, possessed by molten evil manifest.

▼▲▼

Moment de calme, de paix, loin de la frénésie (contrôlée) au sein de laquelle les deux démones s’apprêtent à plonger. Juchée sur son siège comme une princesse née, c’est un savant ballet contrôlé de pinceaux, de fards et de pâtes qui viennent, petit à petit, composer le tableau d’un faciès encore vierge. Mue par l’habitude, par la volonté de ne pas ressembler à un cadavre ambulant, elle étale déjà les crèmes sur ses joues et ses mâchoires, afin de colorer d’une nuance rosée la peau blême et mortifère. Un fond de teint discret, ses paupières nimbées, piquantes (mais à peine), toute peintes de brun pailleté d’or, pour mieux souligner la ligne de cils d’un trait de noir, transformant ses prunelles déjà félines, les étirant pour les rendre plus cruelles, plus perçantes. Les cils étirés à leur maximum, les pommettes encore rosies davantage, et enfin le rouge glissant sur la courbe de ses lippes, invitation aux baisers. Les gouttes de cruor en seront invisibles, elle se le promet. La seule chose, la seule personne capable d’interrompre cette danse de phalanges, c’est bien la Superbe qui se penche, et le contact de ce visage contre son épaule, tout près d’elle, la comble d’un sentiment de joie rarement ressenti. Elle se contemple, duo infernal fixant le même reflet, qu’aucun mythe idiot ne rend invisible.

Mei Long.
Aliénor Bellovaque.

Depuis combien de temps n’avait-elle pas éprouvé ce plaisir sincère, cette impression de se sentir à sa juste place ? Choisie, par cette petite élue venue d’Asie. Comme une humaine comblée de voir un chat un peu farouche choisir ses cuisses comme promontoire, elle s’adoucit, s’attendrit, et incline à peine du chef pour que leur peau fraîche se pose l’une sur l’autre. Séduite. Charmée. Elle pourrait inspirer pour de faux, cet air qui se contente d’entrer et sortir sans mouvement aucun provenant de ses poumons. Elle flotte. Flotte dans cette atmosphère, à la fois étrangère et partie intégrante de ce monde auquel elle se connecte avec tant d’acharnement. Elle n’a jamais souhaité plonger dans les délires inhérents à ceux de sa race. Elle n’a jamais voulu vivre loin des hommes, comme le fit Mei, pour sa part. Contrairement à Jenaro, prompt à se réfugier dans le cycle de règles qu’elle repousse avec hargne, le chaos la mêlant aux humains et à ce qui ne peut être prédit, lui suffit pour seul cap à maintenir.

« Ne sois pas trop dure avec le Sud. Il a ses bons côtés. Et puis, réjouis-toi : tu n’as pas à subir la chaleur et l’humidité comme les humains le font. Crois-moi, je vois comme Serguey en souffre, parfois. Pourtant, il a connu des latitudes arides, mais une telle chaleur… Elle éprouve les Ephémères. » Avec lenteur, elle se détourne de la glace pour, doucement, faire pivoter son corps, sa hanche rencontrant bientôt la base du dossier. Son nez, si proche de celui de la poupée chinoise, elle la contemple et la scrute dans les moindres détails. Ses doigts viennent cueillir une mèche noire, noire comme les orbes qui la fixent, et elle la porte à ses narines, en savourant l'odeur, pour mieux fermer les yeux. Bonheur replet. Ronronnement discret. « C’est beaucoup de responsabilités, que tu fais peser sur mes épaules. Et si tu étais déçue ? Hum ? Comment pourrais-je supporter de voir ce front se plisser ? » De son index, elle caresse la peau diaphane. « Ou ce nez ravissant se froncer ? » La pulpe glisse le long de l’arête, jusqu’à tapoter d’une infime pression la pointe cartilagineuse, à la fois joueuse, affectueuse et respectueuse de la créature splendide qui se tient auprès d’elle.

« Tu sembles toujours pleine de désillusions. Pourquoi ? As-tu seulement connu des périodes plus… propices à l’espoir, pour toi ? » Elle s’alanguit, et ses doigts glissent encore plus longuement contre les tiges de jais à la douceur irréelle. Fascinée, une tendre langueur paraît alléger le toucher de la mort sur sa silhouette figée pour l’éternité. Il n’y a pas que le jeu et la volonté de jouer les effrontées. Mei, énigme vivante (si elle peut le dire), continue de l’intriguer, pour tous les secrets soigneusement conservés dans leurs coffres personnels. Il leur a fallu si longtemps pour tisser les fils d’une amitié réelle, intemporelle, entre elles deux. Beaucoup de confidences n’ont pas encore éclos. Les affres de l’immortalité ont souvent incité la succube à patienter, avant de se livrer comme avant de questionner. Le moment propice arrive toujours. Et, cette nuit, sa langue la démange. « Et pourquoi aurais-je eu moins de chance en étant un homme, dis-moi ? » Son sourire s’effrite. Une mine plus sérieuse, plus pensive, restreint la ligne de ses lèvres de Joconde. « Je ne t’ai jamais vu fréquenter un homme. Ni parler des hommes autrement que pour te montrer sévère à leur égard. Dure. Tu ne mentionnes jamais Serguey. Je vois bien que tu ne l’aimes pas. Et je sais que ce n’est pas de la jalousie bête et méchante. Pas venant de toi. » Elle se recule puis se relève, se dresse sur ses talons et s’asperge d’Yves Saint-Laurent avec une nonchalance étudiée, parisienne. Laissant sa crinière lâche, elle pivote pour lui faire face, et ses paumes viennent trouver leur place contre la gorge de la Caïnite, ses pouces épousant les angles presque imperceptibles de ses mandibules. « Te confieras-tu un jour à moi ? J’aimerais parfois… arriver à trouver les mots pour détruire les barrières que tu continues de dresser entre nous. Alors raconte-moi. Et ne me dis pas que tu es une fille de Sappho. Je ne te croirai pas. »

Les mains glissent, s’évadent, et la voilà qui grippe à ses lobes une paire de boucle d’oreilles sobres, discrètes, qui ne la gêneront pas dans ses courses nocturnes. « Ton Sire était un homme. Et je sais que votre relation était profonde. Était-ce donc le seul ? N’y en aura-t-il plus jamais d’autres ? » La Mort a parfois cet inconvénient : tuer définitivement le cœur et ses mystères. Enterrer l’âme à la place du corps. Elle s’est toujours battue contre cela. Mais elle se demande, parfois, si le cercueil de métal dans lequel son amie s’est enfermée en esprit est ce qui l’empêche de se montrer moins distante, même avec ceux de son Nid.

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Before I'm dead

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Princesse Kumquat, le Glaçon Impérial.
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En un mot : Derrière elle, les traumatismes de l'Orient. Devant, ce spectaculaire et dangereux Occident. Entre les deux, cette douce torpeur, bourreau et gardienne de sa déraisonnable folie. De sa folle déraison.
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Ven 26 Fév - 17:50 (#)


A Brave New World


Fugace roulement des yeux à la mention de son amant.
Mei n’opte pas spécialement pour la subtilité et même son visage de porcelaine si difficilement sondable la trahit en de rares occasions, toujours soigneusement choisies. Elle n’a aucune raison de cacher son indifférence la plus totale pour ce bellâtre aux traits nordiques qui la laisse de marbre, autant par les atouts physiques que les autres femmes semblent lui prêter trop hâtivement que par son caractère qu’elle juge inintéressant. Il n’est qu’un nuisible de plus dans la périphérie de son cercle intime, un invité non désiré mais visiblement désirable dont elle ne tolère la présence que par obligation et si possible le moins souvent possible. Un jouet dont l’Immortelle contre elle se lassera tôt ou tard, comme tous ceux qui l’ont précédé et qu’il précède. Une jolie plante, qui, par la force des choses, fanera et perdra tous ses atouts.
C’est pourquoi la Belle se moque éperdument de savoir la souffrance endurée par ce cloporte inutile mais elle ne dit mot, se contentant d’un silence finalement aussi éloquent sinon plus.

Ce qui accapare son attention, présentement, ce sont les mots sucrés soufflés par la Vampire à ses côtés, dont le corps bascule. Son visage si proche du sien qu’elle ne parvient presque plus à discerner leur odeur séparément. Son doigt glacé qui court lentement sur sa peau et donne à la scène un caractère intime et pourtant si naturel…
Ils sont trop rares, ceux que l’asiatique autorise à toucher et envahir ainsi un espace qu’elle juge encore vital. Instiller la confiance n’est jamais chose aisée, même pour elles. Combien de temps passé ensemble avant que les barrières ne tombent? Combien de pensées contradictoires, vicieuses, mortelles, avant de céder à cette amitié? Avait-elle déjà pensé à la tuer? Evidemment. Dès les premiers instants même. Et pourtant, après toutes ces décennies, toute cette pseudo rivalité, tous les paris repoussés des autres pour savoir qui succomberait en première, elles sont là, immortelles, dans leur toute puissance, leur mesquinerie de femme, dans leur esprit saturé d’un torrent de souvenirs boueux. “Tu peux t’inquiéter de beaucoup de choses mais je ne pense pas que la déception en fasse partie.” Pas pour ce genre d’attentes en tout cas. Pas pour cette soirée.

Mais elle se fait docile, devenant poupée entre ces doigts qui jouent entre ses interminables mèches de jais. “L’espoir?” Elle laisse un rire passer sa gorge, sans joie, sans réelle vitalité. “Pour ressentir l’espoir il me faudrait posséder des attentes et celles-ci mènent fatalement à la déception.” Pessimisme exacerbé ou fatale réalité, elle ne saurait le dire, ne cherche pas explicitement des réponses à des questions qui ne la chatouillent que parce que chuchotées par sa comparse éternelle. Et cette dernière est décidée à se faire inquisitrice. Les questions s’enchaînent sans que la Damnée ne désire réellement s’attarder sur la plupart d’entre elles. Ce n’est pas le moment. Ou le moment n’est jamais le bon. Le passé est passé et elle ne voit pas l’intérêt de s’y attarder. Pas ici. Pas alors qu’elle cherche l’abandon et pourquoi pas l’oubli. Les hommes sont ce qu’ils sont. Utiles, en de rares occasions. Vitaux, si tenter que l’on parle de sang. Leurs mains calleuses, leur souffle alcoolisé, leur regard lubrique et leurs attentes faciles ne la charment pas et puis? Elle cède volontiers la place à toutes ces catins à la cuisse légère. Le sexe ne lui manque pas. Plaisir éphémère qui ne la satisfait que trop peu. Peut-être que l’intimité lui manque, en de rares occasions, cette proximité des sens, cette perte de contrôle volontaire. Mais l’Orientale trouve aisément son plaisir ailleurs, dans des sphères plus viles, plus sombres.

Et puis le sujet revient sur le tapis. L’amant. Le cloporte. Elle se refuse seulement à penser son prénom, le noyant dans cet anonymat qui lui va si bien. Les mains d’Aliénor tout contre sa gorge, elle ne cille pas, ancre ses orbes obsidiennes dans les siennes. “Il n’a pas à me plaire. Il te plaît suffisamment pour deux.” Ni agressive, ni charmeuse, elle est de cette neutralité qui désarçonne car ses intentions restent muettes, mystérieuses. “Et puis il n’est que de passage. Ce qui t’attire aujourd’hui ne sera plus demain. Tout ce bel apparat flétrira, la vieillesse le gagnera et il mourra. Et tu passeras au suivant, à plus ou moyen terme.” Alors quelle importance au fond? Banal mortel qu’elle juge inégal, et non méritant de l’intérêt que la Française lui offre.

