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On the road again (Feat Serguey)

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Anonymous
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Jeu 22 Sep - 13:42 (#)

On the road again





B
ayou, bayou, éternel décor de la Louisiane, si caractéristique de notre région. Des marais que d’aucuns qualifieraient de sordides, peuplés d’alligators affamés de chair. La mangrove y dévore les eaux brunes aux brumes inquiétantes, plongeant ses tortueuses racines vers des profondeurs vaseuses inexplorées. Des serpents vils et veules s’y terrent, confondant leur corps allongé avec le bois clair. Les touristes, bien qu’avides de découvrir ce genre d’endroit, sont souvent déçus de leur première visite. Ça pue, c’est glauque, il y a du brouillard et on n’y voit rien, et où sont les crocodiles ? Futiles ignorants de la beauté, du charme pourtant profond de ces endroits. Ici, l’on peut sentir toute l’âme de la contrée. Les clapotis résonnent aux oreilles comme l’écho d’une région coincée entre deux époques, où l’homme se sent toujours en danger, qu’il n’est pas parvenu à apprivoiser. Comme le souvenir des Chitimachas pêchant sereinement. Le cœur du delta du Mississipi, théâtre de guerres et de révoltes passées ayant forgé le caractère de la population locale.

Le pick up rouge roule sur les sentiers humides et cahoteux, éclaboussant de boue ses ailes sans vergogne. Il en a vu d’autres, et il en verra d’autres. Là il se promène, rebondissant au rythme éclectique du piano de Duke Ellington ou glissant sous les cuivres colorés de Miles Davis. Des sonorités auxquelles mon comparse du jour a l’habitude d’entendre lorsqu’il vient se jeter quelques verres bien trempés au Voodoo, sous mon regard complice. Je ne sais pas si le jazz fait partie de ses goûts les plus personnels, mais il sait dessus emballer de la donzelle. Et puis rien de mieux pour un road trip de découverte des alentours de Shreveport, à la recherche de l’authenticité vaudou des marécages infinis. Le pack de bière bien au frais dans la glacière, nous parcourons depuis plusieurs heures maintenant les décors sauvages. Et je décide qu’il est temps d’une pause. Pilant pour me ranger sur un bas-côté dégagé, j’invite Serguey à descendre pour prendre un bol d’air. De l’air aux senteurs boisées et terreuses, humides.

Serguey. Combattant émérite du Mad Dog, un adversaire de valeur, un colosse à la force herculéenne avec qui j’apprécie m’entraîner, à l’occasion. Lors d’une de ses visite au bar, il m’a parlé de son envie de découvrir un peu les alentours, qu’il ne connait que trop peu. Bondissant sur l’occasion, je lui ai proposé sans attendre un road trip dans le sud-est du Pays, en direction de la Nouvelle-Orléans, notre cap final. Mais je ne pouvais pas manquer une halte dans le bayou. Jamais.

Ne tardant pas à décapsuler deux de Blondes Bomber maltées de la brasserie Red River Brewing de Shreveport. Je lui en tends une avant de me dresser face au paysage, inspirant  pleins poumons.

« Aaaaah. Ça c’est l’air de chez nous. Ce qui forge la magie vaudou, comme clamait Mama Dana, ma grand-mère. »

Je lui jette un regard entendu. Ça a toujours été une blague de la vieille. S’il suffisait de sniffer de la vase pour devenir Bokor, ça se saurait. Même si depuis la Révélation, de plus en plus de gens finissent par croire aux vieilles légendes.

« Allez, santé vieux. »

Et je tends ma bière vers lui pour trinquer. À la liberté, à la découverte. Au bayou !




CODAGE PAR JFB ET POURPRE / Contry.
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Anonymous
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Dim 4 Déc - 17:12 (#)

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« Alors, à quoi on trinque, Nounours ? »
Les cannettes de métal s'entrechoquent, un son étonnamment citadin parmi cette immensité verdoyante. S'il avait apprécié le voyage et la compagnie musicale de Wilson durant les longues heures de route où ils avaient avalé l'asphalte, il n'était pas mécontent d'enfin quitter l'habitacle pour se dégourdir les guiboles. Leurs immenses silhouettes n'étaient décidément pas faites pour l'immobilisme.