Se retenant à nouveau de lever les yeux au ciel quand les vils plaisirs saphiques sont évoqués, elle se détourne, s’autorisant quelques pas dans la chambre. “Ce n’est pas une question de saphisme c’est une question de dégoût.” Trop de mains l’ont touché, souillé, et de ces marques encore visibles et qui défigurent son dos elle peut encore en ressentir la brûlure, l’humiliation, la soumission. De ces cicatrices sont nées son mépris, son rejet. Et si Aliénor ne les a jamais vues, elle en connaît pourtant l’origine. “Tu es gagnante en tant que femme parce que tu es la seule dont je quémande l’attention, les caresses, les baisers, cette intimité unique qui nous lie. Je ne l’ai jamais cherché chez Jenaro et pourtant ma confiance lui est acquise. Le sexe faible te sied à merveille pour cela Aliénor…Si tu étais née homme jamais je ne t’aurais laissé passer cette barrière.” Et jamais leur relation, toute particulière, n’aurait vu le jour.

La mention de Jian la fait se tendre imperceptiblement. Mei ne l’évoque que rarement, la morsure étant toujours trop vive. Il est encore tout ce qu’elle vénère et tout ce qu’elle rejette, tout ce qui lui manque et tout ce qu’elle regrette. “Jian…” Son regard se perd un instant dans le vide, souvenir lui aussi immortel et qui la pousse néanmoins aux portes d’une folie qu’elle a mis si longtemps à oublier. Parce qu’elle ne sait toujours pas… “Il est le premier que j’ai aimé” Le premier, et pas le seul, les non dits sont parfois aussi porteurs que les mots. “Le premier que j’ai haï. Mis sur un piédestal. Méprisé. Le premier avec lequel je me suis pleinement abandonnée. Le premier que j’ai eu envie de tuer.” Peut-être même qu’elle l’avait fait. Les souvenirs étaient trop imprécis, trop irréels, et le déni avait du bon. D’un mouvement de la main elle rompt toute connexion au passé. “Je n’ai pas envie de parler des hommes, ni du tien, ni de celui qui m’a marquée.” S’approchant telle une féline de son aînée, elle glisse ses mains sur ses hanches et se force à inspirer le parfum qu’elle vient de déposer sur sa peau. “J’ai beau ne pas être une fille de Sappho, comme tu le dis si bien, ce soir, je ne veux être qu’à toi, et je ne te veux qu’à moi.” Son visage déjà proche du sien, l’asiatique se rapproche encore, et, inclinant légèrement sa tête sur le côté, vient déposer sa bouche sur sa joue, là, à quelques centimètres à peine de ses lèvres pleines. Joueuse? Sans doute. Toujours. Et cette nuit, elle n’avait pas peur de se brûler les ailes.
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ADMIN ۰ Dalida - Elle devra choisir entre son amour et sa mort.
Aliénor Bellovaque
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"Eh bien ; la guerre."

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Qui es-tu ? :
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♚ Caïnite âgée de trois siècles ; Accomplie du bel âge à portée d'ongles carmins.
♚ L'Ambition la ronge, mais laquelle ? ; le vide de nuits interminables la détruit plus sûrement que n'importe quelle balle en argent. L'Ennui pour seul véritable danger.
♚ Gorgone gauloise, sa réputation parle pour elle, surnommée Mère sanglante ou Reine rouge. Nombre d'enfants sont tombés sous ses crocs.
♚ Fille de corsaire, héritière de ses lettres de Marque ; navigua au service de Louis XV dans les eaux des Caraïbes à la tête de l'Espérance, frégate à l'équipage composé de deux centaines d'hommes.
♚ Trahie par un Britannique ; capturée et ramenée de force sur l'île de Mona, torturée , abusée, échappée - mourante (malaria). Transformée par un autre, à l'aube de sa trentaine.
♚ Éprise de coups d'État et féroce opposante à l'Essaim. Antique imperméable à l'ordre. À la tête du clan du Chaos. Danseuse sur le fil acéré de leur rigueur.
♚ Maudite ; aucun enfant n'a pu sortir de son ventre. Aucun Infant n'a pu résister à son vice, transmis tel un fléau. Sire matricide par deux fois. Échec toujours en gestation.
♚ Sang turc dans les veines, manie les us et coutumes perses. Son réseau d'Orient et d'Occident est dessiné comme une arachnide file sa soie.
♚ Incapable d'aimer son époque ; craintive pour l'avenir, répudiant son passé.
♚ Se joue d'une beauté en laquelle seuls les autres croient. Ancienne compagne de Serguey Diatlov, mère de substitution de Yago Mustafaï, protectrice de Mei Long et amante éternelle de Jenaro Silva.
♚ Pie voleuse, elle a dérobé le Clan du Chaos aux mains trop glissantes de Salâh ad-Dîn Amjad, qu'elle compte bien refonder en un ordre sérieux pour s'opposer à la Mascarade ainsi qu'au dictat de l'Essaim en place.

♚ SLAVE TO DEATH ♚

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"I know where you sleep."

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Mer 10 Mar - 2:56 (#)

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Elle n’aime pas constater cette amertume pleinement affichée, assumée. Ce n’est pas sain. Qui a dit que les Caïnites devaient se complaire dans une posture dramatique, une misanthropie aigüe, un pessimisme abstrait ? Certainement pas elle. Au contraire, allant presque à l’encontre de la résignation plus sage adoptée par ses pairs, elle se bat comme une lionne, refuse de s’en tenir à ce qui ne peut qu’être prédit. Son imagination s’étend bien plus loin. Elle est née et a grandi, descendante, dans une famille stricte composée de corsaires, de marins aguerris. Il s’agissait d’hommes rustres, brutaux et impitoyables, mais qui ne manquaient guère alors d’imagination. Elle leur a emprunté cette faculté trop rare, parfois dénigrée à son époque. Heureuse de l’avoir conservée, choyée, entretenue avec soin, voilà que ce déploiement de fantasmes, de créativité, de possibilités sans cesse esquissées par les brumes d’illusion pendant au bout de ses doigts, la sauvent de la désespérance, de la mort et du noir. Dans ses moments de doute, de faiblesse et d’immobilisme spectral auquel elle n’échappe pas, il n’y a rien d’autre que cette pulsion n’acceptant pas la finitude qui lui permette de relever la tête et d’affronter ce qui viendra en préférant miser sur le plein, plutôt que sur le vide. Comment alors, accepter que ceux qui partagent son sort s’en tiennent à tourner le dos à ce qui peut leur épargner cette condamnation ou au présent, ou au néant ? Elle aimerait voir Mei plus combative, tout en se morigénant aussitôt : trop en demander ne serait pas bon. Mei doit déjà se faire à la discipline de mise, à un tout nouveau monde qu’elle appréhende encore. À force de vouloir lui faire presser le pas, elle finira par donner raison à Jenaro. Ce qui, évidemment, est absolument hors de question. Frustrée, elle contient cette impatience, consciente de la relative jeunesse de sa cadette. Celle-ci a encore beaucoup à apprendre. Elle tente de se souvenir de comment elle pensait, se comportait, au même âge. Nul doute que ce ne devait pas être reluisant.

Malgré ces incitations muettes au calme, elle ressent presque ce qui l’avait froissé lors de leur première rencontre. Elle voudrait tant faire éclater cette paroi imperturbable lui faisant ressembler à une statue d’une dignité inégalable. Tant de désirs égoïstes qui lui font éclater la tête : elle ne peut ni ne veut contrôler Mei comme une marionnette. D’autres lui procureraient, sous cet aspect, un plaisir inégalé. Mais pas Mei. Alors, elle change de cap, arbore une moue provocatrice mais pas vulgaire, visage tendu vers elle, lèvres offertes dans une posture d’attente, de délectation, articulant avec une lenteur calculée. Elle aime les mains de sa semblable sur ses hanches pleines, faites pour être saisies : « Tu ne veux être qu’à moi ? Pourquoi juste ce soir ? Et jusqu’à quel point, chérie ? » Nulle roublardise pour l’emploi du sème : aucun accent de titi parisien, aucun argot de l’Ouest. Elle ressemble à une actrice indolente du début du siècle dernier, exagérant un tantinet l’expression, sans la rendre grotesque. Elle aime toujours s’empêtrer dans les fils d’une nuance, d’un juste milieu sans début ni fin, en sa compagnie. Cela la rend heureuse. Cela la rend meilleure. Elle en est persuadée, tout en évitant de creuser trop loin le sens d’une assertion risible, car absurde. « Tu ne devrais pas employer des mots pareils, Mei. Surtout avec moi. Tu sais à quoi tu t’exposes, car tu sais qui je suis. Et que feras-tu si je décide un jour de les prendre comptant ? » Elle ne supporterait que difficilement un refus. Entre elles, les relations sont si complexes qu’elle craindrait tout éclat les gardant séparées des décennies durant. Il y a d’abord la rivalité agitant tout duo de femmes, dont le tempérament ne laisse guère le doute à l’orage ou à la glace. La peur de valoir moins que l’autre, la comparaison inquiète, même si évanescente, les crispations naturelles. Puis, il y a l’Essaim. Qui ne l’a certes chargée d’aucune responsabilité vis-à-vis de son amie, et pourtant une part d’elle se sent reliée, guide nécessaire bien que bâtarde, modèle de peu de foi. Mais dernier rempart avant la solitude et la folie. Ne pas donner raison à Jenaro.

Elle ne fait rien pour se défaire de l’étreinte.
Quand j’aime, je garde.

Surprise d’une telle audace de la part de celle qu’elle aime à nommer sa princesse de Chine, elle sourit du souvenir immédiat d’un baiser encore sage, mais dont la proximité avec ses lippes tentatrices ne saurait qu’aviver son plus mauvais côté. Rien ne pourra se passer sans consommation du sang d’un de leurs attitrés. Et pourtant, qu’elle enrage de se voir prisonnière de cet écrin de sagesse que seule la Mort professe. Si elle s’écoutait, elle sortirait dans le couloir et, là, s’emparerait du premier humain à sa portée. Elle l’égorgerait s’il le fallait, pour sentir la vigueur et la fièvre d’un désir ardent faire enfler les organes asséchés et aviver les anciennes pulsions éteintes et spontanées. Elle envie si fort ses plus vifs contemporains. « Très bien, cependant. Ne parlons pas des hommes. Ne parlons que de nous. Ce ne sera pas un calvaire… loin de là. » Sa langue humecte sa lèvre inférieure, avant que sa bouche ne se pose, elle, sur celle en bouton de rose de celle qu’elle enlace avec plus de passion. Pourtant, elle se montre prudente, les phalanges légères, consciente de l’inquisition qu’elle abat sur ce corps encore fébrile, mais dont elle ne peut s’empêcher de tester les réflexes. L’embrassade qu’elle lui donne ne semble pas obéir aux règles de la gravité. Le contact est infime, guère de pression. Simplement une proximité troublante, une façon de communier davantage avec cette belle-de-nuit qui ne cesse de lui serrer le cœur, de réveiller en elle questions illusoires ou compassion meurtrie.

Elle lui chuchote ainsi : « Aucune attente ? Aucune, vraiment ? Serais-tu capable de mentir, je me le demande… » Elle connaît la grosseur de l’orgueil inquiétant de Mei Long. « Suis-je une attente ? » Main doucereuse flattant le creux du dos ; ne descend pas plus bas. « Serais-je une déception ? » L’autre s’abîme contre le haut d’une cuisse, faisant remonter et bruire le tissu révélant la peau belle et satinée de l’Asiatique qu’elle convoite, depuis toutes ces années. « Suis-je sexe faible ? » L’appellation ne révèle pas de vexation stupide ou prononcée. Plutôt, comme un étonnement, une remarque surprise de se voir ainsi cataloguée. Presque une menace, un avertissement. Mei et elle n’ont rien de faible. Certainement pas. « Tu ne devrais pas prédire de choses dont tu es incapable de contempler le patron. Tu ignores tout de ce qu’il se serait passé, si j’étais née homme. Ne te montre pas trop présomptueuse, car l’Éternité te prouvera cent fois tes torts, que tu l’acceptes ou pas. » Elle pique sans distiller de venin. Elle la titille de ses pinces de scorpion pour lui rappeler l’existence du destin, du hasard, qu’importe son nom. Pendant un moment flotte le désir de répondre amèrement en ce qui concerne son amant. Elle n’aime pas que Mei pointe ainsi du doigt ce qui la couvre d’une sueur froide qui n’existe plus que dans son esprit. Comme si ses neurones quêtaient encore des émanations de sueur, les fluides propres à la femme qu’elle a été autrefois. Serguey mourra un jour, oui. Si cette peste s’amuse de le lui rappeler, il n’y a pas de raison qu’elle-même soit épargnée.

« Tu manques parfois d’humilité. Peut-être est-ce moi qui devrais te l’apprendre. Que feras-tu lorsque tu tomberas une fois de plus ? Compteras-tu sur moi pour mieux te relever ? Il n’y aura plus de nouvelle chute possible sans que les conséquences ne nous en soient fatales. Pas dans ce monde-là. Plus maintenant, tu entends ? » Les confidences murmurées en reviennent à un timbre plus doux, moins dur. Elle feint un soupire et l’embrasse de nouveau, cette fois aux commissures. « Tu es mauvaise, parfois. Méchante. Et je crois que j’aime bien cela, malgré moi. Je me demande s’il en a toujours été ainsi, dans les palais d’Orient. »

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Mar 18 Mai - 22:22 (#)


A Brave New World
La réponse ne tarde pas et comme toujours, elle ne peut être déçue par sa comparse. Si proches l’une de l’autre, empiétant sur l’espace vital de chacune, elle se coule dans cette bulle salvatrice et protectrice. Ici, contre elle, dans ses bras, rien ne peut l’atteindre, rien ne peut la blesser sinon son aînée. Et pourtant sa confiance lui est acquise, elles en ont payé le prix. Des décennies de ce lien unique, fragile et néanmoins indestructible. Mei le sait, jamais elle n’en tissera de semblable avec personne. Jamais. Et ce mot, pour un Immortel, revêt presque un caractère sacré.
Alors à la question de son amie elle se contente d’arquer un sourcil, sourire énigmatique aux lèvres. Oui, que ferait-elle si Aliénor décidait de prendre? Se soumettrait-elle? Aurait-elle le choix? Plus puissante, plus forte, elle ne pourrait que subir. Mais la Française oserait-elle? Elle a beau ne jamais avoir vu de ses propres yeux les cicatrices qui strient son dos en des boursouflures informes, elle en connaît les causes. Elle sait. Combien les mains masculines l’ont souillé. L’ont marqué. Et elle est bien la seule.
Alors pourquoi apprécie-t-elle autant cette tension soudaine entre elles? Pourquoi ressent-elle si avidement le besoin de s’en nourrir?

Bercée par ses paroles, par la portée de ses mots, par ce tourbillon qui prend naissance dans le creux de son ventre, elle ferme un instant les paupières. Le passé n’a pas de prise cette nuit, elle lui en refuse catégoriquement l’accès. N’existe qu’elles. Deux entités aux antipodes l’une de l’autre et qui se fondent si harmonieusement. Rouvrant les paupières, la Chinoise n’a que le temps de loucher sur ces lèvres avant que ces dernières ne s’apposent sur les siennes dans un effleurement pourtant suggestif. Son corps se tend et son premier réflexe est de reculer, stoppée avant même d’initier tout mouvement par la main d’Aliénor dans son dos.
Elle devrait ressentir du dégoût. Non pas pour son amie mais par son statut de femme. Mei n’est pas de ces esprits ouverts qui acceptent la décadence moderne, la liberté de corps. Élevée dans une culture qui ne donne pas droit à ce genre de pratiques, elle les sait malsaines, anormales. Non, elle n’est définitivement pas de ces esprits qui acceptent. De même que ses mains ne sont pas faites pour toucher et ses lèvres pour embrasser. Si prude, si pudique, enfermée dans ses propres limites.
Et pourtant...pourtant… elle ne peut se résoudre à s’échapper. Depuis combien de temps n’avait-elle pas partagé cela avec un autre? Le sexe ne lui manquait pas mais la Vampire ne pouvait en dire autant de l’intimité, du désir, qu’il soit suscité ou ressenti. Elle en a besoin. De cette prise au creux de ses reins, de cette main qui joue autant avec le tissu du vêtement qu’avec ses limites et sa patience. Jeu dangereux qui devrait la faire réagir hargneusement, la faire sortir de ses gonds, lui faire repousser sa comparse pour lui signifier son indignation. Mais l’instant est si délicieusement savoureux. Il la plonge dans un état cotonneux que seuls ceux qui connaissent l’addiction et le manque de contrôle peuvent comprendre. C’est mal mais on ne peut s’en défaire. On en veut encore, toujours plus, jusqu’à trop.

Les mots contre sa bouche la forcent à fermer avec plus de conviction les paupières pour ne pas reprendre trop vite pied dans la réalité. Une attente? Une déception? “Ni l’une, ni l’autre.” Souffle-t-elle finalement en plantant ses orbes noirs dans l’azur des siens. “Tu es ma plus parfaite rivale, ma seule amie, parfois pilier, parfois phare, mon égale la plus absolue.” Aliénor la connaît trop pour savoir qu’elle est bien incapable de flatterie inutile. “J’ai des dizaines de cicatrices dans le dos pour justifier mon dégoût des hommes et mille rencontres pour nourrir mon mépris des femmes. Tu n’es ni sexe faible, ni sexe fort. Tu es Aliénor Bellovaque.” Et c’est sans doute son explication la plus sensée et la plus trouble.

Les mots deviennent aiguilles, deviennent poison et comme à son habitude l’humeur de la Longue-Vie mue. Se retenant à nouveau de lever les yeux au ciel, elle encaisse les vérités sans broncher, au moins sur l’instant, les traits de son visage se refermant pour ne laisser que le masque qui lui colle à la peau. Consciente d’être toujours sur le fil du rasoir, en équilibre au-dessus d’un précipice sans fin, la morale que lui sert son amie l’agace autant qu’elle l’effraie. Elle ne veut pas l’entendre, même si elle le doit. Ses lèvres à la commissure des siennes la laissent de marbre cette fois-ci et la Vampire se détache brusquement de son aînée, remettant une distance raisonnable entre elles. “Je n’aurais pas à compter sur toi. Si je tombe à nouveau, je meurs.” Une oeillade froide, tout comme le ton implacable employé et elle se détourne pour contempler l’extérieur depuis la fenêtre, se perdant un instant dans l’obscurité au loin.

Les mots se répètent, les reproches aussi. Pourquoi devrait-elle être humble? Elle est Mei Long. Elle n’a pas à l’être. Méchante? Très certainement. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne elle n’avait jamais été gentille ni généreuse. Docile peut-être, pendant un temps, en apparence, mais certainement pas aimable et doucereuse. “Tu t’ennuierais si j’étais autrement. Ou tu te serais lassée depuis longtemps déjà.” Un soupir forcé quitte sa bouche alors qu’elle se retourne à nouveau vers son aînée, laissant retomber sa colère et sa rancune plus que passagères. Existe-t-il pire sentiment, au fond, que celui de se sentir délaissée? De ne plus susciter ni respect, ni crainte, ni désir? La solitude ne lui avait jamais été salutaire, cause de sa folie destructrice, en partie.

Changeant de cap, mettant de côté les piques et les menaces, elle se plante face à la Française, droite, altière. “Tu veux savoir jusqu’où je veux être à toi Ali?” Le sobriquet est rare dans sa bouche, plus que rare. “Tu veux savoir ce que je ferai si tu décidais un jour de prendre mes mots au comptant?” Reprenant volontairement les termes employés plus tôt, elle glisse doucement vers la porte de la chambre. Un pas de plus vers cette découverte du Sud tant promise, vers cette liberté refusée qui l’attire autant qu’elle l’effraie, dans ce jeu qu’elle a initié et dont elle veut tester, elle aussi, les limites, aussi malsaines et dangereuses soient-elles. “Il te faudra le découvrir par toi-même et tenter de m’y faire céder.” Joueuse, intransigeante, invitation ou retrait volontaire? Elle ouvre la porte et, dans un dernier regard de défi, quitte la pièce et prend la direction du rez-de-chaussée.
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Aliénor Bellovaque
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"Eh bien ; la guerre."

En un mot : La Vipère sous la rose.
Qui es-tu ? :
"Don't die with a clean sword."

♚ Caïnite âgée de trois siècles ; Accomplie du bel âge à portée d'ongles carmins.
♚ L'Ambition la ronge, mais laquelle ? ; le vide de nuits interminables la détruit plus sûrement que n'importe quelle balle en argent. L'Ennui pour seul véritable danger.
♚ Gorgone gauloise, sa réputation parle pour elle, surnommée Mère sanglante ou Reine rouge. Nombre d'enfants sont tombés sous ses crocs.
♚ Fille de corsaire, héritière de ses lettres de Marque ; navigua au service de Louis XV dans les eaux des Caraïbes à la tête de l'Espérance, frégate à l'équipage composé de deux centaines d'hommes.
♚ Trahie par un Britannique ; capturée et ramenée de force sur l'île de Mona, torturée , abusée, échappée - mourante (malaria). Transformée par un autre, à l'aube de sa trentaine.
♚ Éprise de coups d'État et féroce opposante à l'Essaim. Antique imperméable à l'ordre. À la tête du clan du Chaos. Danseuse sur le fil acéré de leur rigueur.
♚ Maudite ; aucun enfant n'a pu sortir de son ventre. Aucun Infant n'a pu résister à son vice, transmis tel un fléau. Sire matricide par deux fois. Échec toujours en gestation.
♚ Sang turc dans les veines, manie les us et coutumes perses. Son réseau d'Orient et d'Occident est dessiné comme une arachnide file sa soie.
♚ Incapable d'aimer son époque ; craintive pour l'avenir, répudiant son passé.
♚ Se joue d'une beauté en laquelle seuls les autres croient. Ancienne compagne de Serguey Diatlov, mère de substitution de Yago Mustafaï, protectrice de Mei Long et amante éternelle de Jenaro Silva.
♚ Pie voleuse, elle a dérobé le Clan du Chaos aux mains trop glissantes de Salâh ad-Dîn Amjad, qu'elle compte bien refonder en un ordre sérieux pour s'opposer à la Mascarade ainsi qu'au dictat de l'Essaim en place.