Les épaules ouvertes, il prend le temps de humer l'air ambiant, de s'imprégner de l'humidité et des odeurs des lieux. Eoghan l'avait déjà emmené dans le bayou. Un souvenir impérissable et pour le moins remuant où, en se heurtant à la magie dont les lieux étaient saturés, il avait craint par-dessus tout de ne pas être le bienvenu en ces terres sauvages. Lui qui avait bafoué ses pouvoirs, lui qui faisait honte aux arcanes. Wilson avait-il conscience de toute cette culpabilité qui cisaillait l'Estonien, tandis qu'ils buvaient à longues gorgées la bière fraîche et désaltérante ? Probablement pas. Et pourtant, le barmaid en connaissait un rayon en matière de vaudou, comme le laissait supposer son allusion à sa grand-mère. Pour toute réponse, l'autre géant se contente de lui décocher un sourire, espérant ainsi lui dissimuler tout son embarras. C'était probablement peine perdue : Wilson était tout aussi observateur derrière son comptoir du Voodoo Café qu'il n'était déchaîné sur un ring.

« Plutôt d'chez toi, mon vieux. Moi, t'sais bien que j'suis pas né ici. » En sa compagnie, il ne se privait pas de laisser déferler son accent d'Europe de l'Est, même s'il n'éprouvait nullement le mal du pays en ces terres louisianaises. A vrai dire, ses racines ne lui manquaient pas, à Serguey. Il n'avait jamais ressenti le besoin d'établir un foyer sédentaire à un endroit précis sur la planète, animé par la conviction que l'emplacement géographique était moins chargé de sens que la puissance des relations qui se forgeaient avec le temps. Et c'était calé entre ses compagnons que l'Estonien se sentait chez lui.
Même lorsqu'il manquait une personne à la symphonie. Désagréable dissonance. La raison principale pour laquelle il ne côtoyait plus le Voodoo, se contentant de croiser Wilson au Mad Dog ou de l'inviter dans d'autres bars. Remettre les pieds dans le lieu de la rupture avec celle qu'il avait aimé demeurait impensable. Pousser la porte, revoir la table, l'apercevoir elle, son ombre, sa bouche, la tristesse dans son regard océan. Il ne pouvait s'y résoudre.

Un lourd soupir crève sa poitrine, qui passera peut-être pour une nouvelle inspiration destinée à s'imprégner des parfums de vase et de l'odeur réconfortante de la mousseuse. Quelques minutes suffisent à vider la cannette, qu'il broie ensuite de son poing puissant, avant de l'expédier à l'arrière du pick-up de Wilson.
« En tout cas, j'ai d'la chance de t'avoir rien que pour moi. Entre nos soirées tape-dur au Mad, et les beuveries un peu partout, j'ai l'impression que t'es auréolé d'un brouhaha constant. Ça fait du bien de se retrouver un peu loin de tout ça, pas vrai ? Et de te dévisser de ton foutu comptoir. »
Comptoir qu'il ne fréquentait plus, et dont il espérait que Wilson ne lui en fasse pas la remarque.
Pour l'éviter, il choisit de dévier le sujet et de l'attaquer sur l'un de leurs sujets de prédilection.
« Avoue, t'as pas réussi à pécho une zouz pour l'emmener faire le tour de la région et pour explorer des zones humides, alors t'as dû te rabattre sur moi, pas vrai ? Allez, tu peux tout me dire, j'me vexerais pas d'être ton plan B. Tu t'fais vieux, tu fais c'que tu peux avec les moyens qu't'as. »
Un sourire goguenard, une tape virile sur le biceps, une œillade appuyée. Une nouvelle tournée de bières fraîchement apportée par ses soins. La chaude après-midi s'esquissait sous le meilleur des hospices.

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