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Facultés : ♚ Vicissitude (niveau III)
♚ Mains de la destruction (niveau I)
♚ Chimérie (niveau I)
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Thème : Sleep Alone ♚ Bat for Lashes
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Pseudo : Nero.
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Dim 27 Juin - 23:30 (#)

♛ Dead but dreaming
Wings of Satan, orb my heart! It burns with love for you. And it is ready now, to receive thee. Claws of darkness, tear my soul! For I have chosen the night and branded its seal into my flesh. Lead me to the catacombs, where light of neither sun nor moon disturbs the dark in vaults, possessed by molten evil manifest.

▼▲▼

C’est un ballet.
Il en a toujours été ainsi des relations qu’elle tisse avec autrui.

Elle apparaît. La Mutine s’avance, sur la pointe des pieds, parade avec sobriété, ou avec plus d’éclat, selon à qui appartient le regard qui se trouve là. Un tour, deux tours, ses voiles se propulsent et tissent autour d’elle des atours éthérés, propres à son espèce, et à sa possible frivolité. Mais pas seulement. Si les pas se font légers, très vite, le poids de la gravité reprend la main et la voit tourner, tourner, rôder autour de sa victime attitrée. Homme, femme, enfant et même nouveau-né. Peut-être qu’on la verra tuer. Embrasser, danser, seule ou de concert, avec celui ou celle qu’elle a désigné. Eux, craintifs, s’écarteront par peur d’une contamination inéluctable, irraisonnée. D’autres, se jetteront dans l’étreinte pour la serrer et l’y blottir, tâchant de la réduire, de l’enfermer dans un rôle qui n’existe pas pour elle, qui n’a jamais été. Faite pour rien, conçue nulle part, balayée et promenée sur moult surfaces du globe comme une maladie qui s’échoue çà et là au gré des navires qui accostent, qui voguent et qui s’échouent sur une côte ; et pendant ce temps-là, toujours, la musique joue.

Mei s’est reculée. Elle ne la retient pas, ne l’écharpe pas de ses griffes possessives. Elle la contemple avec une forme de sérénité insolente ; elle sait bien qu’elle ne lui refusera rien éternellement. Rien ne presse. Les jours, les heures, ne sont rien. Sa résistance occupe ainsi la vacance, les empêche de trop songer au lent, si lent défilement des aiguilles, pourtant encore trop rapides à son goût. La preuve étant que, déjà, la princesse d’Extrême-Orient divague, danse à son tour brièvement, mais en revient à son centre de gravité « vivant » : Française demeurant sagement sur un socle de pierre, sur ses talons fragiles, statue immobile attendant qu’on revienne l’admirer ou lui confier les secrets, tous ceux qui n’atteignent pas les oreilles des mortels. Libellule toute en sang et noir, la Splendide la défie, cavale, se détourne pour préférer le couloir à la chambre, et obliquer vers la sortie du motel. Un sourire complice la prend, et c’est avec souplesse qu’elle marche dans ses traces, se frayant un chemin parmi les silhouettes qui s’écartent, qui ne possèdent de toute façon pas leur grâce. Elle rit lorsqu’en quelques enjambées elle la rattrape, caresse son avant-bras jusqu’au poignet de ses doigts délicats, abandonnant dans son sillage un parfum de Paris.

« Tu ne mourras pas. » Elle s’y refuse. Elle ne peut garantir combien de temps la force de son attachement prévaudra sur l’Immortelle et son propre instinct. Elle ne peut deviner quels nouveaux obstacles se dresseront à l’avenir, menaceront leur lien. Mais les cordes sont solides, sa passion tenace, et leur alchimie trop belle pour souhaiter s’en déchirer avant des lustres dont elle n’a pas l’occasion d’en deviner le nombre. « Bien sûr que tu auras à compter sur moi. » Viendra le moment. Viendra la nuit. Elle serait là. Comme elle le fut pour lui éviter l’opprobre, la sentence et la condamnation. Comme elle lui a déjà évité de redevenir poussière, prolongeant le supplice, la malédiction qui leur sied si bien, pour leur teint maquillé, faisant sourire quelques hommes qu’elles croisent à l’entrée. Elle ne leur accorde pas plus d’attention qu’une œillade capricieuse, même pas vouée à la rassurer. Elle sait à quoi ressemble la paire de maudites qui débouche sur le parking, près duquel plane l’odeur du cuir et de fauve émanant du souk, des hommes, senteurs d’Orient détonnant dans le ciel de Louisiane.

Les mots de Mei résonnent, prennent toute la place dans son crâne enchanté par la virée promise. Sans hésiter, elle la conduit vers une décapotable volée, seul véhicule qu’elle conserve pour elle-même, qui lui est attitré. Elle bondit derrière le volant, chipe les clefs depuis la cachette où elle prend l’habitude de les dissimuler, et fait rugir le moteur bien plus que nécessaire, tournant la tête vers celle dont elle fera la complice de sa chair un jour, elle se le promet. « Tu as raison. Je m’ennuierais si tu étais autrement. Prends garde tout de même à ne pas trébucher dans tes propre contradictions. » Le véhicule manœuvre, et la bottine enfonce la pédale sans concession. « Je suis Aliénor Bellovaque. »

La formule lui plaît.
La formule lui va.

La ballerine danse toujours, seule ou accompagnée : la voilà qui trace sa route, qui bondit, cavale et de sauts en cascade, entraîne une compagne encore timide, toujours perfide, sur la longue route qui sillonne le North.
Ni femme, ni homme, ni mortelle, ni Antique, elle est cette chose imparfaite, cette créature qu’on ne peut conditionner à aucune place, à aucun rang, rien qu’on ne puisse étiqueter, rien que l’on pourrait nommer décemment.  
Le temps l’angoisse et la laisse de marbre, la vitesse et le vent qui emmêlent ses cheveux ne l’incitent qu’à se donner à la violence qu'elle déchaîne, provoquant leur face à face. Ne l'incitent qu'à laisser les bourrasques la modeler comme tant d’hommes l’ont déjà touché. Elle pourrait fermer ses pupilles nyctalopes que sans peine, les visages de ses amants s’égrèneraient sans effort. Et plus la voiture fuse, accélère, plus elle remonte les décades, les décennies et les siècles. Les phalanges qui ont empoigné le cuir ne se défaussent pas pour autant. Elle conduit droit, s’écarte lorsque d’autres phares viennent croiser les leurs. Sa vie se détricote, se rembobine, elle en dépiaute les fils, son passé tombe en ruines, en lambeaux, révélant les couches, les strates du temps, les ossements qu’elle n’a pas pris grand soin d’enterrer trop profondément. Elle sillonne, comme elle guidait autrefois ses marins, ses matelots, ses mousses et ses soldats, bravant les creux des vagues, les caprices du ciel et les plaintes du bois, de la proue à la poupe ; quille endommagée, gouvernail raide à manier. Comme éprouver cette force, ce duel entre elle et les éléments lui manque, alors.

Et ses épaules se secouent, en un rire irrépressible, loin de ceux qu’elle crée comme autant d’illusions à dessiner pour charmer l’ouïe de ses proies convoitées. Elle rit, épuisée de cet écartèlement constant, tandis que les lumières de la ville lui apparaissent, pointent sous leur nez comme autant de cadeaux, de grains de vie à perturber. Elle rit, hystérique, ivre de bonheur, de liberté, terrifiée par les limites factice de cette existence emprisonnée, cadenassée par les grilles de l’aube et du crépuscule.

Par jeu, elle emploie la voie rapide, explosant encore davantage les limites du compteur, loin, très loin de la vitesse à respecter, et zigzague entre les autres voitures aux conducteurs affolés.
À défaut de navire, à défaut de rouleaux, à défauts de brise iodée, c’est la fureur d’un bolide sur une route parfois défoncée et baignée d’humidité chaude qu’elle offre en cadeau à sa protégée. Et ce moment, elle le capture, elle s’y attache, elle en respecte la moindre seconde, les calfeutre dans un sablier au verre doublé. Pour ne jamais l’oublier.
Amazone, harpie, furie décoiffée, il ne lui manque qu’un peu de sang frais pour que son rêve soit total, à moins que Mei Long ne couronne la perfection de l’instant par ses lèvres là où elle ne les a encore jamais posés pour le moment.

Quand soudain, les sirènes hurlantes mettent un terme à ses rêveries, sans pour autant la voir ralentir dans l’immédiat. Derrière elles, une simple voiture de police, patrouille hasardeuse, les incite à prendre la première sortie précédant le Downtown. Docile en apparence, la Gorgone obéit. Pauvre flic. Il ignore alors qu’en les isolant des regards témoins, il se condamne, éprouve sans le savoir les dernières gouttes d’une vie de devoir et de responsabilités zélée.

« Tu vas nous débarrasser de lui. »

Elle ralentit encore, prête à se déporter sur le côté, zone industrielle faite d’entrepôts, presque déserts à cette heure. Lorsqu’elle s’arrête, ses iris acérés vrillent sans ménagement ceux de son amie. « À moins que tu aies trop peur ? Que tu ne t’en sentes pas capable ? » Un coup d’œil jeté dans le rétroviseur. L’officier est jeune. Pas désagréable à regarder. « Ne sois pas trop vilaine avec lui. »

CODAGE PAR AMATIS


Before I'm dead

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Princesse Kumquat, le Glaçon Impérial.
Mei Long
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En un mot : Derrière elle, les traumatismes de l'Orient. Devant, ce spectaculaire et dangereux Occident. Entre les deux, cette douce torpeur, bourreau et gardienne de sa déraisonnable folie. De sa folle déraison.
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Mer 21 Juil - 14:06 (#)


A Brave New World
Tu ne mourras pas.

Les mots résonnent, s’ancrent dans une douce litanie aux allures de supplice, de torture. La conviction de son aînée ne trouve guère de résonance là-haut, dans son esprit brumeux aux souvenirs trop nombreux, aux cicatrices trop marquées. Là, dans les replis, loin derrière la conscience, loin derrière les apparats, se cache l’assurance que son temps est compté. Quelle preuve supplémentaire sinon sa vie toute entière? Elle n’est pas de ces joyaux que l’on transforme en pierres précieuses. Trop brute. Trop animale. Ne jamais se méprendre. L’eau qui coule en elle est un tourbillon indomptable. Sous le calme apparent, sous la surface plane et lisse, les fonds restent traîtres, imprévisibles, et mortels.
La cadeau de l’immortalité n’a fait que ressurgir ce qui est resté tapi trop longtemps, gommé par la bourgeoisie, le décorum, les attentes d’une famille au bord du précipice, un pays aux portes de la révolte. Exacerbé par ses nouveaux sens, ses nouveaux besoins. L’insolente est devenue harpie, la jalouse possessive, l’envieuse obsessionnelle. Toujours dans l’excès, jamais dans la mesure. Et ses efforts, elle le sait, seront vains. Peu importe à quel point Mei désire le contrôle, à quel point sa survie lui est chère, un jour, tôt ou tard, elle mourra. De la main d’un autre bourreau, de celle d’une autorité à la pseudo morale bien pensante, ou pire, de celle du seul amant qui ait compté, de la seule amie qu’elle chérit.

Alors elle n’offre que le silence pour réponse, se contentant d’un sourire en coin qui en dit pourtant déjà long, elle n’offre ni son attention ni même un regard en coin aux hommes croisés sur sa route. Elle a appris à les considérer comme des automates. Ils font partie du décor, ni plus, ni moins. Des pantins de chair inintéressants, inférieurs, qui ne méritent rien d’autre que son indifférence la plus totale.

Prenant place dans le véhicule, elle regrette un instant de n’avoir jamais daigné apprendre la conduite, se calant confortablement dans le siège. Seul son visage se tourne vers sa comparse et égale. “Trébucher n’est pas tomber.” Et la nuance prend toute son importance dans le résumé de sa vie. Combien de fois avait-elle touché le sol crasseux et boueux? Combien de fois avait-elle été victime sans jamais s’avouer soumise? Combien de mains sadiques? De regards haineux? D’ordres creux? À chaque fois, l’exultation, tardive ou non, d’une vengeance mesquine, tout aussi sadique, tout aussi haineuse.

La pédale enfoncée, le passé et le futur perdent leur emprise. Ce soir, il n’y a que l’instant présent, le vent qui s’engouffre dans ses cheveux et l’oblige à fermer les yeux pour mieux savourer ce semblant de liberté. Les paupières closes, la ville disparaît au profit des grandes étendues de sa précieuse Mandchourie, des embruns salins qui ont nourri ces premières années, de la soie et l’or qui ont couvert jadis sa peau. Son pays lui manque, sa grandeur aussi. Maintenant craint pour sa puissance économique et moqué pour tout le reste, il ne reste que la poussière de ce qui a, un jour, failli être sien. Mais ce sentiment n’est pas pour cette nuit. Le passé s’efface, le futur n’est pas. Aliénor accélère, et un sourire conquis naît sur ses lèvres, d’une rareté exceptionnelle.
Il n’y a pas de règles pour elles, pas de limites. Le chaos pour seul leitmotiv, pour seul crédo. La Chinoise pourrait s’en nourrir à jamais si ses humeurs ne risquaient pas de la trahir à chaque faux pas, chaque hésitation trop marquée, chaque corde sensible tirée trop fermement. Orgueilleuse, capricieuse, jalouse, mauvaise. Elle n’avait jamais été faite pour la sagesse et la retenue.

Impatiente de ce que la nuit leur réserve, lui réserve, elle ne rouvre les paupières que lorsque les sirènes, trop proches, rompent la sérénité fraîchement gagnée. Là, quelque part, quelque chose se tord, se crispe. Elle les déteste. Elles lui rappellent ses pérégrinations le long de la côte Est, plusieurs décennies auparavant, ses fuites répétées quand ses frénésies attiraient inexorablement l’attention des autorités locales. Jamais son visage n’a été identifié, vulgairement placardé sur une affiche dans un réalisme approximatif et rarement flatteur. Mais Mei les avait sentis trop souvent à ses trousses, marchant dans ses pas, attendant la faute, celle de trop. L’uniforme ne lui inspire que mépris et crainte, et si elle se gorge du premier, le second la révulse par la faiblesse qu’il met en exergue. L’immortelle se tend aux côtés de son aînée, surtout quand cette dernière initie leur reddition. C’est du moins l’hypothèse que formule son esprit quand l’Antique décélère.

Et puis ces mots, soufflés avec une intransigeance qui fait se réveiller le pire en elle. La crainte s’évapore au profit d’envies et d’idées bien moins handicapantes, bien plus exaltantes. Le véhicule s’arrête enfin et quand l’océan s’échoue en une déferlante contre l’onyx, la défiant avec brutalité et supériorité, c’est de son regard le plus noir qu’elle foudroie sa camarade. Vexée, blessée, elle le soutient par refus de se soumettre, mais l’officier descend déjà. À sa dernière recommandation, Mei a déjà la main sur la poignée du véhicule. Dans un simple “pfff” insolent, la Belle est déjà loin.

Obténébration.
Puisant dans ses forces, ce sont les ténèbres qui la portent, comme toujours quand elle redevient prédatrice, protégée par ses précieuses alliées qui la rendent invisible. Elle observe l’homme, trop jeune, trop inexpérimenté, s’approcher doucement de la voiture côté conducteur, la main sur son arme de service encore sagement rangée dans son étui. Première erreur. Comment ne pas être trop vilaine avec lui quand toutes les fibres de son corps pourtant mort s’agitent et lui soufflent de céder, de se jeter sur lui et de se nourrir de sa peur, de son incompréhension, de sa certitude à la mort. Elle veut deviner les images qui défileront dans sa caboche quand il comprendra que cette nuit est sa dernière. Elle se retient, difficilement, ne pouvant rester statique, les poings serrés, les muscles tendus. Aliénor ne sait pas ce qu’elle demande. Ce Besoin est trop impérieux, trop fort, il fait partie d’elle, ne demande qu’à prendre le contrôle. Et il serait si facile de lui céder. De s’échapper. De laisser la place à sa jumelle.

Un pas. Elle sent ses instincts prendre le dessus. Un pas. Il ne peut encore voir que l’arrière de la nuque de son amie. Un pas. Celui de trop. Non, Aliénor ne sait pas ce qu’elle lui demande. Une seconde, peut-être deux, c’est tout ce qu’il faut pour que ses griffes se referment sur sa proie et l’attirent loin de la voiture, dans cette zone déserte aux allures soudaine de cimetière. Une main sur sa bouche, elle attend qu’il tente d’attraper son arme pour la retourner contre elle. Dans un rire sadique et moqueur, presque jubilatoire, c’est l’excuse qu’elle cherchait pour entourer le poignet de l’homme et le briser d’un coup sec, étouffant son cri et raffermissant sa prise sur sa bouche. Il geint et l’immortelle bascule sa tête en arrière, là où la jugulaire pulse juste sous la peau. Si elle déteste le contact physique, si elle se nourrit rarement à même la peau, le manque d’options la force à revoir ses méthodes. Elle ne saurait s’en soucier moins présentement de toute façon. Elle en a envie. Elle en a besoin. Depuis combien de temps n’avait-elle pas mordu? Tuer? Dans un râle de plaisir, elle fond sur sa proie.

À quelques centimètres de sa gorge, elle s’interrompt. L’idée la frappe de plein fouet. Aliénor sait exactement ce qu’elle lui demande. La veine pulse, comme un appel au vice, à l’abandon. L’Asiatique ferme les yeux, serre les mâchoires et ne retient pas un soupir de rage. La colère la submerge tandis que d’un coup bien placé à l’arrière de la jambe Mei oblige sa victime à poser genou au sol. Elle lutte pour ne pas céder, pour ne pas laisser gagner une prévisibilité sans saveur. Elle la déteste. Pour ça. Pour ce qu’elle suppose, de façon juste ou erronée. Un soupir râle haineux s’échappe de sa gorge tandis qu’elle raffermit sa prise sur celle de l’officier. Son pouce sur une veine, le reste de ses doigts sur l’autre, elle serre, serre encore, suffisamment pour priver toute arrivée d’oxygène au cerveau, pas assez pour la briser. Le regard mauvais porté dans le vide, les mâchoires serrées à l’extrême, elle lutte contre ses envies de meurtre et son besoin de sang. Puiser dans ses pouvoirs n’est jamais gratuit, pas avec le régime alimentaire qui lui est imposé.

Quand elle sent les forces de l’agent l’abandonner et son corps retomber, elle ne retient pas le laisse s'aplatir dans les graviers. Son regard se porte enfin sur ce corps frêle, fragile et elle retient un coup traître. D’un geste rapide, ses yeux remontent vers le véhicule, immobile, une dizaine de mètres plus loin. Oui, Aliénor savait précisément ce qu’elle lui demandait.

D’une allure normale, la distance n’est pas suffisante pour adoucir son humeur quand elle remonte dans la voiture. Claquant la portière, elle ne daigne pas reporter son attention sur son aînée, le regard porté droit devant elle. “Tu devras changer tes plaques d’immatriculation.” Un simple constat, sur un ton froid, tandis que la faim lui cisaille les entrailles.

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Lun 17 Jan - 3:25 (#)

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Wings of Satan, orb my heart! It burns with love for you. And it is ready now, to receive thee. Claws of darkness, tear my soul! For I have chosen the night and branded its seal into my flesh. Lead me to the catacombs, where light of neither sun nor moon disturbs the dark in vaults, possessed by molten evil manifest.

▼▲▼

Il en sera toujours ainsi, de cette défiance. De cette provocation. Elle contient un sourire en voyant sa protégée sortir avec orgueil du véhicule. Elle ne sous-estime pas les blessures que ses propres piques peuvent lui infliger, mais elle ne se privera jamais de la remettre à sa place lorsqu’elle trouve nécessaire cet aiguillage approprié. Mei n’est à l’abri de rien. Encore moins d’elle-même. Aliénor ira loin pour la protéger, mais seulement au prix de ce type de rappels à l’ordre, loin d’être superflus.

Pas de caméras dans ce coin-là de la ville. La Samain maudite n’a pas encore eu lieu et, même après cela, Shreveport n’est pas New York. Le manque de budget pour financer des moyens humains comme matériels se fait ressentir plus encore dans cette portion de territoire. Et les pouvoirs de Mei ne font que souligner l’évidence d’un jeu déséquilibré. Toutes les lois n’y changeront rien, se dit-elle à nouveau. Les siens, ou du moins ceux parmi les siens qui ont décidé de lutter contre l’uniformisation de leur mode de vie calqué sur celui des humains, ne cesseront jamais de contourner les limites ni de casser les codes, d’enfreindre les règles, d’égorger les hommes. Dans sa robe d’un rouge sanguin, sa cadette est superbe, son teint pâle soulignant un contraste qui lui plaît, dans le bref reflet des rétroviseurs. Pour sa part, elle ne bronche pas tandis que l’homme ne tarde pas à se rapprocher. Elle ne s’imagine même pas en train de planifier un quelconque bobard, la moindre tentative d’explication. En dépit de ses doutes verbalisés, elle n’est pas inquiète. Elle fait confiance à l’immortelle, seulement curieuse de sa façon de procéder. Elle a besoin de la tester en situation réelle, de mesurer le degré de surveillance à appliquer à son encontre. Elle refuse de réitérer, de les conduire ensemble sur le même chemin déviant ayant mené à sa mise en torpeur. Elle ne supporterait pas de reproduire cette mascarade une seconde fois.

En un souffle morbide, l’homme se fait happer et entraîner à l’abri des regards. Aliénor sort à son tour, et ses talons chantent sans hâte jusqu’à la scène qui voit ce couple de polichinelle enlacé en une étreinte macabre. Ses bras croisés contre sa poitrine, évoluant lentement parmi les fumerolles ténébreuses qui s’écartent avec paresse à son passage, elle ne perd pas une miette de la scène, à la fois voyeuse et attentive.

Mordras-tu ?
Elle-même en crève d’envie. Ses lippes se sont imperceptiblement retroussées, hyène prête à découvrir ses babines et ses crocs jaunis. Elle meurt d’un désir pétri de fantasmes cruoriques ; cascades et geysers de sang fusant loin dans sa gorge, noyant son visage, poissant ses cheveux et salopant ses vêtements jusqu’à sa lingerie. Elle s’oblige à s’immobiliser pour ne pas tronquer le jeu, ne pas influencer Mei d’une manière ou d’une autre.

Elle ne mord pas.
Une véritable surprise attise la curiosité de l’Antique.
Elle était si sûre que sa poupée chinoise céderait à cette boulimie chronique, inévitable.
C’est presque en elle désormais que bout une frustration mauvaise. Elle regarde l’officier choir à terre, évanoui. D’un coup d’œil, elle balaie les horizons déserts et ne cherche pas à retenir sa comparse, une fois son méfait accompli. Elle écoute la portière claquer et finit par pivoter à son tour après un dernier soupir agacé. Elle aurait aimé boire à cette gorge-là. Pas le temps de s’attarder, cependant. Avant de revenir dans sa propre voiture, elle se dépêche de regagner celle du flic, la contournant habilement jusqu’à s’assurer qu’aucune go-pro ou technologie moderne n’a pu enregistrer la scène. Au bout de plusieurs longues secondes d’analyse, elle en revient, satisfaite, vers la décapotable, sautant derrière le volant.

« Je le ferai avant l’aube. »

Elles redémarrent, abandonnant la scène derrière elles. Aliénor plonge loin dans les entrelacs de la zone industrielle afin de brouiller d’éventuelles pistes, de contourner la ville et ainsi d’entrer par l’Est.

« Tu as fait des progrès évidents. D’où te vient une telle maîtrise ? »

Le ton est grinçant – principalement à cause de sa faim – mais nulle ironie ne règne vraiment dans ce qui ressemble fort à un compliment, dans sa bouche. « Je ne t’aurais pas punie, si tu avais décidé de te nourrir de lui. » Un regard vers elle, rapidement. « Alors pourquoi ? Pourquoi as-tu décidé de l’épargner ? Il y un demi-siècle tu l’aurais mis en pièces sans une once d’hésitation. » Elles sont entrées. Bientôt, la voiture se fond parmi toutes les autres, les rendant délicieusement anonymes dans la nuit. « Ou bien ce que tu as vu de ce nouveau monde t’a sérieusement effrayé et convaincu de faire profil bas… ou bien Jenaro n’a pas dû te ménager, à ton réveil. » Un silence. « À moins que ce soit moi que tu souhaites impressionner. Sans oublier ton caractère de cochon et ta propension à souligner les à priori que je pourrais concevoir à tort à ton sujet. »

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En un mot : Derrière elle, les traumatismes de l'Orient. Devant, ce spectaculaire et dangereux Occident. Entre les deux, cette douce torpeur, bourreau et gardienne de sa déraisonnable folie. De sa folle déraison.
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Sam 26 Mar - 21:59 (#)


A Brave New World
Laissant son aînée disparaître, sa main se tend vers le rétroviseur central, fronçant les sourcils quand le reflet de son alliée lui renvoie la scène d’une fouille dont elle ignore le projet. Les mâchoires toujours serrées, elle délaisse cette image déformée pour l’horizon sombre, rongeant son frein, ou plutôt sa faim. Désir en étau, besoin en tenailles, elle lutte intérieurement contre cette rage dévorante au pouvoir de destruction incontrôlée et incontrôlable. Le vent qui souffle n’a rien de rassurant, là, au creux de ses entrailles. Si familier, si dangereux, les crocs aiguisés et la limite incertaine. Elle en connaît chaque tourbillon, chaque tournoiement, se fond dans la tempête annoncée dans laquelle Mei s’est maintes fois laissée emporter.
Comme une valse d’un autre temps, berceuse diabolique la guidant vers cette transe dont seuls les souvenirs lui permettent encore quelque plaisir fugace. Tango lascif dont les bras chimériques lui ont fait perdre raison et équilibre. La danse n’est plus, la musique s’est éteinte, et dans cette maigre étincelle qui ne prend plus, elle se consume sans plus brûler. Y céder la condamnerait. Lutter la tue à petit feu. Inexorablement. Année après année dans cette éternité.

Aliénor revient et ses songes s’atténuent au profit d’une réalité tout aussi froide, tout aussi brutale. Elle lui est rarement apparue autrement au cours de sa longue existence, qu’elle soit mortelle ou créature des ombres. La question lui fait détourner le regard au loin et la mure dans un silence que la Chinoise veut raisonnable, calculé.

Des progrès

Comme un enfant retenant sa leçon. Comme un disciple aveuglément dévoué à son maître. Des progrès, voilà ce à quoi elle est réduite. Car la maîtrise n’existe pas, Mei le sait. Un décorum, une image placée pour mirage. La Caïnite a-t-elle conscience de la force qu’il lui a fallu pour ne pas céder, pour ne pas l’égorger sur place? Les raisons qui l’y ont poussé sont légion, mais aucune ne frôle un tant soit peu la maîtrise.
La laissant émettre ses hypothèses, sa résolution au silence n’y tient plus et elle tourne son visage vers la conductrice. “Vingt ans de torpeur” tranche-t-elle abruptement. Ses yeux fuient à nouveau, sur les lignes avalées par le bitume. “Je n’ai pas besoin de m’entendre dire que c’était nécessaire. Mais tout plutôt que d’y retourner.” Ça n’avait rien eu de calme comme elle avait pu le penser. Non, rien de calme. Pas de traces visibles ne signifiaient pas leur absence.

Un rire teinté de sarcasme passe sa bouche légèrement peinte. “Jenaro ne m’a jamais ménagée. Et il y a un demi-siècle, il a voulu m’offrir la mort ultime. Son petit projet éducatif et son affection malsaine pour ma personne ne changeront pas à mes yeux celui qui a un jour été bourreau en respectable professeur.” Oui, malgré le lien ténu entre eux, au-delà de cette relation hors-norme, elle n’avait jamais oublié. Tous ces beaux discours, tout ce qui avait suivi ne rachèterait jamais entièrement ce geste. Le change, l’immortelle n’a fait que donner le change. Ou peut-être n’est-elle que mauvaise foi incarnée et refuse d’avouer à haute voix tous les sentiments qu’elle peut nourrir pour leur comparse. Non, il y a des fiertés qui empêchent ce genre d’aveu.

Finalement, un sourire discret ourle un instant ses lèvres alors qu’elle daigne jeter un regard à son amie. Le sourcil arqué, elle la détaille quelques instants des pieds à la tête. “Je n’ai pas besoin de me fatiguer inutilement par ce genre d’efforts. Je t’ai impressionné dès notre première rencontre.” Son assurance serait presque amusante si elle était teintée de naïveté et de candeur, deux traits de caractère fatalement absents. Non, c’est son ego qui parle. “Je voulais le tuer.” Tranche-t-elle à nouveau en se détournant, laissant le ronronnement des voitures les accompagner une dizaine de secondes ou deux avant de reprendre. Le policier. “Mais tu as consenti toi aussi à ma torpeur. Je sais que tu aimes ma folie, que tu te délectes de mon absence de contrôle, que tu rêves de toucher la limite la plus extrême pour voir ce qui s’y cache, ce que tu pourrais découvrir, jusqu’où je pourrai te céder dans un abandon le plus parfait. Je n’oublie pas que tu n’hésiterais pas à me replonger dans ce coma brumeux pour ta propre sauvegarde avant la mienne.” Si les mots sont crus, directs, peut-être mesquins, le ton ne s’y prête pas. Il n’est que celui d’une vérité brute énoncée.

Fermant les yeux quelques secondes, Mei prend sur elle pour poursuivre, peu encline à se justifier ou à étayer pour ne pas blesser. C’est dire toute l’importance qu’a Aliénor à ses yeux. “Je ne dis pas ça pour être cruelle. J’en ai besoin.” Aveu de faiblesse et de dépendance. À graver dans le marbre, assurément. “J’ai besoin de ta cruauté et ton pragmatisme autant que ta folie et ton affection.”

Et parce qu’il n’est jamais bon de se laisser aller de la sorte, parce qu’elle refuse d’ouvrir davantage cette porte, Mei reprend sur un ton plus badin. “Et je n’ai pas un caractère de cochon, je suis de l’année du serpent” Humour volontaire ou maladresse et méconnaissance de certaines expressions communes? Peut-être un peu des deux…


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En un mot : La Vipère sous la rose.
Qui es-tu ? :
"Don't die with a clean sword."

♚ Caïnite âgée de trois siècles ; Accomplie du bel âge à portée d'ongles carmins.
♚ L'Ambition la ronge, mais laquelle ? ; le vide de nuits interminables la détruit plus sûrement que n'importe quelle balle en argent. L'Ennui pour seul véritable danger.
♚ Gorgone gauloise, sa réputation parle pour elle, surnommée Mère sanglante ou Reine rouge. Nombre d'enfants sont tombés sous ses crocs.
♚ Fille de corsaire, héritière de ses lettres de Marque ; navigua au service de Louis XV dans les eaux des Caraïbes à la tête de l'Espérance, frégate à l'équipage composé de deux centaines d'hommes.
♚ Trahie par un Britannique ; capturée et ramenée de force sur l'île de Mona, torturée , abusée, échappée - mourante (malaria). Transformée par un autre, à l'aube de sa trentaine.
♚ Éprise de coups d'État et féroce opposante à l'Essaim. Antique imperméable à l'ordre. À la tête du clan du Chaos. Danseuse sur le fil acéré de leur rigueur.
♚ Maudite ; aucun enfant n'a pu sortir de son ventre. Aucun Infant n'a pu résister à son vice, transmis tel un fléau. Sire matricide par deux fois. Échec toujours en gestation.
♚ Sang turc dans les veines, manie les us et coutumes perses. Son réseau d'Orient et d'Occident est dessiné comme une arachnide file sa soie.
♚ Incapable d'aimer son époque ; craintive pour l'avenir, répudiant son passé.
♚ Se joue d'une beauté en laquelle seuls les autres croient. Ancienne compagne de Serguey Diatlov, mère de substitution de Yago Mustafaï, protectrice de Mei Long et amante éternelle de Jenaro Silva.
♚ Pie voleuse, elle a dérobé le Clan du Chaos aux mains trop glissantes de Salâh ad-Dîn Amjad, qu'elle compte bien refonder en un ordre sérieux pour s'opposer à la Mascarade ainsi qu'au dictat de l'Essaim en place.

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Ven 13 Mai - 0:05 (#)

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C’est toute la profondeur du lien qui les unit qui remonte à la surface, sans crier gare.
En dépit de leur apparence, de leurs tenues d’apparat et de leurs apprêts soigneusement étudiés, il lui semble soudain que leur aspect parfaitement inoffensif, tout aussi proche de celui des millions d’humaines occidentales, ne fait plus illusion. Elle croit sentir le poids du regard des passants qui déambulent, sur les trottoirs adjacents. La voiture circule à présent au ralenti, engluée dans une circulation attendue, et finalement bienvenue. L’heure n’est plus à la vitesse. Ces inconnus qui marchent, qui les fixent, qui rêvent peut-être de toucher leur plastique, de convoler pour le reste de la nuit en une étrange et double noce, comprennent-ils que sous les fards se planquent d’infâmes striges ?
Ses doigts se crispent légèrement sur le volant. Elle a provoqué cette conversation. Désormais, elle doit l’assumer. Elle ne compte pas fuir, faire preuve de lâcheté. Elle non plus ne regarde pas Mei ; ne la condamnera donc pas pour cette fuite permanente, l’azur et l’onyx s'effraient mutuellement.

« Je ne souhaite pas te voir retourner à la torpeur, moi non plus. » L’époque a changé. Elle ne permettra plus à cette alliée de poids de s’en aller céder à un sommeil sans fin, inaccessible. Son propre aveu la bouleverse. « Je ne crois pas que j’en aurai le courage. » Et Jenaro ? À en croire ses derniers agissements, il semble peu probable que lui aussi consente à l’enfermer une seconde fois. Ou bien elle ne comprendrait plus rien de ce qui agite les mécanismes de pensée de l’Espagnol. L’arrière de son crâne bute en douceur contre l’appuie-tête de cuir, en silence. Sa cage thoracique se comprime d’une tension pourtant inexistante – parodie de douleur fantôme, de démangeaisons comme seuls les connaissent les amputés. Dans ces moments-là, elle souhaiterait s’ouvrir le thorax, perforer sa poitrine pour faire apparaître à l’air libre chaque côte atrocement fêlée. Ainsi, parviendrait-elle enfin à respirer, de nouveau ? Elle remue un peu. Elle ne se sent pas bien. Décidément, rien ne se passe comme prévu, depuis qu’elles sont apparues l’une à l’autre, ce soir. Ce qui ne devait s’apparenter qu’à une soirée faite de plaisirs vicieux et propres à leur espèce, se change en une analyse tourbillonnante mêlant leurs tourments passés aux turpitudes présentes. Elle ne cherche pas à lutter contre cette pente vertigineuse, rebutante au premier abord. Elle comprend que certaines choses ont besoin d’être nommées. Identifiées. Repousser l’échéance ne la rendra que plus difficile à affronter, une fois confrontées de nouveau. « Tu m’as impressionné, peut-être. Mais tu m’as aussi inquiété. Je sais que tu as parcouru du chemin, depuis New York. Cependant, tu auras beau faire, tu ne m’empêcheras pas de me ronger les sangs, te concernant. C’est plus fort que moi. » Ses ongles cliquètent sur le cuir. « Tu n’es pas mon Infante, Mei. Mais je ne te considère parfois guère autrement. » Elle se retient de clore ses paupières. « Ne le prends pas mal, je t’en prie. Cela n’a rien d’avilissant, dans ma bouche. Au contraire. » Une longue ligne de feux rougeoyants brille, éclaire la nuit de touches d’écarlate, comme un rappel éternel de leur appartenance au monde des Caïnites. Le coude de l’immortelle s’appuie contre le rebord de la portière, et sa paume accueille une joue pleine. Elle se fait pensive. « Yago et toi êtes très différents. Je ne suis pas votre Sire. Pourtant, si j’avais eu l’occasion de faire de vous mes enfants de l’Autre Vie, alors je n’aurais pas hésité une seconde. Même en toute connaissance de cause. » Finalement, un coup d’œil glisse en direction de l’Asiatique. Aucune verve, aucune gouaille ne se sont incrustées dans l’échange, étrangement intime. « J’ai échoué, par deux fois. Ophelia, Drustan… Il n’y a pas une nuit où je ne pense pas à eux. Pourtant, chaque fois que je vois Yago longer un couloir, chaque fois que je t’entends de l’autre côté du mur de ma chambre, je ne peux m’empêcher de retrouver un peu le sourire. C’est peut-être prétentieux, mais je vous vois comme… les deux témoins, la preuve incontestable que le fil interminable de mon expérience n’aura pas totalement été vain. Vous êtes toujours là. Vous allez bien. Ou du moins, aussi bien que possible, au vu des circonstances. »

Un coup de klaxon interrompt sa litanie, brise la ligne de flottaison de sa pensée cotonneuse. Elle se redresse, remet de l’ordre dans sa chevelure, qui n’en a pas forcément besoin. « Tu as raison sur un point. Je garderai le cap, pour toi. Je ne ferai pas preuve de faiblesse pour le seul motif de mon amour à ton intention. Je surveillerai ma jolie vipère. Même si cela implique de l’enfermer parfois dans un terrarium pour son bien. » La plaisanterie s’entend avec la même aisance que celle de Mei, précédemment. Elle a toujours aimé ce trait de caractère, chez la Chinoise. Aussi terrible soit-elle, aussi grandiose, Mei a toujours su trouver le bon tempo pour accoler un mot sordidement drôle, d’un mauvais goût formidable, et d’une cruauté jouissive. Elle ne peut jamais faire autrement que d’y voir une affinité incontestable pour une rhétorique toute personnelle, et dont elle ne parvient toujours pas à se lasser. « Oublie Jenaro, pour le moment. Ce qui est fait, est fait. Il a toujours été plus raisonnable que nous deux. Et puis, il tenait à sa réputation. À sa crédibilité, auprès de l’Essaim. Nous avons beau voir les choses différemment, sa position se tient. De plus, il ne t’a pas tué. C’est tout ce qui compte, ce soir. » Voilà que l’artère s’anime de plus belle. Elles avancent, au pas mais tout de même, roulent pour suivre le boulevard se dégorgeant peu à peu de ce flot de mécaniques luisantes sous les néons des bars. « Quant à moi… oui. Oui, je ferai tout pour me maintenir en vie. Pour me protéger. Ce qui ne veut pas dire que je suis prête à sacrifier ceux à qui je tiens d’un claquement de doigts, sans réfléchir. Ton destin t’appartient à toi seule, et si tu connais mes limites, alors à toi de veiller à ne jamais t’en approcher, Mei. » Sa bouche se tord. Esquisse une moue qui n’appartient qu’à elle seule, parmi toute la palette d’expressions que la Mort ne lui a pas ôté. Elle ne la fixe pas, mais un sourire cruorique apparaît, pour qui voudra bien le contempler. « Continue comme ça. Et je te promets que, bientôt, tu seras récompensée pour ta prudence. Je t’en fais le serment. »  

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Mar 17 Mai - 20:40 (#)


A Brave New World
Ô dangereuses paroles qui s’ancrent, se gravent et écorchent d’une douceur singulière un ego déjà démesuré, prenant des allures d’apophtegme. Ils s’écoulent sur sa peau, en pénètrent l’épiderme, s’immiscent dans les artères inutiles à la recherche d’un cœur mort depuis plus d’un siècle maintenant. Immobile, prise de court par cet élan sincère et inattendu, l’Immortelle se force à fixer un point invisible face à elle, se refusant à détourner le regard ou, à contrario, se laisser tenter par la venimeuse à ses côtés. Plus que l’ego, plus que la fierté qui n’est plus à prouver, elles ravivent ce qui est tari, dénouent l’entrelacement de barrières érigées pour se protéger, il y a longtemps. Là, dans l’habitacle de cette voiture, dans l’impossibilité de fuir, sans trait d’esprit ou sarcasme pour s’en échapper, elle subit dans un supplice qui n’a rien de discordant une effusion qu’elle n’a pas cherché à provoquer.
Aveu de faiblesse de son aînée, de la seule qu’elle pourrait juger digne d’être rivale, de la seule qu’elle estime, également. Pour sa propre personne. Pour sa seule personne. De tous les non-dits qui sont probablement légions entre elles, ils n’ont étrangement rien de détonant. De sa non-croyance pour la verve et le verbe haut, pour les mots enrobés de velours destinés à tromper de futurs actes belliqueux, miroir flatteur pour retourner l’hypocrisie et la malice, elle s’en nourrit plus que son impassibilité le laisse supposer.
Si elle avait été n’importe qui d’autre, si elle en avait eu le pouvoir ou la capacité, Mei ne doute pas un seul instant de la naissance d’une larme au coin de son regard typé. Mais rien, sinon le mutisme le plus absolu.

Ô dangereuses paroles qui effraient, forcent à voir au-delà du déni et des souvenirs enfouis. Dans ce flou visuel duquel elle se force à rester prisonnière, deux visages s’imposent à la vampire. D’abord son Sire, puis Gautièr. Soumise du premier, maîtresse, élève indisciplinée et médiocre, elle lui a tout abandonné quand il n’a cherché qu’à forger la partie qui l’intéressait le plus et se conformait à ses attentes les plus viles, les plus possessives. Comprenant trop tardivement que les ficelles de sa poupée avaient été coupées et que son affranchissement signifiait sa perte, il n’était plus. Quant à son loup…. son loup. Elle restait encore convaincue aujourd’hui qu’il s’était laissé balloter entre la pensée de ne pas la mériter et la conviction profonde qu’une créature aussi féroce ne pouvait qu’être la résultante de ses mauvais choix. Bourreau et absolution, ils avaient été destinés à se détruire autant qu’à se panser. Ils l’étaient certainement encore aujourd’hui.

La rêverie troublée par la tentation de la regarder, c’est du coup de l'œil qu’elle détaille son amie de façon discrète. De toutes les âmes qui ont jalonné sa vie elle prend conscience, dans cette nuit banale, qu’Aliénor est celle qui a su le mieux la lire, la décoder, la protéger, la limiter, l’aimer. Sans qu’elle ne lui en donne la consigne, vil traître de sa maîtrise, son visage se tourne dans sa direction et rarement dans sa longue existence l’Antique s’est sentie si troublée. Les mots sont trop justes et sans doute trop beaux. Est-elle émue? En a-t-elle seulement la capacité? Dans ce tourbillon de sentiments qui l’assaillent chaque seconde de son immortalité, elle est, ma foi, bien incapable d’en identifier celui-ci. Et si elle n’offre jamais ce qu’on attend d’elle, si cette dernière s’évertue à ne jamais céder aux affres d’un sentimentalisme désuet et détestable, la Chinoise ne se sent contrainte à rien, quand, dans un naturel qui lui ressemble si peu, quelques phonèmes viennent rompre son enfermement. “J’aurais aimé que ce soit le cas.” Évidemment ses yeux se détournent pour ne pas affronter un miroir dans lequel celle-ci n’est pas prête à voir son reflet. Elle ne le prend ni mal ni se sent avilie. Non, c’est un espoir qui n’a aucune raison d’être qui germe dans un coin de son esprit, dans un coin retranché du peu d’humanité qui lui reste. Celle d’une autre histoire, celle d’un autre maître. “Jian était…” Ses yeux s’agrandissent un instant et un klaxon vient ponctuer son élan trop vite interrompu alors que le prénom interdit vient de franchir ses lèvres. A-t-elle seulement déjà prononcé celui-ci au cours de leurs nombreux échanges? Elle ne sait plus. Tout s’emmêle, au bout d’un certain temps. Se pinçant les lèvres, la vampire hésite un instant entre la reddition ou le retrait. Combien de secrets encore à dévoiler? Combien de vérités déjà énoncées? “Il n’a jamais vu tout mon potentiel. D’une belle poupée à vicier je suis devenue une créature sauvage à dompter. Puis à modeler, de la façon qu’il trouvait la plus accommodante, pour lui évidemment. Juste assez pour me diriger dans la bonne direction mais pas assez pour que je l’égale. Il n’aurait pas supporté que je sois meilleure que lui. Mais il n’a jamais compris.” Du rouge qui se reflète un instant dans l’obsidienne de ses iris s’invite le vert criard et la voiture repart, comme une autorisation à poursuivre. “J’étais déjà meilleure que lui humaine. Il a pensé m’avoir façonnée à son image. Mais j’étais déjà moi bien avant lui. Je suis restée moi bien après lui.” Enfin le courage semble lui revenir et elle plante ses yeux dans ceux de sa comparse. “Je ne vois aucune prétention dans tes aveux. J’aurais aimé que tu me trouves. J’aurais aimé que tu me choisisses et être née par ton sang, j’en tirerai ma plus grande fierté.”

Jouant avec ses doigts dans ce réflexe humain de nervosité qui lui est resté, elle se détourne dans un énième malaise, si peu encline à se livrer ainsi, à ouvrir la porte sur cet aspect rare de sa personnalité. Mille facettes et un seul visage aux traits figés. Ils sont si peu à pouvoir se targuer d’en connaître ne serait-ce qu’une pleinement. Celle-ci n’est offerte qu’à son amie, ce soir, pour le temps que la Mort décidera de leur octroyer. Parce que le ton se veut plus badin, parce que la lourdeur de leurs confessions semble s’alléger, un mince sourire vient ourler le coin de ses lippes quand les limites viennent s’immiscer tel un défi. “M’en approcher? Ou les franchir?” La nargue-t-elle sans chercher à attiser sa colère. “Jouer à des jeux dangereux est un peu ma spécialité. Quitte à finir dans un terrarium. Ta jolie vipère s’est montrée docile depuis son arrivée ici mais je ne peux être domestiquée.” Se tournant pleinement sur son siège si bien qu’elle lui fait pratiquement face, les jambes repliées redressant sa robe jusqu’à mi-cuisse, elle la fixe sans plus d’état d’âme. “Tu sais de quoi je parle. On ne dompte pas une panthère…” Sourcil arqué en se jouant gentiment de sa partenaire, elle se mord un instant la lèvre inférieure. “Dis-moi que bientôt signifie ce soir. Dis-moi que je ne n’aurais pas à attendre un autre coucher de soleil pour savourer la liberté.” Mine suppliante qui ne lui sied guère, sa main se tend jusqu’au poignet d’Aliénor, le pouce caressant distraitement son épiderme. “Dis-moi que cette nuit est celle où je pourrais trouver l’oubli en ta compagnie.”



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En un mot : La Vipère sous la rose.
Qui es-tu ? :
"Don't die with a clean sword."

♚ Caïnite âgée de trois siècles ; Accomplie du bel âge à portée d'ongles carmins.
♚ L'Ambition la ronge, mais laquelle ? ; le vide de nuits interminables la détruit plus sûrement que n'importe quelle balle en argent. L'Ennui pour seul véritable danger.
♚ Gorgone gauloise, sa réputation parle pour elle, surnommée Mère sanglante ou Reine rouge. Nombre d'enfants sont tombés sous ses crocs.
♚ Fille de corsaire, héritière de ses lettres de Marque ; navigua au service de Louis XV dans les eaux des Caraïbes à la tête de l'Espérance, frégate à l'équipage composé de deux centaines d'hommes.
♚ Trahie par un Britannique ; capturée et ramenée de force sur l'île de Mona, torturée , abusée, échappée - mourante (malaria). Transformée par un autre, à l'aube de sa trentaine.
♚ Éprise de coups d'État et féroce opposante à l'Essaim. Antique imperméable à l'ordre. À la tête du clan du Chaos. Danseuse sur le fil acéré de leur rigueur.
♚ Maudite ; aucun enfant n'a pu sortir de son ventre. Aucun Infant n'a pu résister à son vice, transmis tel un fléau. Sire matricide par deux fois. Échec toujours en gestation.
♚ Sang turc dans les veines, manie les us et coutumes perses. Son réseau d'Orient et d'Occident est dessiné comme une arachnide file sa soie.
♚ Incapable d'aimer son époque ; craintive pour l'avenir, répudiant son passé.
♚ Se joue d'une beauté en laquelle seuls les autres croient. Ancienne compagne de Serguey Diatlov, mère de substitution de Yago Mustafaï, protectrice de Mei Long et amante éternelle de Jenaro Silva.
♚ Pie voleuse, elle a dérobé le Clan du Chaos aux mains trop glissantes de Salâh ad-Dîn Amjad, qu'elle compte bien refonder en un ordre sérieux pour s'opposer à la Mascarade ainsi qu'au dictat de l'Essaim en place.

♚ SLAVE TO DEATH ♚

Come, gentle night! [Aliénor] FASlTSW Come, gentle night! [Aliénor] UByGHjO Come, gentle night! [Aliénor] W6JtYIp

"I know where you sleep."

Facultés : ♚ Vicissitude (niveau III)
♚ Mains de la destruction (niveau I)
♚ Chimérie (niveau I)
♚ Stratège. Rapide. Teigneuse.
Thème : Sleep Alone ♚ Bat for Lashes
Come, gentle night! [Aliénor] X13YkvN
♚ CANNIBAL ♚

Come, gentle night! [Aliénor] 9KgtXIf Come, gentle night! [Aliénor] 7iJSCrv Come, gentle night! [Aliénor] 6gla5CK

"Mind if I cut in?"

Come, gentle night! [Aliénor] BFJjZXP


Pseudo : Nero.
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Dim 5 Juin - 3:32 (#)

♛ Dead but dreaming
Wings of Satan, orb my heart! It burns with love for you. And it is ready now, to receive thee. Claws of darkness, tear my soul! For I have chosen the night and branded its seal into my flesh. Lead me to the catacombs, where light of neither sun nor moon disturbs the dark in vaults, possessed by molten evil manifest.

▼▲▼

Les dés sont jetés.
Plus jamais elles n’auraient cette conversation. Aliénor décrypte celle qui semble submergée par une émotion rare, peu encline à s’installer dans le « cœur » des vampires comme elles. Elle-même remuée par l’instant, elle songe que Mei a entendu son message, et qu’elle seule sera en mesure de prendre son avenir en main, d’assurer sa survie comme de précipiter son destin. Elle avait eu de la chance une fois. Et malgré tout ce qu’il en coûterait à la stryge, elle savait qu’elle ne pourrait peut-être pas s’interposer de nouveau entre elle et une condamnation sans retour. Tant de choses s’écoulent entre elles deux. Le vice, elles le respirent, l’exhalent et le transportent au gré de leurs tueries devenues rares, de leurs interactions venimeuses, des blessures qu’elles infligent, quand il ne s’agit pas tout simplement de se pencher vers leur ventre béant ou leur dos déchiré. Il lui est si rassurant de disposer d’une créature presque jumelle, quoique plus jeune, plus volage, parfois presque inconsciente de la tempête qui menace. Elle espère ainsi que le futur leur sera plus favorable que ce passé ingrat qu’elles trimballent et qui les voient continuer d’errer, contaminant de leur noirceur les âmes à leur tour malchanceuses qui s’aventurent sur leur chemin.

Ses prunelles tombent sur les cuisses relevées hautes par le mouvement de la Chinoise, dévoilant ses jambes pâles et désirables. Sa main s’étire, et du bout des ongles, voilà qu'elle dessine des arabesques à leur surface, jouant elle aussi avec les limites de sa sœur, fille, amie, et bien plus encore. « Pas ce soir… Ce soir, il nous faudra nous contenter d’exploits bien plus modestes… » Elle se penche dans sa direction, ses doigts munis de plus d’assurance à la lisière de la robe tentatrice. Sa bouche frôle le lobe d’une oreille qu’elle embrasse, et la pointe de son nez ne résiste pas à l’envie de caresser le pavillon de son oreille. « Bientôt… Ce n’est l’affaire que de quelque temps. Tu dois me faire confiance. Et lorsque ce jour viendra, je te garantis que l’attente en aura valu la peine. » Les iris océans cherchent les siens. Comme elle aimerait pouvoir transmettre par le seul pouvoir de sa pensée le plan magnifique qui s’est mis en marche. Orhan a déjà été mis au courant. Il fait partie des rares à s’être vu initié. Elle connaît sa prudence, son calme. Jamais il ne fera capoter ce qui, dévoilé trop tôt, risque de les conduire rapidement vers l’échafaud. Un gloussement résonne entre elles deux, dont elle n’a certainement pas honte. Le rictus démoniaque qu’elle lui offre vaut bien toutes les promesses d’un formidable Chaos. « Je déposerai une véritable tempête à tes pieds. Cela te rappellera peut-être quelques souvenirs… mais j’ai davantage d’ambition encore. » L’énigme ne lui plaît jamais davantage que par son cadenas verrouillé. Elle ne lâchera rien. Elle n’abandonnera aucun indice trop aisé pour la succube à ses côtés. La pointe de sa langue taquine la propre commissure de ses lèvres tandis qu’elle se redresse en une posture redevenue sage.

« Je rêve de t’en parler… Mais je préfère préserver l’effet de surprise. Crois-moi. On n’aura jamais vu une telle fête au Lucky Star Motel avant cela… » Il en serait fini des traditionnelles orgies, des excès parfois inquiétants qui, jusqu’alors, régnaient dans l’antre de Salâh ad-Dîn. Heureuse de son effet, elle se rengorge, et son pied enfonce la pédale de l’accélérateur, libérant les chevaux de la voiture qui ne lui appartient pas. La route se dégage pleinement, le bouchon saute… Exactement comme dans une poignée de mois, si tout se déroulait comme prévu. « Ne t’inquiète de rien. Cela ne nous empêche pas de chercher une distraction à ta hauteur, cette nuit. Nous n’avons pas besoin de patienter, pour ça. » Leur imagination dévoyée suffirait. Car elle, avait su voir le potentiel qui dormait en Mei Long, uniquement relâché au profit de frénésies face auxquelles elle avait détesté se faire le public indiscret. Elle répète tel un psaume, la voix chargée de cette gravité joueuse, de cette inquiétante étrangeté qui, entre tout, n’aurait pu la consacrer autrement que Longue-Vie, maudite invétérée. « Oublie-les tous. Jian, Jenaro… Ne pense qu’à nous. »

Bientôt.
Bientôt, elles danseraient au beau milieu de cette mare de sang versé.
Bientôt, elle assisterait au spectacle fabuleux de sa mutine épanouie.
Elle ne songe alors ni à l’après, ni au prix.
Le prix qu’ils auraient tous à payer, en échange des âmes massacrées dans le motel du North.

CODAGE PAR AMATIS


Before I'm dead

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